Traumenschar
3 participants
Page 1 sur 7
Page 1 sur 7 • 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7
Traumenschar
ÉPISODE UN: INTRODUCTION.
1.Triste réunion…
La pluie tombait silencieusement tout autour d’eux.
Tous réunis en ce lieu saint, tous sous le couvert d’un chagrin nouvellement formé dans leurs cœurs, ils restaient immobiles devant le trou béant creusé il y a peu dans la terre fraîche et humide. La fosse leur semblait à tous disproportionnément grande et bien trop profonde vis-à-vis du petit cercueil qui se balançait lentement au-dessus, à cause de la brise légère qui balayait l’ensemble des personnes présentes dans le cimetière.
La plupart regardaient leurs pieds, sans un mot, dans le recueillement de la prière que le prêtre venait de terminer. D’autres sanglotaient douloureusement, mais sans trop oser rompre le silence ambiant. Une jeune fille, lors de la mise en terre du cercueil, se jeta à corps perdu dans les bras d’une autre, près d’elle, et ne pu réprimer de longs gémissements de tristesse. L’autre femme pleurait, elle aussi, sans se cacher.
Mais les larmes n’étaient pas l’apanage des femmes, et certains hommes présents avaient le visage ruisselant, et pas seulement de pluie. Juste devant la tombe désormais pleine se tenait un jeune homme, les cheveux hirsutes, les yeux embués de chagrin, qui se tenait les mains jointes à fixer la cavité offerte à lui. Un second homme, coiffé d’une queue de cheval qui voletait, s’approcha de lui et lui posa une main sur l’épaule. Le premier homme s’effondra alors à genoux et éclata en sanglots sous les regards emplis de compassion de l’assistance.
Le prêtre s’excusa et sortit de la scène, laissant ces hommes et ces femmes à leur deuil. L’homme aux cheveux longs attachés tentait désespérément de consoler celui qui était maintenant à genoux en train d’arracher de grandes mottes de terre à pleines mains. Le groupe derrière eux ne disait rien et observait la scène d’un œil inquiet.
« Calme-toi, Fury… S’il te plait… » dit l’homme à la queue de cheval. Un autre approcha et aida le dénommé Fury à se relever. « Merci Satana, il a besoin de toute l’aide possible en ce moment…
-Je sais. » répondit Satana, l’œil vague. « C’est pourquoi je suis là. » Puis, après un moment d’hésitation : « Et pour elle aussi. »
L’homme à la queue de cheval acquiesça sans un mot et regarda les deux hommes s’éloigner, Fury toujours en pleurs. Il se tourna vers l’assemblée dont l’attention restait fixée sur le cercueil plongé dans la terre qui devenait peu à peu boueuse. Il les dévisagea tous, presque un à un, et reporta lui aussi son regard sur la boite où reposait son amie. Il sentit les larmes perler à ses yeux, et préféra les fermer.
Non, je ne peux pas, je ne dois pas me mettre à craquer maintenant. Il sera grand temps après, si jamais tout ce à quoi j’ai pensé des heures durant échoue, alors je pourrais me mettre à verser la totalité des larmes de mon corps. Mais pas avant.
Pas maintenant.
Il inspira un grand coup d’air frais de cette fin de matinée bruineuse, et il sentit ses poumons se remplir d’air sain et humide. Il réfréna l’envie de tousser face à l’absorption des minuscules gouttelettes d’eau dans son appareil respiratoire et réussit à esquisser un semblant de sourire avant de dire d’une voix qu’il espérait calme et posée :
« Bien, je pense que je vais aller poursuivre les préparatifs au restaurant dont je vous ai parlé dans mon mail. Vous savez tous où il se situe, à peu près ? »
Certains hochèrent la tête, et l’homme à la queue de cheval leur rendit un faible sourire. Ceux qui avaient répondus amèneraient les autres en temps voulus. Il poussa un long soupir ajouta d’une voix toujours sereine : « J’espère vous y retrouver à midi et demie, mais nous attendrons jusqu’à une heure pour être sûr que tout le monde soit présent. Pour ma part, j’y vais. Tout à l’heure. »
Il entama son demi tour, mais un cri déchirant l’arrêta dans son mouvement. La jeune fille de tout à l’heur qui n’avait pu s’empêcher de pleurer dans le giron de son amie levait vers l’homme à la queue de cheval un regard exaspéré, presque haineux.
« Pourquoi nous infliger un tel traitement, Magnum ? hurla-t-elle. Tu nous convies à l’enterrement d’une personne très chère à nos yeux, puis tu nous fais des cachotteries en nous invitant à parler dans un restaurant après ça ? Qu’est-ce que ça signifie ?!! »
Tous se tournèrent vers Mr.Magnum à la fin de cette tirade et ce dernier ne trouva pas quoi répondre, sur le coup. Il resta ainsi à regarder la jeune fille sans mot dire, alors que celle-ci s’était remise à pleurer à chaudes larmes, mais en le regardant en face.
« Je… Je ne pense pas que ce soit l’endroit d’en parler, K-Ro. Je dois vous faire part de quelques informations, mais pas maintenant.
-Et pourquoi pas maintenant ? rétorqua-t-elle.
-C’est un lieu de recueillement, et je ne me sens pas le courage d’aborder le sujet ici. » conclu Mr.Magnum d’un air sévère inhabituel. Il arborait malheureusement souvent ce visage sérieux et concentré depuis qu’il avait appris la terrible nouvelle.
« Il a raison, K-Ro… » murmura doucement RazaëlAurélie en entourant K-Ro d’un bras. Un autre jeune homme s’avança à son tour et prit la parole d’une voix mélodieuse et claire, une voix de meneur de masse :
« Que ceux qui veulent suivre Magnum au restaurant partent de suite. Pour ma part, je préfère rester encore quelques temps ici.
-Très bien, DragonNoir. » approuva Mr.Magnum en faisant à nouveau demi-tour et en se dirigeant d’un pas leste vers sa voiture. Il eut beau se concentrer sur sa Renault Cinq qui se rapprochait de lui, il vit le décor se dédoubler, puis trembloter à chacun de ses pas, et sentit finalement une larme puis deux rouler sur ses joues. Il retient un sanglot et accéléra encore la marche, quand une voix résonner derrière lui.
« Magnum!! Magnum !!! François !!! »
Erwan le rattrapa et se plaça à sa hauteur, s’accordant à sa vitesse de pas. Il était à peine essoufflé et le regardais avec ferveur. Mr.Magnum détourna un instant la tête pour s’essuyer les yeux, puis ralentit la cadence. « Qu’y a-t-il ?
-C’est vrai cette histoire de résurrection ? » demanda-t-il en levant un sourcil interrogateur. Mr.Magnum stoppa net sa marche, et Erwan fut pris au dépourvu et du refaire quelques pas à reculons.
« Qui t’as parlé de ça ?
-Draco, lors d’une conversation sur MSN hier soir, avant qu’on parte. Je… oh ! J’ignorais que c’était un secret…
-N’en parle pas aux autres pour le moment, voilà tout. » Le ton était sec et cassant, et Erwan sentit une boule apparaître dans sa gorge. Il ne l’avait jamais vu aussi sérieux depuis les quelques années qu’il le connaissait.
« Je me tais, affirma-t-il. Tu vas leur en parler là ?
-Je vais leur soumettre les informations que j’ai trouvé, et voir ce qu’ils en pensent. Mais je suppose qu’ils vont me prendre pour un fou. Et si jamais ça ne fonctionne pas, je pense que je disparaîtrais complètement du forum… Des forums… »
Le regard perdu dans ses funestes pensées, alors qu’Erwan scrutait attentivement les moindres changements de traits de son visage, ils se firent doubler par quelques groupes de personnes qui retournaient à leurs véhicules. Le temps s’était enlaidi et il pleuvait maintenant à grosses gouttes. De gigantesques nuages noirs mangeaient le ciel et menaçaient de faire gronder le tonnerre sous peu. Une bourrasque un peu plus forte que les autres tira Mr.Magnum de ses pensées, et il regarda attentivement Erwan.
« Peut-être même disparaîtrais-je entièrement… »
Sans lui laisser le temps de répondre, il attrapa son ami par les épaules et l’entraîna avec lui, reprenant sa marche. Un sourire faux donnait à son visage fatigué un air de clown triste, et un instant, Erwan fut pris de pitié envers lui. Mr.Magnum du le sentir et il tourna la tête, arborant toujours son sourire qui semblait dire Tout va bien, pourquoi s’en faire, tout se passera comme prévu, ne t’en fait pas mon ami ! alors que ses yeux trahissaient un désarroi profond et peut-être même…
…de la peur.
« Mais arrêtons de parler de ça maintenant, clama joyeusement Mr.Magnum. Et rendons-nous avant les autres au restaur… Han !!
-Tu pourrais faire un peu attention où tu marches ! »
K-Ro fixait Mr.Magnum d’un œil mauvais en se frottant la hanche, l’air manifestement fâché de cette brutale confrontation. Son teint était empourpré malgré le froid qui régnait et ses paupières étaient gonflées par les larmes qu’elle avait versées… Elle reniflait d’ailleurs de temps à autre entre deux respirations.
« Je suis désolé, K-Ro, je ne t’avais pas vu et…
-Trop occupé à discuter pour voir les autres, n’est-ce pas ? » lui envoya-t-elle d’un ton méprisant. Une larme se formait déjà au bord de son œil droit, sans même qu’elle s’en rende compte. « Tout comme tu dois être trop occupé à tenter de te faire reconnaître avec tes idées pour songer ne serais-ce qu’un seul instant à la peine qu’on ressent ? »
Erwan regarda K-Ro, puis Mr.Magnum, sans un mot. Draco les rejoignis, ainsi que RazaëlAurélie qui se plaça légèrement en retrait derrière K-Ro. Celle-ci n’en démordait pas et continuait à provoquer Mr.Magnum du regard.
« K-Ro… commença-t-il.
-Non, c’est trop facile de présenter des excuses, tout comme de nous faire miroiter l’impossible… Elle est morte, belle et bien morte, et il est inutile de nous farcir la tête avec des inepties comme le fait de pouvoir la ressusciter !! »
La tirade achevée, Mr.Magnum jeta un bref coup d’œil à Erwan, qui lui rendit en haussant subrepticement les épaules. Non, ce n’était pas lui qui avait vendu la mèche, et Mr.Magnum soupçonna que l’ensemble de la communauté devait se douter de la véritable raison de leur présence ici. Il préféra s’abstenir de tout commentaire, et se contenta de regarder K-Ro d’un air résigné et solennel.
Celle-ci sembla s’irriter encore plus de l’attitude de l’homme en face d’elle, et envoya son petit poing dans l’épaule de Mr.Magnum, puis fit demi-tour sans ajouter un mot. Mr.Magnum accusa le coup sans broncher, puis poussa un léger soupir discrètement pour que la furie ne l’entende pas.
« Ce n’est pas moi qui… » commença Erwan avec nervosité. Mr.Magnum leva sa main et sourit gentiment.
« Je sais, Erwan, je sais… De toute façon, ils vont tous savoir, et d’ici peu…
-Et tu penses vraiment, sincèrement, que ça peut marcher ? demanda Draco qui s’était mis aux cotés de Mr.Magnum. Tu penses vraiment que tu peux lui redonner la vie ?
-Je l’espère de tout cœur, Draco… »
Il atteignit sa voiture, en ouvrit les portières et s’installa au volant, perdu dans ses pensées. Erwan et Draco prirent place à l’arrière, comme sur le trajet qui les avait mené ici, dans ce cimetière, et gardèrent le silence. Au bout de quelques minutes, Mr.Magnum enclencha le moteur, et passa la première en murmurant :
« …je l’espère de tout cœur… »
1.Triste réunion…
La pluie tombait silencieusement tout autour d’eux.
Tous réunis en ce lieu saint, tous sous le couvert d’un chagrin nouvellement formé dans leurs cœurs, ils restaient immobiles devant le trou béant creusé il y a peu dans la terre fraîche et humide. La fosse leur semblait à tous disproportionnément grande et bien trop profonde vis-à-vis du petit cercueil qui se balançait lentement au-dessus, à cause de la brise légère qui balayait l’ensemble des personnes présentes dans le cimetière.
La plupart regardaient leurs pieds, sans un mot, dans le recueillement de la prière que le prêtre venait de terminer. D’autres sanglotaient douloureusement, mais sans trop oser rompre le silence ambiant. Une jeune fille, lors de la mise en terre du cercueil, se jeta à corps perdu dans les bras d’une autre, près d’elle, et ne pu réprimer de longs gémissements de tristesse. L’autre femme pleurait, elle aussi, sans se cacher.
Mais les larmes n’étaient pas l’apanage des femmes, et certains hommes présents avaient le visage ruisselant, et pas seulement de pluie. Juste devant la tombe désormais pleine se tenait un jeune homme, les cheveux hirsutes, les yeux embués de chagrin, qui se tenait les mains jointes à fixer la cavité offerte à lui. Un second homme, coiffé d’une queue de cheval qui voletait, s’approcha de lui et lui posa une main sur l’épaule. Le premier homme s’effondra alors à genoux et éclata en sanglots sous les regards emplis de compassion de l’assistance.
Le prêtre s’excusa et sortit de la scène, laissant ces hommes et ces femmes à leur deuil. L’homme aux cheveux longs attachés tentait désespérément de consoler celui qui était maintenant à genoux en train d’arracher de grandes mottes de terre à pleines mains. Le groupe derrière eux ne disait rien et observait la scène d’un œil inquiet.
« Calme-toi, Fury… S’il te plait… » dit l’homme à la queue de cheval. Un autre approcha et aida le dénommé Fury à se relever. « Merci Satana, il a besoin de toute l’aide possible en ce moment…
-Je sais. » répondit Satana, l’œil vague. « C’est pourquoi je suis là. » Puis, après un moment d’hésitation : « Et pour elle aussi. »
L’homme à la queue de cheval acquiesça sans un mot et regarda les deux hommes s’éloigner, Fury toujours en pleurs. Il se tourna vers l’assemblée dont l’attention restait fixée sur le cercueil plongé dans la terre qui devenait peu à peu boueuse. Il les dévisagea tous, presque un à un, et reporta lui aussi son regard sur la boite où reposait son amie. Il sentit les larmes perler à ses yeux, et préféra les fermer.
Non, je ne peux pas, je ne dois pas me mettre à craquer maintenant. Il sera grand temps après, si jamais tout ce à quoi j’ai pensé des heures durant échoue, alors je pourrais me mettre à verser la totalité des larmes de mon corps. Mais pas avant.
Pas maintenant.
Il inspira un grand coup d’air frais de cette fin de matinée bruineuse, et il sentit ses poumons se remplir d’air sain et humide. Il réfréna l’envie de tousser face à l’absorption des minuscules gouttelettes d’eau dans son appareil respiratoire et réussit à esquisser un semblant de sourire avant de dire d’une voix qu’il espérait calme et posée :
« Bien, je pense que je vais aller poursuivre les préparatifs au restaurant dont je vous ai parlé dans mon mail. Vous savez tous où il se situe, à peu près ? »
Certains hochèrent la tête, et l’homme à la queue de cheval leur rendit un faible sourire. Ceux qui avaient répondus amèneraient les autres en temps voulus. Il poussa un long soupir ajouta d’une voix toujours sereine : « J’espère vous y retrouver à midi et demie, mais nous attendrons jusqu’à une heure pour être sûr que tout le monde soit présent. Pour ma part, j’y vais. Tout à l’heure. »
Il entama son demi tour, mais un cri déchirant l’arrêta dans son mouvement. La jeune fille de tout à l’heur qui n’avait pu s’empêcher de pleurer dans le giron de son amie levait vers l’homme à la queue de cheval un regard exaspéré, presque haineux.
« Pourquoi nous infliger un tel traitement, Magnum ? hurla-t-elle. Tu nous convies à l’enterrement d’une personne très chère à nos yeux, puis tu nous fais des cachotteries en nous invitant à parler dans un restaurant après ça ? Qu’est-ce que ça signifie ?!! »
Tous se tournèrent vers Mr.Magnum à la fin de cette tirade et ce dernier ne trouva pas quoi répondre, sur le coup. Il resta ainsi à regarder la jeune fille sans mot dire, alors que celle-ci s’était remise à pleurer à chaudes larmes, mais en le regardant en face.
« Je… Je ne pense pas que ce soit l’endroit d’en parler, K-Ro. Je dois vous faire part de quelques informations, mais pas maintenant.
-Et pourquoi pas maintenant ? rétorqua-t-elle.
-C’est un lieu de recueillement, et je ne me sens pas le courage d’aborder le sujet ici. » conclu Mr.Magnum d’un air sévère inhabituel. Il arborait malheureusement souvent ce visage sérieux et concentré depuis qu’il avait appris la terrible nouvelle.
« Il a raison, K-Ro… » murmura doucement RazaëlAurélie en entourant K-Ro d’un bras. Un autre jeune homme s’avança à son tour et prit la parole d’une voix mélodieuse et claire, une voix de meneur de masse :
« Que ceux qui veulent suivre Magnum au restaurant partent de suite. Pour ma part, je préfère rester encore quelques temps ici.
-Très bien, DragonNoir. » approuva Mr.Magnum en faisant à nouveau demi-tour et en se dirigeant d’un pas leste vers sa voiture. Il eut beau se concentrer sur sa Renault Cinq qui se rapprochait de lui, il vit le décor se dédoubler, puis trembloter à chacun de ses pas, et sentit finalement une larme puis deux rouler sur ses joues. Il retient un sanglot et accéléra encore la marche, quand une voix résonner derrière lui.
« Magnum!! Magnum !!! François !!! »
Erwan le rattrapa et se plaça à sa hauteur, s’accordant à sa vitesse de pas. Il était à peine essoufflé et le regardais avec ferveur. Mr.Magnum détourna un instant la tête pour s’essuyer les yeux, puis ralentit la cadence. « Qu’y a-t-il ?
-C’est vrai cette histoire de résurrection ? » demanda-t-il en levant un sourcil interrogateur. Mr.Magnum stoppa net sa marche, et Erwan fut pris au dépourvu et du refaire quelques pas à reculons.
« Qui t’as parlé de ça ?
-Draco, lors d’une conversation sur MSN hier soir, avant qu’on parte. Je… oh ! J’ignorais que c’était un secret…
-N’en parle pas aux autres pour le moment, voilà tout. » Le ton était sec et cassant, et Erwan sentit une boule apparaître dans sa gorge. Il ne l’avait jamais vu aussi sérieux depuis les quelques années qu’il le connaissait.
« Je me tais, affirma-t-il. Tu vas leur en parler là ?
-Je vais leur soumettre les informations que j’ai trouvé, et voir ce qu’ils en pensent. Mais je suppose qu’ils vont me prendre pour un fou. Et si jamais ça ne fonctionne pas, je pense que je disparaîtrais complètement du forum… Des forums… »
Le regard perdu dans ses funestes pensées, alors qu’Erwan scrutait attentivement les moindres changements de traits de son visage, ils se firent doubler par quelques groupes de personnes qui retournaient à leurs véhicules. Le temps s’était enlaidi et il pleuvait maintenant à grosses gouttes. De gigantesques nuages noirs mangeaient le ciel et menaçaient de faire gronder le tonnerre sous peu. Une bourrasque un peu plus forte que les autres tira Mr.Magnum de ses pensées, et il regarda attentivement Erwan.
« Peut-être même disparaîtrais-je entièrement… »
Sans lui laisser le temps de répondre, il attrapa son ami par les épaules et l’entraîna avec lui, reprenant sa marche. Un sourire faux donnait à son visage fatigué un air de clown triste, et un instant, Erwan fut pris de pitié envers lui. Mr.Magnum du le sentir et il tourna la tête, arborant toujours son sourire qui semblait dire Tout va bien, pourquoi s’en faire, tout se passera comme prévu, ne t’en fait pas mon ami ! alors que ses yeux trahissaient un désarroi profond et peut-être même…
…de la peur.
« Mais arrêtons de parler de ça maintenant, clama joyeusement Mr.Magnum. Et rendons-nous avant les autres au restaur… Han !!
-Tu pourrais faire un peu attention où tu marches ! »
K-Ro fixait Mr.Magnum d’un œil mauvais en se frottant la hanche, l’air manifestement fâché de cette brutale confrontation. Son teint était empourpré malgré le froid qui régnait et ses paupières étaient gonflées par les larmes qu’elle avait versées… Elle reniflait d’ailleurs de temps à autre entre deux respirations.
« Je suis désolé, K-Ro, je ne t’avais pas vu et…
-Trop occupé à discuter pour voir les autres, n’est-ce pas ? » lui envoya-t-elle d’un ton méprisant. Une larme se formait déjà au bord de son œil droit, sans même qu’elle s’en rende compte. « Tout comme tu dois être trop occupé à tenter de te faire reconnaître avec tes idées pour songer ne serais-ce qu’un seul instant à la peine qu’on ressent ? »
Erwan regarda K-Ro, puis Mr.Magnum, sans un mot. Draco les rejoignis, ainsi que RazaëlAurélie qui se plaça légèrement en retrait derrière K-Ro. Celle-ci n’en démordait pas et continuait à provoquer Mr.Magnum du regard.
« K-Ro… commença-t-il.
-Non, c’est trop facile de présenter des excuses, tout comme de nous faire miroiter l’impossible… Elle est morte, belle et bien morte, et il est inutile de nous farcir la tête avec des inepties comme le fait de pouvoir la ressusciter !! »
La tirade achevée, Mr.Magnum jeta un bref coup d’œil à Erwan, qui lui rendit en haussant subrepticement les épaules. Non, ce n’était pas lui qui avait vendu la mèche, et Mr.Magnum soupçonna que l’ensemble de la communauté devait se douter de la véritable raison de leur présence ici. Il préféra s’abstenir de tout commentaire, et se contenta de regarder K-Ro d’un air résigné et solennel.
Celle-ci sembla s’irriter encore plus de l’attitude de l’homme en face d’elle, et envoya son petit poing dans l’épaule de Mr.Magnum, puis fit demi-tour sans ajouter un mot. Mr.Magnum accusa le coup sans broncher, puis poussa un léger soupir discrètement pour que la furie ne l’entende pas.
« Ce n’est pas moi qui… » commença Erwan avec nervosité. Mr.Magnum leva sa main et sourit gentiment.
« Je sais, Erwan, je sais… De toute façon, ils vont tous savoir, et d’ici peu…
-Et tu penses vraiment, sincèrement, que ça peut marcher ? demanda Draco qui s’était mis aux cotés de Mr.Magnum. Tu penses vraiment que tu peux lui redonner la vie ?
-Je l’espère de tout cœur, Draco… »
Il atteignit sa voiture, en ouvrit les portières et s’installa au volant, perdu dans ses pensées. Erwan et Draco prirent place à l’arrière, comme sur le trajet qui les avait mené ici, dans ce cimetière, et gardèrent le silence. Au bout de quelques minutes, Mr.Magnum enclencha le moteur, et passa la première en murmurant :
« …je l’espère de tout cœur… »
Mr.Magnum- Enorme floodeur
- Nombre de messages : 2475
Age : 42
Localisation : Dans les limbes torturées d'un esprit dérangé.
Date d'inscription : 18/01/2005
Re: Traumenschar
2.Dialogues cuités.
Dans le petit restaurant d’ordinaire bien animé, le silence était pour une fois de rigueur. Les serveurs et quelques clients habitués regardaient défiler les dizaines de personnes qui arrivaient par groupes ou seules. Les rumeurs allaient déjà bon train, certains parlaient d’une réunion de secte, d’autres les ayant vu sortir du cimetière les avaient déjà catalogués en tant que satanistes venant prêcher leur démoneries par ici, mais toutes et tous étaient dans le faux.
Le premier arrivé, et celui qui était en bout de table et attendait les autres depuis le premier coup de douze heures, avait été nommé ‘Matrik’ par le barman, un homme de 56ans bien tassé et qui avait le nez aussi rouge et piqueté que son tablier était sale et troué. Ses ‘habitués’ et piliers de bar attitrés appelés Gontran et Gérald, avait doucement ri sous cape lorsque leur dealer d’alcool préféré avait lancé ce surnom.
Mr.Magnum n’avait entendu que les gloussements avinés lorsqu’il s’était installé à la table qu’il avait réservée la veille, et n’avait pas relevé. Il était trop tendu pour oser s’engager dans ce type de terrain, et le ‘patron’ était libre de le mettre à la porte si débordement il y avait. Connaissant parfaitement son avantage, Hubert, ledit patron, en avait donc profité pour en rajouter une couche, et tandis que Mr.Magnum attendait patiemment que ceux qu’il avait convié à venir fasse leur entrée.
« Regardez-moi ça, éructa Gontran d’un air méprisant, en voilà d’autres.
-Si vous voulez mon avis, chuchota Gérald avec une voix de conspirateur, ces mecs là sont louches. Ces trois-là, surtout… Regarde : Matrik tout en noir, l’autre qui lui ressemble : Tout en bleu... »
Hubert éclata d’un rire gras en regardant Draco passer, suivit d’Erwan. Ses deux compères le regardèrent un instant, surpris, puis se mirent à rire à leur tour.
« Mais c’est qu’il a raison, l’petit Gégé !! » s’exclama le patron en lui balançant une claque dans le dos, puis plus bas : « Il est en bleu, l’autre en noir, et il en attends des dizaines d’autres, selon ma femme…
-Des dizaines ?
-Oui Gégé, des dizaines d’autres… Pourquoi tu crois qu’il a réservé c’te grande table ? Tu crois qu’ils vont becter à trois là-dessus ? » Et il se remit à rire.
« Eh, en voilà encore deux… Regarde celui de droite, Hubert : Il a pas l’air bien.
-Il est bourré, c’est sûr, affirma Gontran d’un ton sans appel. J’en ai déjà vu des mecs murgés, et c’est comme ça qu’c’est.
-On dirait plutôt qu’il a chialé, non ? » hasarda Gérald. Hubert haussa les épaules, et reprit le nettoyage délicat d’un verre tandis que Fury et Satana pénétrait dans le restaurant. Ils saluèrent les trois hommes d’un vague geste de la main, et allèrent directement dans la petite salle annexe où ils étaient attendus.
« Pfff… lâcha Hubert en reprenant un autre verre mouillé. Rien d’autre que des gamins. Tu as vu celui qui nous a salué, là ? J’avais l’impression que ça lui brisait les doigts de nous agiter la main…
-Tu sais, les jeunes de nos jours… » soupira Gontran en vidant sa chope de bière. Squall et DragonNoir, accompagnés de DarKenshin, Hilde, le Ionisateur Fou et Youfie, entrèrent à leur tour. DragonNoir salua les habitués, ainsi que Squall, et les autres articulèrent un bref bonjour d’usage.
« Bonjour, mesdemoiselles et messieurs… Je suppose que vous venez pour la réunion ? clama Hubert d’une voix claire.
-Vous avez deviné juste, monsieur. Où doit-on se diriger ?
-Par là-bas. » dit-il en montrant la petite porte du doigt, avant d’ajouter à vois basse pour ses amis : « Qu’est-ce qu’il vont bien pouvoir foutre tous, là-bas… ?
-T’as vu ? Y a même des gonzesses avec eux, ils vont peut-être faire des trucs cochons… » Et, comme si c’était la meilleure blague au monde, Gérald éclata d’un rire profondément inintelligent avant de frapper son verre sur la table, en réclamant un autre.
K-Ro et RazaëlAurélie suivirent, la petite jeune fille toujours au bord de la crise de nerfs et/ou de larmes, et RazaëlAurélie la soutenant du mieux qu’elle le pouvait. Gontran, dans un élan de stupidité sans borne, siffla les deux ‘mamzelles’ et K-Ro lui répondit d’un majeur silencieux, accompagné d’un regard qui ne présageait rien de bon.
« Hou la, mon brave Gontran, tu viens d’te prendre une trempe du tonnerre de Dieu !
-Fais pas chier, et sert m’en un autre au lieu de dire des conneries plus grosses que toi…
-Tu sais qu’tu d’viens mauvais, toi, avec l’âge ?
-Les gars, regardez qui voilà !! » s’exclama Gérald d’une voix estomaquée. Les deux autres se tournèrent vers la porte et virent un jeune homme arriver, à première vue banal. Mais en l’observant, on devinait une gestuelle calculée et maniérée, un air hautain trahissant une estime de soi et un ego démesuré.
Il entra sous les yeux ébahis des trois compères et ne daigna pas même poser un regard sur eux. Il se dirigea directement vers les débuts de conversations qui venaient de la droite et rentra à son tour dans la salle.
« Vache ! Alors lui, si c’est pas une tantouze, alors je ne m’appelle plus Hubert, ça je vous le dis. Il en a des drôle de potes le…
-Chuuut ! » intima Gérald en agitant la main. Ils restèrent coi quelques secondes, puis il ajouta d’un air éberlué : « Il s’appelle Arc !! Comme un arc !!
-Si tu veux mon avis, commença Gontran, blasé, ces mecs ne sont pas nets. Il doit leur manquer des cases dans le ciboulot !!
-Il en a des drôles de potes le Matrik, tout de même… » acheva Hubert en reposant un nouveau verre propre et sec sous le comptoir.
« Matrik la matraque !! » lança bêtement Gérald, sur quoi ils rirent pendant de longues minutes inlassablement, se claquant les cuisses et se frappant les épaules dans une démonstration frappante d’amitié masculine.
Un couple fit irruption à son tour dans le restaurant, Angie et Laekh jetèrent un regard amusé vers les trois joyeux drilles qui étaient trop occupés à rire pour les remarquer, puis rejoignirent les autres sans mot dire.
« Encore ? s’exclama Gontran avec une pointe d’irritation. Mais c’est pas possible, ton restaurant va jamais être assez grand !
-Ils ont payés, après je m’en fous. » répondit sèchement Hubert en regardant passer LeKanar, Soulblighter et Wee-Ree-Cat. « C’est Matrik qu’à payer pour tout le monde, et en avance, en plus…
-Et bien, encore des gosses de riches… conclu Gérald en terminant son verre. T’es sûr au moins que le chèque est pas en bois, Hub ?
-Pas plus en bois que ta caboche, Gégé. » Et ils repartirent d’un rire alors que Halvorc passait devant eux, et ils riaient encore à gorge déployée lorsque TheMaker et Hitomi arrivèrent sans bruit. Les conversations commençaient à s’entendre, et Hubert reprit un nouveau verre avant d’avancer sa tête près de celle de Gontran et de lui murmurer discrètement : « Regarde ceux qui arrivent, Gontran… C’est impressionnant…
-Quoi ? Qu’est-ce que t’as dis, Hubert ? » demanda Gérald avec un air d’enfant maintenu hors d’un secret contre sa volonté. Les deux l’ignorèrent et observèrent les sept personnes qui s’approchaient de la porte.
« Tu penses qu’ils sont aussi avec Matrik et sa clique ?
-J’en sais rien, Gontran, mais on dirait une bande de jeunes des cités… » Hubert les dévisagea d’un œil méfiant, et Gérald compris enfin où il fallait regarder et fit de même. Les cinq garçon et les deux filles s’arrêtèrent une fois la porte passée, et restèrent immobile, ne sachant où allez ni que faire. Viper Dragoon s’avança et dit alors :
« Euh, excusez-moi, c’est bien ici qu’il y a une réunion ?
-Ils sont là-bas, remarqua Pythagore à voix haute.
-Vous faites partie de la bande à Mat… » Hubert s’arrêta net : Il avait failli dire Matrik au lieu du nom sous lequel il avait réservé. Il feuilleta rapidement son registre près du bottin, trouva la page, et reprit sa phrase là où il l’avait laissé : « Magnum. Monsieur Magnum. C’est bien ça ?
-Merci monsieur, acquiesça Yclipt en se dirigeant vers la salle maintenant animée. Pythagore le laissa passer, ainsi que les deux demoiselles présente qui se trouvaient être Weedow et Sephirath, puis doubla Viper Dragoon pour se placer devant. Ce dernier lui donna une bourrade dans l’épaule en ronchonnant, et évita le coup de pied lancé par Pythagore en aveugle, qui manqua de peu GabiMatrix et DanteFS qui fermaient la marche.
« C’est fou le nombre de personnes qui vont le rejoindre, s’étonna Gérald.
-Et encore, il en attend encore une vingtaine, d’après ce que j’ai pu compter.
-Une vingtaine ? criait presque Gérald. Eh bien… On peut pas dire qu’il a pas d’ami, lui… Et de quoi ils vont parler ? Hub ?
-J’en sais foutrement rien.
-Ils viennent du cimetière, tous… » Hubert et Gérald regardèrent Gontran, incrédule. Celui-ci vida son verre, le reposa, et regarda le patron avec un œil sérieux. Apeuré, même.
« Je les ai vu sortir du cimetière, la grand partie du monde qui est dans ton restaurant, là-bas, était au cimetière il y a moins d’une heure, j’en suis sûr et certain, parole de moi.
-Et qu’est-ce qu’ils allaient y foutre, ces gosses ? cracha Hubert.
-Je croyais que c’était que des rumeurs, ces histoires de satanistes, merde… » soupira Gérald. Ils se turent un instant, le temps de laisser passer deux personnes qui rejoignirent le groupe. IL et Radamenthe ne leur adressèrent qu’un bref bonjour d’usage avant de se mêler à la foule maintenant bruyante.
« Je vous jure sur ma pauvre mère, paix à son âme, que je les ai vu sortir du cimetière mais je sais pas ce qu’ils y ont fait, par contre, continua Gontran d’un ton de conspirateur.
-Des profanateurs ? » articula lentement Hubert, comme si c’était le mot le plus compliqué qui lui avait été donné de prononcer, ce qui était probablement le cas. Les deux autres le dévisagèrent gravement, puis haussèrent les épaules en même temps d’une manière comique. « Si j’avais su, j’aurais pas accepté de les prendre, ces gars là…
-Peut-être même que ce sont des néo-nazis ? proclama Gérald d’un air dégoûté. J’ai vu ça à la télé la semaine dernière, et il paraît qu’ils cassent les tombes et qu’ils peignent des croix gammées sur les pierres tombales, et partout autours…
-Si jamais c’est bien ça, dit Hubert d’un air résolu et implacable qui ne lui seyait pas du tout, je n’hésiterai pas à faire leur description à la police ! »
Il avait bien appuyé sur le dernier mot en haussant le ton et en regardant dans l’embrasure de la porte Mr.Magnum qui discutait avec d’autres personnes. Gontran remarqua que les mains de Hubert tremblaient et qu’il les fixait avec rage. Il ouvrit la bouche pour ajouter quelque chose, puis se ravisa. Ce fut la femme de Hubert qui cassa la transe de son mari :
« Pourquoi tu cries comme ça, encore, toi ? » dit-elle d’une voix claire et mélodieuse. Elle s’approcha d’eux en les regardant un à un, et un à un ils baissaient les yeux comme des enfants devant une mère en colère. Hubert fut le plus longtemps à tenir, la force de l’habitude sans doute, mais n’en examina pas moins ses pieds après coup.
« Claire, je… commença Hubert, l’attention toujours fixée sur un point entre ses pieds.
-Chut, Hubert. Ce sont des clients, et rien de plus. Alors toi et tes amis, vous allez me faire le plaisir d’arrêter de dire des conneries plus grosses que vous sur nos clients, et éviter de les regarder d’un air mauvais, n’est-ce pas ? »
Elle n’avait pas même terminée sa phrase que Gontran et Gérald hochaient déjà la tête exagérément, ayant dans l’idée de terminer leurs verres au plus vite au cas où il y ait du grabuge. Claire appela son mari, qui n’avait pas répondu, et celui-ci bredouilla un oui contraint et forcé. Un sourire lui éclaira le visage.
« Et bien voilà, est-ce si compliqué ? » Puis, sans attendre de réponse, elle passa derrière le comptoir, saisit le carnet où étaient notés les réservations et compta mentalement le nombre de personnes attendues moins celles qui étaient arrivées. Concentrée sur sa soustraction, elle ne releva la tête que pour saluer Gorgon_Roo, Pusar-San et Haschatan qui venaient d’arriver.
« Je vais aller voir s’ils veulent que je commence le service. Prépares-toi pour les apéritifs, Hubert. Et vous deux, laissez-le un peu bosser en paix ! »
Elle partit directement vers la salle, pendant que Gontran et Gérald continuaient de hocher la tête. Une fois partie, Hubert releva enfin son visage vers sa femme, et cracha un ‘Pffeuh…’ méprisant. Il se tourna ensuite vers ses acolytes et maugréa :
« Les gonzesses, toutes les mêmes…
-Bon, Hubert, je vais m’rentrer, il se fait tard et…
-Tu me lâches avec eux ? lança le patron, outré. Tu veux me laisser seul avec les cinquante fous dans la salle là-bas ? C’est gentil, Gontran, c’est très gentil…
-Et bien, c’est-à-dire que… » Commença Gontran. Gérald se leva, déposa un billet de vingt euros sur le comptoir, et partit sans un mot. Le patron ne s’en aperçut même pas, concentré sur Gontran. Ce dernier profita du départ de son ‘ami’ pour filer à son tour, prétextant quelque chose à lui dire.
« Ah bravo… » grommela Hubert attrapant les billets avant de se les mettre en poche. Il vit les deux hommes sortir et se faire questionner par un couple. Une fois ceux-ci renseignés, ils se dirigèrent vers la porte, comme tout les autres.
« Bonjour patron ! » salua fortement Aran Valentine, qui se fit prestement réprimander par AngelAeris sa compagne. Et pendant qu’ils rejoignaient la salle où tout le monde conversait sans gène, Hubert marmonna :
« …bande de gothiques… »
Dans le petit restaurant d’ordinaire bien animé, le silence était pour une fois de rigueur. Les serveurs et quelques clients habitués regardaient défiler les dizaines de personnes qui arrivaient par groupes ou seules. Les rumeurs allaient déjà bon train, certains parlaient d’une réunion de secte, d’autres les ayant vu sortir du cimetière les avaient déjà catalogués en tant que satanistes venant prêcher leur démoneries par ici, mais toutes et tous étaient dans le faux.
Le premier arrivé, et celui qui était en bout de table et attendait les autres depuis le premier coup de douze heures, avait été nommé ‘Matrik’ par le barman, un homme de 56ans bien tassé et qui avait le nez aussi rouge et piqueté que son tablier était sale et troué. Ses ‘habitués’ et piliers de bar attitrés appelés Gontran et Gérald, avait doucement ri sous cape lorsque leur dealer d’alcool préféré avait lancé ce surnom.
Mr.Magnum n’avait entendu que les gloussements avinés lorsqu’il s’était installé à la table qu’il avait réservée la veille, et n’avait pas relevé. Il était trop tendu pour oser s’engager dans ce type de terrain, et le ‘patron’ était libre de le mettre à la porte si débordement il y avait. Connaissant parfaitement son avantage, Hubert, ledit patron, en avait donc profité pour en rajouter une couche, et tandis que Mr.Magnum attendait patiemment que ceux qu’il avait convié à venir fasse leur entrée.
« Regardez-moi ça, éructa Gontran d’un air méprisant, en voilà d’autres.
-Si vous voulez mon avis, chuchota Gérald avec une voix de conspirateur, ces mecs là sont louches. Ces trois-là, surtout… Regarde : Matrik tout en noir, l’autre qui lui ressemble : Tout en bleu... »
Hubert éclata d’un rire gras en regardant Draco passer, suivit d’Erwan. Ses deux compères le regardèrent un instant, surpris, puis se mirent à rire à leur tour.
« Mais c’est qu’il a raison, l’petit Gégé !! » s’exclama le patron en lui balançant une claque dans le dos, puis plus bas : « Il est en bleu, l’autre en noir, et il en attends des dizaines d’autres, selon ma femme…
-Des dizaines ?
-Oui Gégé, des dizaines d’autres… Pourquoi tu crois qu’il a réservé c’te grande table ? Tu crois qu’ils vont becter à trois là-dessus ? » Et il se remit à rire.
« Eh, en voilà encore deux… Regarde celui de droite, Hubert : Il a pas l’air bien.
-Il est bourré, c’est sûr, affirma Gontran d’un ton sans appel. J’en ai déjà vu des mecs murgés, et c’est comme ça qu’c’est.
-On dirait plutôt qu’il a chialé, non ? » hasarda Gérald. Hubert haussa les épaules, et reprit le nettoyage délicat d’un verre tandis que Fury et Satana pénétrait dans le restaurant. Ils saluèrent les trois hommes d’un vague geste de la main, et allèrent directement dans la petite salle annexe où ils étaient attendus.
« Pfff… lâcha Hubert en reprenant un autre verre mouillé. Rien d’autre que des gamins. Tu as vu celui qui nous a salué, là ? J’avais l’impression que ça lui brisait les doigts de nous agiter la main…
-Tu sais, les jeunes de nos jours… » soupira Gontran en vidant sa chope de bière. Squall et DragonNoir, accompagnés de DarKenshin, Hilde, le Ionisateur Fou et Youfie, entrèrent à leur tour. DragonNoir salua les habitués, ainsi que Squall, et les autres articulèrent un bref bonjour d’usage.
« Bonjour, mesdemoiselles et messieurs… Je suppose que vous venez pour la réunion ? clama Hubert d’une voix claire.
-Vous avez deviné juste, monsieur. Où doit-on se diriger ?
-Par là-bas. » dit-il en montrant la petite porte du doigt, avant d’ajouter à vois basse pour ses amis : « Qu’est-ce qu’il vont bien pouvoir foutre tous, là-bas… ?
-T’as vu ? Y a même des gonzesses avec eux, ils vont peut-être faire des trucs cochons… » Et, comme si c’était la meilleure blague au monde, Gérald éclata d’un rire profondément inintelligent avant de frapper son verre sur la table, en réclamant un autre.
K-Ro et RazaëlAurélie suivirent, la petite jeune fille toujours au bord de la crise de nerfs et/ou de larmes, et RazaëlAurélie la soutenant du mieux qu’elle le pouvait. Gontran, dans un élan de stupidité sans borne, siffla les deux ‘mamzelles’ et K-Ro lui répondit d’un majeur silencieux, accompagné d’un regard qui ne présageait rien de bon.
« Hou la, mon brave Gontran, tu viens d’te prendre une trempe du tonnerre de Dieu !
-Fais pas chier, et sert m’en un autre au lieu de dire des conneries plus grosses que toi…
-Tu sais qu’tu d’viens mauvais, toi, avec l’âge ?
-Les gars, regardez qui voilà !! » s’exclama Gérald d’une voix estomaquée. Les deux autres se tournèrent vers la porte et virent un jeune homme arriver, à première vue banal. Mais en l’observant, on devinait une gestuelle calculée et maniérée, un air hautain trahissant une estime de soi et un ego démesuré.
Il entra sous les yeux ébahis des trois compères et ne daigna pas même poser un regard sur eux. Il se dirigea directement vers les débuts de conversations qui venaient de la droite et rentra à son tour dans la salle.
« Vache ! Alors lui, si c’est pas une tantouze, alors je ne m’appelle plus Hubert, ça je vous le dis. Il en a des drôle de potes le…
-Chuuut ! » intima Gérald en agitant la main. Ils restèrent coi quelques secondes, puis il ajouta d’un air éberlué : « Il s’appelle Arc !! Comme un arc !!
-Si tu veux mon avis, commença Gontran, blasé, ces mecs ne sont pas nets. Il doit leur manquer des cases dans le ciboulot !!
-Il en a des drôles de potes le Matrik, tout de même… » acheva Hubert en reposant un nouveau verre propre et sec sous le comptoir.
« Matrik la matraque !! » lança bêtement Gérald, sur quoi ils rirent pendant de longues minutes inlassablement, se claquant les cuisses et se frappant les épaules dans une démonstration frappante d’amitié masculine.
Un couple fit irruption à son tour dans le restaurant, Angie et Laekh jetèrent un regard amusé vers les trois joyeux drilles qui étaient trop occupés à rire pour les remarquer, puis rejoignirent les autres sans mot dire.
« Encore ? s’exclama Gontran avec une pointe d’irritation. Mais c’est pas possible, ton restaurant va jamais être assez grand !
-Ils ont payés, après je m’en fous. » répondit sèchement Hubert en regardant passer LeKanar, Soulblighter et Wee-Ree-Cat. « C’est Matrik qu’à payer pour tout le monde, et en avance, en plus…
-Et bien, encore des gosses de riches… conclu Gérald en terminant son verre. T’es sûr au moins que le chèque est pas en bois, Hub ?
-Pas plus en bois que ta caboche, Gégé. » Et ils repartirent d’un rire alors que Halvorc passait devant eux, et ils riaient encore à gorge déployée lorsque TheMaker et Hitomi arrivèrent sans bruit. Les conversations commençaient à s’entendre, et Hubert reprit un nouveau verre avant d’avancer sa tête près de celle de Gontran et de lui murmurer discrètement : « Regarde ceux qui arrivent, Gontran… C’est impressionnant…
-Quoi ? Qu’est-ce que t’as dis, Hubert ? » demanda Gérald avec un air d’enfant maintenu hors d’un secret contre sa volonté. Les deux l’ignorèrent et observèrent les sept personnes qui s’approchaient de la porte.
« Tu penses qu’ils sont aussi avec Matrik et sa clique ?
-J’en sais rien, Gontran, mais on dirait une bande de jeunes des cités… » Hubert les dévisagea d’un œil méfiant, et Gérald compris enfin où il fallait regarder et fit de même. Les cinq garçon et les deux filles s’arrêtèrent une fois la porte passée, et restèrent immobile, ne sachant où allez ni que faire. Viper Dragoon s’avança et dit alors :
« Euh, excusez-moi, c’est bien ici qu’il y a une réunion ?
-Ils sont là-bas, remarqua Pythagore à voix haute.
-Vous faites partie de la bande à Mat… » Hubert s’arrêta net : Il avait failli dire Matrik au lieu du nom sous lequel il avait réservé. Il feuilleta rapidement son registre près du bottin, trouva la page, et reprit sa phrase là où il l’avait laissé : « Magnum. Monsieur Magnum. C’est bien ça ?
-Merci monsieur, acquiesça Yclipt en se dirigeant vers la salle maintenant animée. Pythagore le laissa passer, ainsi que les deux demoiselles présente qui se trouvaient être Weedow et Sephirath, puis doubla Viper Dragoon pour se placer devant. Ce dernier lui donna une bourrade dans l’épaule en ronchonnant, et évita le coup de pied lancé par Pythagore en aveugle, qui manqua de peu GabiMatrix et DanteFS qui fermaient la marche.
« C’est fou le nombre de personnes qui vont le rejoindre, s’étonna Gérald.
-Et encore, il en attend encore une vingtaine, d’après ce que j’ai pu compter.
-Une vingtaine ? criait presque Gérald. Eh bien… On peut pas dire qu’il a pas d’ami, lui… Et de quoi ils vont parler ? Hub ?
-J’en sais foutrement rien.
-Ils viennent du cimetière, tous… » Hubert et Gérald regardèrent Gontran, incrédule. Celui-ci vida son verre, le reposa, et regarda le patron avec un œil sérieux. Apeuré, même.
« Je les ai vu sortir du cimetière, la grand partie du monde qui est dans ton restaurant, là-bas, était au cimetière il y a moins d’une heure, j’en suis sûr et certain, parole de moi.
-Et qu’est-ce qu’ils allaient y foutre, ces gosses ? cracha Hubert.
-Je croyais que c’était que des rumeurs, ces histoires de satanistes, merde… » soupira Gérald. Ils se turent un instant, le temps de laisser passer deux personnes qui rejoignirent le groupe. IL et Radamenthe ne leur adressèrent qu’un bref bonjour d’usage avant de se mêler à la foule maintenant bruyante.
« Je vous jure sur ma pauvre mère, paix à son âme, que je les ai vu sortir du cimetière mais je sais pas ce qu’ils y ont fait, par contre, continua Gontran d’un ton de conspirateur.
-Des profanateurs ? » articula lentement Hubert, comme si c’était le mot le plus compliqué qui lui avait été donné de prononcer, ce qui était probablement le cas. Les deux autres le dévisagèrent gravement, puis haussèrent les épaules en même temps d’une manière comique. « Si j’avais su, j’aurais pas accepté de les prendre, ces gars là…
-Peut-être même que ce sont des néo-nazis ? proclama Gérald d’un air dégoûté. J’ai vu ça à la télé la semaine dernière, et il paraît qu’ils cassent les tombes et qu’ils peignent des croix gammées sur les pierres tombales, et partout autours…
-Si jamais c’est bien ça, dit Hubert d’un air résolu et implacable qui ne lui seyait pas du tout, je n’hésiterai pas à faire leur description à la police ! »
Il avait bien appuyé sur le dernier mot en haussant le ton et en regardant dans l’embrasure de la porte Mr.Magnum qui discutait avec d’autres personnes. Gontran remarqua que les mains de Hubert tremblaient et qu’il les fixait avec rage. Il ouvrit la bouche pour ajouter quelque chose, puis se ravisa. Ce fut la femme de Hubert qui cassa la transe de son mari :
« Pourquoi tu cries comme ça, encore, toi ? » dit-elle d’une voix claire et mélodieuse. Elle s’approcha d’eux en les regardant un à un, et un à un ils baissaient les yeux comme des enfants devant une mère en colère. Hubert fut le plus longtemps à tenir, la force de l’habitude sans doute, mais n’en examina pas moins ses pieds après coup.
« Claire, je… commença Hubert, l’attention toujours fixée sur un point entre ses pieds.
-Chut, Hubert. Ce sont des clients, et rien de plus. Alors toi et tes amis, vous allez me faire le plaisir d’arrêter de dire des conneries plus grosses que vous sur nos clients, et éviter de les regarder d’un air mauvais, n’est-ce pas ? »
Elle n’avait pas même terminée sa phrase que Gontran et Gérald hochaient déjà la tête exagérément, ayant dans l’idée de terminer leurs verres au plus vite au cas où il y ait du grabuge. Claire appela son mari, qui n’avait pas répondu, et celui-ci bredouilla un oui contraint et forcé. Un sourire lui éclaira le visage.
« Et bien voilà, est-ce si compliqué ? » Puis, sans attendre de réponse, elle passa derrière le comptoir, saisit le carnet où étaient notés les réservations et compta mentalement le nombre de personnes attendues moins celles qui étaient arrivées. Concentrée sur sa soustraction, elle ne releva la tête que pour saluer Gorgon_Roo, Pusar-San et Haschatan qui venaient d’arriver.
« Je vais aller voir s’ils veulent que je commence le service. Prépares-toi pour les apéritifs, Hubert. Et vous deux, laissez-le un peu bosser en paix ! »
Elle partit directement vers la salle, pendant que Gontran et Gérald continuaient de hocher la tête. Une fois partie, Hubert releva enfin son visage vers sa femme, et cracha un ‘Pffeuh…’ méprisant. Il se tourna ensuite vers ses acolytes et maugréa :
« Les gonzesses, toutes les mêmes…
-Bon, Hubert, je vais m’rentrer, il se fait tard et…
-Tu me lâches avec eux ? lança le patron, outré. Tu veux me laisser seul avec les cinquante fous dans la salle là-bas ? C’est gentil, Gontran, c’est très gentil…
-Et bien, c’est-à-dire que… » Commença Gontran. Gérald se leva, déposa un billet de vingt euros sur le comptoir, et partit sans un mot. Le patron ne s’en aperçut même pas, concentré sur Gontran. Ce dernier profita du départ de son ‘ami’ pour filer à son tour, prétextant quelque chose à lui dire.
« Ah bravo… » grommela Hubert attrapant les billets avant de se les mettre en poche. Il vit les deux hommes sortir et se faire questionner par un couple. Une fois ceux-ci renseignés, ils se dirigèrent vers la porte, comme tout les autres.
« Bonjour patron ! » salua fortement Aran Valentine, qui se fit prestement réprimander par AngelAeris sa compagne. Et pendant qu’ils rejoignaient la salle où tout le monde conversait sans gène, Hubert marmonna :
« …bande de gothiques… »
Mr.Magnum- Enorme floodeur
- Nombre de messages : 2475
Age : 42
Localisation : Dans les limbes torturées d'un esprit dérangé.
Date d'inscription : 18/01/2005
Re: Traumenschar
(partie 1)
3. Un début d’explication…
Mr.Magnum attendit encore l’arrivée de Jamic et de Fab avant d’entamer les choses sérieuses. Il s’était attendu à ce qu’il y ait de nombreuses personnes, mais pas tant. Pas autant que ça : Ils étaient tous venus. Même Lord FireFly était apparu sur le pas de la porte, suivit de près par Final Séraphin, que même lui n’attendait pas à voir débarquer.
Ils vinrent tous tour à tour le voir pour signaler leur présence, et présenter leurs condoléances à Fury. Ce dernier avait réussi à se clamer, certainement grâce à Satana, et présentait une mine certes triste, mais moins ravagée par les larmes qu’au cimetière. Il remerciait les gens chaleureusement, tout comme Mr.Magnum, et adressait même des sourires de temps à autres…
Les convives parlèrent, allèrent de personnes en personnes pour converser, joyeusement pour la plupart, malgré certains et certaines, comme K-Ro, qui ne pouvaient se résoudre à accepter sa mort. La rencontre prenait des allures de réunion Trauménienne, à la grande satisfaction de Mr.Magnum.
Au moins, Fury ne risque-t-il pas de craquer de nouveau. Et s’ils sont dans de bonnes dispositions, alors peut-être que ma nouvelle, que mon idée, passera plus facilement. J’espère qu’ils ne vont pas me prendre pour un fou… Il faut qu’ils me croient…Et il ne faut pas que j’aie peur de leur dire. Je n’ai jamais été confronté à un public comme celui-ci…Un public qui, en fait, ne sait rien de sa présence ici, et ne me connaît que très peu…
Mr.Magnum dégagea ses funestes pensées d’un coup de tête, et se redressa. Placé en bout de la longue table, il frappa soudainement du poing sur la table trois fois. Tout le monde s’arrêta de parler, et Mr.Magnum vit même que le patron, à l’autre bout du restaurant, lui jetait un regard courroucé. Il esquissa un léger sourire à son attention, et regarda l’assemblée qui attendait une explication de sa part.
Pour les coups de poings, et ensuite pour la raison de leur présence.
« Je vois que la grande majorité des personnes que j’ai convié via Traumen est présente, et je vous en remercie. Je tiens à vous dire, tout d’abord, que je vous suis reconnaissant de vous être déplacés étant donnés les circonstances, et que cette réunion ne sera pas considérée comme une simple rencontre entre membre, mais réellement comme une sorte de brainstorming sur éventuelle possibilité de remédier à la mort de Séphy-Roshou. »
Les mots étaient lâchés.
Un long silence accueilli la nouvelle, et tout les visages crispés regardaient Mr.Magnum, seul en bout de table, qui se sentait soudainement inutile et ridicule. Squall, incrédule, le fixait d’un œil agrandi par l’étonnement. K-Ro, toujours secouée par des sanglots, semblait prête à lui sauter à la gorge. DragonNoir avait posé ses mains sur sa nuque et attendait patiemment la suite, tandis que d’autres trépignaient littéralement.
« Qu’est-ce qu’il a dit, là ? demanda Viper Dragoon d’une voix surexcitée en regardant tour à tour Arkh, Squall, Pythagore et d’autres encore.
-Remédier à la mort de Séphy-Roshou, hein… Mais bien sûr… »
Satana avait parlé d’une voix calme, mais le silence pesant de l’assemblée avait amplifié sa remarque sarcastique. Il poursuivit : « Écoute, Magnum, je t’ai déjà donné mon opinion sur le sujet, et je continue à penser que tu te fourvoie complètement. Le chagrin t’aveugle, au même titre que Fury, mais dans un autre style : Il pleure, tu délires.
-Je ne… commença Mr.Magnum.
-Laisse-le parler, Satana, ne commence pas à faire ton intéressant… l’interrompit Erwan. Son idée est peut-être folle, mais elle vaut au moins l’intérêt qu’on l’étudie.
-Son idée est folle, ça oui, et irréalisable. Et le pire, c’est que tu le sais très bien. »
Personne n’osa ajouter un mot à cette remarque acerbe et ô combien réaliste. Mr.Magnum avait espéré que la discussion se passe bien et sans anicroches, mais ses espérances venaient d’être réduites à néant. Il pris une profonde inspiration tandis que tous se regardaient en chien de faïence, et ouvrit la bouche pour parler, lorsque la patronne revint avec les collations qu’ils avaient demandés.
« Puis-je vous demander de tous vous mettre à table, s’il vous plaît ? » dit-elle d’une voix enjouée. Elle resta interdite une seconde, puis tous allèrent se placer sur l’immense table qui trônait au milieu de la salle. Mr.Magnum la bénit intérieurement pour cette apparition involontaire et libératrice, et s’assit en bout de table, tel un maître de cérémonie.
Les gens s’installèrent où ils le voulaient, sans ordre spécifique, mais sans querelles non plus. Deux autres personnes arrivèrent pendant ce temps, Dalisc et Sozeyh Baelish, et prirent place comme les autres autours de la table. Le brouhaha et la confusion s’estompèrent rapidement, tandis que Claire repartait chercher les apéritifs au bar.
Fury avait la tête cachée entre ses mains, et semblait dormir. Mais la réalité était tout autre : Il pensait. Il se remémorait. Il se torturait. Des images de Séphy-Roshou n’avait cessé de le tourmenter depuis ces quelques trois jours où il avait retrouvé le corps inanimé de sa belle. Il se rappelait encore les derniers instants où, rentrant chez elle, il avait crié son prénom comme à son habitude, s’attendant à recevoir une flopée de juron comme quoi il ne devrait pas crier ainsi. Il se souvenait aussi du silence qui lui avait répondu.
Un silence qui n’augurait rien de bon en ce début de matinée. Un silence pesant, lourd de mauvaises vibrations. Il avait déposa le bouquet de fleurs sur la table, et avait retiré son manteau, le jetant nonchalamment sur un dossier de chaise, toujours en l’appelant. Il se repassait encore les images de lui, déambulant dans la maison, un peu paniqué, espérant les insultes, espérant sa mauvaise humeur, espérant même une engueulade.
Il avait alors atteins la porte de sa chambre et l’avait entrouverte sans frapper. Elle était là. Une immense vague de soulagement l’avait envahis en la trouvant enfin, allongée dans son lit. Les habitudes avaient finalement reprit leurs places. Mais son malaise n’avait pas bougé et Fury avait sentit son estomac se retourner sans y prêter attention.
Il avait ouvert la porte doucement et l’avait refermée sans enclencher le loquet, afin de faire le moindre bruit possible. Il s’était approché de son lit et s’était assis près d’elle, lui remettant une mèche blonde d’une geste tendre. C’est à ce moment qu’il avait compris que quelque chose clochait. En effleurant sa joue, il avait cru frôler un glaçon. Il avait alors posé un doigt curieux sur son front, et s’était rendu compte qu’elle était gelée.
Fury se souvint que son cœur, au lieu de s’accélérer, avait ralenti au point où il avait cru un instant que son muscle principal ne repartirait plus. Et dans un sens, c’était ce qui s’était produit : Depuis le Dimanche matin, son cœur avait cessé toute activité émotionnelle. Il se revit encore tâter son pouls en grande hâte et découvrir que…
« Oses m’affirmer que j’ai tort de dénigrer cette idée stupide, Erwan ! »
Un poing rageur le sortit de ses rêverie et Fury vit son ami Satana debout, penché sur la table, frémissant de frustration et de colère et fixant Erwan de l’autre coté. Erwan restait, lui, assit, mais sous la table, sa jambe battait un rythme accéléré. Fury resta coi de stupéfaction, alors que Satana reprit d’une voix forte :
« Oses me dire qu’il y a une chance pour que ça marche.
-Il y a bien une chance, Satana. » répondit Mr.Magnum. Fury dirigea mollement son regard vers lui, l’esprit toujours remplit d’images de sa fiancée. Il note distraitement, au passage que les verres avaient été servi, et se dit vaguement que son absence avait peut-être duré un peu plus longtemps qu’il ne l’avait cru au départ.
« Ah, alors si môssieur Magnum dit qu’il y a une chance… ironisa Satana en se rasseyant.
-Je n’affirme rien, mais je vous demande juste, pour le moment, de m’écouter. Simplement écouter ce que je vais vous dire. Nous en parlerons après, lorsque… » Mr.Magnum ne termina pas sa phrase et prit une gorgée de son verre de Soho. Fury l’examina avec l’air d’un homme qui le voit pour la première fois.
« Mais commençons par le commencement, si vous le voulez bien. C’était le dimanche matin, en fin de matinée, si je me souviens bien. Je m’étais, pour une fois, réveillé relativement tôt afin de faire un peu de place dans le bordel qui compose la majeure partie de ma chambre… Et c’est alors que mon téléphone portable a sonné… »
Fury n’entendit pas la suite : Il s’était replongé dans ses souvenirs. Son esprit vagabonda encore quelques minutes autours de la table, dévisageant les personnes, épiant les regards, sentant les émotions diverses qui émanaient d’eux : Tristesse, chagrin, ennui, intérêt, etc… Seuls quelques mots que disait Mr.Magnum arrivaient à passer la barrière de ses tympans : « …était en larmes… », « …les prévenir, il ne le pouvait pas… », « …croyais endormie… » ou encore « morte ». Le dernier mot résonnait dans sa tête comme un carillon maudit.
« morte »
Il sentit sa tête dodeliner et il la posa de nouveau entre ses mains jointes. Ainsi, les sons qui lui parvenaient étaient plus étouffés, et il n’y avait plus de lumière pour éclairer son visage strié de larmes sèches. Il se sentit un peu mieux à se protéger des agressions externes, et même si la méthode employée était dérisoire, elle lui suffisait amplement. Les regards qui se posaient sur lui ne pouvaient le voir, et surtout il n’entendait plus le mot
« morte »
qui lui donnait mal au crâne. Mr.Magnum parlait, et parlait encore, mais lui connaissait déjà l’histoire, puisqu’il l’avait vécu. Il étouffa un rire qui aurait été malvenu et les pensées l’assaillir soudain, sans raison particulières, comme ça. Comme des petits gobelins qui se perchaient à l’oreille pour murmurer : Elle est morte ! Tu t’en rappelles, hein ? Tu n’oublieras pas, ne t’en fais pas, je serais là…
Fury imaginait la saloperie de bestiole verdâtre qui se balançait en riant sur le cartilage de l’oreille, dandinant ses jambes minuscules en braillant d’une voix aigue que seul lui pouvait entendre : Tu te souviens de la fois où vous vous étiez promené dans les bois ? Hein ? Et le jour où vous aviez passé toute la journée dans son lit à vous papouiller. Ces jours là sont finis, et bien finis…
Oui, ils sont finis, c’est sûr… songea Fury. Maintenant, quand je repense à son lit, c’est elle que je vois dessus. Elle, morte. Comme quand je l’ai découvert. Comme la dernière fois où je l’ai vu. Elle, en T-shirt, allongée alanguie sous un duvet léger, semblant attendre le réveil d’un prince, un baiser. Baiser que je lui ai donné, mais pas de la manière si romantique dont on écrit les contes…
Il se souvint, juste après s’être rendu compte qu’elle ne respirait pas, qu’il avait tenté de lui faire du bouche à bouche pendant ce qui lui avait semblé des heures. Et elle n’avait eu aucune réaction. Il lui avait fait un massage cardiaque, comme il avait appris à la faire il y a longtemps, mais sans succès. Mais il n’arrivait toujours pas à oser penser qu’elle était morte. Il n’avait pas voulu le croire.
Mais au bout de cinq minutes, la vérité avait semblé lui éclater au visage comme un ballon remplit de sang poisseux. Il avait reposé le corps sans vie de Séphy-Roshou, et s’était relevé, interdit, ne sachant plus où il était et pourquoi. D’un pas machinal, il s’était dirigé vers la télévision, qu’il avait éteinte, et il avait remonté la couverture sur elle, comme pour la border. Et effectivement, il lui avait semblé qu’elle dormait.
Sauf qu’elle ne dort pas, ta copine ! avait gueulé le lutin pendu à son oreille. À partir de ce moment là, il ne l’avait plus quitté. Elle est morte, on ne peut plus morte, et il est bien trop tard pour faire quoi que ce soit de ridicule comme appeler les pompiers ou l’hôpital. C’est finit, et bien finit ! Fury était ressortit sans un mot de la chambre et avait appelé tout de suite la police sur le poste fixe de la maison.
3. Un début d’explication…
Mr.Magnum attendit encore l’arrivée de Jamic et de Fab avant d’entamer les choses sérieuses. Il s’était attendu à ce qu’il y ait de nombreuses personnes, mais pas tant. Pas autant que ça : Ils étaient tous venus. Même Lord FireFly était apparu sur le pas de la porte, suivit de près par Final Séraphin, que même lui n’attendait pas à voir débarquer.
Ils vinrent tous tour à tour le voir pour signaler leur présence, et présenter leurs condoléances à Fury. Ce dernier avait réussi à se clamer, certainement grâce à Satana, et présentait une mine certes triste, mais moins ravagée par les larmes qu’au cimetière. Il remerciait les gens chaleureusement, tout comme Mr.Magnum, et adressait même des sourires de temps à autres…
Les convives parlèrent, allèrent de personnes en personnes pour converser, joyeusement pour la plupart, malgré certains et certaines, comme K-Ro, qui ne pouvaient se résoudre à accepter sa mort. La rencontre prenait des allures de réunion Trauménienne, à la grande satisfaction de Mr.Magnum.
Au moins, Fury ne risque-t-il pas de craquer de nouveau. Et s’ils sont dans de bonnes dispositions, alors peut-être que ma nouvelle, que mon idée, passera plus facilement. J’espère qu’ils ne vont pas me prendre pour un fou… Il faut qu’ils me croient…Et il ne faut pas que j’aie peur de leur dire. Je n’ai jamais été confronté à un public comme celui-ci…Un public qui, en fait, ne sait rien de sa présence ici, et ne me connaît que très peu…
Mr.Magnum dégagea ses funestes pensées d’un coup de tête, et se redressa. Placé en bout de la longue table, il frappa soudainement du poing sur la table trois fois. Tout le monde s’arrêta de parler, et Mr.Magnum vit même que le patron, à l’autre bout du restaurant, lui jetait un regard courroucé. Il esquissa un léger sourire à son attention, et regarda l’assemblée qui attendait une explication de sa part.
Pour les coups de poings, et ensuite pour la raison de leur présence.
« Je vois que la grande majorité des personnes que j’ai convié via Traumen est présente, et je vous en remercie. Je tiens à vous dire, tout d’abord, que je vous suis reconnaissant de vous être déplacés étant donnés les circonstances, et que cette réunion ne sera pas considérée comme une simple rencontre entre membre, mais réellement comme une sorte de brainstorming sur éventuelle possibilité de remédier à la mort de Séphy-Roshou. »
Les mots étaient lâchés.
Un long silence accueilli la nouvelle, et tout les visages crispés regardaient Mr.Magnum, seul en bout de table, qui se sentait soudainement inutile et ridicule. Squall, incrédule, le fixait d’un œil agrandi par l’étonnement. K-Ro, toujours secouée par des sanglots, semblait prête à lui sauter à la gorge. DragonNoir avait posé ses mains sur sa nuque et attendait patiemment la suite, tandis que d’autres trépignaient littéralement.
« Qu’est-ce qu’il a dit, là ? demanda Viper Dragoon d’une voix surexcitée en regardant tour à tour Arkh, Squall, Pythagore et d’autres encore.
-Remédier à la mort de Séphy-Roshou, hein… Mais bien sûr… »
Satana avait parlé d’une voix calme, mais le silence pesant de l’assemblée avait amplifié sa remarque sarcastique. Il poursuivit : « Écoute, Magnum, je t’ai déjà donné mon opinion sur le sujet, et je continue à penser que tu te fourvoie complètement. Le chagrin t’aveugle, au même titre que Fury, mais dans un autre style : Il pleure, tu délires.
-Je ne… commença Mr.Magnum.
-Laisse-le parler, Satana, ne commence pas à faire ton intéressant… l’interrompit Erwan. Son idée est peut-être folle, mais elle vaut au moins l’intérêt qu’on l’étudie.
-Son idée est folle, ça oui, et irréalisable. Et le pire, c’est que tu le sais très bien. »
Personne n’osa ajouter un mot à cette remarque acerbe et ô combien réaliste. Mr.Magnum avait espéré que la discussion se passe bien et sans anicroches, mais ses espérances venaient d’être réduites à néant. Il pris une profonde inspiration tandis que tous se regardaient en chien de faïence, et ouvrit la bouche pour parler, lorsque la patronne revint avec les collations qu’ils avaient demandés.
« Puis-je vous demander de tous vous mettre à table, s’il vous plaît ? » dit-elle d’une voix enjouée. Elle resta interdite une seconde, puis tous allèrent se placer sur l’immense table qui trônait au milieu de la salle. Mr.Magnum la bénit intérieurement pour cette apparition involontaire et libératrice, et s’assit en bout de table, tel un maître de cérémonie.
Les gens s’installèrent où ils le voulaient, sans ordre spécifique, mais sans querelles non plus. Deux autres personnes arrivèrent pendant ce temps, Dalisc et Sozeyh Baelish, et prirent place comme les autres autours de la table. Le brouhaha et la confusion s’estompèrent rapidement, tandis que Claire repartait chercher les apéritifs au bar.
Fury avait la tête cachée entre ses mains, et semblait dormir. Mais la réalité était tout autre : Il pensait. Il se remémorait. Il se torturait. Des images de Séphy-Roshou n’avait cessé de le tourmenter depuis ces quelques trois jours où il avait retrouvé le corps inanimé de sa belle. Il se rappelait encore les derniers instants où, rentrant chez elle, il avait crié son prénom comme à son habitude, s’attendant à recevoir une flopée de juron comme quoi il ne devrait pas crier ainsi. Il se souvenait aussi du silence qui lui avait répondu.
Un silence qui n’augurait rien de bon en ce début de matinée. Un silence pesant, lourd de mauvaises vibrations. Il avait déposa le bouquet de fleurs sur la table, et avait retiré son manteau, le jetant nonchalamment sur un dossier de chaise, toujours en l’appelant. Il se repassait encore les images de lui, déambulant dans la maison, un peu paniqué, espérant les insultes, espérant sa mauvaise humeur, espérant même une engueulade.
Il avait alors atteins la porte de sa chambre et l’avait entrouverte sans frapper. Elle était là. Une immense vague de soulagement l’avait envahis en la trouvant enfin, allongée dans son lit. Les habitudes avaient finalement reprit leurs places. Mais son malaise n’avait pas bougé et Fury avait sentit son estomac se retourner sans y prêter attention.
Il avait ouvert la porte doucement et l’avait refermée sans enclencher le loquet, afin de faire le moindre bruit possible. Il s’était approché de son lit et s’était assis près d’elle, lui remettant une mèche blonde d’une geste tendre. C’est à ce moment qu’il avait compris que quelque chose clochait. En effleurant sa joue, il avait cru frôler un glaçon. Il avait alors posé un doigt curieux sur son front, et s’était rendu compte qu’elle était gelée.
Fury se souvint que son cœur, au lieu de s’accélérer, avait ralenti au point où il avait cru un instant que son muscle principal ne repartirait plus. Et dans un sens, c’était ce qui s’était produit : Depuis le Dimanche matin, son cœur avait cessé toute activité émotionnelle. Il se revit encore tâter son pouls en grande hâte et découvrir que…
« Oses m’affirmer que j’ai tort de dénigrer cette idée stupide, Erwan ! »
Un poing rageur le sortit de ses rêverie et Fury vit son ami Satana debout, penché sur la table, frémissant de frustration et de colère et fixant Erwan de l’autre coté. Erwan restait, lui, assit, mais sous la table, sa jambe battait un rythme accéléré. Fury resta coi de stupéfaction, alors que Satana reprit d’une voix forte :
« Oses me dire qu’il y a une chance pour que ça marche.
-Il y a bien une chance, Satana. » répondit Mr.Magnum. Fury dirigea mollement son regard vers lui, l’esprit toujours remplit d’images de sa fiancée. Il note distraitement, au passage que les verres avaient été servi, et se dit vaguement que son absence avait peut-être duré un peu plus longtemps qu’il ne l’avait cru au départ.
« Ah, alors si môssieur Magnum dit qu’il y a une chance… ironisa Satana en se rasseyant.
-Je n’affirme rien, mais je vous demande juste, pour le moment, de m’écouter. Simplement écouter ce que je vais vous dire. Nous en parlerons après, lorsque… » Mr.Magnum ne termina pas sa phrase et prit une gorgée de son verre de Soho. Fury l’examina avec l’air d’un homme qui le voit pour la première fois.
« Mais commençons par le commencement, si vous le voulez bien. C’était le dimanche matin, en fin de matinée, si je me souviens bien. Je m’étais, pour une fois, réveillé relativement tôt afin de faire un peu de place dans le bordel qui compose la majeure partie de ma chambre… Et c’est alors que mon téléphone portable a sonné… »
Fury n’entendit pas la suite : Il s’était replongé dans ses souvenirs. Son esprit vagabonda encore quelques minutes autours de la table, dévisageant les personnes, épiant les regards, sentant les émotions diverses qui émanaient d’eux : Tristesse, chagrin, ennui, intérêt, etc… Seuls quelques mots que disait Mr.Magnum arrivaient à passer la barrière de ses tympans : « …était en larmes… », « …les prévenir, il ne le pouvait pas… », « …croyais endormie… » ou encore « morte ». Le dernier mot résonnait dans sa tête comme un carillon maudit.
« morte »
Il sentit sa tête dodeliner et il la posa de nouveau entre ses mains jointes. Ainsi, les sons qui lui parvenaient étaient plus étouffés, et il n’y avait plus de lumière pour éclairer son visage strié de larmes sèches. Il se sentit un peu mieux à se protéger des agressions externes, et même si la méthode employée était dérisoire, elle lui suffisait amplement. Les regards qui se posaient sur lui ne pouvaient le voir, et surtout il n’entendait plus le mot
« morte »
qui lui donnait mal au crâne. Mr.Magnum parlait, et parlait encore, mais lui connaissait déjà l’histoire, puisqu’il l’avait vécu. Il étouffa un rire qui aurait été malvenu et les pensées l’assaillir soudain, sans raison particulières, comme ça. Comme des petits gobelins qui se perchaient à l’oreille pour murmurer : Elle est morte ! Tu t’en rappelles, hein ? Tu n’oublieras pas, ne t’en fais pas, je serais là…
Fury imaginait la saloperie de bestiole verdâtre qui se balançait en riant sur le cartilage de l’oreille, dandinant ses jambes minuscules en braillant d’une voix aigue que seul lui pouvait entendre : Tu te souviens de la fois où vous vous étiez promené dans les bois ? Hein ? Et le jour où vous aviez passé toute la journée dans son lit à vous papouiller. Ces jours là sont finis, et bien finis…
Oui, ils sont finis, c’est sûr… songea Fury. Maintenant, quand je repense à son lit, c’est elle que je vois dessus. Elle, morte. Comme quand je l’ai découvert. Comme la dernière fois où je l’ai vu. Elle, en T-shirt, allongée alanguie sous un duvet léger, semblant attendre le réveil d’un prince, un baiser. Baiser que je lui ai donné, mais pas de la manière si romantique dont on écrit les contes…
Il se souvint, juste après s’être rendu compte qu’elle ne respirait pas, qu’il avait tenté de lui faire du bouche à bouche pendant ce qui lui avait semblé des heures. Et elle n’avait eu aucune réaction. Il lui avait fait un massage cardiaque, comme il avait appris à la faire il y a longtemps, mais sans succès. Mais il n’arrivait toujours pas à oser penser qu’elle était morte. Il n’avait pas voulu le croire.
Mais au bout de cinq minutes, la vérité avait semblé lui éclater au visage comme un ballon remplit de sang poisseux. Il avait reposé le corps sans vie de Séphy-Roshou, et s’était relevé, interdit, ne sachant plus où il était et pourquoi. D’un pas machinal, il s’était dirigé vers la télévision, qu’il avait éteinte, et il avait remonté la couverture sur elle, comme pour la border. Et effectivement, il lui avait semblé qu’elle dormait.
Sauf qu’elle ne dort pas, ta copine ! avait gueulé le lutin pendu à son oreille. À partir de ce moment là, il ne l’avait plus quitté. Elle est morte, on ne peut plus morte, et il est bien trop tard pour faire quoi que ce soit de ridicule comme appeler les pompiers ou l’hôpital. C’est finit, et bien finit ! Fury était ressortit sans un mot de la chambre et avait appelé tout de suite la police sur le poste fixe de la maison.
Mr.Magnum- Enorme floodeur
- Nombre de messages : 2475
Age : 42
Localisation : Dans les limbes torturées d'un esprit dérangé.
Date d'inscription : 18/01/2005
Re: Traumenschar
(partie 2)
Il avait attendu leur arrivé pendant une dizaine de minutes en compagnie du gobelin affectueux et excité, qui ne cessait de lui remémorer des souvenirs de bonheur douloureux. Il n’avait pas pleuré, non, pas tout de suite. Jusqu’à onze heure et quart, passant outre les questions de la police, les pleurs de la mère de Séphy-Roshou, les bousculades, le gobelin mauvais, les sentiments, les souvenirs, il n’avait pas versé la moindre larme.
Et, curieusement, il avait demandé à un officier de police s’il avait le droit de passer un coup de fil. Le policier avait acquiescé à condition qu’il ne sorte pas de la maison, et Fury s’était en premier lieu dirigé vers la cuisine pour échapper au brouhaha du salon. Mais la mère de Séphy-Roshou pleurait à gros sanglots dans cette pièce, et il avait dû immigrer dans la chambre parentale afin d’être au calme.
Et là, il avait décroché le téléphone sans même savoir qui il allait appeler, et composé le numéro de Mr.Magnum qui était noté sur le portable de sa bien-aimée. Ton ex-bien-aimée, sombre crétin, martela la voix nasillarde dans son esprit, car elle est morte ! À moins que tu sois nécrophile, ha ha ! Alors dans ce cas, elle est là, dans la pièce à coté, dans un joli costume en sac poubelle… Si tu cherches bien, tu pourras peut-être même trouver la fermeture éclair de sa si belle robe, ha ha ha…
Au bout de deux sonneries, Mr.Magnum avait répondu. Son ‘Allô ?’ étonné grésilla et sembla se répercuter dans le combiné en une infinité de Allô stressant. Fury ravala sa salive devant cette voix inconnue et le salua avec politesse.
« Qui est-ce ? demanda Mr.Magnum. C’est le numéro d’une amie, vous vous n’êtes manifestement elle, ou alors tu as changé de sexe depuis la dernière fois où je t’ai parlé. »
Sa voix était joyeuse et plus claire maintenant que la friture avait cessé. Fury hésita deux secondes, le temps que son cerveau se demande s’il devait vraiment gâcher la journée d’un homme qui n’avait rien à voir avec elle, et qui respirait la bonne humeur. Mais, tout comme il s’était retrouvé entrain de composer le numéro d’une personne avec qui il n’avait jamais parlée autrement que par forum, il lui annonça la nouvelle :
« Séphy-Roshou est décédée. »
Sa voix était montée dans les aigus aux deux dernières syllabes et Fury s’était mordu le poing pour ne pas éclater en sanglots. Deux larmes avaient roulés sur ses pommettes avant de sauter sur son jean où ils explosèrent en silence, laissant deux ronds plus sombres sur la cuisse. Fury avait alors reprit sa respiration en haletant, mais Mr.Magnum le devança :
« Fury ? C’est toi ? Qu’est-il arrivé ? Qu’est-ce qui s’est passé ?
-Ils ne savent même pas, ces foutus médecins… » avait-il marmonné entre deux sanglots qui secouaient son corps en spasmes disgracieux. « Ils disent qu’elle est morte comme ça, et qu’on y peux rien, et que parfois ça arrive, c’est tout.
-Oh merde… avait lâché Mr.Magnum à des centaines de kilomètres de là. Je suis vraiment sincèrement désolé, Fury… Qu’est-ce que je peux faire pour toi, pour elle… Sa mère ! Comment va sa mère ? »
Mr.Magnum avait attendu patiemment que Fury reprenne son souffle. Il n’avait pas pleuré jusqu’à là, mais le fait d’annoncer la nouvelle, et de prononcer le mot ‘décédé’ avait déclenché le processus. Un processus difficile à arrêter.
« Elle est dans un état pire que le miens, comme tu peux t’en douter. Déjà, quand on oit la loque que je suis, pour le moment… » Fury renifla, et les larmes jaillirent à nouveau. Une fois la vanne ouverte, il était difficile de l’arrêter, et le gobelin prenait un plaisir manifeste à entretenir le flot continu.
« C’est normal que tu sois dans un tel état. » avait dit Mr.Magnum d’une voix calme et posée. La joie avait disparue de son ton pour laisser place à une sorte de note protectrice. Fury eu un instant l’impression d’entendre un grand frère lui parler. Penser à ça arriva à le calmer plus rapidement et à faire taire la voix.
« Je… Pour tout te dire, je ne sais pas pourquoi je t’appelle exactement… J’ai juste eu envie de t’appeler… J’ai été prendre ton numéro dans son portable sans trop savoir ce que je faisais, et voilà…
-Si je peux t’être utile, Fury je… » Il n’avait pas terminé sa phrase, préférant laisser le soin à Fury de lui dire ce dont il avait besoin en ce moment. Il n’avait d’ailleurs pas tardé à lui confier qu’il ne se sentait pas capable d’annoncer ça à tout le monde sur le forum…
« Même Satana n’est pas au courant ! avait-il déclaré, sentant les larmes revenir à l’assaut. Je ne l’ai pas appelé, mais je le ferais… Pas tout de suite…
-Ne t’inquiète pas, je me charge de faire l’annonce sur Traumen. Je… Je le ferais demain, pour être précis. Quand a lieu l’enterrement ? »
Fury avait ravalé un sanglot, puis avoué qu’il l’ignorait. C’était trop tôt. Ils avaient encore parlé quelques minutes, et ils avaient raccrochés. Fury s’était sentit mieux, malgré tout, après cette discussion. Le fait d’avoir partagé sa peine avec un autre lui avait semblé alléger ses épaules. Il avait aussi reprit le contrôle de lui-même.
Le reste de la journée, il l’avait passé à soutenir moralement la mère de Séphy-Roshou, qui tenait bien mal le coup et n’arrivait pas, encore à l’heure actuelle, à se remettre du décès de sa fille. Elle n’avait cessé de pleurer, de gémir, et était même passée dans une phase de quasi-démence lorsqu’elle s’était mise à l’appeler dans toute la maison, une fois les policiers repartis et le corps emporté.
Fury avait refusé qu’elle accompagne sa fille à la morgue, prétextant aux policiers et aux médecins présents qu’elle ne supporterait pas le choc. Et il n’avait peut-être pas eu tort étant donné que son état n’avait fait que se délabrer jusqu’à l’enterrement. Il avait réglé les papiers, lui avait indiqué où posé sa signature, lui expliquant ce qu’elle ne comprenait pas, la rassurant, la consolant quand elle se remettait à pleurer.
Le soir venu, et une fois que la mère de Séphy-Roshou fut endormie, ce qui ne se passa pas sans mal, Fury téléphona à nouveau à Mr.Magnum pour lui répéter ce que lui avait dit les autorités compétentes, à savoir que l’enterrement aurait lieu le mercredi suivant.
« Je posterai l’annonce demain… répondit Mr.Magnum. Tout va bien, pour toi ?
-Je tiens le coup… dit-il d’un ton qui se voulait neutre. Est-ce que… Est-ce que je peux compter sur ta présence le jour de l’enterrement ? »
Fury se souvint que la question avait engendré un silence de quelques secondes, et qu’il avait tout d’abord pensé que Magnum avait prit cette remarque comme un affront, ou comme une sorte d’irrespect envers la défunte. Il avait été prêt à s’expliquer quand son interlocuteur avait rompu le silence c’une voix émue :
« Je… Bien sûr, écoute… Je n’osais pas te le demander… Je ne la connaissais que très peu, mais je l’appréciais énormément… Je ne sais pas si c’était réciproque, mais…
-Elle ne m’a… m’avait jamais rien dit là-dessus, désolé… Tu penses pouvoir venir alors ? Satana aussi sera là.
-Je prendrais ma journée… Est-ce que je dois les prévenir de la date de l’enterrement, et du lieu ? »
À son tour, Fury avait eu un instant d’hésitation, et s’était demandé de qui Mr.Magnum parlait. Puis il avait réagi : « Ceux du forum ?
-Si jamais tu ne veux pas qu’ils soient présent, je ne dirais rien et…
-Non, dis-leur aussi ! L’interrompit-il. Si jamais ils peuvent venir, ils représenteront le plus bel hommage que la communauté pouvait lui offrir. »
Mr.Magnum avait acquiescé et il avait raccroché. S’il avait pu se douter que sa précipitation a mettre fin à la conversation était due à ses expériences qui les mèneraient tous dans ce restaurant, en début d’après-midi, il aurait certainement cherché à l’arrêter, à l’appeler, ou au moins à tenter de le convaincre… Mais il avait su tout ça le lendemain, et il n’avait pas eu la force de le faire.
Il avait été tellement abasourdi par l’idée de Mr.Magnum qu’il en avait perdu momentanément tous ses moyens, et il était maintenant trop tard pour faire demi-tour. Et peut-être avait-il raison : Son voyage paraissait insensé et sortit d’un roman de science-fiction, mais Fury s’était raccroché à cet espoir jusqu’à aujourd’hui, alors autant continuer à lui faire confiance encore un peu, ne serais-ce que pour entendre ses explications.
Fury sortit de sa rêverie et s’aperçut que les esprits s’étaient échauffés pendant qu’il se remémorait les quelques jours passés : Erwan était debout, penché en avant sur la table, les cheveux ébouriffés et le visage empourpré par la colère ou la rage, et il envoyait des bordées d’arguments plus hurlés que parlés. Satana, en face, croisait les bras en signe de dénégation et refusait même de regarder Erwan, ce qui mettait ce dernier encore plus en colère.
Arkh et Q-Po s’étaient levés et faisait mine de quitter la salle. Fury songea qu’il n’avait même pas remarqué l’arrivée de Q-Po, ni celle du groupe de membres du forum Manoir Compagnie, arrivés peu après. Ils étaient également tous venus : HoTaKu, Marvin, Daelith Mrakthas, jidé, Romuald Valkovitch, Dragoon24, Karigane, BLue et Terennie gentil papillon. Les plus influents et importants de son forum à elle.
Fury sentit Mr.Magnum se lever plus qu’il ne le vit, et le son puissant de sa voix résonna dans les oreilles de Fury. Au moins cette voix était-elle plus agréable que le lutin farceur.
« Arkh ! Reste au moins écouter mes explications !
-Pourquoi faire ? répondit l’intéressé. Je n’ai pas à perdre mon temps pour écouter un ramassis de foutaises enrobées d’une sauce science-fiction futuriste de série Z…
-Mais ce n’est pas qu’un amoncellement de conneries, Arkh ! s’insurgea DragonNoir. Sa thèse est intéressante, il nous faudrait simplement la tester pour...
-Pour quoi, DragonNoir ? répliqua Q-Po. Pour y rester ? Pour crever en tentant de voyager dans les limbes de l’au-delà ? Très peu pour moi. »
Arkh ouvrit la porte donnant sur la salle principale du restaurant. Q-Po enfila son long manteau de cuir, et salua l’assemblée présente : « Sur ces paroles, je vous tire ma révérence. » Squall se leva pour les arrêter, les réflexes de modérateurs prenant le dessus, mais Mr.Magnum l’arrêta d’un regard appuyé.
Draco calma Erwan qui s’assit, presque haletant, et Satana daigna reprendre une attitude moins agressive. Mr.Magnum posa ses deux poings serrés sur la table. Fury examina sans le vouloir les mains tremblantes de Mr.Magnum et se rendit compte que cette histoire le tenait vraiment à cœur. Plus encore que ce qu’il imaginait.
« Je ne vous retiens pas, messieurs, si vous voulez nous quitter, bien que j’aurais préféré que vous assistiez à la suite de mes explications, pour avoir une idée plus vaste de mon plan, si je peux me permettre de l’appeler ainsi…
-Ton ‘plan’ ? dit Arkh d’une voix dédaigneuse qu’on lui prêtais facilement. Le seul plan que j’imagine en écoutant tes élucubrations, est celui d’un suicide collectif à peine déguisé.
-Quelles preuves as-tu des possibilités de voyager dans la mort, Magnum ? »
La question invita l’assemblée au silence. Les regards se croisèrent, les yeux se toisèrent, et l’attention se déporta sur Mr.Magnum qui, toujours appuyé sur la table, gardait la tête baissé. K-Ro avait cessé de pleurer dans le giron de RazaëlAurélie, et fixait encore intensément Mr.Magnum, les yeux rougis par les larmes.
Fury voyait le visage de Mr.Magnum, un visage sérieux, concentré et pourtant serein. Comme s’il savait déjà que tout allait se dérouler ainsi : Les divergences d’opinion, les esclandres à la table, et tout le reste. Il cru même deviner un soupçon d’amusement, dans ses yeux fixés sur son verre vide. Sa bouche s’ouvrit alors qu’il relevait la tête :
« J’ai la preuve la plus incontestable qu’on puisse imaginer : Ce voyage au pays des morts… Dans l’un des pays des morts, devrais-je même dire, je l’ai fait. »
Il avait attendu leur arrivé pendant une dizaine de minutes en compagnie du gobelin affectueux et excité, qui ne cessait de lui remémorer des souvenirs de bonheur douloureux. Il n’avait pas pleuré, non, pas tout de suite. Jusqu’à onze heure et quart, passant outre les questions de la police, les pleurs de la mère de Séphy-Roshou, les bousculades, le gobelin mauvais, les sentiments, les souvenirs, il n’avait pas versé la moindre larme.
Et, curieusement, il avait demandé à un officier de police s’il avait le droit de passer un coup de fil. Le policier avait acquiescé à condition qu’il ne sorte pas de la maison, et Fury s’était en premier lieu dirigé vers la cuisine pour échapper au brouhaha du salon. Mais la mère de Séphy-Roshou pleurait à gros sanglots dans cette pièce, et il avait dû immigrer dans la chambre parentale afin d’être au calme.
Et là, il avait décroché le téléphone sans même savoir qui il allait appeler, et composé le numéro de Mr.Magnum qui était noté sur le portable de sa bien-aimée. Ton ex-bien-aimée, sombre crétin, martela la voix nasillarde dans son esprit, car elle est morte ! À moins que tu sois nécrophile, ha ha ! Alors dans ce cas, elle est là, dans la pièce à coté, dans un joli costume en sac poubelle… Si tu cherches bien, tu pourras peut-être même trouver la fermeture éclair de sa si belle robe, ha ha ha…
Au bout de deux sonneries, Mr.Magnum avait répondu. Son ‘Allô ?’ étonné grésilla et sembla se répercuter dans le combiné en une infinité de Allô stressant. Fury ravala sa salive devant cette voix inconnue et le salua avec politesse.
« Qui est-ce ? demanda Mr.Magnum. C’est le numéro d’une amie, vous vous n’êtes manifestement elle, ou alors tu as changé de sexe depuis la dernière fois où je t’ai parlé. »
Sa voix était joyeuse et plus claire maintenant que la friture avait cessé. Fury hésita deux secondes, le temps que son cerveau se demande s’il devait vraiment gâcher la journée d’un homme qui n’avait rien à voir avec elle, et qui respirait la bonne humeur. Mais, tout comme il s’était retrouvé entrain de composer le numéro d’une personne avec qui il n’avait jamais parlée autrement que par forum, il lui annonça la nouvelle :
« Séphy-Roshou est décédée. »
Sa voix était montée dans les aigus aux deux dernières syllabes et Fury s’était mordu le poing pour ne pas éclater en sanglots. Deux larmes avaient roulés sur ses pommettes avant de sauter sur son jean où ils explosèrent en silence, laissant deux ronds plus sombres sur la cuisse. Fury avait alors reprit sa respiration en haletant, mais Mr.Magnum le devança :
« Fury ? C’est toi ? Qu’est-il arrivé ? Qu’est-ce qui s’est passé ?
-Ils ne savent même pas, ces foutus médecins… » avait-il marmonné entre deux sanglots qui secouaient son corps en spasmes disgracieux. « Ils disent qu’elle est morte comme ça, et qu’on y peux rien, et que parfois ça arrive, c’est tout.
-Oh merde… avait lâché Mr.Magnum à des centaines de kilomètres de là. Je suis vraiment sincèrement désolé, Fury… Qu’est-ce que je peux faire pour toi, pour elle… Sa mère ! Comment va sa mère ? »
Mr.Magnum avait attendu patiemment que Fury reprenne son souffle. Il n’avait pas pleuré jusqu’à là, mais le fait d’annoncer la nouvelle, et de prononcer le mot ‘décédé’ avait déclenché le processus. Un processus difficile à arrêter.
« Elle est dans un état pire que le miens, comme tu peux t’en douter. Déjà, quand on oit la loque que je suis, pour le moment… » Fury renifla, et les larmes jaillirent à nouveau. Une fois la vanne ouverte, il était difficile de l’arrêter, et le gobelin prenait un plaisir manifeste à entretenir le flot continu.
« C’est normal que tu sois dans un tel état. » avait dit Mr.Magnum d’une voix calme et posée. La joie avait disparue de son ton pour laisser place à une sorte de note protectrice. Fury eu un instant l’impression d’entendre un grand frère lui parler. Penser à ça arriva à le calmer plus rapidement et à faire taire la voix.
« Je… Pour tout te dire, je ne sais pas pourquoi je t’appelle exactement… J’ai juste eu envie de t’appeler… J’ai été prendre ton numéro dans son portable sans trop savoir ce que je faisais, et voilà…
-Si je peux t’être utile, Fury je… » Il n’avait pas terminé sa phrase, préférant laisser le soin à Fury de lui dire ce dont il avait besoin en ce moment. Il n’avait d’ailleurs pas tardé à lui confier qu’il ne se sentait pas capable d’annoncer ça à tout le monde sur le forum…
« Même Satana n’est pas au courant ! avait-il déclaré, sentant les larmes revenir à l’assaut. Je ne l’ai pas appelé, mais je le ferais… Pas tout de suite…
-Ne t’inquiète pas, je me charge de faire l’annonce sur Traumen. Je… Je le ferais demain, pour être précis. Quand a lieu l’enterrement ? »
Fury avait ravalé un sanglot, puis avoué qu’il l’ignorait. C’était trop tôt. Ils avaient encore parlé quelques minutes, et ils avaient raccrochés. Fury s’était sentit mieux, malgré tout, après cette discussion. Le fait d’avoir partagé sa peine avec un autre lui avait semblé alléger ses épaules. Il avait aussi reprit le contrôle de lui-même.
Le reste de la journée, il l’avait passé à soutenir moralement la mère de Séphy-Roshou, qui tenait bien mal le coup et n’arrivait pas, encore à l’heure actuelle, à se remettre du décès de sa fille. Elle n’avait cessé de pleurer, de gémir, et était même passée dans une phase de quasi-démence lorsqu’elle s’était mise à l’appeler dans toute la maison, une fois les policiers repartis et le corps emporté.
Fury avait refusé qu’elle accompagne sa fille à la morgue, prétextant aux policiers et aux médecins présents qu’elle ne supporterait pas le choc. Et il n’avait peut-être pas eu tort étant donné que son état n’avait fait que se délabrer jusqu’à l’enterrement. Il avait réglé les papiers, lui avait indiqué où posé sa signature, lui expliquant ce qu’elle ne comprenait pas, la rassurant, la consolant quand elle se remettait à pleurer.
Le soir venu, et une fois que la mère de Séphy-Roshou fut endormie, ce qui ne se passa pas sans mal, Fury téléphona à nouveau à Mr.Magnum pour lui répéter ce que lui avait dit les autorités compétentes, à savoir que l’enterrement aurait lieu le mercredi suivant.
« Je posterai l’annonce demain… répondit Mr.Magnum. Tout va bien, pour toi ?
-Je tiens le coup… dit-il d’un ton qui se voulait neutre. Est-ce que… Est-ce que je peux compter sur ta présence le jour de l’enterrement ? »
Fury se souvint que la question avait engendré un silence de quelques secondes, et qu’il avait tout d’abord pensé que Magnum avait prit cette remarque comme un affront, ou comme une sorte d’irrespect envers la défunte. Il avait été prêt à s’expliquer quand son interlocuteur avait rompu le silence c’une voix émue :
« Je… Bien sûr, écoute… Je n’osais pas te le demander… Je ne la connaissais que très peu, mais je l’appréciais énormément… Je ne sais pas si c’était réciproque, mais…
-Elle ne m’a… m’avait jamais rien dit là-dessus, désolé… Tu penses pouvoir venir alors ? Satana aussi sera là.
-Je prendrais ma journée… Est-ce que je dois les prévenir de la date de l’enterrement, et du lieu ? »
À son tour, Fury avait eu un instant d’hésitation, et s’était demandé de qui Mr.Magnum parlait. Puis il avait réagi : « Ceux du forum ?
-Si jamais tu ne veux pas qu’ils soient présent, je ne dirais rien et…
-Non, dis-leur aussi ! L’interrompit-il. Si jamais ils peuvent venir, ils représenteront le plus bel hommage que la communauté pouvait lui offrir. »
Mr.Magnum avait acquiescé et il avait raccroché. S’il avait pu se douter que sa précipitation a mettre fin à la conversation était due à ses expériences qui les mèneraient tous dans ce restaurant, en début d’après-midi, il aurait certainement cherché à l’arrêter, à l’appeler, ou au moins à tenter de le convaincre… Mais il avait su tout ça le lendemain, et il n’avait pas eu la force de le faire.
Il avait été tellement abasourdi par l’idée de Mr.Magnum qu’il en avait perdu momentanément tous ses moyens, et il était maintenant trop tard pour faire demi-tour. Et peut-être avait-il raison : Son voyage paraissait insensé et sortit d’un roman de science-fiction, mais Fury s’était raccroché à cet espoir jusqu’à aujourd’hui, alors autant continuer à lui faire confiance encore un peu, ne serais-ce que pour entendre ses explications.
Fury sortit de sa rêverie et s’aperçut que les esprits s’étaient échauffés pendant qu’il se remémorait les quelques jours passés : Erwan était debout, penché en avant sur la table, les cheveux ébouriffés et le visage empourpré par la colère ou la rage, et il envoyait des bordées d’arguments plus hurlés que parlés. Satana, en face, croisait les bras en signe de dénégation et refusait même de regarder Erwan, ce qui mettait ce dernier encore plus en colère.
Arkh et Q-Po s’étaient levés et faisait mine de quitter la salle. Fury songea qu’il n’avait même pas remarqué l’arrivée de Q-Po, ni celle du groupe de membres du forum Manoir Compagnie, arrivés peu après. Ils étaient également tous venus : HoTaKu, Marvin, Daelith Mrakthas, jidé, Romuald Valkovitch, Dragoon24, Karigane, BLue et Terennie gentil papillon. Les plus influents et importants de son forum à elle.
Fury sentit Mr.Magnum se lever plus qu’il ne le vit, et le son puissant de sa voix résonna dans les oreilles de Fury. Au moins cette voix était-elle plus agréable que le lutin farceur.
« Arkh ! Reste au moins écouter mes explications !
-Pourquoi faire ? répondit l’intéressé. Je n’ai pas à perdre mon temps pour écouter un ramassis de foutaises enrobées d’une sauce science-fiction futuriste de série Z…
-Mais ce n’est pas qu’un amoncellement de conneries, Arkh ! s’insurgea DragonNoir. Sa thèse est intéressante, il nous faudrait simplement la tester pour...
-Pour quoi, DragonNoir ? répliqua Q-Po. Pour y rester ? Pour crever en tentant de voyager dans les limbes de l’au-delà ? Très peu pour moi. »
Arkh ouvrit la porte donnant sur la salle principale du restaurant. Q-Po enfila son long manteau de cuir, et salua l’assemblée présente : « Sur ces paroles, je vous tire ma révérence. » Squall se leva pour les arrêter, les réflexes de modérateurs prenant le dessus, mais Mr.Magnum l’arrêta d’un regard appuyé.
Draco calma Erwan qui s’assit, presque haletant, et Satana daigna reprendre une attitude moins agressive. Mr.Magnum posa ses deux poings serrés sur la table. Fury examina sans le vouloir les mains tremblantes de Mr.Magnum et se rendit compte que cette histoire le tenait vraiment à cœur. Plus encore que ce qu’il imaginait.
« Je ne vous retiens pas, messieurs, si vous voulez nous quitter, bien que j’aurais préféré que vous assistiez à la suite de mes explications, pour avoir une idée plus vaste de mon plan, si je peux me permettre de l’appeler ainsi…
-Ton ‘plan’ ? dit Arkh d’une voix dédaigneuse qu’on lui prêtais facilement. Le seul plan que j’imagine en écoutant tes élucubrations, est celui d’un suicide collectif à peine déguisé.
-Quelles preuves as-tu des possibilités de voyager dans la mort, Magnum ? »
La question invita l’assemblée au silence. Les regards se croisèrent, les yeux se toisèrent, et l’attention se déporta sur Mr.Magnum qui, toujours appuyé sur la table, gardait la tête baissé. K-Ro avait cessé de pleurer dans le giron de RazaëlAurélie, et fixait encore intensément Mr.Magnum, les yeux rougis par les larmes.
Fury voyait le visage de Mr.Magnum, un visage sérieux, concentré et pourtant serein. Comme s’il savait déjà que tout allait se dérouler ainsi : Les divergences d’opinion, les esclandres à la table, et tout le reste. Il cru même deviner un soupçon d’amusement, dans ses yeux fixés sur son verre vide. Sa bouche s’ouvrit alors qu’il relevait la tête :
« J’ai la preuve la plus incontestable qu’on puisse imaginer : Ce voyage au pays des morts… Dans l’un des pays des morts, devrais-je même dire, je l’ai fait. »
Mr.Magnum- Enorme floodeur
- Nombre de messages : 2475
Age : 42
Localisation : Dans les limbes torturées d'un esprit dérangé.
Date d'inscription : 18/01/2005
Re: Traumenschar
(partie 1)
4. Espoir ou Utopie ?
Tout le monde avait repris sa place, et les plats avaient été servis. Claire avait fait le service accompagné d’une jeune femme d’une vingtaine d’années, et ça dans le calme le plus total. La dernière remarque avait fait son petit effet, et personne ne disait plus rien maintenant que les assiettes chaudes avaient été disposées devant chaque membre.
Atsuo était arrivé au moment où Arkh et Q-Po refermaient la porte de la pièce, et avait pris sa place près de Radamenthe sans un mot. Soulblighter, à sa gauche, lui avait expliqué en résumant ce qu’avait dit Mr.Magnum depuis le début, c'est-à-dire presque rien, mis à part ses derniers mots.
Arkh et Q-Po avaient rejoins leurs places respectives, sans rien dire, se sentant obligés d’assister à la fin de la ‘conférence’. Et peut-être curieux, aussi. Tout les autres mangeaient succinctement, sans réelle envie ni vraie faim, jouant avec leur fourchette ou examinant attentivement leur verre d’eau.
Mr.Magnum avait gardé le silence après cette ultime déclaration, et rechignait à avaler sa côte de bœuf qu’il avait commandé. Comme l’avait pensé Fury quelques instants plus tôt, alors que la tempête de la discorde faisait rage dans le restaurant, Mr.Magnum était confiant et riait intérieurement de devoir se chamailler pour défendre son opinion. Les débats et autres joutes d’idées étaient la moelle des forums, et Traumen n’y faisait pas exception.
Mais après ces quelques minutes de silence pesant, sa confiance et son assurance avaient pliés bagage, laissant place à une sorte de trac maladif qui avait emménagé dans son esprit et y avait prit ses aises avec une facilité déconcertante. Les questions tournaient dans sa tête comme un manège dont les chevaux seraient des incertitudes et les enfants des craintes débordantes. Ses mains tremblaient en tenant son couteau.
Ce n’est peut-être pas une si bonne idée que ça ? disait une voix. Fury aurait été étonné d’entendre cette voix et de noter qu’elle avait les mêmes intonations et le même ton railleur que celle de son lutin aigri. Et si c’était Satana, Arkh ou Q-Po qui avaient raison ? Si ton idée était insensée et ne révélait qu’une folie sortie de ton esprit dérangé ? Si tu ne cherchais que la reconnaissance de tes pairs Traumatiques via cette réunion, comme le pense K-Ro ?
Mr.Magnum chassa de nouveau ces funestes pensées et essaya de recadrer ses esprits. Il picora rapidement dans sa viande pourtant saignante et appétissante, puis mis un petit morceau en bouche avant de le mastiquer pensivement. Puis, sans crier gare ni prévenir de quelque façon que ce soit, il entama son long monologue qui n’allait pas être interrompu jusqu’à ce qu’il en ait terminé.
Il pris une profonde inspiration, et commença son récit en regardant son assiette, plongé dans les pensées et souvenirs des quelques jours en arrière. Il se revit avant le coup de téléphone, avant qu’il ne commence ses recherches, avant qu’il ne meure une première fois… Et il se surprit à penser : Comme ma vie était ennuyeuse, avant. Même si j’étais persuadé de m’amuser, de me divertir, de m’instruire, en fait, je ne faisais que passer le temps.
Puis une autre pensée s’imposa à lui : Je ne faisais qu’attendre ce moment. Cet évènement. La voix qui lui disait ceci était la sienne, et non celle du gobelin perfide qui claironnait des inepties dans sa tête de temps à autre. Il releva la tête et s’aperçut qu’il avait la bouche ouverte, prête à parler, depuis maintenant quelques minutes. Et tous le regardait, impatients mais silencieux, curieux mais immobiles, attendant ses paroles comme un une plante verte attends de l’eau en pleine canicule.
Maintenant, il est temps, songea-t-il. Et il reprit son récit :
« Je continue mon histoire là où nous nous étions arrêtés quand Arkh a décidé de nous quitter, si vous le voulez bien. Si mes souvenirs sont bons, je vous parlais du coup de fil de Fury le soir du pire dimanche de ma vie, c’est bien ça ? »
La plupart des personnes acquiescèrent silencieusement, délaissant leur repas pour suivre le discours qui s’annonçait. Mr.Magnum hocha la tête, bu une gorgée d’eau, et poursuivit, la tête penchée en avant.
« Après le coup de téléphone de Fury, le premier je parle, en fin de matinée, je ne me rappelle plus bien ce que j’ai fait. Mes pensées me fuyaient lorsque je tentais de les attraper, et je sentais pourtant qu’une fois saisies, classées et assemblées, elles me donneraient une sorte de solution. Une idée générale à laquelle me raccrocher. Mais il était encore trop tôt pour ça.
Je suis donc resté sur mon lit, inerte physiquement et mentalement, à tenter vainement d’analyser une situation qui me dépassait. Ma mère m’a appelé pour déjeuner vers treize heures, donc plus d’une heure après la fin du coup de téléphone, et je n’ai que des vagues souvenirs brouillés de cette heure. J’ai ouvert la porte à ma mère et lui ait donné une excuse pour couper au repas, et je suis retourné m’allonger.
J’avais envie de poster tout de suite l’annonce sur Traumen et Manoir Compagnie, son forum à elle et Fury, mais je lui avais promis de ne le faire que le lendemain. Puis, soudainement, comme ça, une idée m’est apparue.
Elle avait l’air idiote, au départ.
J’ai esquissé un sourire moqueur à son adresse. J’avais certainement l’air d’un parfait imbécile, allongé dans ma chambre, les mains derrière la tête et les yeux clos, un immense sourire vissé au visage. Y penser a commence à me faire glousser. L’ironie de la situation ; Rire alors que Séphy-Roshou était morte ; me fit éclater de rire encore plus fort. Il me fallut quelques minutes pour m’en remettre, je ne le vous cache pas.
Mais l’idée était toujours là, et même plus présente que jamais. Je me mis alors à l’analyser. Cette idée me suggérait d’aller chercher Séphy-Roshou dans les territoires des morts. Vous comprenez mon hilarité, ma réaction quelque peu saugrenue identique à la votre lorsque je vous ai annoncé la teneur de ma pensée…
Mais au lieu de s’estomper comme la plupart des raisonnements farfelus qui germent de temps à autre dans ma cervelle, celle-ci n’a fait que s’accentuer, se développer pour finalement se concrétiser. J’ai passé la majeure partie de l’après-midi à faire des recherches sur le Net et dans les livres de mon père sur les différentes expériences du pays de morts selon les religions, les mythes et les peuplades.
J’étais en pleine transe lorsque Fury m’a appelé le soir pour me donner les renseignements à divulguer sur le lieu et la date de l’enterrement. J’ai tout griffonné sur un bout de papier, mais j’étais encore trop absorbé par mes recherches pour discuter plus longuement avec lui. D’ailleurs, j’en profite pour m’excuser d’avoir abrégé si rapidement la conversation téléphonique, Fury… »
À l’évocation de son pseudo/nom, Fury hocha la tête. Tout le monde le dévisagea en pensant qu’il devait être en proie à des souvenirs douloureux, mais personne ne pouvait imaginer qu’il se débattait simplement avec la voix de la raison, la voix de la vérité. Son petit gobelin malfaisant qui ne cessait de parler.
Mr.Magnum fit craquer son dos, puis ses doigts, coupa un morceau de viande et le mâcha goulûment. L’appétit lui revenait peu à peu au fur et à mesure où il parlait, et se libérait des explications qu’il leur devait. Leurs réactions étaient mitigés : Certains étaient captivés par l’histoire, d’autres écoutaient d’une oreille distraite, mais tous suivaient malgré tout le récit, sans en perdre une miette.
Les assiettes, encore chaudes pour la plupart, se vidaient doucement, mais ce n’était pas là la priorité. Mr.Magnum le savait : Ils attendaient la suite. Une réponse aux questions soulevés par sa phrase : Je l’ai fait. Il inspira tout l’air qu’il pu, puis souffla sans un bruit, les yeux clos. Il n’avait plus peur, maintenant, le plus dur était fait.
4. Espoir ou Utopie ?
Tout le monde avait repris sa place, et les plats avaient été servis. Claire avait fait le service accompagné d’une jeune femme d’une vingtaine d’années, et ça dans le calme le plus total. La dernière remarque avait fait son petit effet, et personne ne disait plus rien maintenant que les assiettes chaudes avaient été disposées devant chaque membre.
Atsuo était arrivé au moment où Arkh et Q-Po refermaient la porte de la pièce, et avait pris sa place près de Radamenthe sans un mot. Soulblighter, à sa gauche, lui avait expliqué en résumant ce qu’avait dit Mr.Magnum depuis le début, c'est-à-dire presque rien, mis à part ses derniers mots.
Arkh et Q-Po avaient rejoins leurs places respectives, sans rien dire, se sentant obligés d’assister à la fin de la ‘conférence’. Et peut-être curieux, aussi. Tout les autres mangeaient succinctement, sans réelle envie ni vraie faim, jouant avec leur fourchette ou examinant attentivement leur verre d’eau.
Mr.Magnum avait gardé le silence après cette ultime déclaration, et rechignait à avaler sa côte de bœuf qu’il avait commandé. Comme l’avait pensé Fury quelques instants plus tôt, alors que la tempête de la discorde faisait rage dans le restaurant, Mr.Magnum était confiant et riait intérieurement de devoir se chamailler pour défendre son opinion. Les débats et autres joutes d’idées étaient la moelle des forums, et Traumen n’y faisait pas exception.
Mais après ces quelques minutes de silence pesant, sa confiance et son assurance avaient pliés bagage, laissant place à une sorte de trac maladif qui avait emménagé dans son esprit et y avait prit ses aises avec une facilité déconcertante. Les questions tournaient dans sa tête comme un manège dont les chevaux seraient des incertitudes et les enfants des craintes débordantes. Ses mains tremblaient en tenant son couteau.
Ce n’est peut-être pas une si bonne idée que ça ? disait une voix. Fury aurait été étonné d’entendre cette voix et de noter qu’elle avait les mêmes intonations et le même ton railleur que celle de son lutin aigri. Et si c’était Satana, Arkh ou Q-Po qui avaient raison ? Si ton idée était insensée et ne révélait qu’une folie sortie de ton esprit dérangé ? Si tu ne cherchais que la reconnaissance de tes pairs Traumatiques via cette réunion, comme le pense K-Ro ?
Mr.Magnum chassa de nouveau ces funestes pensées et essaya de recadrer ses esprits. Il picora rapidement dans sa viande pourtant saignante et appétissante, puis mis un petit morceau en bouche avant de le mastiquer pensivement. Puis, sans crier gare ni prévenir de quelque façon que ce soit, il entama son long monologue qui n’allait pas être interrompu jusqu’à ce qu’il en ait terminé.
Il pris une profonde inspiration, et commença son récit en regardant son assiette, plongé dans les pensées et souvenirs des quelques jours en arrière. Il se revit avant le coup de téléphone, avant qu’il ne commence ses recherches, avant qu’il ne meure une première fois… Et il se surprit à penser : Comme ma vie était ennuyeuse, avant. Même si j’étais persuadé de m’amuser, de me divertir, de m’instruire, en fait, je ne faisais que passer le temps.
Puis une autre pensée s’imposa à lui : Je ne faisais qu’attendre ce moment. Cet évènement. La voix qui lui disait ceci était la sienne, et non celle du gobelin perfide qui claironnait des inepties dans sa tête de temps à autre. Il releva la tête et s’aperçut qu’il avait la bouche ouverte, prête à parler, depuis maintenant quelques minutes. Et tous le regardait, impatients mais silencieux, curieux mais immobiles, attendant ses paroles comme un une plante verte attends de l’eau en pleine canicule.
Maintenant, il est temps, songea-t-il. Et il reprit son récit :
« Je continue mon histoire là où nous nous étions arrêtés quand Arkh a décidé de nous quitter, si vous le voulez bien. Si mes souvenirs sont bons, je vous parlais du coup de fil de Fury le soir du pire dimanche de ma vie, c’est bien ça ? »
La plupart des personnes acquiescèrent silencieusement, délaissant leur repas pour suivre le discours qui s’annonçait. Mr.Magnum hocha la tête, bu une gorgée d’eau, et poursuivit, la tête penchée en avant.
« Après le coup de téléphone de Fury, le premier je parle, en fin de matinée, je ne me rappelle plus bien ce que j’ai fait. Mes pensées me fuyaient lorsque je tentais de les attraper, et je sentais pourtant qu’une fois saisies, classées et assemblées, elles me donneraient une sorte de solution. Une idée générale à laquelle me raccrocher. Mais il était encore trop tôt pour ça.
Je suis donc resté sur mon lit, inerte physiquement et mentalement, à tenter vainement d’analyser une situation qui me dépassait. Ma mère m’a appelé pour déjeuner vers treize heures, donc plus d’une heure après la fin du coup de téléphone, et je n’ai que des vagues souvenirs brouillés de cette heure. J’ai ouvert la porte à ma mère et lui ait donné une excuse pour couper au repas, et je suis retourné m’allonger.
J’avais envie de poster tout de suite l’annonce sur Traumen et Manoir Compagnie, son forum à elle et Fury, mais je lui avais promis de ne le faire que le lendemain. Puis, soudainement, comme ça, une idée m’est apparue.
Elle avait l’air idiote, au départ.
J’ai esquissé un sourire moqueur à son adresse. J’avais certainement l’air d’un parfait imbécile, allongé dans ma chambre, les mains derrière la tête et les yeux clos, un immense sourire vissé au visage. Y penser a commence à me faire glousser. L’ironie de la situation ; Rire alors que Séphy-Roshou était morte ; me fit éclater de rire encore plus fort. Il me fallut quelques minutes pour m’en remettre, je ne le vous cache pas.
Mais l’idée était toujours là, et même plus présente que jamais. Je me mis alors à l’analyser. Cette idée me suggérait d’aller chercher Séphy-Roshou dans les territoires des morts. Vous comprenez mon hilarité, ma réaction quelque peu saugrenue identique à la votre lorsque je vous ai annoncé la teneur de ma pensée…
Mais au lieu de s’estomper comme la plupart des raisonnements farfelus qui germent de temps à autre dans ma cervelle, celle-ci n’a fait que s’accentuer, se développer pour finalement se concrétiser. J’ai passé la majeure partie de l’après-midi à faire des recherches sur le Net et dans les livres de mon père sur les différentes expériences du pays de morts selon les religions, les mythes et les peuplades.
J’étais en pleine transe lorsque Fury m’a appelé le soir pour me donner les renseignements à divulguer sur le lieu et la date de l’enterrement. J’ai tout griffonné sur un bout de papier, mais j’étais encore trop absorbé par mes recherches pour discuter plus longuement avec lui. D’ailleurs, j’en profite pour m’excuser d’avoir abrégé si rapidement la conversation téléphonique, Fury… »
À l’évocation de son pseudo/nom, Fury hocha la tête. Tout le monde le dévisagea en pensant qu’il devait être en proie à des souvenirs douloureux, mais personne ne pouvait imaginer qu’il se débattait simplement avec la voix de la raison, la voix de la vérité. Son petit gobelin malfaisant qui ne cessait de parler.
Mr.Magnum fit craquer son dos, puis ses doigts, coupa un morceau de viande et le mâcha goulûment. L’appétit lui revenait peu à peu au fur et à mesure où il parlait, et se libérait des explications qu’il leur devait. Leurs réactions étaient mitigés : Certains étaient captivés par l’histoire, d’autres écoutaient d’une oreille distraite, mais tous suivaient malgré tout le récit, sans en perdre une miette.
Les assiettes, encore chaudes pour la plupart, se vidaient doucement, mais ce n’était pas là la priorité. Mr.Magnum le savait : Ils attendaient la suite. Une réponse aux questions soulevés par sa phrase : Je l’ai fait. Il inspira tout l’air qu’il pu, puis souffla sans un bruit, les yeux clos. Il n’avait plus peur, maintenant, le plus dur était fait.
Mr.Magnum- Enorme floodeur
- Nombre de messages : 2475
Age : 42
Localisation : Dans les limbes torturées d'un esprit dérangé.
Date d'inscription : 18/01/2005
Re: Traumenschar
(partie 2)
« À peine raccroché, je m’y suis remis. Ceux qui m’ont en tant que contact sur MSN ont d’ailleurs peut-être remarqués que j’étais en statut ‘occupé’ pendant toute la nuit, et une partie du lendemain matin. Je n’ai pas dormis cette nuit là, et je n’ai pas arrêté d’accumuler les documents et autres écrits de la nuit. En fait, si, j’ai cessé de travailler là-dessus pendant une dizaine de minutes, le dimanche soir vers neuf heures, le temps d’appeler mon chef en lui disant que je prenais ma semaine. Ce qui avait été le plus long : Le convaincre que c’était pas une blague de ma part et que je ne viendrais pas.
Ensuite, j’ai naviguer, écrit, dessiné, imprimé pendant des heures. Ma mère m’a fournis en café jusqu’à minuit, puis elle est allée se coucher, et j’ai continué seul. J’ai préféré aller dormir de moi-même, à un moment donné le lundi matin, car je n’arrivais plus à comprendre ce que je lisais. J’ai alors mis mes papiers de coté, j’ai posté le fameux topic sur le décès de Séphy-Roshou, celui- que vous avez tous lu, et je suis allé me reposer. »
Mr.Magnum prit une nouvelle gorgée de son verre, la laissa couler dans sa gorge devenue chaude d’avoir tant parlé, puis vida son eau d’un trait. Erwan le resservit et Mr.Magnum murmura un remerciement en prenant une autre bouchée de viande.
« Vous avez été nombreux à envoyer des posts de soutient, des messages de condoléances et autres… Et ça en peu de temps… Si vous vous rappelez bien, pour ceux, du moins, qui ont vu la toute première annonce, je n’avais fait que transmettre les grandes lignes : Lieu et date de l’enterrement, cause du décès etc. Je n’avais pas encore mis au poins cette réunion, celle où vous vous trouvez tous ici et maintenant.
Et pour cause : Je n’avais rien d’autre que de simples théorie et aucune pratique sur l’envol… Je m’étais donc tout d’abord contenté de poster un avis de décès, tout simple, et avait poursuivit mes recherches après avoir dormis plus de sept heures. À mon réveil, c’était la fin de l’après-midi, et il pleuvait à verse. J’avais certainement eu un sommeil agité, car nombre de mes papiers gisaient sur le sol, glissé ça et là sur le parquet. J’ai commencé à les ramasser, et puis j’ai eu un éclair.
La théorie.
Là était tout le problème. À quoi servaient ces monceaux de feuilles qui n’expliquaient la chose qu’en théorie. Est-ce que ces piles de paperasse allaient sauver Séphy-Roshou ? Est-ce que la théorie pouvait quoi que ce soit ? Non, non et encore non. La réponse me sautait pourtant aux yeux, mais je me refusais à l’utiliser. Trop dangereux. J’ai dû rester ainsi courbé, mes feuilles à la main, pendant peut-être deux ou trois minutes, puis j’ai pris ma décision.
J’ai lâché la théorie et me suis allongé sur mon lit. Je me souvenais de toutes les expériences et autres témoignages de voyages astraux que j’avais recueilli sur le Net. À chaque fois, les gens parlaient de calme et de maîtrise de soi, de la respiration. J’ai commencé à me détendre, à fermer les yeux, et… »
Mr.Magnum poussa un long soupir et se resservit un nouveau verre d’eau. Il en but une gorgée, et le reposa, songeur. Puis il leva les yeux, parcouru l’assemblée et haussa les épaules en signe d’impuissance.
« C’est impossible à décrire, mais le fait est que je suis en quelque sorte sortit de mon corps. Ne riez pas, c’est la stricte vérité. J’étais dans une autre chambre, d’un style plus ancien, démodé. En même temps, elle ressemblait à ma chambre, mais ce n’était pas elle. Je ne saurais pas comment vous l’expliquer, mais je n’étais plus chez moi.
Je me suis levé, et je me suis aperçu que je portais un costume noir, des gants noirs, une cravate noire comme mon personnage sur Traumen. J’étais devenu monsieur Magnum, mon invention, mon jumeau virtuel. Je me redécouvrais plus grand, plus souple, plus fort, plus musclé, plus… » Il hésita un instant. « Plus tout, en fait.
Beaucoup de personnes pensent qu’au pays des morts, dans l’au-delà, les représentations spectrales des êtres et des âmes correspondent à ce que les gens veulent bien voir. Lorsqu’on meurt vieux, je suppose qu’en pénétrant au Paradis ; si Paradis il y a mais là n’est pas le débat ; nous ne nous retrouvons pas dans une enveloppe fantomatique de vieillard arthritique et en fauteuil roulant. Nous nous représentons en pleine forme, à vingt ou trente ans, dans la force de l’âge.
Nos parents verront notre âme dans une réplique de leur choix : En enfant ou en adulte, selon leurs désirs. Plus tard, nos enfants nous verront comme ils le veulent eux aussi, en tant que parents, et nos petits-enfants en tant de grands-pères et grands-mères, et ainsi de suite. Là, je me suis représenté en tant que monsieur Magnum, certainement en y pensant très fort au moment de l’envol. Et voilà en quoi je me suis retrouvé.
J’ai déambulé dans ma chambre, sans but, n’osant pas toucher les meubles ou frôler les murs. Je marchais pourtant, sentant le sol sous mes pieds, déplaçant de l’air à mon passage. Simplement, je n’étais qu’un fantôme, un esprit sans corps. Mue d’une envie subite et presque instinctive, je me suis baissé et j’ai chiffonné une lettre de ma banque qui traînait sur le sol. Le papier ne résista pas et termina en boule sur mon lit.
Je pouvais donc interagir avec le véritable monde, celui où je vivais depuis des années. Je résistais à l’envie de sauter de joie, et continua mes tentatives : J’allumais et éteignais la télévision, j’ai ouvert et fermé une boîte de cd, sans peine. Je repensais au film Ghost avec Demi Moore et songeait que Swayze avait tout faux en voulant bouger la canette dans le métro en luttant par la pensée. Il suffisait d’agir comme d’habitude, sans se débattre inutilement avec le fait que nous étions un spectre.
Mon corps physique était toujours sur le lit, inerte. Je l’ai observé un moment, notant les imperfections qu’on ne remarque pas lorsqu’on dirige ce corps, et connaissant aussi parfaitement les défauts cachés qu’on ne voyait pas de l’extérieur. Je m’examinais, en riant intérieurement, jubilant de la réussite de mon expérience. J’avais sauté la théorie et jugée la pratique. Le résultat était concluant.
Je ne suis resté que quelques minutes dans cette réalité alternative. Je n’avais pas pensé à quelque chose en particulier, ni fait un rituel spécial pour partir. C’était de la concentration pure et simple. Et j’étais rassuré. J’ai réintégré mon corps en m’allongeant sur lui, ne sachant à la fois pas du tout et parfaitement ce que je faisais. La seconde d’après, je sortais de ma transe comme d’un cauchemar horrible : Sueurs froides, vertiges, nausée, et extrême fatigue.
De plus, il était tard. J’avais eu l’impression de n’être parti que quelques minutes, mais je remarquais que mon réveil indiquait minuit passé. Plusieurs heures s’étaient donc écoulées durant ce voyage. Et si j’avais rêvé ? Me suis-je demandé. C’était une possibilité. Et très probable, même. Légèrement décourage, je me suis assis sur mon lit.
Sur la lettre froissée de la banque. »
Mr.Magnum s’arrêta sur ces paroles et laissa la patronne débarrasser la table. C’était la dernière ligne droite maintenant. Il attendit que la serveuse parte avec les derniers plats pour reprendre, un sourire aux lèvres : « Après ça, je me suis contenté d’approfondir mes recherches et rien de plus. Je me suis reposé, j’ai repris des forces, et j’ai imaginé cette réunion. J’ai modifié le post de départ sur le topic du décès de Séphy-Roshou, afin d’y inclure le rendez-vous, et voilà le résultat. Vous êtes tous là. »
Mr.Magnum poussa un immense soupir approbateur, accompagné d’autres membres qui avaient ingurgité l’histoire sans mot dire. Les deux femmes revinrent avec les cartes des desserts qu’ils disposèrent devant chaque personne. Un brouhaha léger de conversation reprit, comme si la fin toute proche du récit descellait les lèvres.
« À peine raccroché, je m’y suis remis. Ceux qui m’ont en tant que contact sur MSN ont d’ailleurs peut-être remarqués que j’étais en statut ‘occupé’ pendant toute la nuit, et une partie du lendemain matin. Je n’ai pas dormis cette nuit là, et je n’ai pas arrêté d’accumuler les documents et autres écrits de la nuit. En fait, si, j’ai cessé de travailler là-dessus pendant une dizaine de minutes, le dimanche soir vers neuf heures, le temps d’appeler mon chef en lui disant que je prenais ma semaine. Ce qui avait été le plus long : Le convaincre que c’était pas une blague de ma part et que je ne viendrais pas.
Ensuite, j’ai naviguer, écrit, dessiné, imprimé pendant des heures. Ma mère m’a fournis en café jusqu’à minuit, puis elle est allée se coucher, et j’ai continué seul. J’ai préféré aller dormir de moi-même, à un moment donné le lundi matin, car je n’arrivais plus à comprendre ce que je lisais. J’ai alors mis mes papiers de coté, j’ai posté le fameux topic sur le décès de Séphy-Roshou, celui- que vous avez tous lu, et je suis allé me reposer. »
Mr.Magnum prit une nouvelle gorgée de son verre, la laissa couler dans sa gorge devenue chaude d’avoir tant parlé, puis vida son eau d’un trait. Erwan le resservit et Mr.Magnum murmura un remerciement en prenant une autre bouchée de viande.
« Vous avez été nombreux à envoyer des posts de soutient, des messages de condoléances et autres… Et ça en peu de temps… Si vous vous rappelez bien, pour ceux, du moins, qui ont vu la toute première annonce, je n’avais fait que transmettre les grandes lignes : Lieu et date de l’enterrement, cause du décès etc. Je n’avais pas encore mis au poins cette réunion, celle où vous vous trouvez tous ici et maintenant.
Et pour cause : Je n’avais rien d’autre que de simples théorie et aucune pratique sur l’envol… Je m’étais donc tout d’abord contenté de poster un avis de décès, tout simple, et avait poursuivit mes recherches après avoir dormis plus de sept heures. À mon réveil, c’était la fin de l’après-midi, et il pleuvait à verse. J’avais certainement eu un sommeil agité, car nombre de mes papiers gisaient sur le sol, glissé ça et là sur le parquet. J’ai commencé à les ramasser, et puis j’ai eu un éclair.
La théorie.
Là était tout le problème. À quoi servaient ces monceaux de feuilles qui n’expliquaient la chose qu’en théorie. Est-ce que ces piles de paperasse allaient sauver Séphy-Roshou ? Est-ce que la théorie pouvait quoi que ce soit ? Non, non et encore non. La réponse me sautait pourtant aux yeux, mais je me refusais à l’utiliser. Trop dangereux. J’ai dû rester ainsi courbé, mes feuilles à la main, pendant peut-être deux ou trois minutes, puis j’ai pris ma décision.
J’ai lâché la théorie et me suis allongé sur mon lit. Je me souvenais de toutes les expériences et autres témoignages de voyages astraux que j’avais recueilli sur le Net. À chaque fois, les gens parlaient de calme et de maîtrise de soi, de la respiration. J’ai commencé à me détendre, à fermer les yeux, et… »
Mr.Magnum poussa un long soupir et se resservit un nouveau verre d’eau. Il en but une gorgée, et le reposa, songeur. Puis il leva les yeux, parcouru l’assemblée et haussa les épaules en signe d’impuissance.
« C’est impossible à décrire, mais le fait est que je suis en quelque sorte sortit de mon corps. Ne riez pas, c’est la stricte vérité. J’étais dans une autre chambre, d’un style plus ancien, démodé. En même temps, elle ressemblait à ma chambre, mais ce n’était pas elle. Je ne saurais pas comment vous l’expliquer, mais je n’étais plus chez moi.
Je me suis levé, et je me suis aperçu que je portais un costume noir, des gants noirs, une cravate noire comme mon personnage sur Traumen. J’étais devenu monsieur Magnum, mon invention, mon jumeau virtuel. Je me redécouvrais plus grand, plus souple, plus fort, plus musclé, plus… » Il hésita un instant. « Plus tout, en fait.
Beaucoup de personnes pensent qu’au pays des morts, dans l’au-delà, les représentations spectrales des êtres et des âmes correspondent à ce que les gens veulent bien voir. Lorsqu’on meurt vieux, je suppose qu’en pénétrant au Paradis ; si Paradis il y a mais là n’est pas le débat ; nous ne nous retrouvons pas dans une enveloppe fantomatique de vieillard arthritique et en fauteuil roulant. Nous nous représentons en pleine forme, à vingt ou trente ans, dans la force de l’âge.
Nos parents verront notre âme dans une réplique de leur choix : En enfant ou en adulte, selon leurs désirs. Plus tard, nos enfants nous verront comme ils le veulent eux aussi, en tant que parents, et nos petits-enfants en tant de grands-pères et grands-mères, et ainsi de suite. Là, je me suis représenté en tant que monsieur Magnum, certainement en y pensant très fort au moment de l’envol. Et voilà en quoi je me suis retrouvé.
J’ai déambulé dans ma chambre, sans but, n’osant pas toucher les meubles ou frôler les murs. Je marchais pourtant, sentant le sol sous mes pieds, déplaçant de l’air à mon passage. Simplement, je n’étais qu’un fantôme, un esprit sans corps. Mue d’une envie subite et presque instinctive, je me suis baissé et j’ai chiffonné une lettre de ma banque qui traînait sur le sol. Le papier ne résista pas et termina en boule sur mon lit.
Je pouvais donc interagir avec le véritable monde, celui où je vivais depuis des années. Je résistais à l’envie de sauter de joie, et continua mes tentatives : J’allumais et éteignais la télévision, j’ai ouvert et fermé une boîte de cd, sans peine. Je repensais au film Ghost avec Demi Moore et songeait que Swayze avait tout faux en voulant bouger la canette dans le métro en luttant par la pensée. Il suffisait d’agir comme d’habitude, sans se débattre inutilement avec le fait que nous étions un spectre.
Mon corps physique était toujours sur le lit, inerte. Je l’ai observé un moment, notant les imperfections qu’on ne remarque pas lorsqu’on dirige ce corps, et connaissant aussi parfaitement les défauts cachés qu’on ne voyait pas de l’extérieur. Je m’examinais, en riant intérieurement, jubilant de la réussite de mon expérience. J’avais sauté la théorie et jugée la pratique. Le résultat était concluant.
Je ne suis resté que quelques minutes dans cette réalité alternative. Je n’avais pas pensé à quelque chose en particulier, ni fait un rituel spécial pour partir. C’était de la concentration pure et simple. Et j’étais rassuré. J’ai réintégré mon corps en m’allongeant sur lui, ne sachant à la fois pas du tout et parfaitement ce que je faisais. La seconde d’après, je sortais de ma transe comme d’un cauchemar horrible : Sueurs froides, vertiges, nausée, et extrême fatigue.
De plus, il était tard. J’avais eu l’impression de n’être parti que quelques minutes, mais je remarquais que mon réveil indiquait minuit passé. Plusieurs heures s’étaient donc écoulées durant ce voyage. Et si j’avais rêvé ? Me suis-je demandé. C’était une possibilité. Et très probable, même. Légèrement décourage, je me suis assis sur mon lit.
Sur la lettre froissée de la banque. »
Mr.Magnum s’arrêta sur ces paroles et laissa la patronne débarrasser la table. C’était la dernière ligne droite maintenant. Il attendit que la serveuse parte avec les derniers plats pour reprendre, un sourire aux lèvres : « Après ça, je me suis contenté d’approfondir mes recherches et rien de plus. Je me suis reposé, j’ai repris des forces, et j’ai imaginé cette réunion. J’ai modifié le post de départ sur le topic du décès de Séphy-Roshou, afin d’y inclure le rendez-vous, et voilà le résultat. Vous êtes tous là. »
Mr.Magnum poussa un immense soupir approbateur, accompagné d’autres membres qui avaient ingurgité l’histoire sans mot dire. Les deux femmes revinrent avec les cartes des desserts qu’ils disposèrent devant chaque personne. Un brouhaha léger de conversation reprit, comme si la fin toute proche du récit descellait les lèvres.
Mr.Magnum- Enorme floodeur
- Nombre de messages : 2475
Age : 42
Localisation : Dans les limbes torturées d'un esprit dérangé.
Date d'inscription : 18/01/2005
Re: Traumenschar
(partie 1)
5. Un Rôle Playing Game façon Traumen.
« Alors, si je comprends bien, tu nous proposes un voyage dans l’au-delà… » grogna Satana avec sarcasme. Il souriait presque méchamment et fixait Mr.Magnum avec un regard froid et noir. Ce dernier le soutint un instant, puis balaya l’assemblée qui conversait maintenant sans gènes. Des bribes de paroles lui parvenaient aux oreilles :
IL : « …pourrait être un intéressant de sujet de fic et… »
Arkh : « …cune preuve de ce qu’il avance, juste un récit enjolivé… »
Daelith Mrakthas : « …suis partante, moi, aucun problème pour… »
Angie : « …complètement fou, mais pas inintéressant, tout en sachant que… »
Pythagore : « …ientifiquement impossible, mais… »
Les serveuses firent leur ultime apparition avec les desserts et ressortirent sans un bruit. Mr.Magnum regarda sa Dame Blanche et s’efforça de retrouver l’appétit qu’il avait eu au moment du plat principal, mais sans conviction. En réalité, il avait posé toutes ses cartes, dévoilés ses atouts et il ne lui fallait qu’attendre le résultat.
Fury posa une main sur son bras, et Mr.Magnum tourna sa tête vers lui. Le visage de Fury était livide, blanc comme la craie et brillant comme la cire. Ses yeux, d’ordinaires si vifs, étaient cloués et inertes, semblant flottés dans ses orbites. L’air hagard, il ouvrit la bouche mais aucun son n’en sortit au départ. Une larme roula sur sa joue sans même qu’il s’en aperçoive. Mr.Magnum approcha sa tête.
« Merci d’avoir au moins essayé, Magnum… » murmura-t-il d’une voix sans timbre, et d’une tristesse infinie. Le petit lutin moqueur n’avait eu de cesse de le harceler pendant les dernières explications de Mr.Magnum, et Fury avait la désagréable impression d’avoir une tête remplie d’épingles aiguisées.
« Je crois, reprit Mr.Magnum, j’espère, avoir fait plus qu’essayer, Fury… » Il posa une main réconfortante sur l’épaule de Fury, qui lui rendit un faible sourire las. Ce fut ce sourire, songea Mr.Magnum par la suite, qui le motiva plus encore que tout le reste. Il repoussa sa glace et interpella l’assemblée d’une voix forte et claire.
« Mesdemoiselles, messieurs… » Le silence se fit rapidement. « Juste une dernière précision, avant de se lancer dans les questions que vous vous posez : Je n’oblige personne à venir, à m’accompagner dans ces voyages, mais je pense qu’en s’y mettant à plusieurs, le succès n’en sera que plus possible et probable. Je ne vous demande donc qu’un soutient moral et technique dans cette entreprise, et…
-Non ! Qu’est-ce que c’est que ces conneries, Magnum ? l’interrompit Erwan. Tu penses vraiment que je vais te laisser partir seul là-bas ?
-Oh, comme c’est touchant, railla Arkh à l’autre bout de la table. Le fidèle toutou Erwan/Calisto qui vole au secours de son cher et grand ami Magnum !
-Erwan, dit Mr.Magnum en ignorant totalement la remarque acide d’Arkh, je ne pense pas que tout le monde ici veuille risquer sa vie pour Séphy-Roshou. Elle n’était qu’une personne virtuelle parmi d’autres, rien de plus. »
K-Ro étouffa un sanglot à ces mots, et Dalisc approuva d’un hochement de tête. Arkh élargit son sourire mauvais et leva un sourcil provocateur à l’adresse de Mr.Magnum. TheMaker prit la parole :
« Je doute que ton idée soit vraie : Si voyager si simplement dans une sorte de monde onirique était réalisable, alors pourquoi personne ne l’a inventé avant ?
-Pourquoi personne n’a inventé la roue avant qu’on le fasse ? » rétorqua Pulsar-San du tac au tac, sous quelques rires approbateurs. DragonNoir, un léger sourire aux lèvres, la tête posée sur ses mains entrecroisées, émit alors un point de vue intéressant :
« Ce n’est pas le fait de voyager dans le monde des morts qui est intéressant : le sujet ayant déjà été exploité à l’extrême par bon nombre d’auteurs et de savants. Ce qui est séduisant, c’est l’idée selon laquelle les Paradis ou autres au-delà divergent selon la façon de périr ou les croyances.
-On dirait presque qu’il parle d’un roman, là, commenta Aran Valentine. Ce n’est pas un bouquin que tu vas écrire dont il s’agit, DragonNoir !
-Je le sais parfaitement, Aran, mais je pense que nous devons plus nous focaliser sur cette idée que sur le voyage en lui-même, puisque de toute façon Magnum a déjà réussi à franchir la barrière sépare les deux sphères : Réelle et Spectrale…
-Loule, s’exclama Haschatan. On entre dans le domaine de prédilection de DragonNoir : Legacy ok Kain et Soul Reaver… »
DragonNoir arbora un sourire béat et papillota des yeux comiquement. Tout le monde s’esclaffa, ce qui détendit un peu l’atmosphère. Mr.Magnum reprit la conversation :
« Cessez de flooder, tous, ironisa-t-il. Ne dérivez pas la conversation, pour une fois.
-Bon, en admettant que tout ton plan soit réalisable, concéda Satana, en quoi tout ceci nous concerne au juste ? Que peut-on faire concrètement ? Tu parlais de soutient moral et technique, alors développe un peu tes propos.
-Vous pourriez me fournir le maximum de renseignements sur les diverses légendes et autres mythes relatifs à la mort, par exemple. K-Ro, toi qui connaît bien la Bretagne, je suis persuadé que tu as la possibilité de nous fournir une multitude d’histoires, n’est-ce pas ? »
K-Ro resta un instant immobile, semblant réfléchir à la question, puis elle rougit. Elle hocha la tête deux fois et son visage rayonna un instant fugace d’un sourire joyeux. Elle avait encore les joues rouges et les yeux marqués par les larmes, mais le chagrin s’était estompé et elle ne pleurait plus.
« Je dois avoir quelques vieux, dit-elle d’une voix douce et timide, qui peuvent me raconter pleins de récit de ce genre, dans un de mes patelins perdu…
-Très bien, s’exclama Mr.Magnum. RazaëlAurélie peut faire de même avec les légendes d’Alsace, et ainsi de suite… Hilde ! C’est bien toi qui habites vers Nice ?
-Oui, mais je doute trouver ce type de renseignements aussi facilement, répondit la principale intéressée. On a peut-être moins gardé les traces des contes dans le Sud.
-Même à Paris, s’insurgea artificiellement Halvorc, on peut trouver quelques fables propres à la ville, j’en suis sûr.
-Ça sera bien la seule chose de propre à Paris, alors ! »
Lancée par HoTaKu, un membre du forum Manoir Compagnie, la remarque fit mouche et les éclats de rire fusèrent. Les cafés furent servis pendant que les choses se mettaient en place d’elles-mêmes, sans que Mr.Magnum ne fasse ou dise quoi que ce soit de plus. Il avait réussit et, bien que sceptiques au début du repas, ils étaient maintenant pour la plupart enthousiastes et impliqués.
Même ceux qui n’avaient pas eu l’air convaincus tout à l’heure y allaient de leur histoire romancée ou non sur la mort, ou songeaient aux endroits où ils pourraient se renseigner. Mr.Magnum se leva une fois son café terminé et se dirigea vers Arkh. Erwan le retint avant même qu’il fasse un pas.
« Qu’y a-t-il, Erwan ? demanda Mr.Magnum.
-Tu as convaincu les personnes présentes autours de cette table, mais je n’ai pas oublié ce que tu as dit tout à l’heure. Tu n’iras pas seul là-bas. »
Son ton était sans appel, et Mr.Magnum sentit presque les larmes affluer à cette déclaration sincère. Il se contint, lui offrit son plus beau sourire et lui fit un clin d’œil. Un clin d’oeil qui disait : Ne t’en fais pas, mon ami, tout ira bien.
« Et tu te trompes, Erwan. Il reste des personnes à persuader parmi nous. » Mr.Magnum jeta un regard de conspirateur à l’assemblée, puis montra discrètement Arkh du doigt. Erwan acquiesça et reprit sa conversation avec Draco et K-Ro.
Mr.Magnum fit le tour de la table et se posta derrière Arkh, qui ne parlait à personne, entouré de Radamenthe qui conversait avec Dalisc et Pulsar-San et de Viper Dragoon qui s’engueulait, pour changer, avec Pythagore pour une broutille. Avant même que Mr.Magnum ai pu s’annoncer, Arkh abdiqua une défaite partielle :
« Je reconnais que ton idée à du bon, même si je n’y adhère pas pour les raisons que j’ai présentés tout à l’heure. Tu devras te débrouiller sans moi.
-Ce n’est pas un problème, répondit Mr.Magnum d’une voix qui se voulait neutre. Nous nous passerons de ta participation. Néanmoins, je tenais à te dire d’une manière officieuse que si jamais tu décidais de faire machine arrière et de finalement nous rejoindre, ma proposition n’est pas limitée dans le temps.
-J’en prends bonne note. »
5. Un Rôle Playing Game façon Traumen.
« Alors, si je comprends bien, tu nous proposes un voyage dans l’au-delà… » grogna Satana avec sarcasme. Il souriait presque méchamment et fixait Mr.Magnum avec un regard froid et noir. Ce dernier le soutint un instant, puis balaya l’assemblée qui conversait maintenant sans gènes. Des bribes de paroles lui parvenaient aux oreilles :
IL : « …pourrait être un intéressant de sujet de fic et… »
Arkh : « …cune preuve de ce qu’il avance, juste un récit enjolivé… »
Daelith Mrakthas : « …suis partante, moi, aucun problème pour… »
Angie : « …complètement fou, mais pas inintéressant, tout en sachant que… »
Pythagore : « …ientifiquement impossible, mais… »
Les serveuses firent leur ultime apparition avec les desserts et ressortirent sans un bruit. Mr.Magnum regarda sa Dame Blanche et s’efforça de retrouver l’appétit qu’il avait eu au moment du plat principal, mais sans conviction. En réalité, il avait posé toutes ses cartes, dévoilés ses atouts et il ne lui fallait qu’attendre le résultat.
Fury posa une main sur son bras, et Mr.Magnum tourna sa tête vers lui. Le visage de Fury était livide, blanc comme la craie et brillant comme la cire. Ses yeux, d’ordinaires si vifs, étaient cloués et inertes, semblant flottés dans ses orbites. L’air hagard, il ouvrit la bouche mais aucun son n’en sortit au départ. Une larme roula sur sa joue sans même qu’il s’en aperçoive. Mr.Magnum approcha sa tête.
« Merci d’avoir au moins essayé, Magnum… » murmura-t-il d’une voix sans timbre, et d’une tristesse infinie. Le petit lutin moqueur n’avait eu de cesse de le harceler pendant les dernières explications de Mr.Magnum, et Fury avait la désagréable impression d’avoir une tête remplie d’épingles aiguisées.
« Je crois, reprit Mr.Magnum, j’espère, avoir fait plus qu’essayer, Fury… » Il posa une main réconfortante sur l’épaule de Fury, qui lui rendit un faible sourire las. Ce fut ce sourire, songea Mr.Magnum par la suite, qui le motiva plus encore que tout le reste. Il repoussa sa glace et interpella l’assemblée d’une voix forte et claire.
« Mesdemoiselles, messieurs… » Le silence se fit rapidement. « Juste une dernière précision, avant de se lancer dans les questions que vous vous posez : Je n’oblige personne à venir, à m’accompagner dans ces voyages, mais je pense qu’en s’y mettant à plusieurs, le succès n’en sera que plus possible et probable. Je ne vous demande donc qu’un soutient moral et technique dans cette entreprise, et…
-Non ! Qu’est-ce que c’est que ces conneries, Magnum ? l’interrompit Erwan. Tu penses vraiment que je vais te laisser partir seul là-bas ?
-Oh, comme c’est touchant, railla Arkh à l’autre bout de la table. Le fidèle toutou Erwan/Calisto qui vole au secours de son cher et grand ami Magnum !
-Erwan, dit Mr.Magnum en ignorant totalement la remarque acide d’Arkh, je ne pense pas que tout le monde ici veuille risquer sa vie pour Séphy-Roshou. Elle n’était qu’une personne virtuelle parmi d’autres, rien de plus. »
K-Ro étouffa un sanglot à ces mots, et Dalisc approuva d’un hochement de tête. Arkh élargit son sourire mauvais et leva un sourcil provocateur à l’adresse de Mr.Magnum. TheMaker prit la parole :
« Je doute que ton idée soit vraie : Si voyager si simplement dans une sorte de monde onirique était réalisable, alors pourquoi personne ne l’a inventé avant ?
-Pourquoi personne n’a inventé la roue avant qu’on le fasse ? » rétorqua Pulsar-San du tac au tac, sous quelques rires approbateurs. DragonNoir, un léger sourire aux lèvres, la tête posée sur ses mains entrecroisées, émit alors un point de vue intéressant :
« Ce n’est pas le fait de voyager dans le monde des morts qui est intéressant : le sujet ayant déjà été exploité à l’extrême par bon nombre d’auteurs et de savants. Ce qui est séduisant, c’est l’idée selon laquelle les Paradis ou autres au-delà divergent selon la façon de périr ou les croyances.
-On dirait presque qu’il parle d’un roman, là, commenta Aran Valentine. Ce n’est pas un bouquin que tu vas écrire dont il s’agit, DragonNoir !
-Je le sais parfaitement, Aran, mais je pense que nous devons plus nous focaliser sur cette idée que sur le voyage en lui-même, puisque de toute façon Magnum a déjà réussi à franchir la barrière sépare les deux sphères : Réelle et Spectrale…
-Loule, s’exclama Haschatan. On entre dans le domaine de prédilection de DragonNoir : Legacy ok Kain et Soul Reaver… »
DragonNoir arbora un sourire béat et papillota des yeux comiquement. Tout le monde s’esclaffa, ce qui détendit un peu l’atmosphère. Mr.Magnum reprit la conversation :
« Cessez de flooder, tous, ironisa-t-il. Ne dérivez pas la conversation, pour une fois.
-Bon, en admettant que tout ton plan soit réalisable, concéda Satana, en quoi tout ceci nous concerne au juste ? Que peut-on faire concrètement ? Tu parlais de soutient moral et technique, alors développe un peu tes propos.
-Vous pourriez me fournir le maximum de renseignements sur les diverses légendes et autres mythes relatifs à la mort, par exemple. K-Ro, toi qui connaît bien la Bretagne, je suis persuadé que tu as la possibilité de nous fournir une multitude d’histoires, n’est-ce pas ? »
K-Ro resta un instant immobile, semblant réfléchir à la question, puis elle rougit. Elle hocha la tête deux fois et son visage rayonna un instant fugace d’un sourire joyeux. Elle avait encore les joues rouges et les yeux marqués par les larmes, mais le chagrin s’était estompé et elle ne pleurait plus.
« Je dois avoir quelques vieux, dit-elle d’une voix douce et timide, qui peuvent me raconter pleins de récit de ce genre, dans un de mes patelins perdu…
-Très bien, s’exclama Mr.Magnum. RazaëlAurélie peut faire de même avec les légendes d’Alsace, et ainsi de suite… Hilde ! C’est bien toi qui habites vers Nice ?
-Oui, mais je doute trouver ce type de renseignements aussi facilement, répondit la principale intéressée. On a peut-être moins gardé les traces des contes dans le Sud.
-Même à Paris, s’insurgea artificiellement Halvorc, on peut trouver quelques fables propres à la ville, j’en suis sûr.
-Ça sera bien la seule chose de propre à Paris, alors ! »
Lancée par HoTaKu, un membre du forum Manoir Compagnie, la remarque fit mouche et les éclats de rire fusèrent. Les cafés furent servis pendant que les choses se mettaient en place d’elles-mêmes, sans que Mr.Magnum ne fasse ou dise quoi que ce soit de plus. Il avait réussit et, bien que sceptiques au début du repas, ils étaient maintenant pour la plupart enthousiastes et impliqués.
Même ceux qui n’avaient pas eu l’air convaincus tout à l’heure y allaient de leur histoire romancée ou non sur la mort, ou songeaient aux endroits où ils pourraient se renseigner. Mr.Magnum se leva une fois son café terminé et se dirigea vers Arkh. Erwan le retint avant même qu’il fasse un pas.
« Qu’y a-t-il, Erwan ? demanda Mr.Magnum.
-Tu as convaincu les personnes présentes autours de cette table, mais je n’ai pas oublié ce que tu as dit tout à l’heure. Tu n’iras pas seul là-bas. »
Son ton était sans appel, et Mr.Magnum sentit presque les larmes affluer à cette déclaration sincère. Il se contint, lui offrit son plus beau sourire et lui fit un clin d’œil. Un clin d’oeil qui disait : Ne t’en fais pas, mon ami, tout ira bien.
« Et tu te trompes, Erwan. Il reste des personnes à persuader parmi nous. » Mr.Magnum jeta un regard de conspirateur à l’assemblée, puis montra discrètement Arkh du doigt. Erwan acquiesça et reprit sa conversation avec Draco et K-Ro.
Mr.Magnum fit le tour de la table et se posta derrière Arkh, qui ne parlait à personne, entouré de Radamenthe qui conversait avec Dalisc et Pulsar-San et de Viper Dragoon qui s’engueulait, pour changer, avec Pythagore pour une broutille. Avant même que Mr.Magnum ai pu s’annoncer, Arkh abdiqua une défaite partielle :
« Je reconnais que ton idée à du bon, même si je n’y adhère pas pour les raisons que j’ai présentés tout à l’heure. Tu devras te débrouiller sans moi.
-Ce n’est pas un problème, répondit Mr.Magnum d’une voix qui se voulait neutre. Nous nous passerons de ta participation. Néanmoins, je tenais à te dire d’une manière officieuse que si jamais tu décidais de faire machine arrière et de finalement nous rejoindre, ma proposition n’est pas limitée dans le temps.
-J’en prends bonne note. »
Mr.Magnum- Enorme floodeur
- Nombre de messages : 2475
Age : 42
Localisation : Dans les limbes torturées d'un esprit dérangé.
Date d'inscription : 18/01/2005
Re: Traumenschar
(partie 2)
Il ne s’était pas retourné pour lui parler, mais après quelques secondes de silence, il pivota sur sa chaise et posa ses yeux sur Mr.Magnum. Celui-ci remarqua les traits tirés de son visage, et des yeux froids et distants, mais également bien plus triste que son attitude le laissait présager. Une seconde, Mr.Magnum crut même qu’il allait se mettre à pleurer.
« Magnum… Pourquoi tu fais tout ça pour elle ? »
La question désarçonna le jeune homme, qui ne su quoi répondre. Il fixa Arkh sans broncher quelques secondes, puis détourna les yeux, gêné sans aucune raison. Pourquoi je fais tout ça ? réfléchit Mr.Magnum. Pourquoi Séphy-Roshou semble-t-elle si importante, si importante pour que je mobilise une cinquantaine de personne dans un restaurant pour échafauder un plan aussi invraisemblable ?
Arkh interrompit ses réflexions troublantes : « Oublie ma question, je comprends… » Il souriait comme s’il comprenait, justement. Ce comportement acheva de torturer le subconscient de Mr.Magnum, qui ne cessait de se demander : Pourquoi ? Pourquoi est-elle si importante ? Pourquoi ?
« Magnum ! Je viens de parler à Erwan, et je serais aussi de la partie si tu t’en vas ! » proclama Gorgon_Roo derrière Mr.Magnum en posant une main sur son épaule. Mr.Magnum se détourna de Arkh, qui souriait encore, et oublia pour le moment ces interrogations qui lui torturaient l’esprit.
« Merci, Gorgon_Roo, mais je…
-D’autres sont partant aussi, Magnum : Squall, Youfie, GabiMatrix, Pulsar-San, Viper Dragoon, Pythagore, et j’en oublie… Ils sont tous d’accord pour risquer leur peau !!
-Ce n’est pas un jeu, Gorgon_Roo, dit le plus sérieusement du monde Draco. On risquera vraiment nos vies. »
Mr.Magnum regarda les volontaires qui le dévisageaient gravement, et se sentit gonfler d’admiration et de reconnaissance envers eux. Il avait envie de tous les prendre dans ses bras un à un, au nom de Fury et de la mère de Séphy-Roshou, pour tous les remercier des risques qu’ils prenaient, peut-être pour rien.
Pour la première fois, il regretta d’avoir osé les entraîner dans cette immense absurdité. Qui était-il pour avoir le droit de les envoyer à la mort, car c’était bien le cas. Mais il chassa ces sombres pensées et se concentra sur son objectif. Leur objectif, maintenant qu’ils étaient un véritable groupe d’intervention. Lord FireFly exprima cette même idée à haute voix :
« Un escadron pour récupérer Séphy-Roshou…
-Les troupes d’interventions Trauméniennes, railla LeKanar en enfilant sa veste.
-Traumenschar, en allemand… traduisit GabiMatrix avec une facilité déconcertante. Les Troupes du Rêve… Ça fait très poétique, non ?
-Très, oui… » approuva Laekh Traumen en riant.
Les gens de la table se levèrent et commencèrent à s’habiller pour sortir. La réunion était terminée, et tout avait fonctionné selon les souhaits de Mr.Magnum. Elle s’était déroulée à merveille. Mr.Magnum consulta sa montre après avoir mit son long manteau de cuir noir.
17h23.
Ils avaient passé quatre bonnes heures à palabrer sans même s’en rendre compte. Et voilà que tout le monde se séparait à nouveau. Chacun reprenait ses habitudes, tout en sachant tout de même que lorsque les voyages commenceront, ces membres dispersés répondront présents. Ils étaient un groupe, maintenant. Solidaires.
Les membres s’échangèrent moult numéros de portable, et divers adresses avant de ses séparer. Mr.Magnum attendit que out le monde sorte de la salle avant de quitter la table. Fury, toujours accompagné de Satana, quitta le restaurant en dernier. Erwan et Draco sortirent sans attendre Mr.Magnum, qui régla la note seul, comme prévu.
« Tout a été comme prévu ? » demanda Hubert d’un ton bourru au bar, essuyant perpétuellement un verre sans sembler se fatiguer. Mr.Magnum songea qu’il devait faire ce geste à longueur de temps, et il se demanda même s’il ne le faisait pas une fois sortit de derrière son comptoir, en mangeant, et même au lit. Il se retint de pouffer de rire.
« Très bien, aucun problème. J’espère que nous n’avons pas fait trop de bruit ?
-Nan, ça a été. Y a vingt-trois euros de frais supplémentaires pour ce que vous avez pris en plus du menu, monsieur Matrik. »
Le mot lui avait échappé, et Hubert devint rouge pivoine. Mr.Magnum, sans le regarder, sortit deux billets de dix et un de cinq et les posa sur le comptoir. Puis il releva la tête vers le barman à l’humour tordant et le pointa du doigt en poussant un sifflement strident. Hubert se cambra de peur et son teint écarlate pâlit. Ses yeux s’agrandirent et Mr.Magnum eut même le temps de remarquer sa bouche qui tremblotait avant de faire demi tour et rejoindre la rue sans un regard en arrière.
Hubert le regarda sortir, les jambes en coton, puis s’essuya le front de son chiffon humide. Sa femme le vit passer en courant jusqu’à la salle de bain où il s’examina pendant un quart d’heure dans la glace pour déceler la moindre anomalie due au sort que lui avait forcément lancé le gothique avant de partir.
Une fois dehors, Mr.Magnum inspira une immense bouffée d’air frais. La pluie avait cessée, mais le fond de l’air restait humide, et le vent soufflait encore en rafales. Il regarda une dernière fois le restaurant au patron douteux et avança pour rejoindre sa voiture. Il percuta une nouvelle fois K-Ro qui s’était mise devant lui.
« Oh, pardon, bafouilla-t-il. Excuses-moi K-Ro, je ne t’avais pas vu et…
-C’est rien, Magnum, dit-elle d’une voix posée et calme si différente de celle hystérique de ce matin. Je me suis mis exprès sur ton chemin pour que tu me voies.
-Mais malheureusement, pour la seconde fois de la journée, je ne t’ai pas vu… » Mr.Magnum émit un petit rire bref, K-Ro fit de même en retour, et bientôt ils rirent tout deux de bon cœur face à face, devant le restaurant.
« C’est ce qui s’appelle faire du rentres dedans, hein, Magnum, dit-elle avec un clin d’œil. Mais ce n’est rien… Je… Je tenais à m’excuser pour ce matin… J’ai eu une réaction complètement débile et j’ai crié sur la première personne que j’ai vu…
-Et malheureusement, c’était moi, c’est ça ? » dit Mr.Magnum en riant de nouveau. Les autres étaient loin devant, et Mr.Magnum pouvait apercevoir Erwan et Draco qui discutaient devant sa voiture.
« Oui, on peut dire ça… » K-Ro frissonna sous un coup de vent et s’enlaça dans ses bras pour se tenir chaud. Ses yeux fuyaient ceux de Mr.Magnum et se posaient sans cesse sur des endroits différents, semblant poursuivre un animal invisible et particulièrement véloce. « C’est pourquoi je voulais te dire de ne pas prendre en compte tout ce que je t’ai dis ce matin, d’accord ? Je n’en pensais rien, et ton idée n’est pas si mauvaise.
-C’est déjà oublié, K-Ro. Du moment que toi aussi tu participes à cette idée de Traumenschar, alors tout va bien. »
Elle hocha la tête et fit demi tour pour rejoindre RazaëlAurélie qui l’attendait un peu plus loin. Quelques pas avant de l’atteindre, elle se retourna vers Mr.Magnum et lui lança joyeusement d’une voix suraiguë :
« Et si tu crois que je vais rester les jambes croisées sous un table, alors tu te fourres le doigt dans l’œil jusqu’au coude ! Je serais sur le terrain, fois de K-Ro ! »
Mr.Magnum crut remarquer des larmes sur les joues de K-Ro dans cette ultime bravade orale, mais sans en être parfaitement sûr. Il lui fit un signe de la main et se dirigea vers sa Super cinq où l’attendaient Erwan et Draco.
Mr.Magnum repensa subitement, sans raison, à Arkh et sa question : Pourquoi tu fais tout ça pour elle ? Encore maintenant, il n’avait pas de réponses précises à lui donner. Étais-ce pour se donner de l’importance au sein du groupe Traumen, comme l’avait dit K-Ro en fin de matinée ? Étais-ce pour le plaisir d’effectuer une bonne action ? Le plaisir de sauver une femme, comme dans un roman à l’eau de rose ? Espérait-il un baiser final langoureux ?
Non, mille fois non.
Mr.Magnum ignorait encore les réponses à ces questions lorsqu’il se coucha dans son propre lit, ce soir là, à plus de quatre cents kilomètres du restaurant où avait eu lieu la plus importante réunion de Traumen. Son esprit vagabondait encore dans les limbes des souvenirs lorsqu’il se remémora les mots de GabiMatrix.
Traumenschar…
Les troupes du rêve…
*
* *
Fury avait les yeux grands ouverts dans son lit.
La voix du lutin ne l’avait pas lâché depuis la fin de la conversation du restaurant, et il ne s’était pas retenu de lui seriner sans fin les mêmes âneries :
Elle est morte ! Tu t’en rappelles, hein ? Morte. Tu n’oublieras pas, ne t’en fais pas, je serais là tout les jours, toutes les heures pour te le dire, te le rappeler : Morte. Froide. Un cadavre. Tu te souviens comme elle était froide quand tu l’as frôlé ? Son cœur aussi était ainsi, froid, mort, ce cœur qui t’a aimé, qui a battu pour toi.
Fury ne luttait plus contre la voix. Elle l’envahissait, ne résonnant plus simplement à ses oreilles, mais dans sa tête, dans son être, dans son âme toute entière. Le lutin
Morte.
qu’il imaginait dansait sur sa cervelle comme on piétine un tas de fourmis. Et il piétinait effectivement toute pensée rationnelle avec ses
Froide.
pensées horribles et pénétrantes. Le pire, songeait Fury, c’est que ce petit démon avait raison, et c’était là le plus difficile à avaler : Il avait raison de A à Z. Séphy-Roshou, la femme qu’il aimait depuis longtemps était morte et enterrée.
La voix changea alors soudainement de forme, et son ton, plus dure et ferme, devint subitement très éloigné du lutin excentrique incarné tout d’abord. Elle faisait maintenant plus songer à une sorte d’ombre noire, une ombre dominatrice et puissante, à la voix enjôleuse mais néfaste, pouvant provoquer la folie à long terme.
Et Fury commença à écouter cette nouvelle voix.
FIN DU PREMIER ÉPISODE : INTRODUCTION.
Il ne s’était pas retourné pour lui parler, mais après quelques secondes de silence, il pivota sur sa chaise et posa ses yeux sur Mr.Magnum. Celui-ci remarqua les traits tirés de son visage, et des yeux froids et distants, mais également bien plus triste que son attitude le laissait présager. Une seconde, Mr.Magnum crut même qu’il allait se mettre à pleurer.
« Magnum… Pourquoi tu fais tout ça pour elle ? »
La question désarçonna le jeune homme, qui ne su quoi répondre. Il fixa Arkh sans broncher quelques secondes, puis détourna les yeux, gêné sans aucune raison. Pourquoi je fais tout ça ? réfléchit Mr.Magnum. Pourquoi Séphy-Roshou semble-t-elle si importante, si importante pour que je mobilise une cinquantaine de personne dans un restaurant pour échafauder un plan aussi invraisemblable ?
Arkh interrompit ses réflexions troublantes : « Oublie ma question, je comprends… » Il souriait comme s’il comprenait, justement. Ce comportement acheva de torturer le subconscient de Mr.Magnum, qui ne cessait de se demander : Pourquoi ? Pourquoi est-elle si importante ? Pourquoi ?
« Magnum ! Je viens de parler à Erwan, et je serais aussi de la partie si tu t’en vas ! » proclama Gorgon_Roo derrière Mr.Magnum en posant une main sur son épaule. Mr.Magnum se détourna de Arkh, qui souriait encore, et oublia pour le moment ces interrogations qui lui torturaient l’esprit.
« Merci, Gorgon_Roo, mais je…
-D’autres sont partant aussi, Magnum : Squall, Youfie, GabiMatrix, Pulsar-San, Viper Dragoon, Pythagore, et j’en oublie… Ils sont tous d’accord pour risquer leur peau !!
-Ce n’est pas un jeu, Gorgon_Roo, dit le plus sérieusement du monde Draco. On risquera vraiment nos vies. »
Mr.Magnum regarda les volontaires qui le dévisageaient gravement, et se sentit gonfler d’admiration et de reconnaissance envers eux. Il avait envie de tous les prendre dans ses bras un à un, au nom de Fury et de la mère de Séphy-Roshou, pour tous les remercier des risques qu’ils prenaient, peut-être pour rien.
Pour la première fois, il regretta d’avoir osé les entraîner dans cette immense absurdité. Qui était-il pour avoir le droit de les envoyer à la mort, car c’était bien le cas. Mais il chassa ces sombres pensées et se concentra sur son objectif. Leur objectif, maintenant qu’ils étaient un véritable groupe d’intervention. Lord FireFly exprima cette même idée à haute voix :
« Un escadron pour récupérer Séphy-Roshou…
-Les troupes d’interventions Trauméniennes, railla LeKanar en enfilant sa veste.
-Traumenschar, en allemand… traduisit GabiMatrix avec une facilité déconcertante. Les Troupes du Rêve… Ça fait très poétique, non ?
-Très, oui… » approuva Laekh Traumen en riant.
Les gens de la table se levèrent et commencèrent à s’habiller pour sortir. La réunion était terminée, et tout avait fonctionné selon les souhaits de Mr.Magnum. Elle s’était déroulée à merveille. Mr.Magnum consulta sa montre après avoir mit son long manteau de cuir noir.
17h23.
Ils avaient passé quatre bonnes heures à palabrer sans même s’en rendre compte. Et voilà que tout le monde se séparait à nouveau. Chacun reprenait ses habitudes, tout en sachant tout de même que lorsque les voyages commenceront, ces membres dispersés répondront présents. Ils étaient un groupe, maintenant. Solidaires.
Les membres s’échangèrent moult numéros de portable, et divers adresses avant de ses séparer. Mr.Magnum attendit que out le monde sorte de la salle avant de quitter la table. Fury, toujours accompagné de Satana, quitta le restaurant en dernier. Erwan et Draco sortirent sans attendre Mr.Magnum, qui régla la note seul, comme prévu.
« Tout a été comme prévu ? » demanda Hubert d’un ton bourru au bar, essuyant perpétuellement un verre sans sembler se fatiguer. Mr.Magnum songea qu’il devait faire ce geste à longueur de temps, et il se demanda même s’il ne le faisait pas une fois sortit de derrière son comptoir, en mangeant, et même au lit. Il se retint de pouffer de rire.
« Très bien, aucun problème. J’espère que nous n’avons pas fait trop de bruit ?
-Nan, ça a été. Y a vingt-trois euros de frais supplémentaires pour ce que vous avez pris en plus du menu, monsieur Matrik. »
Le mot lui avait échappé, et Hubert devint rouge pivoine. Mr.Magnum, sans le regarder, sortit deux billets de dix et un de cinq et les posa sur le comptoir. Puis il releva la tête vers le barman à l’humour tordant et le pointa du doigt en poussant un sifflement strident. Hubert se cambra de peur et son teint écarlate pâlit. Ses yeux s’agrandirent et Mr.Magnum eut même le temps de remarquer sa bouche qui tremblotait avant de faire demi tour et rejoindre la rue sans un regard en arrière.
Hubert le regarda sortir, les jambes en coton, puis s’essuya le front de son chiffon humide. Sa femme le vit passer en courant jusqu’à la salle de bain où il s’examina pendant un quart d’heure dans la glace pour déceler la moindre anomalie due au sort que lui avait forcément lancé le gothique avant de partir.
Une fois dehors, Mr.Magnum inspira une immense bouffée d’air frais. La pluie avait cessée, mais le fond de l’air restait humide, et le vent soufflait encore en rafales. Il regarda une dernière fois le restaurant au patron douteux et avança pour rejoindre sa voiture. Il percuta une nouvelle fois K-Ro qui s’était mise devant lui.
« Oh, pardon, bafouilla-t-il. Excuses-moi K-Ro, je ne t’avais pas vu et…
-C’est rien, Magnum, dit-elle d’une voix posée et calme si différente de celle hystérique de ce matin. Je me suis mis exprès sur ton chemin pour que tu me voies.
-Mais malheureusement, pour la seconde fois de la journée, je ne t’ai pas vu… » Mr.Magnum émit un petit rire bref, K-Ro fit de même en retour, et bientôt ils rirent tout deux de bon cœur face à face, devant le restaurant.
« C’est ce qui s’appelle faire du rentres dedans, hein, Magnum, dit-elle avec un clin d’œil. Mais ce n’est rien… Je… Je tenais à m’excuser pour ce matin… J’ai eu une réaction complètement débile et j’ai crié sur la première personne que j’ai vu…
-Et malheureusement, c’était moi, c’est ça ? » dit Mr.Magnum en riant de nouveau. Les autres étaient loin devant, et Mr.Magnum pouvait apercevoir Erwan et Draco qui discutaient devant sa voiture.
« Oui, on peut dire ça… » K-Ro frissonna sous un coup de vent et s’enlaça dans ses bras pour se tenir chaud. Ses yeux fuyaient ceux de Mr.Magnum et se posaient sans cesse sur des endroits différents, semblant poursuivre un animal invisible et particulièrement véloce. « C’est pourquoi je voulais te dire de ne pas prendre en compte tout ce que je t’ai dis ce matin, d’accord ? Je n’en pensais rien, et ton idée n’est pas si mauvaise.
-C’est déjà oublié, K-Ro. Du moment que toi aussi tu participes à cette idée de Traumenschar, alors tout va bien. »
Elle hocha la tête et fit demi tour pour rejoindre RazaëlAurélie qui l’attendait un peu plus loin. Quelques pas avant de l’atteindre, elle se retourna vers Mr.Magnum et lui lança joyeusement d’une voix suraiguë :
« Et si tu crois que je vais rester les jambes croisées sous un table, alors tu te fourres le doigt dans l’œil jusqu’au coude ! Je serais sur le terrain, fois de K-Ro ! »
Mr.Magnum crut remarquer des larmes sur les joues de K-Ro dans cette ultime bravade orale, mais sans en être parfaitement sûr. Il lui fit un signe de la main et se dirigea vers sa Super cinq où l’attendaient Erwan et Draco.
Mr.Magnum repensa subitement, sans raison, à Arkh et sa question : Pourquoi tu fais tout ça pour elle ? Encore maintenant, il n’avait pas de réponses précises à lui donner. Étais-ce pour se donner de l’importance au sein du groupe Traumen, comme l’avait dit K-Ro en fin de matinée ? Étais-ce pour le plaisir d’effectuer une bonne action ? Le plaisir de sauver une femme, comme dans un roman à l’eau de rose ? Espérait-il un baiser final langoureux ?
Non, mille fois non.
Mr.Magnum ignorait encore les réponses à ces questions lorsqu’il se coucha dans son propre lit, ce soir là, à plus de quatre cents kilomètres du restaurant où avait eu lieu la plus importante réunion de Traumen. Son esprit vagabondait encore dans les limbes des souvenirs lorsqu’il se remémora les mots de GabiMatrix.
Traumenschar…
Les troupes du rêve…
*
* *
Fury avait les yeux grands ouverts dans son lit.
La voix du lutin ne l’avait pas lâché depuis la fin de la conversation du restaurant, et il ne s’était pas retenu de lui seriner sans fin les mêmes âneries :
Elle est morte ! Tu t’en rappelles, hein ? Morte. Tu n’oublieras pas, ne t’en fais pas, je serais là tout les jours, toutes les heures pour te le dire, te le rappeler : Morte. Froide. Un cadavre. Tu te souviens comme elle était froide quand tu l’as frôlé ? Son cœur aussi était ainsi, froid, mort, ce cœur qui t’a aimé, qui a battu pour toi.
Fury ne luttait plus contre la voix. Elle l’envahissait, ne résonnant plus simplement à ses oreilles, mais dans sa tête, dans son être, dans son âme toute entière. Le lutin
Morte.
qu’il imaginait dansait sur sa cervelle comme on piétine un tas de fourmis. Et il piétinait effectivement toute pensée rationnelle avec ses
Froide.
pensées horribles et pénétrantes. Le pire, songeait Fury, c’est que ce petit démon avait raison, et c’était là le plus difficile à avaler : Il avait raison de A à Z. Séphy-Roshou, la femme qu’il aimait depuis longtemps était morte et enterrée.
La voix changea alors soudainement de forme, et son ton, plus dure et ferme, devint subitement très éloigné du lutin excentrique incarné tout d’abord. Elle faisait maintenant plus songer à une sorte d’ombre noire, une ombre dominatrice et puissante, à la voix enjôleuse mais néfaste, pouvant provoquer la folie à long terme.
Et Fury commença à écouter cette nouvelle voix.
FIN DU PREMIER ÉPISODE : INTRODUCTION.
Mr.Magnum- Enorme floodeur
- Nombre de messages : 2475
Age : 42
Localisation : Dans les limbes torturées d'un esprit dérangé.
Date d'inscription : 18/01/2005
Re: Traumenschar
(partie 1)
ÉPISODE 2: LA DAME BLANCHE.
1.Une conduite… …sportive.
Nationale N104, surnommée Francilienne, Sud de Paris, 04h53.
Les rares voitures qui circulaient sur cette portion de route et en cette heure avancée de la nuit eurent certainement l’intime conviction que l’armée française faisait des essais de matériel prohibé tel qu’une roquette à vitesse sonique ou encore un modèle sur roue d’un avion de chasse. Soit une voiture de chasse.
Mais la réalité était tout autre : L’engin en question, une vieille Renault de fabrication française, effectivement, roulait simplement au maximum de ses capacités et profitait d’un vent dans le dos pour pousser le surrégime de la cinquième et dernière vitesse à son paroxysme. Le résultat était brillant : Plus de deux cents kilomètres à l’heure sur une nationale limitée à cent dix et un moteur qui hurlait sous le capot.
« Tu ne penses pas qu’on aurait du prendre une autre voiture ? J’ai peur que la tienne explose avant qu’on ne la voie. »
Mr.Magnum, au volant du bolide fou lancé à toute vitesse, souriait tel un démon entrain de torturer un innocent. Et, lorsqu’on y songe, c’est ce qu’il faisait en poussant sa pauvre voiture à une telle pointe. Il avait toujours aimé la vitesse, et il avait toujours roulé vite sans raison sur les autoroutes et les voies expresses. Pas au point de mettre sa vie ou celle des autres en danger, mais il prenait du plaisir à pousser son moteur dans ses derniers retranchements.
Et peut-être aussi à enfreindre la loi ?
Les enceintes des portières hurlaient du Slipknot à fond dans les oreilles des passagers. Tous grimaçaient ou se bouchaient les oreilles tandis que les percussions faisaient vibrer jusqu’aux vitres du véhicule. Tous sauf Mr.Magnum qui, battant le rythme sur son levier de vitesse d’une main gantée de noir, psalmodiait les paroles et les hurlements énergiques d’une voix forte et grave.
À la remarque de Fury, il tourna la tête et baissa le son de l’autoradio. Un soupir de soulagement général accueilli ce changement de volume et Mr.Magnum se retourna vers ses passagers à l’arrière d’un air étonné :
« Si vous n’aimiez pas, il fallait me le dire !
-On aurait bien aimé, ahuri ! hurla K-Ro d’une voix stridente rappelant le chanteur du groupe qui murmurait maintenant en fond sonore. Le problème, c’est que tu n’entendais rien avec cette saloperie de musique !!
-Yeaheah !! Moi j’aimais bien !! »
K-Ro envoya sa main sur l’arrière du crâne d’Haschatan qui poussa un petit cri de surprise. De l’autre coté de K-Ro, Erwan observait la scène d’un air perplexe. Il se tenait un peu penché vers la vitre de la voiture trois portes, donc sans échappatoire, et scrutait K-Ro pour tenter d’éviter les futurs coups de coudes.
« Bon, en tout cas, j’espère que cette gonzesse va bientôt se montrer, dit Fury d’une voix irritée. Ce n’est pas que ta voiture est inconfortable, mais elle est un peu…
-…petite ? termina Erwan avec un sourire.
-En même temps, maugréa Mr.Magnum, c’est la seule que nous avons sous la main pour le moment, alors si quelqu’un n’est pas content, il n’a qu’à sortir !
-On voudrait bien, mais on est coincé à l’arrière ! » railla Haschatan en riant à moitié. Mr.Magnum lui lança un regard noir par le rétroviseur, et ce dernier n’ajouta rien. Il préféra regarder par la fenêtre les bandes blanches qui défilaient rapidement.
« Et elle est censée apparaître quand cette dame blanche, Magnum ? demanda Fury.
-Lorsqu’on atteindra l’endroit de l’accident.
-Quel accident ? » gémit K-Ro, qui connaissait déjà la réponse. Mr.Magnum la regarda fixement dans le rétroviseur et dit :
« Notre accident. »
Un silence pesant accompagna la remarque. Puis Haschatan claironna une musique dramatique et tous sursautèrent. Fury éclata de rire nerveusement, et Erwan fit de même lorsque K-Ro, au comble de la nervosité, décocha une nouvelle baffe au pauvre Haschatan.
« Cesse de fanfaronner, Haschatan, tu n’en mènes pas plus large de nous tous ici.
-Tu as raison, Erwan, déclara le principal intéressé. Mais personne ne t’a obligé à venir, tu sais ! C’est bien toi qui nous clamait des tirades comme : ‘‘Je ne te laisserais pas y aller seul, mon Magnumichou…’’ lors de la réunion, non ? »
Ce fut au tour d’Erwan d’envoyer une claque sur l’arrière de la tête d’Haschatan, qui beugla de mécontentement, sous les applaudissements de K-Ro. Mr.Magnum, qui suivait toujours la scène dans le rétroviseur central de sa voiture, réprima un sourire et reposa les yeux sur la route.
Toujours rien.
Les kilomètres défilaient, et toujours aucune trace de la dame blanche. Mr.Magnum se mit à songer au moment où lui faudrait refaire de l’essence. Il avait fait le plein avant de partir, mais ça faisait maintenant plus d’une demi-heure qu’ils roulaient comme des fous sans que rien ne se passe. Sans qu’aucune dame blanche ne survienne sur le bord de la route.
Mr.Magnum jeta un coup d’œil à Fury pour vérifier son humeur. Il n’était pas rare qu’il fasse de soudaine crise de mélancolie depuis le décès de sa bien aimée, même si avec le temps, les crises s’étaient espacées. DragonNoir pensait aussi qu’il s’était certainement raccroché à cette idée de sauvetage pour garder un pied parmi nous.
Fury avait sa tête posée sur sa main, le coude sur le genou, et regardait devant lui. Ses yeux cherchaient apparemment à trouver la fameuse dame blanche, mais son esprit semblait ailleurs, accaparé par d’autres pensées, d’autres priorités. Mr.Magnum remarqua que Fury tremblait spasmodiquement de la jambe droite et il s’apprêtait à le lui faire remarquer lorsque Haschatan demanda des explications sur la légende.
« C’est une légende très courante, en fait, répondit Erwan d’un ton de professeur. Il existe des témoignages de cette histoire un peu partout, de la Corse à la Bretagne…
-Oui, j’en ai entendu parler aussi ! ajouta K-Ro.
-…en passant par l’Île-de-France. C’est toujours à peu de choses près la même chose : Un conducteur roule, il voit la dame blanche, il meurt. C’est un résumé, bien sûr. »
Mr.Magnum observait toujours la jambe de Fury qui montait et descendait comme un piston à une vitesse anormale. Fury, toujours penché vers le pare-brise, ne semblait rien remarquer et scrutait l’obscurité.
« Il y a plusieurs divergences de témoignages, ou bien peut-être plusieurs dames blanches, peut-être, poursuivit Erwan à l’arrière.
-J’aime bien les dames blanches, moi, dit K-Ro d’un ton rêveur. Quand je vais au restaurant, c’est toujours ce que je prends comme dessert. Avec du chocolat… »
Mr.Magnum remarqua que Fury semblait écouter quelque chose, ou quelqu’un : Il avait la tête d’une personne notant point par point les étapes d’un discours. Mais Mr.Magnum avait beau tendre l’oreille, il n’entendait que les trois passagers à l’arrière, sa musique de sauvage en fond sonore cacophonique ; Mayhem, De Mysteriis Dom Sathanas, un don d’Halvorc ; et le moteur de la Renault qui hurlait de douleur.
« Certaines personnes disent que c’est en les prenant en stop que tout arrive, continua Erwan, imperturbable. Elles montent en guise de passager, et arrive un moment où elles disparaissent en hurlant. Un cri à vous glacer le sang.
-Brrrrr… frissonna Haschatan. Je n’aime pas cette histoire.
-D’autres disent que c’est en ne les prenant pas en stop que vous déclenchez une sorte de malédiction. La dame blanche revient alors se mettre à votre hauteur et vous avez un accident. Ou elle crie une fois à votre hauteur. Les avis et récits ne sont pas tous semblables. »
Fury hocha distinctement la tête, dans la pénombre de la voiture, le regard fixé sur un point imaginaire. Mr.Magnum cru même déceler un sourire sur son visage, un instant, mais la seconde d’après, il n’y était plus. Malgré tout, il l’avait vu faire un oui de la tête.
« Et là, on recherche laquelle, de dame blanche ? questionna K-Ro.
-Celle qui provoque des accidents simplement lorsqu’on la croise sur la route, ou peu de temps après, l’informa Erwan. Ou bien, en fait, la première qui viendra à nous. Vous savez d’où viennent la grande majorité de ces légendes ? »
Les deux autres occupants des places arrière secouèrent la tête en signe de dénégation. Mr.Magnum jeta un rapide coup d’œil sur la route, espionnant toujours Fury discrètement. Quelque chose ne collait pas.
« Même si les histoires sont différentes, la dame blanche en elle-même a toujours à peu de changements près la même horrible histoire.
-Une jeune fille qui meure dans un accident quelconque, intervint Fury du siège avant. Elle hante alors l’endroit de sa mort dans une robe immaculée et elle entraîne tout ceux qu’elle trouve avec elle. Souvent, on la rencontrait aux croisements des routes ou des ponts, et les anciens des villages pensaient que c’étaient des sortes de signes qui prouvaient un passage vers l’au-delà. En fait, c’était tout simplement des embranchements ou des intersections dangereuses, là où se passaient les accidents les plus graves. »
Mr.Magnum dévisagea Fury avec un œil rond, ainsi qu’Erwan, littéralement mystifié par l’intervention de Fury. Étais-ce ça que la voix lui avait soufflé ? Avait-il fait des recherches sur la dame blanche ? Mr.Magnum sentit son ventre se retourner en lui. Quelque chose de mauvais se tramait, il en avait de plus en plus l’impression.
« Pourquoi tu me regardes comme ça ? demanda Fury, curieux.
-La route !! » hurla K-Ro. Mr.Magnum détacha ses yeux de Fury. Il avait sourit, là, en me posant cette question ? Ou bien l’avais-je rêvé ? Il donna un coup de volant et un instant, il cru que la voiture allait partir en tonneau. Pas besoin de dame blanche, tout le monde allait mourir sans en avoir aperçu une seule.
La voiture fit une embardée et ses roues chassèrent une seconde sur les gravillons du bas-côté de la route. Une fois redressée, Mr.Magnum appuya de nouveau sur l’accélérateur pour retrouver sa pleine puissance. Il a hoché la tête. Il ne cessait de revoir les images, et ceci conjugué à la fatigue et à l’heure tardive commençait à lui embrouiller l’esprit.
La Renault doubla un camion sur la bande d’arrêt d’urgence. Ce dernier klaxonna, couvrant momentanément Rammstein qui beuglait en allemand dans les enceintes des portières. Mr.Magnum leva un majeur bien haut et bougonna une insulte.
ÉPISODE 2: LA DAME BLANCHE.
1.Une conduite… …sportive.
Nationale N104, surnommée Francilienne, Sud de Paris, 04h53.
Les rares voitures qui circulaient sur cette portion de route et en cette heure avancée de la nuit eurent certainement l’intime conviction que l’armée française faisait des essais de matériel prohibé tel qu’une roquette à vitesse sonique ou encore un modèle sur roue d’un avion de chasse. Soit une voiture de chasse.
Mais la réalité était tout autre : L’engin en question, une vieille Renault de fabrication française, effectivement, roulait simplement au maximum de ses capacités et profitait d’un vent dans le dos pour pousser le surrégime de la cinquième et dernière vitesse à son paroxysme. Le résultat était brillant : Plus de deux cents kilomètres à l’heure sur une nationale limitée à cent dix et un moteur qui hurlait sous le capot.
« Tu ne penses pas qu’on aurait du prendre une autre voiture ? J’ai peur que la tienne explose avant qu’on ne la voie. »
Mr.Magnum, au volant du bolide fou lancé à toute vitesse, souriait tel un démon entrain de torturer un innocent. Et, lorsqu’on y songe, c’est ce qu’il faisait en poussant sa pauvre voiture à une telle pointe. Il avait toujours aimé la vitesse, et il avait toujours roulé vite sans raison sur les autoroutes et les voies expresses. Pas au point de mettre sa vie ou celle des autres en danger, mais il prenait du plaisir à pousser son moteur dans ses derniers retranchements.
Et peut-être aussi à enfreindre la loi ?
Les enceintes des portières hurlaient du Slipknot à fond dans les oreilles des passagers. Tous grimaçaient ou se bouchaient les oreilles tandis que les percussions faisaient vibrer jusqu’aux vitres du véhicule. Tous sauf Mr.Magnum qui, battant le rythme sur son levier de vitesse d’une main gantée de noir, psalmodiait les paroles et les hurlements énergiques d’une voix forte et grave.
À la remarque de Fury, il tourna la tête et baissa le son de l’autoradio. Un soupir de soulagement général accueilli ce changement de volume et Mr.Magnum se retourna vers ses passagers à l’arrière d’un air étonné :
« Si vous n’aimiez pas, il fallait me le dire !
-On aurait bien aimé, ahuri ! hurla K-Ro d’une voix stridente rappelant le chanteur du groupe qui murmurait maintenant en fond sonore. Le problème, c’est que tu n’entendais rien avec cette saloperie de musique !!
-Yeaheah !! Moi j’aimais bien !! »
K-Ro envoya sa main sur l’arrière du crâne d’Haschatan qui poussa un petit cri de surprise. De l’autre coté de K-Ro, Erwan observait la scène d’un air perplexe. Il se tenait un peu penché vers la vitre de la voiture trois portes, donc sans échappatoire, et scrutait K-Ro pour tenter d’éviter les futurs coups de coudes.
« Bon, en tout cas, j’espère que cette gonzesse va bientôt se montrer, dit Fury d’une voix irritée. Ce n’est pas que ta voiture est inconfortable, mais elle est un peu…
-…petite ? termina Erwan avec un sourire.
-En même temps, maugréa Mr.Magnum, c’est la seule que nous avons sous la main pour le moment, alors si quelqu’un n’est pas content, il n’a qu’à sortir !
-On voudrait bien, mais on est coincé à l’arrière ! » railla Haschatan en riant à moitié. Mr.Magnum lui lança un regard noir par le rétroviseur, et ce dernier n’ajouta rien. Il préféra regarder par la fenêtre les bandes blanches qui défilaient rapidement.
« Et elle est censée apparaître quand cette dame blanche, Magnum ? demanda Fury.
-Lorsqu’on atteindra l’endroit de l’accident.
-Quel accident ? » gémit K-Ro, qui connaissait déjà la réponse. Mr.Magnum la regarda fixement dans le rétroviseur et dit :
« Notre accident. »
Un silence pesant accompagna la remarque. Puis Haschatan claironna une musique dramatique et tous sursautèrent. Fury éclata de rire nerveusement, et Erwan fit de même lorsque K-Ro, au comble de la nervosité, décocha une nouvelle baffe au pauvre Haschatan.
« Cesse de fanfaronner, Haschatan, tu n’en mènes pas plus large de nous tous ici.
-Tu as raison, Erwan, déclara le principal intéressé. Mais personne ne t’a obligé à venir, tu sais ! C’est bien toi qui nous clamait des tirades comme : ‘‘Je ne te laisserais pas y aller seul, mon Magnumichou…’’ lors de la réunion, non ? »
Ce fut au tour d’Erwan d’envoyer une claque sur l’arrière de la tête d’Haschatan, qui beugla de mécontentement, sous les applaudissements de K-Ro. Mr.Magnum, qui suivait toujours la scène dans le rétroviseur central de sa voiture, réprima un sourire et reposa les yeux sur la route.
Toujours rien.
Les kilomètres défilaient, et toujours aucune trace de la dame blanche. Mr.Magnum se mit à songer au moment où lui faudrait refaire de l’essence. Il avait fait le plein avant de partir, mais ça faisait maintenant plus d’une demi-heure qu’ils roulaient comme des fous sans que rien ne se passe. Sans qu’aucune dame blanche ne survienne sur le bord de la route.
Mr.Magnum jeta un coup d’œil à Fury pour vérifier son humeur. Il n’était pas rare qu’il fasse de soudaine crise de mélancolie depuis le décès de sa bien aimée, même si avec le temps, les crises s’étaient espacées. DragonNoir pensait aussi qu’il s’était certainement raccroché à cette idée de sauvetage pour garder un pied parmi nous.
Fury avait sa tête posée sur sa main, le coude sur le genou, et regardait devant lui. Ses yeux cherchaient apparemment à trouver la fameuse dame blanche, mais son esprit semblait ailleurs, accaparé par d’autres pensées, d’autres priorités. Mr.Magnum remarqua que Fury tremblait spasmodiquement de la jambe droite et il s’apprêtait à le lui faire remarquer lorsque Haschatan demanda des explications sur la légende.
« C’est une légende très courante, en fait, répondit Erwan d’un ton de professeur. Il existe des témoignages de cette histoire un peu partout, de la Corse à la Bretagne…
-Oui, j’en ai entendu parler aussi ! ajouta K-Ro.
-…en passant par l’Île-de-France. C’est toujours à peu de choses près la même chose : Un conducteur roule, il voit la dame blanche, il meurt. C’est un résumé, bien sûr. »
Mr.Magnum observait toujours la jambe de Fury qui montait et descendait comme un piston à une vitesse anormale. Fury, toujours penché vers le pare-brise, ne semblait rien remarquer et scrutait l’obscurité.
« Il y a plusieurs divergences de témoignages, ou bien peut-être plusieurs dames blanches, peut-être, poursuivit Erwan à l’arrière.
-J’aime bien les dames blanches, moi, dit K-Ro d’un ton rêveur. Quand je vais au restaurant, c’est toujours ce que je prends comme dessert. Avec du chocolat… »
Mr.Magnum remarqua que Fury semblait écouter quelque chose, ou quelqu’un : Il avait la tête d’une personne notant point par point les étapes d’un discours. Mais Mr.Magnum avait beau tendre l’oreille, il n’entendait que les trois passagers à l’arrière, sa musique de sauvage en fond sonore cacophonique ; Mayhem, De Mysteriis Dom Sathanas, un don d’Halvorc ; et le moteur de la Renault qui hurlait de douleur.
« Certaines personnes disent que c’est en les prenant en stop que tout arrive, continua Erwan, imperturbable. Elles montent en guise de passager, et arrive un moment où elles disparaissent en hurlant. Un cri à vous glacer le sang.
-Brrrrr… frissonna Haschatan. Je n’aime pas cette histoire.
-D’autres disent que c’est en ne les prenant pas en stop que vous déclenchez une sorte de malédiction. La dame blanche revient alors se mettre à votre hauteur et vous avez un accident. Ou elle crie une fois à votre hauteur. Les avis et récits ne sont pas tous semblables. »
Fury hocha distinctement la tête, dans la pénombre de la voiture, le regard fixé sur un point imaginaire. Mr.Magnum cru même déceler un sourire sur son visage, un instant, mais la seconde d’après, il n’y était plus. Malgré tout, il l’avait vu faire un oui de la tête.
« Et là, on recherche laquelle, de dame blanche ? questionna K-Ro.
-Celle qui provoque des accidents simplement lorsqu’on la croise sur la route, ou peu de temps après, l’informa Erwan. Ou bien, en fait, la première qui viendra à nous. Vous savez d’où viennent la grande majorité de ces légendes ? »
Les deux autres occupants des places arrière secouèrent la tête en signe de dénégation. Mr.Magnum jeta un rapide coup d’œil sur la route, espionnant toujours Fury discrètement. Quelque chose ne collait pas.
« Même si les histoires sont différentes, la dame blanche en elle-même a toujours à peu de changements près la même horrible histoire.
-Une jeune fille qui meure dans un accident quelconque, intervint Fury du siège avant. Elle hante alors l’endroit de sa mort dans une robe immaculée et elle entraîne tout ceux qu’elle trouve avec elle. Souvent, on la rencontrait aux croisements des routes ou des ponts, et les anciens des villages pensaient que c’étaient des sortes de signes qui prouvaient un passage vers l’au-delà. En fait, c’était tout simplement des embranchements ou des intersections dangereuses, là où se passaient les accidents les plus graves. »
Mr.Magnum dévisagea Fury avec un œil rond, ainsi qu’Erwan, littéralement mystifié par l’intervention de Fury. Étais-ce ça que la voix lui avait soufflé ? Avait-il fait des recherches sur la dame blanche ? Mr.Magnum sentit son ventre se retourner en lui. Quelque chose de mauvais se tramait, il en avait de plus en plus l’impression.
« Pourquoi tu me regardes comme ça ? demanda Fury, curieux.
-La route !! » hurla K-Ro. Mr.Magnum détacha ses yeux de Fury. Il avait sourit, là, en me posant cette question ? Ou bien l’avais-je rêvé ? Il donna un coup de volant et un instant, il cru que la voiture allait partir en tonneau. Pas besoin de dame blanche, tout le monde allait mourir sans en avoir aperçu une seule.
La voiture fit une embardée et ses roues chassèrent une seconde sur les gravillons du bas-côté de la route. Une fois redressée, Mr.Magnum appuya de nouveau sur l’accélérateur pour retrouver sa pleine puissance. Il a hoché la tête. Il ne cessait de revoir les images, et ceci conjugué à la fatigue et à l’heure tardive commençait à lui embrouiller l’esprit.
La Renault doubla un camion sur la bande d’arrêt d’urgence. Ce dernier klaxonna, couvrant momentanément Rammstein qui beuglait en allemand dans les enceintes des portières. Mr.Magnum leva un majeur bien haut et bougonna une insulte.
Mr.Magnum- Enorme floodeur
- Nombre de messages : 2475
Age : 42
Localisation : Dans les limbes torturées d'un esprit dérangé.
Date d'inscription : 18/01/2005
Re: Traumenschar
(partie 2)
« Magnum, demanda Haschatan, on ne devrait pas plutôt rouler sur une route où a eu lieu des accidents grave, plutôt que de foncer au hasard ?
-Connais-tu un endroit où il y a eu plus d’accidents que sur une voie rapide ? » lui demanda Erwan d’un ton moqueur. Haschatan leva son index en signe de protestation, puis reposa sa main sur sa cuisse, vaincu.
« Au pire, dit-il en regardant au dehors, on aura fait une belle balade et…
-Regardez devant ! »
Tous suivirent la direction du doigt de Mr.Magnum qui montrait une forme blanchâtre au loin, sur le coté de la route. Une personne, sans nul doute, qui était debout sur la bande d’arrêt d’urgence, manifestement immobile et habillée de blanc. Mr.Magnum jubilait intérieurement : « Je suis sûr et certain que c’est elle, la dame blanche. »
Au fur et à mesure que la distance se réduisait, tous découvraient la superbe beauté pâle qui se tenait sur les graviers à quelques centaines de mètres du groupe de voyageurs. Mr.Magnum oublia momentanément l’attitude pour le moins étrange de Fury et se prépara à tout éventualité. Allait-elle se jeter sur eux ? Allait-elle tendre le pouce ? Allait-elle se contenter de les laisser passer sans bouger ?
Cinq cents mètres à peine.
L’autoradio commença à émettre des grésillements par-dessus Butterfly and Hurricanes de Muse, rendant la musique inintelligible. Mais personne ne le remarqua.
Quatre cents mètres.
K-Ro, sans s’en rendre particulièrement compte, attrapa la main d’Erwan et la serra. Ce dernier eut une bouffée de chaleur mais n’opposa aucune résistance.
Trois cents mètres.
Les grésillements augmentaient et la musique se réduisait à un bourdonnement inaudible tandis qu’ils se rapprochaient de la femme. On apercevait distinctement un sourire mélancolique sur son visage d’une blancheur fantomatique.
Deux cents mètres.
Haschatan émit un rire nerveux et bref. K-Ro agrippa la main d’Erwan qui fixait les yeux de la dame blanche, maintenant visibles et exprimant une sorte de tristesse affectée. Elle semblait se complaire intérieurement dans ce ‘travail’ qui consistait à entraîner des innocents dans les méandres de la mort.
Erwan songea, une fraction de seconde, qu’elle-même avait été innocente avant de subir la mort, accidentellement ou intentionnellement, et il en vint même à la prendre en pitié, alors que son regard se plongeait dans les deux orbites vides et froides de l’apparition.
Cent mètres.
Mr.Magnum sentit ses tripes se nouer, et il se demanda avec une dérision mordante s’il n’allait pas se vider dans les secondes qui arrivaient. Il se posa même la question de savoir si les vêtements sales et malodorants allaient eux aussi l’accompagner dans le royaume des morts. Sans prendre la peine de rire, il courba imperceptiblement l’échine et appuya encore sur l’accélérateur, faisant bondir la Renault sur l’asphalte.
Les grésillements s’accentuèrent encore à l’approche du fantôme immaculé et le son strident semblait venir de partout en même temps, emplissant leurs oreilles et leurs bouches, les empêchant de crier ou de se débattre. La dame blanche était bientôt sur eux, à leur droite, et tous fermèrent les yeux lorsqu’ils l’atteignirent enfin.
***
K-Ro ouvrit un œil, hésitante. Elle regarda la route qui défilait encore devant elle à toute allure. Puis elle regarda ses camarades et vit que tous attendaient une quelconque action extérieure : Un accident, un hurlement. La mort.
La nationale entama un virage et la voiture se rapprocha dangereusement du bord. Elle relâcha rapidement la main d’Erwan ; Tiens ? Je lui tenais la main ? ; pour attraper l’épaule de Mr.Magnum qui avait toujours les yeux clos.
« Magnum ! hurla-t-elle. La route !
-Hein ? Quoi ? » Mr.Magnum corrigea la trajectoire d’un coup de volant qui acheva de tous les sortir de la transe dans laquelle ils s’étaient sciemment plongés. « Ça fait deux fois… » murmura K-Ro. Haschatan sembla regarder partout à la fois, puis déclara d’une manière implacable :
« On est toujours vivant. »
La remarque fut accueillie par des rires tendus. Fury se pencha pour regarder dans le rétroviseur latéral afin de vérifier si la dame blanche se trouvait toujours là.
« Rien, aboya-t-il entre deux gloussements. Si jamais elle avait bien été là, comme nous l’avons vu, elle n’y est plus.
-On a du rêver, déduisit hâtivement Erwan à voix haute.
-Un rêve collectif ? ricana Haschatan. On l’a tous vu au même endroit, avec la même lueur de joie malsaine dans le regard, non ? »
La question resta en suspend dans la voiture. Le grésillement avait cessé et un nouveau groupe se succéda à l’autre, braillant des paroles dans un américain familier. Mr.Magnum tapota le volant de ses doigts recouverts de cuir et chantonna en rythme. K-Ro se frotta les yeux, et n’osait plus regarder Erwan.
« Bon, que fait-on alors ? s’exclama Haschatan, rompant le silence. On ne va pas passer notre vie sur la route, il est maintenant cinq heures passées, et comme cette expérience a foiré, autant rentrer à l’hôtel et prendre du repos. Tu n’en as pas marre de conduire Magnum ? Moi j’ai mal au cul et j’ai les jambes ankylosées. »
Mr.Magnum approuva en hochant la tête et décida de faire demi-tour à la prochaine sortie. Cette mission, la première, était un échec sur toute la ligne. Ils avaient bien vu la dame blanche, mais celle-ci n’avait rien fait d’autre que dérégler temporairement l’autoradio et leur donner une belle frousse. Il ralentit ostensiblement, restant au dessus des limites de vitesses, mais préférant limiter les risques pour ce soir.
« Nous réessaierons demain, d’accord ? dit-il d’une voix fatiguée. Tu as raison, Haschatan, rentrons.
-Qui vous dit que l’expérience a raté ? »
Tous, sauf Mr.Magnum, se retournèrent vers Erwan. Il arborait un sourire charmant, et son visage tendu et sérieux lui donnait les quelques années qui lui manquaient pour être un jeune homme au summum de sa séduction. Il se remit machinalement une mèche en place de la main et regarda fixement K-Ro.
« Nous vous rappelez-vous pas les différentes histoires de la dame blanche dont je vous ai parlé tout à l’heure ? Celle que vous ne prenez pas en stop et qui revient peu de temps après, ça ne vous dit rien? »
Comme pour répondre à la question d’Erwan, le poste se remit à crépiter d’un seul coup, et tous sursautèrent. Erwan, impassible, fixa à nouveau K-Ro, qui cherchait l’apparition prochaine du spectre tueur en scrutant l’obscurité extérieure par toutes les fenêtres à la fois. Erwan lui prit la main, qui était gelée par la peur, l’obligeant à poser ses yeux sur lui.
« La voilà. » chuchota-t-il.
Les parasites s’amplifièrent et les quatre enceintes tremblèrent dans les portières et sur la plage arrière. Une fumée grisâtre commença à sortir du poste radio et le bruit devenait assourdissant. Mr.Magnum lâcha le volant, portant les mains à ses oreilles et commença à hurler en chœur avec ses passagers.
Fury se recroquevilla sur lui-même, tendant sa ceinture de sécurité au maximum. Haschatan criait, raide comme un piquet sur le siège arrière, sa jambe gauche secouée de spasmes qui envoyait des coups de pied dans le dos de Mr.Magnum. K-Ro et Erwan s’enlacèrent, plus par réflexe que par envie spéciale.
Seul Mr.Magnum la vit.
Il regarda la femme qui, debout et figée, les rattrapait dans le rétroviseur. Il hurlait, et il le savait, mais il ne pouvait pas s’en empêcher. La femme au teint blafard la regardait avec des yeux immenses et emplis d’affliction. Les crachats incessants des enceintes couvraient tout autre bruit, et pourtant, lorsque la dame blanche desserra ses lèvres, Mr.Magnum savait qu’il l’entendrait sa complainte.
Le trou noir qui s’ouvrait en lieu et place de sa bouche lui donna une vision du néant. Il hurla à nouveau, mais le gémissement de la dame blanche commença et tout sombra dans un tourbillon ténébreux.
Sur la nationale, la voiture fit une embardée, toucha une barrière de sécurité, et entama une longue série de tonneaux qui s’achevèrent quelques centaines de mètres plus loin dans une gigantesque explosion.
« Magnum, demanda Haschatan, on ne devrait pas plutôt rouler sur une route où a eu lieu des accidents grave, plutôt que de foncer au hasard ?
-Connais-tu un endroit où il y a eu plus d’accidents que sur une voie rapide ? » lui demanda Erwan d’un ton moqueur. Haschatan leva son index en signe de protestation, puis reposa sa main sur sa cuisse, vaincu.
« Au pire, dit-il en regardant au dehors, on aura fait une belle balade et…
-Regardez devant ! »
Tous suivirent la direction du doigt de Mr.Magnum qui montrait une forme blanchâtre au loin, sur le coté de la route. Une personne, sans nul doute, qui était debout sur la bande d’arrêt d’urgence, manifestement immobile et habillée de blanc. Mr.Magnum jubilait intérieurement : « Je suis sûr et certain que c’est elle, la dame blanche. »
Au fur et à mesure que la distance se réduisait, tous découvraient la superbe beauté pâle qui se tenait sur les graviers à quelques centaines de mètres du groupe de voyageurs. Mr.Magnum oublia momentanément l’attitude pour le moins étrange de Fury et se prépara à tout éventualité. Allait-elle se jeter sur eux ? Allait-elle tendre le pouce ? Allait-elle se contenter de les laisser passer sans bouger ?
Cinq cents mètres à peine.
L’autoradio commença à émettre des grésillements par-dessus Butterfly and Hurricanes de Muse, rendant la musique inintelligible. Mais personne ne le remarqua.
Quatre cents mètres.
K-Ro, sans s’en rendre particulièrement compte, attrapa la main d’Erwan et la serra. Ce dernier eut une bouffée de chaleur mais n’opposa aucune résistance.
Trois cents mètres.
Les grésillements augmentaient et la musique se réduisait à un bourdonnement inaudible tandis qu’ils se rapprochaient de la femme. On apercevait distinctement un sourire mélancolique sur son visage d’une blancheur fantomatique.
Deux cents mètres.
Haschatan émit un rire nerveux et bref. K-Ro agrippa la main d’Erwan qui fixait les yeux de la dame blanche, maintenant visibles et exprimant une sorte de tristesse affectée. Elle semblait se complaire intérieurement dans ce ‘travail’ qui consistait à entraîner des innocents dans les méandres de la mort.
Erwan songea, une fraction de seconde, qu’elle-même avait été innocente avant de subir la mort, accidentellement ou intentionnellement, et il en vint même à la prendre en pitié, alors que son regard se plongeait dans les deux orbites vides et froides de l’apparition.
Cent mètres.
Mr.Magnum sentit ses tripes se nouer, et il se demanda avec une dérision mordante s’il n’allait pas se vider dans les secondes qui arrivaient. Il se posa même la question de savoir si les vêtements sales et malodorants allaient eux aussi l’accompagner dans le royaume des morts. Sans prendre la peine de rire, il courba imperceptiblement l’échine et appuya encore sur l’accélérateur, faisant bondir la Renault sur l’asphalte.
Les grésillements s’accentuèrent encore à l’approche du fantôme immaculé et le son strident semblait venir de partout en même temps, emplissant leurs oreilles et leurs bouches, les empêchant de crier ou de se débattre. La dame blanche était bientôt sur eux, à leur droite, et tous fermèrent les yeux lorsqu’ils l’atteignirent enfin.
***
K-Ro ouvrit un œil, hésitante. Elle regarda la route qui défilait encore devant elle à toute allure. Puis elle regarda ses camarades et vit que tous attendaient une quelconque action extérieure : Un accident, un hurlement. La mort.
La nationale entama un virage et la voiture se rapprocha dangereusement du bord. Elle relâcha rapidement la main d’Erwan ; Tiens ? Je lui tenais la main ? ; pour attraper l’épaule de Mr.Magnum qui avait toujours les yeux clos.
« Magnum ! hurla-t-elle. La route !
-Hein ? Quoi ? » Mr.Magnum corrigea la trajectoire d’un coup de volant qui acheva de tous les sortir de la transe dans laquelle ils s’étaient sciemment plongés. « Ça fait deux fois… » murmura K-Ro. Haschatan sembla regarder partout à la fois, puis déclara d’une manière implacable :
« On est toujours vivant. »
La remarque fut accueillie par des rires tendus. Fury se pencha pour regarder dans le rétroviseur latéral afin de vérifier si la dame blanche se trouvait toujours là.
« Rien, aboya-t-il entre deux gloussements. Si jamais elle avait bien été là, comme nous l’avons vu, elle n’y est plus.
-On a du rêver, déduisit hâtivement Erwan à voix haute.
-Un rêve collectif ? ricana Haschatan. On l’a tous vu au même endroit, avec la même lueur de joie malsaine dans le regard, non ? »
La question resta en suspend dans la voiture. Le grésillement avait cessé et un nouveau groupe se succéda à l’autre, braillant des paroles dans un américain familier. Mr.Magnum tapota le volant de ses doigts recouverts de cuir et chantonna en rythme. K-Ro se frotta les yeux, et n’osait plus regarder Erwan.
« Bon, que fait-on alors ? s’exclama Haschatan, rompant le silence. On ne va pas passer notre vie sur la route, il est maintenant cinq heures passées, et comme cette expérience a foiré, autant rentrer à l’hôtel et prendre du repos. Tu n’en as pas marre de conduire Magnum ? Moi j’ai mal au cul et j’ai les jambes ankylosées. »
Mr.Magnum approuva en hochant la tête et décida de faire demi-tour à la prochaine sortie. Cette mission, la première, était un échec sur toute la ligne. Ils avaient bien vu la dame blanche, mais celle-ci n’avait rien fait d’autre que dérégler temporairement l’autoradio et leur donner une belle frousse. Il ralentit ostensiblement, restant au dessus des limites de vitesses, mais préférant limiter les risques pour ce soir.
« Nous réessaierons demain, d’accord ? dit-il d’une voix fatiguée. Tu as raison, Haschatan, rentrons.
-Qui vous dit que l’expérience a raté ? »
Tous, sauf Mr.Magnum, se retournèrent vers Erwan. Il arborait un sourire charmant, et son visage tendu et sérieux lui donnait les quelques années qui lui manquaient pour être un jeune homme au summum de sa séduction. Il se remit machinalement une mèche en place de la main et regarda fixement K-Ro.
« Nous vous rappelez-vous pas les différentes histoires de la dame blanche dont je vous ai parlé tout à l’heure ? Celle que vous ne prenez pas en stop et qui revient peu de temps après, ça ne vous dit rien? »
Comme pour répondre à la question d’Erwan, le poste se remit à crépiter d’un seul coup, et tous sursautèrent. Erwan, impassible, fixa à nouveau K-Ro, qui cherchait l’apparition prochaine du spectre tueur en scrutant l’obscurité extérieure par toutes les fenêtres à la fois. Erwan lui prit la main, qui était gelée par la peur, l’obligeant à poser ses yeux sur lui.
« La voilà. » chuchota-t-il.
Les parasites s’amplifièrent et les quatre enceintes tremblèrent dans les portières et sur la plage arrière. Une fumée grisâtre commença à sortir du poste radio et le bruit devenait assourdissant. Mr.Magnum lâcha le volant, portant les mains à ses oreilles et commença à hurler en chœur avec ses passagers.
Fury se recroquevilla sur lui-même, tendant sa ceinture de sécurité au maximum. Haschatan criait, raide comme un piquet sur le siège arrière, sa jambe gauche secouée de spasmes qui envoyait des coups de pied dans le dos de Mr.Magnum. K-Ro et Erwan s’enlacèrent, plus par réflexe que par envie spéciale.
Seul Mr.Magnum la vit.
Il regarda la femme qui, debout et figée, les rattrapait dans le rétroviseur. Il hurlait, et il le savait, mais il ne pouvait pas s’en empêcher. La femme au teint blafard la regardait avec des yeux immenses et emplis d’affliction. Les crachats incessants des enceintes couvraient tout autre bruit, et pourtant, lorsque la dame blanche desserra ses lèvres, Mr.Magnum savait qu’il l’entendrait sa complainte.
Le trou noir qui s’ouvrait en lieu et place de sa bouche lui donna une vision du néant. Il hurla à nouveau, mais le gémissement de la dame blanche commença et tout sombra dans un tourbillon ténébreux.
Sur la nationale, la voiture fit une embardée, toucha une barrière de sécurité, et entama une longue série de tonneaux qui s’achevèrent quelques centaines de mètres plus loin dans une gigantesque explosion.
Mr.Magnum- Enorme floodeur
- Nombre de messages : 2475
Age : 42
Localisation : Dans les limbes torturées d'un esprit dérangé.
Date d'inscription : 18/01/2005
Re: Traumenschar
(partie 1)
2. Métamorphoses.
Mr.Magnum se sentit partir comme lorsqu’il avait sauté à l’élastique lors d’une des nombreuses foires où il était allé. On saute, et puis plus rien ne vous rattache au sol. On oublie l’élastique qui vous sangle à la taille et à l’abdomen jusqu’au moment où il vous retient de vous écraser au sol comme une vulgaire poche remplie de sang et de boyaux.
Et là, c’était la même chose. Mr.Magnum avait vu la femme se rapprocher, se mettre à hurler par delà le vrombissement de la voiture, par delà les parasites de la radio, par delà les cris de peur de ses amis. Elle avait hurlé directement dans son cerveau, directement à son âme, juste avant qu’il ne saute dans le noir.
Mr.Magnum se rectifia de lui-même : Non, ce n’était pas la même chose que de sauter à l’élastique. Lorsqu’on sautait à l’élastique, on voyait tout d’abord l’immense paysage qui nous entourait, puis notre regard se baissait sur le sol et sur la foule qui s’amassait afin de se repaître de notre spectacle, puis le sol qui se jetait sur nous.
Là, le passage de vie à trépas s’était fait dans le noir le plus absolu. Un instant, il était dans la voiture, et l’instant d’après, plus rien. C’était à la fois mieux et pire que de voir ce qui vous arrivait dessus à toute vapeur. Pire, parce que vous ignorez parfaitement ce qui risque de vous arriver. Mieux, parce que vous avez moins peur, grâce à ça.
Néanmoins, Mr.Magnum se demandait ce qui allait se passer. Il flottait dans un abîme de ténèbres et n’osait pas ouvrir les yeux pour voir ce qui l’entourait. Sa mort dans sa chambre avait été tellement différente. Et s’il s’était fourvoyé sur toute la ligne ? S’il n’avait fait que tuer quatre personnes qui n’avaient rien demandé juste pour satisfaire une lubie qui consistait à se croire le sauveur des âmes ?
Il chassa ces pensées de sa tête en la secouant de droite à gauche. Il chercha avec ses mains une surface concrète pour la toucher, un endroit pour se poser, quelque chose, ou quelqu’un, à quoi ou qui s’accrocher.
Quelqu’un.
« Erwan ? » cria-t-il dans l’immensité de vide qui se trouvait tout autour de lui. Sa voix résonnait mais ne semblait rencontrer aucun obstacle sur lesquels se répercuter. Prenant son courage à deux mains, et inquiet de n’entendre aucune réponse, il ouvrit les yeux.
Et là, il vit…
*
* *
Haschatan tourbillonnait sans fin depuis quelques minutes. Il avait plus conscience de tourner sur lui-même qu’il n’en avait de preuve, mais cette sensation lui suffisait amplement pour lui filer la nausée. Il avait essayé de s’arrêter en tendant les bras, se disant qu’à un moment ou un autre il finirait forcément par agripper quelque chose.
Mais il avait rapidement abandonné l’idée, tout comme celle d’appeler ses camarades. Il se demandait ce qui avait bien pu leur arriver, depuis l’explosion. Les yeux fermés, il se remémorait une énième fois sa mort, riant intérieurement du paradoxe qu’impliquait le fait qu’il puisse y songer.
Les grésillements lui avaient mordu les tympans jusqu’à ce qu’il ait cru devenir fou. Il avait sincèrement pensé que si toute cette cacophonie continuait plus longtemps, son cerveau allait passer en mode autodestruction et qu’il allait perdre la raison. Mais, aussi soudainement que les crépitements avaient refait leur apparition, une voix de femme avait submergé son esprit et il avait ouvert les yeux.
Il n’avait pas vu la dame blanche, mais il avait vu la voiture foncer sur la barrière et prendre son envol. Il se souvenait même d’avoir vu la constellation de la grande ourse dans le ciel dégagé avant que la voiture ne se mette à tourner sur elle-même. Elle avait rebondi une fois sur le capot, qui avait plié et empêché Haschatan de voir la suite par le pare-brise, puis la seconde fois, il avait vu le sol se rapprocher de son coté avant que sa fenêtre se brise et que son crâne n’aille se répandre sur la lunette arrière.
Puis, plus rien.
Il avait repris conscience ici, virevoltant sur lui-même comme une toupie folle, ou comme une voiture faisant des tonneaux, les yeux fermés hermétiquement, et ne cessait de se demander quand il allait toucher terre. Un bruissement lui parvint de par la droite, comme si une chose se développait ou s’agrandissait de manière désordonnée. Des craquements, peut-être, ou alors autre chose.
Quelqu’un hurla un mot, ou un nom, loin de lui. N’y tenant plus, il décida d’ouvrir les yeux et remarqua que…
*
* *
Fury respirait par saccades.
Son torse avait été écrasé par le moteur dans l’accident, et bien qu’il n’en ait rien vu, il gardait une intense impression d’étouffement sur la poitrine, comme si une main puissante se pressait sur ses poumons. Il tenta de se calmer en se focalisant sur Séphy-Roshou, mais il n’arriva qu’à se demander s’ils avaient choisis la bonne option en entreprenant ce projet.
Mais bientôt, son attention fut accaparée par autre chose : Son corps.
Son corps tout entier changeait, grandissait, se distendait. Il sentit ses muscles gonfler sous sa peau, son cœur battre dans ses tempes et son cou lui faisait l’impression d’un sac plastique qu’on remplissait à l’extrême. Il n’avait pas mal
Peut-on avoir mal dans la mort ?
mais les mutations le gênaient sans ses mouvements. Et les bruits qui accompagnaient ces changements étaient répugnants. On aurait dit un piétinement de cadavre en putréfaction, de chairs qui se rompaient, d’os brisés, de sang collant et d’organes éclatés. Il se passa une main sur le torse et y découvrit des muscles qui n’y étaient pas moins d’une heure auparavant.
« Évidemment, une heure avant, tu n’étais pas mort, ahuri ! dit la voix du lutin, une voix éraillée mais néanmoins sirupeuse. Si ce crétin de Magnum ne t’avait pas entraîné là-dedans, tu ne serais pas entrain de te changer en monstre…
-En monstre ? » répondit Fury à voix haute sans le vouloir. Ses paroles lui parvinrent comme celles d’un autre, et il approcha ses deux mains à sa bouche. Deux mains gigantesques qui ne lui appartenaient pas. Il n’eut pas le temps de réfléchir à la question que monsieur le lutin éclata de rire dans sa tête.
« Bien entendu ! éructa le farfadet en riant. Tu ne penses tout de même pas que tu vas te changer en autre chose ? Si ? Tu crois quoi, pauvre ignorant mon ami, que la mort va te donner la beauté et l’intelligence infinie ? »
La dernière syllabe rebondit contre les parois de son esprit pendant ce qui lui parut de nombreuses minutes, mais en réalité seulement quelques secondes s’écoulèrent entre les mots qu’avait prononcé Fury et la réponse d’Haschatan lui parvenant de devant lui.
« Fury ? C’est toi ? Qu’est-ce que tu as dit ?
-Je… commença Fury. Rien, je n’ai rien dit. Où est-on ?
-Tu as ouvert les yeux ?
-Non, répondit Fury du tac au tac. Je n’ose pas.
-Je sais, c’était pareil pour moi ? avoua Haschatan avec une pointe d’amusement. Mais ouvre-les maintenant, tu verras, c’est… » Il n’acheva pas sa phrase. Fury, interloqué et profondément curieux, ouvrit alors les yeux, et vit que, effectivement, c’était…
2. Métamorphoses.
Mr.Magnum se sentit partir comme lorsqu’il avait sauté à l’élastique lors d’une des nombreuses foires où il était allé. On saute, et puis plus rien ne vous rattache au sol. On oublie l’élastique qui vous sangle à la taille et à l’abdomen jusqu’au moment où il vous retient de vous écraser au sol comme une vulgaire poche remplie de sang et de boyaux.
Et là, c’était la même chose. Mr.Magnum avait vu la femme se rapprocher, se mettre à hurler par delà le vrombissement de la voiture, par delà les parasites de la radio, par delà les cris de peur de ses amis. Elle avait hurlé directement dans son cerveau, directement à son âme, juste avant qu’il ne saute dans le noir.
Mr.Magnum se rectifia de lui-même : Non, ce n’était pas la même chose que de sauter à l’élastique. Lorsqu’on sautait à l’élastique, on voyait tout d’abord l’immense paysage qui nous entourait, puis notre regard se baissait sur le sol et sur la foule qui s’amassait afin de se repaître de notre spectacle, puis le sol qui se jetait sur nous.
Là, le passage de vie à trépas s’était fait dans le noir le plus absolu. Un instant, il était dans la voiture, et l’instant d’après, plus rien. C’était à la fois mieux et pire que de voir ce qui vous arrivait dessus à toute vapeur. Pire, parce que vous ignorez parfaitement ce qui risque de vous arriver. Mieux, parce que vous avez moins peur, grâce à ça.
Néanmoins, Mr.Magnum se demandait ce qui allait se passer. Il flottait dans un abîme de ténèbres et n’osait pas ouvrir les yeux pour voir ce qui l’entourait. Sa mort dans sa chambre avait été tellement différente. Et s’il s’était fourvoyé sur toute la ligne ? S’il n’avait fait que tuer quatre personnes qui n’avaient rien demandé juste pour satisfaire une lubie qui consistait à se croire le sauveur des âmes ?
Il chassa ces pensées de sa tête en la secouant de droite à gauche. Il chercha avec ses mains une surface concrète pour la toucher, un endroit pour se poser, quelque chose, ou quelqu’un, à quoi ou qui s’accrocher.
Quelqu’un.
« Erwan ? » cria-t-il dans l’immensité de vide qui se trouvait tout autour de lui. Sa voix résonnait mais ne semblait rencontrer aucun obstacle sur lesquels se répercuter. Prenant son courage à deux mains, et inquiet de n’entendre aucune réponse, il ouvrit les yeux.
Et là, il vit…
*
* *
Haschatan tourbillonnait sans fin depuis quelques minutes. Il avait plus conscience de tourner sur lui-même qu’il n’en avait de preuve, mais cette sensation lui suffisait amplement pour lui filer la nausée. Il avait essayé de s’arrêter en tendant les bras, se disant qu’à un moment ou un autre il finirait forcément par agripper quelque chose.
Mais il avait rapidement abandonné l’idée, tout comme celle d’appeler ses camarades. Il se demandait ce qui avait bien pu leur arriver, depuis l’explosion. Les yeux fermés, il se remémorait une énième fois sa mort, riant intérieurement du paradoxe qu’impliquait le fait qu’il puisse y songer.
Les grésillements lui avaient mordu les tympans jusqu’à ce qu’il ait cru devenir fou. Il avait sincèrement pensé que si toute cette cacophonie continuait plus longtemps, son cerveau allait passer en mode autodestruction et qu’il allait perdre la raison. Mais, aussi soudainement que les crépitements avaient refait leur apparition, une voix de femme avait submergé son esprit et il avait ouvert les yeux.
Il n’avait pas vu la dame blanche, mais il avait vu la voiture foncer sur la barrière et prendre son envol. Il se souvenait même d’avoir vu la constellation de la grande ourse dans le ciel dégagé avant que la voiture ne se mette à tourner sur elle-même. Elle avait rebondi une fois sur le capot, qui avait plié et empêché Haschatan de voir la suite par le pare-brise, puis la seconde fois, il avait vu le sol se rapprocher de son coté avant que sa fenêtre se brise et que son crâne n’aille se répandre sur la lunette arrière.
Puis, plus rien.
Il avait repris conscience ici, virevoltant sur lui-même comme une toupie folle, ou comme une voiture faisant des tonneaux, les yeux fermés hermétiquement, et ne cessait de se demander quand il allait toucher terre. Un bruissement lui parvint de par la droite, comme si une chose se développait ou s’agrandissait de manière désordonnée. Des craquements, peut-être, ou alors autre chose.
Quelqu’un hurla un mot, ou un nom, loin de lui. N’y tenant plus, il décida d’ouvrir les yeux et remarqua que…
*
* *
Fury respirait par saccades.
Son torse avait été écrasé par le moteur dans l’accident, et bien qu’il n’en ait rien vu, il gardait une intense impression d’étouffement sur la poitrine, comme si une main puissante se pressait sur ses poumons. Il tenta de se calmer en se focalisant sur Séphy-Roshou, mais il n’arriva qu’à se demander s’ils avaient choisis la bonne option en entreprenant ce projet.
Mais bientôt, son attention fut accaparée par autre chose : Son corps.
Son corps tout entier changeait, grandissait, se distendait. Il sentit ses muscles gonfler sous sa peau, son cœur battre dans ses tempes et son cou lui faisait l’impression d’un sac plastique qu’on remplissait à l’extrême. Il n’avait pas mal
Peut-on avoir mal dans la mort ?
mais les mutations le gênaient sans ses mouvements. Et les bruits qui accompagnaient ces changements étaient répugnants. On aurait dit un piétinement de cadavre en putréfaction, de chairs qui se rompaient, d’os brisés, de sang collant et d’organes éclatés. Il se passa une main sur le torse et y découvrit des muscles qui n’y étaient pas moins d’une heure auparavant.
« Évidemment, une heure avant, tu n’étais pas mort, ahuri ! dit la voix du lutin, une voix éraillée mais néanmoins sirupeuse. Si ce crétin de Magnum ne t’avait pas entraîné là-dedans, tu ne serais pas entrain de te changer en monstre…
-En monstre ? » répondit Fury à voix haute sans le vouloir. Ses paroles lui parvinrent comme celles d’un autre, et il approcha ses deux mains à sa bouche. Deux mains gigantesques qui ne lui appartenaient pas. Il n’eut pas le temps de réfléchir à la question que monsieur le lutin éclata de rire dans sa tête.
« Bien entendu ! éructa le farfadet en riant. Tu ne penses tout de même pas que tu vas te changer en autre chose ? Si ? Tu crois quoi, pauvre ignorant mon ami, que la mort va te donner la beauté et l’intelligence infinie ? »
La dernière syllabe rebondit contre les parois de son esprit pendant ce qui lui parut de nombreuses minutes, mais en réalité seulement quelques secondes s’écoulèrent entre les mots qu’avait prononcé Fury et la réponse d’Haschatan lui parvenant de devant lui.
« Fury ? C’est toi ? Qu’est-ce que tu as dit ?
-Je… commença Fury. Rien, je n’ai rien dit. Où est-on ?
-Tu as ouvert les yeux ?
-Non, répondit Fury du tac au tac. Je n’ose pas.
-Je sais, c’était pareil pour moi ? avoua Haschatan avec une pointe d’amusement. Mais ouvre-les maintenant, tu verras, c’est… » Il n’acheva pas sa phrase. Fury, interloqué et profondément curieux, ouvrit alors les yeux, et vit que, effectivement, c’était…
Mr.Magnum- Enorme floodeur
- Nombre de messages : 2475
Age : 42
Localisation : Dans les limbes torturées d'un esprit dérangé.
Date d'inscription : 18/01/2005
Re: Traumenschar
(partie 2)
K-Ro en était encore à se demander ce qui lui avait pris de se jeter ainsi dans les bras d’Erwan lorsqu’elle avait entendu la voix de Mr.Magnum hurler justement ce nom/pseudo dans le néant où elle errait depuis quelques minutes.
Elle ne se souvenait pas le moins du monde de l’accident en lui-même, ni de ce qui l’avait provoqué, bien qu’elle se soit doutée qu’il ne s’agissait pas d’un simple carambolage. Néanmoins, elle ne pouvait s’empêcher de penser qu’il pouvait s’agir d’une nouvelle erreur d’inattention du conducteur qu’elle avait déjà rappelé à l’ordre par deux fois.
Mais pourquoi je me suis jetée ainsi dans ses bras ? se demanda-t-elle une nouvelle fois, sentant la chaleur lui monter aux joues tandis qu’elle se remémorait la scène. Tout était allé très vite : Les grésillements, les hurlements… Son hurlement à elle… Puis tout s’était secoué dans tout les sens et puis plus rien jusqu’à ce qu’elle se retrouve à voler ici, dans cet endroit qu’elle ne voulait pas voir.
Il m’a pris dans ses bras.
« Rha ! Mais c’est pas vrai ! Qu’est-ce que j’ai à penser à ça tout le temps ?! » brailla-t-elle. Le son retentit dans ses oreilles mais la sonorité ne suggérait pas un endroit fermé. Elle devait donc être dehors. Elle écouta les bruits alentour, mais il ne lui parvint qu’un silence dérangeant et presque oppressant.
« Si j’étais dehors, c’est sûr que j’entendrais des bruits comme le vents, des voitures, ou même des trucs vivants, quoi… maugréa-t-elle.
-Il suffirait d’ouvrir les yeux pour savoir » dit une voix non loin d’elle. K-Ro se tourna dans la direction de la voix, sans ouvrir les yeux. Elle avait reconnu le timbre calme d’Erwan, mais n’osait trop y croire. Son cœur battait la chamade, et K-Ro due se concentrer pour calmer son rythme cardiaque et se convaincre que c’était le soulagement qu’elle ressentait et non un autre sentiment bien éloigné.
« Erwan ? C’est toi ?
-Oui, c’est moi, ne t’en fais pas. »
Sa voix se faisait plus forte, plus présente, preuve qu’il se rapprochait d’elle. K-Ro avança les mains devant elle, aveugle, pour le sentir arriver faut de le voir. Il parlait d’une voix posée mais K-Ro y devinait une sorte d’inquiétude sous-jacente. De plus, elle remarqua que son timbre avait changé. Pas complètement, on reconnaissait encore Erwan, mais le ton était plus grave et la façon de parlée plus mûre. Plus réfléchie.
Plus adulte.
Elle sentit alors le bras d’Erwan rencontrer ses doigts, et elle referma sa main sur le tissu en cuir du pardessus qu’il portait. Portait-il un pardessus lorsqu’il était avec nous dans la voiture ? K-Ro ne se souvenait que de sa chemise lorsqu’elle y avait posé la joue quand
il m’avait pris dans ses bras…
l’accident avait eu lieu. Elle ouvrit la bouche pour le dire, mais Erwan la devança :
« Alors toi aussi tu as peur d’ouvrir les yeux pour découvrir ce qu’il y a après la mort ?
-Pas exactement, non, mais… » Elle hésita un instant, avala sa salive et, tenant toujours Erwan par la manche, inspira un grand coup et dit : « J’ai peur de découvrir qu’il n’y ait rien après la mort, voilà ce dont j’ai peur. »
La remarque sembla faire mouche car Erwan ne dit rien. K-Ro laissa le silence s’installer, puis appela son compagnon pour savoir s’il était encore présent. Elle tenait toujours son bras, mais elle préférait l’entendre de vive voix.
« Excuses-moi, mais j’ai remarqué une chose : Ta voix.
-Oui, et alors ? dit-elle, impatiente. Qu’est-ce qu’elle a ma voix ?
-Elle est plus aiguë. »
K-Ro porta une main ses fines lèvres et n’osa plus prononcer un mot, indécise, tiraillée entre l’envie de savoir si effectivement elle parlait d’une manière anormale ou si Erwan avait tort et l’envie de lui prouver. Elle finit par articuler un ‘Vraiment ?’ d’une voix encore plus haut perchée, et les deux acolytes éclatèrent de rire simultanément.
« Je crois même que c’est de pire en pire ! » pouffa Erwan entre deux rires graves. K-Ro s’esclaffa en entendant la façon de rire de son ami :
« Toi aussi, ta voix a muée !!
-Vraiment ? » dit Erwan avec les mêmes intonations de K-Ro peu de temps avant, mais quelques milliers d’octaves plus bas. Et ils se remirent à rire de bon cœur. Lorsqu’ils furent enfin calmés de leur fou rire, ils entendirent enfin des voix qui leur parvenaient de leur gauche. Erwan se tourna dans cette direction, et K-Ro se cacha derrière lui, sur ses gardes.
« Qui est-ce ? » demanda-t-elle de sa voix qui les avait tant faire rire il y a peu et qui maintenant était pleine d'appréhension. K-Ro sentit les épaules d’Erwan se hausser et il ajouta, comme pour confirmer ce geste :
« Aucune idée : J’ai les yeux fermés. Mais je crois avoir reconnu la voix d’Haschatan.
-Ce serait donc Magnum, Fury et Haschatan ? »
Nouveau haussement d’épaules.
« Aucune idée. Je vais les appeler et nous serons fixés. De toute façon, je n’ai aucune envie de moisir ici pour l’éternité.
-Moi non plus. » dit K-Ro en serrant fort la manche d’Erwan, tandis que celui-ci hélait ses amis du plus fort de sa voix. K-Ro attendit quelques minutes, et se joignit à lui dans un duo comique a capella.
Quelques minutes plus tard, ils furent rejoins par le groupe Haschatan/Fury/Magnum qui s’émerveillaient mutuellement à coups de Regarde-moi ça, là bas ! ou encore Tu as vu cette beauté, au loin ?, et Erwan sentait qu’ils souriaient à leur ton enjoués.
« Vous en êtes encore au stade des yeux fermés ? s’étonna Fury en s’approchant d’Erwan. Ne vous en faites pas, ouvrez les yeux, c’est superbe.
-Vous êtes sûrs ? hasarda K-Ro.
-Parfaitement sûr, la rassura Mr.Magnum en la décrochant du bras d’Erwan. Vas-y, écarte tes paupières et admire. »
Soulagée de ne pas découvrir le néant absolu après la mort, K-Ro ouvrit ses yeux et Erwan la suivit de près, surtout pour savoir ce qui impliquait tant d’émerveillement de ses compagnons morts.
*
* *
Le décor dans lequel ils évoluaient depuis leur arrivée ne cessait de changer, de se mouvoir. Les nuances pastelles se succédaient sans jamais se répéter, passant du fuchsia au turquoise, puis au parme parsemé d’étoiles émeraudes fleurissantes qui s’étiolaient pour se fondrent dans des nuages couleur rouille.
Lorsque Erwan eut ouvert à son tour les yeux, les choses semblèrent s’accélérer. Les mélanges de couleurs qui ressemblaient à deux peintures liquides qu’on diluait les unes dans les autres s’intensifièrent, et les tons devinrent plus vifs, presque aveuglants, tandis que le groupe d’aventuriers plongeait vers le bas. Ils n’avaient aucun moyen de savoir dans quelle direction ils allaient, néanmoins tous avaient la sensation de descendre à une allure vertigineuse. Le décor tourna un instant sur lui-même puis tout se figea.
Ils se retrouvèrent sur la terre ferme.
Mr.Magnum vacilla et tomba à genoux. Il posa ses deux mains gantées sur le sol, et sentit son ventre se retourner. Il resta ainsi quelques minutes, attendant que la vague de nausée passe, puis daigna lever les yeux sur ses camarades, qui inspectaient les alentours. Erwan était pâle, mais semblait tenir le choc. Fury examinait un buisson sur le bord de la route, tripotant les feuilles entre ses doigts, et Haschatan marchait vers K-Ro. Il titubait un peu, mais tenait debout au moins, lui.
« Où est-ce qu’on est tombé ? demanda Fury, abandonnant son buisson feuillu.
-Aucune idée, répondit Erwan, reprenant peu à peu des couleurs. Le fait est que nous sommes sur un chemin en terre et qu’il fait jour.
-Et les oiseaux chantent : Cui cui, cui cui… » conclu Haschatan en s’agrippant à un arbre. Il paraissait saoul, mais en bonne santé. C’est à ce moment là que Mr.Magnum s’aperçut du changement. Des changements. Il s’assit par terre et éclata de rire. Tous se retournèrent vers lui, abandonnant la contemplation du paysage et écarquillèrent les yeux.
Le changement n’avait pas été flagrant pour Mr.Magnum : Il avait simplement perdu un peu de poids, grandi légèrement et était devenu plus élancé, plus souple, plus gracieux. Une arme, un Magnum, était apparu à son flanc droit, imbriquée dans un holster à peine dissimulé par son long trench-coat en cuir noir habituel. Sa chemise noire avait été remplacée par une blanche, et une cravate sombre était apparue, parfaitement nouée et rentrée dans une veste noire impeccable. Le reste ; ses gants, ses chaussures, son pantalon, tous noirs ; étaient restés inchangés. Une paire de lunettes noires s’était également posée sur son nez.
« Pourquoi tu te marres en me montrant du doigt ? »
Par contre, pour Fury, le changement était impossible à ne pas remarquer : Il avait doublé ou triplé de volume, et sa masse musculaire débordait de partout sous un débardeur noir moulant. Sa tête était devenue plus carrée qu’à l’origine, et son cou était aussi large que son visage, visage qui arborait une vision de la colère permanente. Il fixait Mr.Magnum avec ses yeux froids et une veine battait à sa tempe.
Erwan comprit soudainement les raisons de l’hilarité de son ami et se tourna vers Haschatan : Il n’avait, lui, pas changé de vêtement ni de corps, mais sa personnalité en avait manifestement pris un sérieux coup : Il se roulait par terre en hurlant de rire, martelant le sol de ses poings. Erwan posa son regard sur ses pieds et y découvrit une paire de magnifiques bottes noires à fermetures en ceintures.
Un sourire éclaira son visage. C’était le vêtement d’Erwan, celui qu’il avait inventé de toute pièce : Un ensemble militaire à prédominance bleu, orné de motifs dorés en spirales. Il n’eut pas non plus besoin de tourner sa tête pour savoir que la cape qui claquait derrière lui était bordeaux, et que dans son fourreau attendait sa lame.
« Est-ce que quelqu’un peu m’expliquer, là ? demanda Fury, au comble de l’énervement. Magnum ! Pourquoi tu rigoles comme ça ? » Il tendit un immense doigt rageur vers lui et s’aperçut soudainement que ce bras musclé ne lui avait pas été attribué à la naissance et qu’il ne l’avait reçu que récemment. Mr.Magnum, toujours à terre, regarda Fury qui se détaillait maintenant, allant de surprise en surprise.
K-Ro avait rétrécit et son visage brillait d’un sourire farceur. Elle était vêtue d’un kimono dont la couleur oscillait entre le marron et le vert, et sa longue chevelure châtain descendait dans son dos, maintenue au bout par un nœud kaki. Ses grands yeux observaient ses compagnons et, élargissant encore plus son sourire, elle sortit une dizaine de feuillets de son kimono.
« Quelqu’un veut signer un contrat ? »
Et tous éclatèrent de rire.
K-Ro en était encore à se demander ce qui lui avait pris de se jeter ainsi dans les bras d’Erwan lorsqu’elle avait entendu la voix de Mr.Magnum hurler justement ce nom/pseudo dans le néant où elle errait depuis quelques minutes.
Elle ne se souvenait pas le moins du monde de l’accident en lui-même, ni de ce qui l’avait provoqué, bien qu’elle se soit doutée qu’il ne s’agissait pas d’un simple carambolage. Néanmoins, elle ne pouvait s’empêcher de penser qu’il pouvait s’agir d’une nouvelle erreur d’inattention du conducteur qu’elle avait déjà rappelé à l’ordre par deux fois.
Mais pourquoi je me suis jetée ainsi dans ses bras ? se demanda-t-elle une nouvelle fois, sentant la chaleur lui monter aux joues tandis qu’elle se remémorait la scène. Tout était allé très vite : Les grésillements, les hurlements… Son hurlement à elle… Puis tout s’était secoué dans tout les sens et puis plus rien jusqu’à ce qu’elle se retrouve à voler ici, dans cet endroit qu’elle ne voulait pas voir.
Il m’a pris dans ses bras.
« Rha ! Mais c’est pas vrai ! Qu’est-ce que j’ai à penser à ça tout le temps ?! » brailla-t-elle. Le son retentit dans ses oreilles mais la sonorité ne suggérait pas un endroit fermé. Elle devait donc être dehors. Elle écouta les bruits alentour, mais il ne lui parvint qu’un silence dérangeant et presque oppressant.
« Si j’étais dehors, c’est sûr que j’entendrais des bruits comme le vents, des voitures, ou même des trucs vivants, quoi… maugréa-t-elle.
-Il suffirait d’ouvrir les yeux pour savoir » dit une voix non loin d’elle. K-Ro se tourna dans la direction de la voix, sans ouvrir les yeux. Elle avait reconnu le timbre calme d’Erwan, mais n’osait trop y croire. Son cœur battait la chamade, et K-Ro due se concentrer pour calmer son rythme cardiaque et se convaincre que c’était le soulagement qu’elle ressentait et non un autre sentiment bien éloigné.
« Erwan ? C’est toi ?
-Oui, c’est moi, ne t’en fais pas. »
Sa voix se faisait plus forte, plus présente, preuve qu’il se rapprochait d’elle. K-Ro avança les mains devant elle, aveugle, pour le sentir arriver faut de le voir. Il parlait d’une voix posée mais K-Ro y devinait une sorte d’inquiétude sous-jacente. De plus, elle remarqua que son timbre avait changé. Pas complètement, on reconnaissait encore Erwan, mais le ton était plus grave et la façon de parlée plus mûre. Plus réfléchie.
Plus adulte.
Elle sentit alors le bras d’Erwan rencontrer ses doigts, et elle referma sa main sur le tissu en cuir du pardessus qu’il portait. Portait-il un pardessus lorsqu’il était avec nous dans la voiture ? K-Ro ne se souvenait que de sa chemise lorsqu’elle y avait posé la joue quand
il m’avait pris dans ses bras…
l’accident avait eu lieu. Elle ouvrit la bouche pour le dire, mais Erwan la devança :
« Alors toi aussi tu as peur d’ouvrir les yeux pour découvrir ce qu’il y a après la mort ?
-Pas exactement, non, mais… » Elle hésita un instant, avala sa salive et, tenant toujours Erwan par la manche, inspira un grand coup et dit : « J’ai peur de découvrir qu’il n’y ait rien après la mort, voilà ce dont j’ai peur. »
La remarque sembla faire mouche car Erwan ne dit rien. K-Ro laissa le silence s’installer, puis appela son compagnon pour savoir s’il était encore présent. Elle tenait toujours son bras, mais elle préférait l’entendre de vive voix.
« Excuses-moi, mais j’ai remarqué une chose : Ta voix.
-Oui, et alors ? dit-elle, impatiente. Qu’est-ce qu’elle a ma voix ?
-Elle est plus aiguë. »
K-Ro porta une main ses fines lèvres et n’osa plus prononcer un mot, indécise, tiraillée entre l’envie de savoir si effectivement elle parlait d’une manière anormale ou si Erwan avait tort et l’envie de lui prouver. Elle finit par articuler un ‘Vraiment ?’ d’une voix encore plus haut perchée, et les deux acolytes éclatèrent de rire simultanément.
« Je crois même que c’est de pire en pire ! » pouffa Erwan entre deux rires graves. K-Ro s’esclaffa en entendant la façon de rire de son ami :
« Toi aussi, ta voix a muée !!
-Vraiment ? » dit Erwan avec les mêmes intonations de K-Ro peu de temps avant, mais quelques milliers d’octaves plus bas. Et ils se remirent à rire de bon cœur. Lorsqu’ils furent enfin calmés de leur fou rire, ils entendirent enfin des voix qui leur parvenaient de leur gauche. Erwan se tourna dans cette direction, et K-Ro se cacha derrière lui, sur ses gardes.
« Qui est-ce ? » demanda-t-elle de sa voix qui les avait tant faire rire il y a peu et qui maintenant était pleine d'appréhension. K-Ro sentit les épaules d’Erwan se hausser et il ajouta, comme pour confirmer ce geste :
« Aucune idée : J’ai les yeux fermés. Mais je crois avoir reconnu la voix d’Haschatan.
-Ce serait donc Magnum, Fury et Haschatan ? »
Nouveau haussement d’épaules.
« Aucune idée. Je vais les appeler et nous serons fixés. De toute façon, je n’ai aucune envie de moisir ici pour l’éternité.
-Moi non plus. » dit K-Ro en serrant fort la manche d’Erwan, tandis que celui-ci hélait ses amis du plus fort de sa voix. K-Ro attendit quelques minutes, et se joignit à lui dans un duo comique a capella.
Quelques minutes plus tard, ils furent rejoins par le groupe Haschatan/Fury/Magnum qui s’émerveillaient mutuellement à coups de Regarde-moi ça, là bas ! ou encore Tu as vu cette beauté, au loin ?, et Erwan sentait qu’ils souriaient à leur ton enjoués.
« Vous en êtes encore au stade des yeux fermés ? s’étonna Fury en s’approchant d’Erwan. Ne vous en faites pas, ouvrez les yeux, c’est superbe.
-Vous êtes sûrs ? hasarda K-Ro.
-Parfaitement sûr, la rassura Mr.Magnum en la décrochant du bras d’Erwan. Vas-y, écarte tes paupières et admire. »
Soulagée de ne pas découvrir le néant absolu après la mort, K-Ro ouvrit ses yeux et Erwan la suivit de près, surtout pour savoir ce qui impliquait tant d’émerveillement de ses compagnons morts.
*
* *
Le décor dans lequel ils évoluaient depuis leur arrivée ne cessait de changer, de se mouvoir. Les nuances pastelles se succédaient sans jamais se répéter, passant du fuchsia au turquoise, puis au parme parsemé d’étoiles émeraudes fleurissantes qui s’étiolaient pour se fondrent dans des nuages couleur rouille.
Lorsque Erwan eut ouvert à son tour les yeux, les choses semblèrent s’accélérer. Les mélanges de couleurs qui ressemblaient à deux peintures liquides qu’on diluait les unes dans les autres s’intensifièrent, et les tons devinrent plus vifs, presque aveuglants, tandis que le groupe d’aventuriers plongeait vers le bas. Ils n’avaient aucun moyen de savoir dans quelle direction ils allaient, néanmoins tous avaient la sensation de descendre à une allure vertigineuse. Le décor tourna un instant sur lui-même puis tout se figea.
Ils se retrouvèrent sur la terre ferme.
Mr.Magnum vacilla et tomba à genoux. Il posa ses deux mains gantées sur le sol, et sentit son ventre se retourner. Il resta ainsi quelques minutes, attendant que la vague de nausée passe, puis daigna lever les yeux sur ses camarades, qui inspectaient les alentours. Erwan était pâle, mais semblait tenir le choc. Fury examinait un buisson sur le bord de la route, tripotant les feuilles entre ses doigts, et Haschatan marchait vers K-Ro. Il titubait un peu, mais tenait debout au moins, lui.
« Où est-ce qu’on est tombé ? demanda Fury, abandonnant son buisson feuillu.
-Aucune idée, répondit Erwan, reprenant peu à peu des couleurs. Le fait est que nous sommes sur un chemin en terre et qu’il fait jour.
-Et les oiseaux chantent : Cui cui, cui cui… » conclu Haschatan en s’agrippant à un arbre. Il paraissait saoul, mais en bonne santé. C’est à ce moment là que Mr.Magnum s’aperçut du changement. Des changements. Il s’assit par terre et éclata de rire. Tous se retournèrent vers lui, abandonnant la contemplation du paysage et écarquillèrent les yeux.
Le changement n’avait pas été flagrant pour Mr.Magnum : Il avait simplement perdu un peu de poids, grandi légèrement et était devenu plus élancé, plus souple, plus gracieux. Une arme, un Magnum, était apparu à son flanc droit, imbriquée dans un holster à peine dissimulé par son long trench-coat en cuir noir habituel. Sa chemise noire avait été remplacée par une blanche, et une cravate sombre était apparue, parfaitement nouée et rentrée dans une veste noire impeccable. Le reste ; ses gants, ses chaussures, son pantalon, tous noirs ; étaient restés inchangés. Une paire de lunettes noires s’était également posée sur son nez.
« Pourquoi tu te marres en me montrant du doigt ? »
Par contre, pour Fury, le changement était impossible à ne pas remarquer : Il avait doublé ou triplé de volume, et sa masse musculaire débordait de partout sous un débardeur noir moulant. Sa tête était devenue plus carrée qu’à l’origine, et son cou était aussi large que son visage, visage qui arborait une vision de la colère permanente. Il fixait Mr.Magnum avec ses yeux froids et une veine battait à sa tempe.
Erwan comprit soudainement les raisons de l’hilarité de son ami et se tourna vers Haschatan : Il n’avait, lui, pas changé de vêtement ni de corps, mais sa personnalité en avait manifestement pris un sérieux coup : Il se roulait par terre en hurlant de rire, martelant le sol de ses poings. Erwan posa son regard sur ses pieds et y découvrit une paire de magnifiques bottes noires à fermetures en ceintures.
Un sourire éclaira son visage. C’était le vêtement d’Erwan, celui qu’il avait inventé de toute pièce : Un ensemble militaire à prédominance bleu, orné de motifs dorés en spirales. Il n’eut pas non plus besoin de tourner sa tête pour savoir que la cape qui claquait derrière lui était bordeaux, et que dans son fourreau attendait sa lame.
« Est-ce que quelqu’un peu m’expliquer, là ? demanda Fury, au comble de l’énervement. Magnum ! Pourquoi tu rigoles comme ça ? » Il tendit un immense doigt rageur vers lui et s’aperçut soudainement que ce bras musclé ne lui avait pas été attribué à la naissance et qu’il ne l’avait reçu que récemment. Mr.Magnum, toujours à terre, regarda Fury qui se détaillait maintenant, allant de surprise en surprise.
K-Ro avait rétrécit et son visage brillait d’un sourire farceur. Elle était vêtue d’un kimono dont la couleur oscillait entre le marron et le vert, et sa longue chevelure châtain descendait dans son dos, maintenue au bout par un nœud kaki. Ses grands yeux observaient ses compagnons et, élargissant encore plus son sourire, elle sortit une dizaine de feuillets de son kimono.
« Quelqu’un veut signer un contrat ? »
Et tous éclatèrent de rire.
Mr.Magnum- Enorme floodeur
- Nombre de messages : 2475
Age : 42
Localisation : Dans les limbes torturées d'un esprit dérangé.
Date d'inscription : 18/01/2005
Re: Traumenschar
(partie 1)
3. « Dame Blanche ville »
Une fois le changement acceptés par tous ; Fury avait grand mal à s’adapter à son nouveau corps, ressemblant étrangement au héros de l’anime Berserker ; et l’inventaire de leurs nouveaux équipements et vêtements effectué, Mr.Magnum leur expliqua ce qui avait du se passer quand ils flottaient dans l’atmosphère colorée.
« Tu veux dire que on se retrouve dans les corps de nos personnages Trauméniens dès qu’on passe l’arme à gauche ? s’étonna Haschatan.
-Je vois que tu as bien suivis ce que je disais au restaurant la dernière fois, toi, répondit Mr.Magnum, l’air faussement pincé. Je pense que le passage dans ce monde bariolé de tout à l’heure était en fait le moment où les changements opéraient, et une fois ceux-ci terminés, on s’est retrouvé ici, dans le véritable au-delà.
-Ici… répéta Erwan en regardant alentour. Mais c’est où ici ? On se croirait sur Terre. »
Mr.Magnum se releva et inspecta le paysage.
Le chemin était en terre, à l’orée d’un bois ou d’une forêt, et de nombreux cailloux jonchaient le bord de la voie. Ils avaient manifestement été posées exprès sur les cotés de la route par la main de l’homme, et Mr.Magnum en déduisit que cette route devait être empruntée couramment pour qu’on se soit donné la peine de dégager le passage. Il baissa les yeux et tenta de remarquer s’il y avait des traces de pneus ou au moins de roues, mais ne vit aucun indice lui permettant de confirmer cette hypothèse.
D’un coté de la route, la forêt dense et manifestement profonde était verdoyante et animée de bruits et mouvements divers, certainement dues à la légère brise qui faisait voleter les vêtements des voyageurs. Les feuilles des arbres gigantesques qui s’élevaient près d’eux bruissaient légèrement, et des branches craquaient de temps à autre, certainement sous le poids d’un écureuil ou d’un oiseau.
Erwan dressa l’oreille.
« Écoutez ! » dit-il d’un ton sans appel. Tous se turent et restèrent impassible, écoutant le vent qui agitait les cimes des arbres. Fury allait demander à Erwan où il voulait en venir et s’il comptait rester à écouter le silence pendant une heure lorsque Erwan reprit la parole : « Aucun bruit d’oiseaux, justement. C’est Haschatan qui me l’a fait remarquer.
-Qui ça, moi ? dit l’intéressé, de nouveau accroché à son arbre.
-Oui, avec ton imitation du canari tellement réaliste, ironisa K-Ro. Pourquoi n’y a-t-il pas de chants d’oiseau, par ici ? »
Mr.Magnum se retourna vers les champs qui s’étendaient à perte de vue de l’autre coté de la route. Il examina les épis de maïs qui faisaient des vagues à cause du vent qui devait souffler plus fort là-bas, scruta les plaines d’herbes ensoleillées au loin, leva les yeux au ciel d’un bleu immaculé et ce qu’il vit confirma ses pensées.
« Parce qu’il n’y a pas d’animaux. Pas d’oiseaux dans le ciel, pas d’écureuils sur les arbres, pas de cerfs dans la forêt. Pas même de taupes dans les champs, j’en suis sûr.
-Mais qu’est-ce que… commença Haschatan, qui s’interrompit lui-même en voyant une femme qui approchait sur le sentier. Quelqu’un arrive. »
La femme qui s’approchait d’eux était simplement vêtue d’une robe blanche qui flottait derrière elle comme un voile de soie. Ou un linceul. Mr.Magnum se demanda si c’était elle qui les avait amenés ici, ou bien si leur venue était indépendante de sa volonté. Il regarda la jeune fille qui s’approchait, notant qu’elle ne devait pas dépasser les dix-sept ans au maximum, et ne pu s’empêcher de laisser dériver son regard sur sa poitrine maintenue par aucun sous-vêtement.
Le groupe se ressouda sans qu’aucun ordre ne fut donné et tous se retrouvèrent derrière Mr.Magnum, devenu soudainement chef d’exploration et délégué du mouvement, et regardaient tous en direction de la fille fantôme qui s’avançait vers eux. Une image revient dans l’esprit de Mr.Magnum : La dame blanche, debout, raide comme un piquet, qui avançait dans son rétroviseur en le fixant de ses deux orbites vides.
Cette dame blanche ci, en considérant qu’il puisse y en avoir plusieurs, avait de magnifiques yeux vert émeraude, vifs et alertes malgré la tristesse apparente de son visage finement ciselé. Ses mains se tenaient le long de ses hanches aux formes sensuelles bien que trop étroites, et on devinait de longues jambes fuselées sous sa tunique blanche. Elle était pieds nus et marchait sur la terre rugueuse sans s’en accommoder.
Arrivé à quelques mètres du groupe, elle s’arrêta d’elle-même et dévisagea les nouveaux venus un à un, plongeant son regard dans le leur. Mr.Magnum se surprit à chasser toute pensées impures de son esprit lorsqu’elle posa ses yeux sur lui, comme si elle pouvait lire en lui. Mais c’est peut-être bien ce qu’elle fait… songea-t-il, et en réponse, la dame blanche sourit, exhibant des dents parfaitement rangées et à l’émail sans défauts.
Ils restèrent ainsi à se faire face, personne n’osant parler, pendant plus d’une minute. Mr.Magnum se découvrait des envies qu’il ne se connaissait pas, et un appétit débordant le submergeait dès qu’il posait à nouveau ses yeux sur cette poitrine seulement voilée par un tissu laiteux qui laissait transparaître sa nudité. Puis la jeune fille parla.
« Vous êtes arrivés. » dit-elle d’une voix claire et harmonieuse qui acheva de mettre Mr.Magnum en transe. Il s’imagina soudainement sortant du groupe et la renversant, couvrant son visage et son corps de baisers fougueux et destructeurs, se laissant aller à ses instincts sauvages et primitifs en copulant à même le sol et devant ses amis.
« Qui êtes-vous ? demanda Erwan, pas le moins du monde troublé par la jeune femme.
-Je suis une dame blanche, comme celle qui vous a amené ici. Vous n’avez qu’à m’appeler Élodie.
-Élodie… » répéta Mr.Magnum, subjugué. La jeune dame blanche lui lança un rayonnant sourire, achevant le peu de raison qui lui restait, et elle reprit :
« Voulez-vous me suivre ? Je vais vous conduire en ville.
-Une ville ? l’interrogea Haschatan. Mais on est pas censé être morts ?
-Si, répondit-elle de sa douce voix chantante. Mais pourquoi ne pas passer l’éternité dans une ville plutôt que d’errer sans fin et sans but sur les chemins ? »
Sur ces paroles, elle fit demi-tour et se mit à avancer. Mr.Magnum, perdu dans un abîme de contemplation, la suivit sans hésiter une seconde, les yeux figés sur le déhanchement suggestif de ses fesses qui tendait la toile fine de sa robe. Les autres se lancèrent un fugitif regard et avancèrent à leur tour.
« Donc, nous sommes bien mort, mademoiselle Élodie ? hasarda Erwan au bout de quelques minutes. C’est ici le paradis ?
-Appelle-moi simplement Élodie, Erwan. Évitons les formules de politesses trop impersonnelles. » Elle sembla réfléchir, et Erwan nota mentalement le fait qu’elle connaissait son nom sans qu’il le lui ai dit. « Ici ce n’est qu’un des Paradis existants, pour tout vous dire. Il n’y a pas qu’un seul et unique Paradis, savez-vous ?
-Oui, nous le savons depuis peu, dit Fury en jetant un coup d’œil à Mr.Magnum. Avez-vous vu une femme arriver ici ces derniers temps ? Une jeune femme… »
La dame blanche éclata d’un rire cristallin, pure et magnifique, qui sonna aux oreilles de Mr.Magnum comme une mélodie divine. Un sourire béat s’étala sur son visage tandis qu’ils continuaient leur cheminement. Elle finit par cesser de rire et tourna la tête vers Fury, qui fulminait intérieurement.
« Des femmes arrivent ici tout les jours, ainsi que des hommes. » Elle avait prononcé le mot homme avec une pointe de dégoût que seule K-Ro remarqua. Alors qu’elle entamait l’histoire de la ville qui se dressait maintenant devant eux, à quelques kilomètres, K-Ro tira Erwan par la manche pour le faire ralentir.
« Tu ne trouves pas que quelque chose cloche ? lui demanda-t-elle à voix basse.
-Vis-à-vis de cette Élodie ?
-Non, vis-à-vis du Pape, baka ! marmonna K-Ro en filant une taloche à Erwan. Évidemment, à propos d’elle ! Tu as entendu comment elle a dit ‘homme’ ? J’ai cru qu’elle allait s’essuyer la bouche après, de peur qu’elle soit souillée. »
Erwan prit K-Ro par le coude et lui indiqua discrètement Mr.Magnum d’un mouvement de tête. « Regarde comment il est : On dirait qu’il est complètement hypnotisé par la fille. D’ordinaire, son personnage de Mr.Magnum est un obsédé notoire, mais je le connais, et il n’agirait pas ainsi. De plus, elle connaît nos noms.
-Quoi ?! » s’exclama K-Ro un peu fort, sur quoi Élodie cessa son histoire et se retourna vers eux. Erwan et K-Ro, dans une synchronisation parfaite, lui lancèrent un sourire innocent. Elle plissa un instant les yeux, et Erwan crut déceler son vrai visage sous celui de la beauté qui s’était amené à eux : Un visage émacié et osseux, taillé à la serpe et dont le regard disparaissait dans de grands orbites sombres.
Puis le visage de la belle enfant reprit sa place, et elle leur sourit aussi. Un sourire franc et joyeux, dénué de toute attitude contraire à ses intentions. Sans prendre en compte le cri de K-Ro, elle reprit sa marche vers le village, terminant son récit de l’édification de la ville. Haschatan, fasciné par ce conte, le demanda le nom de cette ville.
« Un nom ? Pourquoi faire ? »
Haschatan ne su quoi répondre, et haussa les épaules. Le reste du chemin se fit en silence, alors que les rayons du soleil entamèrent leur courbe ascendante en direction de l’ouest, en direction de l’horizon.
*
* *
« C’est superbe ! » constata K-Ro devant une immense statue de femme qui trônait au centre de la place du village de ‘Dame Blanche ville’, comme l’avait appelé Haschatan. Élodie les avait laissé au pied de cette sculpture en leur disant qu’elle allait régler quelques problèmes dus à leur arrivée ici. Mr.Magnum avait hoché la tête en ne la quittant pas des yeux jusqu’à ce qu’elle ait disparue de son champ de vision.
Le village semblait relativement grand, et il y régnait un calme rassurant. Aucune voiture, aucune ligne électrique ni câble n’étaient tendus ça et là dans le paysage, donnant un aspect ancien aux bâtiments qui s’élevaient dans la clarté d’un franc soleil d’après-midi. Le style architectural était celui da la paysannerie du XVIIIème siècle, mais les maisons et les granges semblaient avoir été construites la veille.
K-Ro ne détachait pas ses yeux de la femme en marbre qui joignait ses mains de pierre sur son ventre plat, le regard blanc levé sur l’horizon. Elle ressemblait fortement à Élodie ou à la dame blanche qui les avait envoyé ici, mais chacune d’entre elle avait un signe distinctif propre à elle qui les différenciait des autres.
Leur meurtrière avait les doigts osseux, contrairement à Élodie qui avait les mains fines, mais les yeux verts. Élodie était par contre plus petite que celle qui avait servie de modèle pour la statue, dont les épaules étaient plus larges et l’âge plus avancé que leur jeune guide. Les rares passantes, car toutes étaient des femmes en robes blanches qui trottaient sur la place du village, évitaient leur regard intrigué et marchaient sans droit vers leur but.
« Mais il n’y a que des femmes ici, ou quoi ? chuchota Fury à Erwan.
-Ce n’est pas parce que nous voyons deux ou trois femmes traîner par ici que ce village n’est constitué que de femme, Fury, rétorqua Erwan en examinant les alentours. Néanmoins, il est vrai que ce n’est pas vraiment ce qu’on pourrait appelé un village vivant.
-Peut-être que tous les hommes sont partis travailler dans la mine la plus proche ? »
Fury et Erwan se tournèrent vers Haschatan, qui leva précipitamment les mains en s’excusant : « J’en sais rien, je suppose, c’est tout !
-Magnum ! appela Erwan. Qu’est-ce que tu en penses ? »
Mr.Magnum tourna son regard embué vers Erwan et resta un instant immobile, comme s’il se demandait qui était la personne qui se trouvait devant lui. Puis une ombre passa dans ses yeux, et leurs pupilles s’étrécirent. Il s’ébroua la tête et se gratta les cheveux.
« Je pense qu’on est dans une ville de femmes, dit K-Ro en les rejoignant. Une ville entièrement constituée de femmes. Toutes les femmes mortes dans des accidents comme tu nous l’as raconté, Erwan.
-Tu crois ? lui demanda Erwan, indécis.
-Tu vois une autre explication à l’absence d’animaux et d’hommes ici ? répliqua K-Ro. Les seuls hommes que je vois dans ce village, c’est…
-…nous. »
Tous se tournèrent vers Mr.Magnum qui avait terminé la phrase d’un ton las. On avait l’impression, en le voyant, qu’il sortait d’un sommeil de plusieurs heures. Il défit sa queue de cheval et remit un semblant d’ordre dans sa coiffure.
« Nous quatre ; Erwan, Fury, Haschatan et moi ; sommes les seuls mâles de ‘Dame Blanche ville’, affirma Mr.Magnum en remettant son élastique. Et je suis prêt à parier ma bouteille de Soho que nous sommes les seuls dans tout ce monde. »
3. « Dame Blanche ville »
Une fois le changement acceptés par tous ; Fury avait grand mal à s’adapter à son nouveau corps, ressemblant étrangement au héros de l’anime Berserker ; et l’inventaire de leurs nouveaux équipements et vêtements effectué, Mr.Magnum leur expliqua ce qui avait du se passer quand ils flottaient dans l’atmosphère colorée.
« Tu veux dire que on se retrouve dans les corps de nos personnages Trauméniens dès qu’on passe l’arme à gauche ? s’étonna Haschatan.
-Je vois que tu as bien suivis ce que je disais au restaurant la dernière fois, toi, répondit Mr.Magnum, l’air faussement pincé. Je pense que le passage dans ce monde bariolé de tout à l’heure était en fait le moment où les changements opéraient, et une fois ceux-ci terminés, on s’est retrouvé ici, dans le véritable au-delà.
-Ici… répéta Erwan en regardant alentour. Mais c’est où ici ? On se croirait sur Terre. »
Mr.Magnum se releva et inspecta le paysage.
Le chemin était en terre, à l’orée d’un bois ou d’une forêt, et de nombreux cailloux jonchaient le bord de la voie. Ils avaient manifestement été posées exprès sur les cotés de la route par la main de l’homme, et Mr.Magnum en déduisit que cette route devait être empruntée couramment pour qu’on se soit donné la peine de dégager le passage. Il baissa les yeux et tenta de remarquer s’il y avait des traces de pneus ou au moins de roues, mais ne vit aucun indice lui permettant de confirmer cette hypothèse.
D’un coté de la route, la forêt dense et manifestement profonde était verdoyante et animée de bruits et mouvements divers, certainement dues à la légère brise qui faisait voleter les vêtements des voyageurs. Les feuilles des arbres gigantesques qui s’élevaient près d’eux bruissaient légèrement, et des branches craquaient de temps à autre, certainement sous le poids d’un écureuil ou d’un oiseau.
Erwan dressa l’oreille.
« Écoutez ! » dit-il d’un ton sans appel. Tous se turent et restèrent impassible, écoutant le vent qui agitait les cimes des arbres. Fury allait demander à Erwan où il voulait en venir et s’il comptait rester à écouter le silence pendant une heure lorsque Erwan reprit la parole : « Aucun bruit d’oiseaux, justement. C’est Haschatan qui me l’a fait remarquer.
-Qui ça, moi ? dit l’intéressé, de nouveau accroché à son arbre.
-Oui, avec ton imitation du canari tellement réaliste, ironisa K-Ro. Pourquoi n’y a-t-il pas de chants d’oiseau, par ici ? »
Mr.Magnum se retourna vers les champs qui s’étendaient à perte de vue de l’autre coté de la route. Il examina les épis de maïs qui faisaient des vagues à cause du vent qui devait souffler plus fort là-bas, scruta les plaines d’herbes ensoleillées au loin, leva les yeux au ciel d’un bleu immaculé et ce qu’il vit confirma ses pensées.
« Parce qu’il n’y a pas d’animaux. Pas d’oiseaux dans le ciel, pas d’écureuils sur les arbres, pas de cerfs dans la forêt. Pas même de taupes dans les champs, j’en suis sûr.
-Mais qu’est-ce que… commença Haschatan, qui s’interrompit lui-même en voyant une femme qui approchait sur le sentier. Quelqu’un arrive. »
La femme qui s’approchait d’eux était simplement vêtue d’une robe blanche qui flottait derrière elle comme un voile de soie. Ou un linceul. Mr.Magnum se demanda si c’était elle qui les avait amenés ici, ou bien si leur venue était indépendante de sa volonté. Il regarda la jeune fille qui s’approchait, notant qu’elle ne devait pas dépasser les dix-sept ans au maximum, et ne pu s’empêcher de laisser dériver son regard sur sa poitrine maintenue par aucun sous-vêtement.
Le groupe se ressouda sans qu’aucun ordre ne fut donné et tous se retrouvèrent derrière Mr.Magnum, devenu soudainement chef d’exploration et délégué du mouvement, et regardaient tous en direction de la fille fantôme qui s’avançait vers eux. Une image revient dans l’esprit de Mr.Magnum : La dame blanche, debout, raide comme un piquet, qui avançait dans son rétroviseur en le fixant de ses deux orbites vides.
Cette dame blanche ci, en considérant qu’il puisse y en avoir plusieurs, avait de magnifiques yeux vert émeraude, vifs et alertes malgré la tristesse apparente de son visage finement ciselé. Ses mains se tenaient le long de ses hanches aux formes sensuelles bien que trop étroites, et on devinait de longues jambes fuselées sous sa tunique blanche. Elle était pieds nus et marchait sur la terre rugueuse sans s’en accommoder.
Arrivé à quelques mètres du groupe, elle s’arrêta d’elle-même et dévisagea les nouveaux venus un à un, plongeant son regard dans le leur. Mr.Magnum se surprit à chasser toute pensées impures de son esprit lorsqu’elle posa ses yeux sur lui, comme si elle pouvait lire en lui. Mais c’est peut-être bien ce qu’elle fait… songea-t-il, et en réponse, la dame blanche sourit, exhibant des dents parfaitement rangées et à l’émail sans défauts.
Ils restèrent ainsi à se faire face, personne n’osant parler, pendant plus d’une minute. Mr.Magnum se découvrait des envies qu’il ne se connaissait pas, et un appétit débordant le submergeait dès qu’il posait à nouveau ses yeux sur cette poitrine seulement voilée par un tissu laiteux qui laissait transparaître sa nudité. Puis la jeune fille parla.
« Vous êtes arrivés. » dit-elle d’une voix claire et harmonieuse qui acheva de mettre Mr.Magnum en transe. Il s’imagina soudainement sortant du groupe et la renversant, couvrant son visage et son corps de baisers fougueux et destructeurs, se laissant aller à ses instincts sauvages et primitifs en copulant à même le sol et devant ses amis.
« Qui êtes-vous ? demanda Erwan, pas le moins du monde troublé par la jeune femme.
-Je suis une dame blanche, comme celle qui vous a amené ici. Vous n’avez qu’à m’appeler Élodie.
-Élodie… » répéta Mr.Magnum, subjugué. La jeune dame blanche lui lança un rayonnant sourire, achevant le peu de raison qui lui restait, et elle reprit :
« Voulez-vous me suivre ? Je vais vous conduire en ville.
-Une ville ? l’interrogea Haschatan. Mais on est pas censé être morts ?
-Si, répondit-elle de sa douce voix chantante. Mais pourquoi ne pas passer l’éternité dans une ville plutôt que d’errer sans fin et sans but sur les chemins ? »
Sur ces paroles, elle fit demi-tour et se mit à avancer. Mr.Magnum, perdu dans un abîme de contemplation, la suivit sans hésiter une seconde, les yeux figés sur le déhanchement suggestif de ses fesses qui tendait la toile fine de sa robe. Les autres se lancèrent un fugitif regard et avancèrent à leur tour.
« Donc, nous sommes bien mort, mademoiselle Élodie ? hasarda Erwan au bout de quelques minutes. C’est ici le paradis ?
-Appelle-moi simplement Élodie, Erwan. Évitons les formules de politesses trop impersonnelles. » Elle sembla réfléchir, et Erwan nota mentalement le fait qu’elle connaissait son nom sans qu’il le lui ai dit. « Ici ce n’est qu’un des Paradis existants, pour tout vous dire. Il n’y a pas qu’un seul et unique Paradis, savez-vous ?
-Oui, nous le savons depuis peu, dit Fury en jetant un coup d’œil à Mr.Magnum. Avez-vous vu une femme arriver ici ces derniers temps ? Une jeune femme… »
La dame blanche éclata d’un rire cristallin, pure et magnifique, qui sonna aux oreilles de Mr.Magnum comme une mélodie divine. Un sourire béat s’étala sur son visage tandis qu’ils continuaient leur cheminement. Elle finit par cesser de rire et tourna la tête vers Fury, qui fulminait intérieurement.
« Des femmes arrivent ici tout les jours, ainsi que des hommes. » Elle avait prononcé le mot homme avec une pointe de dégoût que seule K-Ro remarqua. Alors qu’elle entamait l’histoire de la ville qui se dressait maintenant devant eux, à quelques kilomètres, K-Ro tira Erwan par la manche pour le faire ralentir.
« Tu ne trouves pas que quelque chose cloche ? lui demanda-t-elle à voix basse.
-Vis-à-vis de cette Élodie ?
-Non, vis-à-vis du Pape, baka ! marmonna K-Ro en filant une taloche à Erwan. Évidemment, à propos d’elle ! Tu as entendu comment elle a dit ‘homme’ ? J’ai cru qu’elle allait s’essuyer la bouche après, de peur qu’elle soit souillée. »
Erwan prit K-Ro par le coude et lui indiqua discrètement Mr.Magnum d’un mouvement de tête. « Regarde comment il est : On dirait qu’il est complètement hypnotisé par la fille. D’ordinaire, son personnage de Mr.Magnum est un obsédé notoire, mais je le connais, et il n’agirait pas ainsi. De plus, elle connaît nos noms.
-Quoi ?! » s’exclama K-Ro un peu fort, sur quoi Élodie cessa son histoire et se retourna vers eux. Erwan et K-Ro, dans une synchronisation parfaite, lui lancèrent un sourire innocent. Elle plissa un instant les yeux, et Erwan crut déceler son vrai visage sous celui de la beauté qui s’était amené à eux : Un visage émacié et osseux, taillé à la serpe et dont le regard disparaissait dans de grands orbites sombres.
Puis le visage de la belle enfant reprit sa place, et elle leur sourit aussi. Un sourire franc et joyeux, dénué de toute attitude contraire à ses intentions. Sans prendre en compte le cri de K-Ro, elle reprit sa marche vers le village, terminant son récit de l’édification de la ville. Haschatan, fasciné par ce conte, le demanda le nom de cette ville.
« Un nom ? Pourquoi faire ? »
Haschatan ne su quoi répondre, et haussa les épaules. Le reste du chemin se fit en silence, alors que les rayons du soleil entamèrent leur courbe ascendante en direction de l’ouest, en direction de l’horizon.
*
* *
« C’est superbe ! » constata K-Ro devant une immense statue de femme qui trônait au centre de la place du village de ‘Dame Blanche ville’, comme l’avait appelé Haschatan. Élodie les avait laissé au pied de cette sculpture en leur disant qu’elle allait régler quelques problèmes dus à leur arrivée ici. Mr.Magnum avait hoché la tête en ne la quittant pas des yeux jusqu’à ce qu’elle ait disparue de son champ de vision.
Le village semblait relativement grand, et il y régnait un calme rassurant. Aucune voiture, aucune ligne électrique ni câble n’étaient tendus ça et là dans le paysage, donnant un aspect ancien aux bâtiments qui s’élevaient dans la clarté d’un franc soleil d’après-midi. Le style architectural était celui da la paysannerie du XVIIIème siècle, mais les maisons et les granges semblaient avoir été construites la veille.
K-Ro ne détachait pas ses yeux de la femme en marbre qui joignait ses mains de pierre sur son ventre plat, le regard blanc levé sur l’horizon. Elle ressemblait fortement à Élodie ou à la dame blanche qui les avait envoyé ici, mais chacune d’entre elle avait un signe distinctif propre à elle qui les différenciait des autres.
Leur meurtrière avait les doigts osseux, contrairement à Élodie qui avait les mains fines, mais les yeux verts. Élodie était par contre plus petite que celle qui avait servie de modèle pour la statue, dont les épaules étaient plus larges et l’âge plus avancé que leur jeune guide. Les rares passantes, car toutes étaient des femmes en robes blanches qui trottaient sur la place du village, évitaient leur regard intrigué et marchaient sans droit vers leur but.
« Mais il n’y a que des femmes ici, ou quoi ? chuchota Fury à Erwan.
-Ce n’est pas parce que nous voyons deux ou trois femmes traîner par ici que ce village n’est constitué que de femme, Fury, rétorqua Erwan en examinant les alentours. Néanmoins, il est vrai que ce n’est pas vraiment ce qu’on pourrait appelé un village vivant.
-Peut-être que tous les hommes sont partis travailler dans la mine la plus proche ? »
Fury et Erwan se tournèrent vers Haschatan, qui leva précipitamment les mains en s’excusant : « J’en sais rien, je suppose, c’est tout !
-Magnum ! appela Erwan. Qu’est-ce que tu en penses ? »
Mr.Magnum tourna son regard embué vers Erwan et resta un instant immobile, comme s’il se demandait qui était la personne qui se trouvait devant lui. Puis une ombre passa dans ses yeux, et leurs pupilles s’étrécirent. Il s’ébroua la tête et se gratta les cheveux.
« Je pense qu’on est dans une ville de femmes, dit K-Ro en les rejoignant. Une ville entièrement constituée de femmes. Toutes les femmes mortes dans des accidents comme tu nous l’as raconté, Erwan.
-Tu crois ? lui demanda Erwan, indécis.
-Tu vois une autre explication à l’absence d’animaux et d’hommes ici ? répliqua K-Ro. Les seuls hommes que je vois dans ce village, c’est…
-…nous. »
Tous se tournèrent vers Mr.Magnum qui avait terminé la phrase d’un ton las. On avait l’impression, en le voyant, qu’il sortait d’un sommeil de plusieurs heures. Il défit sa queue de cheval et remit un semblant d’ordre dans sa coiffure.
« Nous quatre ; Erwan, Fury, Haschatan et moi ; sommes les seuls mâles de ‘Dame Blanche ville’, affirma Mr.Magnum en remettant son élastique. Et je suis prêt à parier ma bouteille de Soho que nous sommes les seuls dans tout ce monde. »
Mr.Magnum- Enorme floodeur
- Nombre de messages : 2475
Age : 42
Localisation : Dans les limbes torturées d'un esprit dérangé.
Date d'inscription : 18/01/2005
Re: Traumenschar
(partie 2)
Avant qu’il n’ai pu ajouter quoi que ce soit, ou que quelqu’un puisse faire une quelconque remarque, il intima le silence à ses camarades d’un geste discret de la main. Élodie revenait vers eux, le visage radieux en sautillant d’un pied sur l’autre comme une petite fille. Mr.Magnum eut juste le temps de se dire que quelque chose clochait avant qu’il ne retombe dans cet état de coma énamouré.
« Bon, j’ai pu vous obtenir une chambre dans cet hôtel, là-bas. Vous pourrez y loger jusqu’à ce que vous la rencontriez… Et, en fait, jusqu’au moment où vous le désirez !
-Excusez-moi, dit Fury, mais nous ne comptons pas rester ici pour l’éternité. Nous venons juste chercher un renseignement, ou même une personne.
-Vous ne comptez pas rester ici pour l’éternité ? répéta Élodie en étouffant à peine un rire moqueur. Mais vous n’avez pas vraiment le choix. Vous êtes mort.
-Et quand on est mort, c’et pour la vie. » Le trait d’humour d’Haschatan tomba à plat. Élodie le regarda et leur demanda de la suivre alors qu’elle se redirigeait vers l’hôtel.
*
* *
Une fois dans leur chambre, les cinq voyageurs se posèrent et purent enfin souffler et reposer leurs jambes fourbues par la marche. Élodie resta un instant sur le seuil de la porte, semblant réfléchir, regardant fixement K-Ro de ses yeux émeraude qui ne laissait rien transparaître de ses sentiments. Jalousie ? Envie ? Mépris ? Erwan n’arrivait pas à décrypter les émotions de ce visage juvénile.
Elle détacha finalement son regard de K-Ro pour passer un instant sur Mr.Magnum. Un léger sourire inquiétant passa sur ses lèvres lorsqu’elle le survola des yeux, puis elle leur souhaita une bonne après-midi et une bonne nuit. Elle insista un peu trop sur les derniers mots pour qu’Erwan ne le remarque pas, et il rangea cette information à coté de ses mauvaises intuitions qu’il avait depuis leur rencontre avec elle.
De nouveau, dès qu’elle eut refermée la porte, le regard vide de Mr.Magnum reprit vie et il se secoua intérieurement l’esprit. Erwan, assit sur un des lits, jeta un regard à la porte où s’était dernièrement tenu la dame blanche nommée Élodie, et se tourna vers Mr.Magnum, allongé sur le dos et contemplant le plafond nu.
« Y a un truc qui cloche, lâcha-t-il au bout de quelques minutes. La fille, la Élodie, je ne sais pas pourquoi, mais je ne la sens pas du tout.
-Une intuition, Erwan ? demanda Fury.
-On peut dire ça comme ça, oui.
-Elle me plaît bien à moi, cette ville, dit K-Ro en regardant par l’unique fenêtre de la pièce, qui donnait sur la place. C’est calme et reposant : Pas de bruits, pas de voitures, pas de racailles qui se trimballent en bande…
-…pas non plus d’hommes, ni d’animaux, ni d’accueil chaleureux, termina Haschatan. Je te rappelle que personne, mis à part Élodie, ne nous a adressé la parole.
-Élodie… soupira Mr.Magnum.
-En parlant de ça, Magnum, gronda Erwan. Est-ce que tu ne penses pas qu’elle exerce beaucoup d’emprise sur toi ? »
Mr.Magnum leva la tête vers Erwan, qui soutint son regard. Puis il poussa un immense soupir et reposa sa tête sur ses mains jointes. Elle exerçait de l’emprise sur lui, oui, bien sûr : Elle était jeune, terriblement attirante, et assez peu farouche. Néanmoins, Mr.Magnum se sentit incapable de se justifier et lui dit :
« Non, c’est juste ma personnalité de Mr.Magnum qui fait des siennes, Erwan, rien de plus. Mais je contrôle la situation, ne t’en fait pas. » Puis, devant l’air dubitatif d’Erwan, ainsi que celui peu convaincu d’Haschatan, il jugea bon d’ajouter : « Mon personnage n’est qu’un fieffé coquin qui ne pense qu’aux femmes, il est donc normal que je reluque un peu la jolie guide que nous avons eu en chemin, non ?
-Mais avec tout ça, on n’a pas encore retrouvé Séphy-Roshou, je vous le rappelle. » Les regards convergèrent sur Fury. Mr.Magnum changea de position et s’assit au bord du lit. Erwan, regarda tour à tour Haschatan, Fury et Mr.Magnum, puis préféra ne rien dire et s’approcha de la fenêtre pour se mettre aux cotés de K-Ro.
« Élodie a parlé de quelqu’un que nous allions rencontrer, non ? hasarda Haschatan.
-Exact, dit Mr.Magnum. La rencontrer, pour être précis. C’est une femme, une autre. Peut-être la chef de ce village, ou au moins une dame blanche respectée par les autres, si j’en crois le ton de déférence perçu dans la voix d’Élodie tout à l’heure.
-Pourquoi devons-nous la voir ?
-Aucune idée, répondit Mr.Magnum. Mais s’il y a bien une personne qui pourra nous informer de l’éventuelle présence de Séphy-Roshou dans les parages, c’est elle. »
C’est ainsi qu’ils décidèrent de patienter encore quelques temps dans l’hôtel afin de prendre un peu de repos et d’attendre la fameuse rencontre. Mr.Magnum se coucha dans un lit et dormit un peu. Il rêva d’Élodie. Elle venait vers lui, son sourire désarmant aux lèvres, et l’embrassait avant qu’il puisse dire quoi que ce soit. Il la déshabillait d’une main, arrachant sa tunique, et lorsque leurs deux bouches ses séparaient, Mr.Magnum se rendait compte qu’il embrassait un cadavre en putréfaction, les lèvres bleuis et boursouflées d’asticots grouillants dans la chair, ses yeux anciennement verts qui était comme deux billes blanches crevées, et son corps autrefois si désirable réduis à un ramassis d’os suintants.
K-Ro et Erwan restèrent un moment devant la fenêtre, puis décidèrent de se reposer également. Ne restant qu’un autre lit de libre, ils se couchèrent tous les deux côte à côte, le plus près du bord possible. Chacun ne voyait pas les rougeurs du visage de l’autre car ils se tournaient le dos, mais Fury le remarqua et n’en dit rien.
Il resta assit par terre, examinant sans fin ses bras et ses muscles, ne cessant de s’en découvrir des nouveaux ici et là. Il n’éprouvait pas non plus le besoin de dormir : Il était, même, en pleine forme, et sentait une force latente en lui qui n’attendait que le bon moment pour exploser. Le Berserker sommeillait, mais il pouvait le réveiller quand il le souhaitait.
Haschatan avait décidé de visiter les environs et était partit seul quelques minutes après que la discussion fut terminée. Il avait traversé ‘Dame Blanche ville’ de part en part à la recherche de personne avec qui discuter, mais les rares êtres qu’il avait vu étaient des femmes qui s’étaient sauvées en courant à son approche.
Lorsque le soleil atteignit la ligne d’horizon, il était encore dehors à flâner.
*
* *
Mr.Magnum se réveilla en sursaut de son cauchemar lorsque Haschatan ouvrit la porte et la claqua, haletant. Il s’adossa au battant et reprit son souffle : Il était écarlate et transpirait à grosses gouttes. Il tenta d’articuler quelques mots à leur attention, mais n’y parvint pas. Il retenait la porte comme si ce qui se trouvait derrière ne devait jamais en sortir.
Ou entrer.
Erwan fut le premier à réagir en allant fermer le loquet de sécurité de la porte. Haschatan, le regard toujours paniqué, finit tout de même par lâcher la poignée et glissa sur le sol. Il soufflait fort et Fury se dit qu’il avait du courir un moment pour qu’il se retrouve dans un tel état. Il ouvrit la bouche mais n’émit qu’un râle impuissant et fut prit d’une quinte de toux. Erwan s’assura que le loquet fermait bien la porte en le secouant.
« Ça… ne suffira pas… articula péniblement Haschatan.
-Ne suffira pas contre quoi ? Contre qui ? » Mr.Magnum releva la tête de son camarade et remarqua les traces de griffures sur sa joue et son cou. Son corps était pris de tremblements et ses dents claquaient nerveusement, sans même qu’il ne s’en rende compte. Ses yeux, hagards, étaient pétrifiés dans un étonnement constant.
-Merde, les gars, regardez ce qui arrive ! » cria K-Ro de la fenêtre. Mr.Magnum, Fury et Erwan se précipitèrent auprès d’elle et regardèrent la foule qui se pressait sur la place principale du village. Une foule de femme.
« Une foule de dames blanches… » pensa Erwan à vois haute. Fury entendit Haschatan qui gémit d’approbation derrière eux.
Des dizaines, des centaines de dame blanches se tenaient toutes debout devant l’hôtel, dans la lueur orangée du soleil couchant. Elles regardaient toutes la fenêtre où s’agglutinaient les quatre voyageurs curieux et maintenant apeurés. Elles portaient toutes des robes blanches, mais dans cette atmosphère crépusculaires, leurs vêtements prenaient un ton rouge sanguinolent, comme si elles s’étaient toutes trempées dans une baignoire de sang.
Leurs visages au teint blafard étaient tournés vers eux, et des centaines d’yeux les fixaient avec avidité. Fury pesta et regarde le soleil qui disparaissait peu à peu derrière la ligne d’horizon. En même temps, les visages des femmes changeaient et prenaient leur véritable apparence : Celle de femmes mortes, tuées en accident ou intentionnellement.
Mr.Magnum vit leur ancienne guide, Élodie, qui se transformait en cadavre, comme dans son cauchemar, et dont les yeux se dégonflèrent tandis qu’elle passait une langue verdâtre sur ses lèvres devenues gercées. Mr.Magnum eut une grimace de dégoût, et annonça à ses amis d’un bloc :
« Je crois qu’on est dans la mouise. »
Une femme, plus grande que les autres, et qui ressemblait trait pour trait à la statue de marbre non loin d’elle, se dressa au dessus des autres. Le soleil n’était plus qu’une ligne lumineuse, et à peine eut-il complètement disparu, que la dame blanche en chef rugit en pointant un doigt décharné vers l’hôtel.
Avant qu’il n’ai pu ajouter quoi que ce soit, ou que quelqu’un puisse faire une quelconque remarque, il intima le silence à ses camarades d’un geste discret de la main. Élodie revenait vers eux, le visage radieux en sautillant d’un pied sur l’autre comme une petite fille. Mr.Magnum eut juste le temps de se dire que quelque chose clochait avant qu’il ne retombe dans cet état de coma énamouré.
« Bon, j’ai pu vous obtenir une chambre dans cet hôtel, là-bas. Vous pourrez y loger jusqu’à ce que vous la rencontriez… Et, en fait, jusqu’au moment où vous le désirez !
-Excusez-moi, dit Fury, mais nous ne comptons pas rester ici pour l’éternité. Nous venons juste chercher un renseignement, ou même une personne.
-Vous ne comptez pas rester ici pour l’éternité ? répéta Élodie en étouffant à peine un rire moqueur. Mais vous n’avez pas vraiment le choix. Vous êtes mort.
-Et quand on est mort, c’et pour la vie. » Le trait d’humour d’Haschatan tomba à plat. Élodie le regarda et leur demanda de la suivre alors qu’elle se redirigeait vers l’hôtel.
*
* *
Une fois dans leur chambre, les cinq voyageurs se posèrent et purent enfin souffler et reposer leurs jambes fourbues par la marche. Élodie resta un instant sur le seuil de la porte, semblant réfléchir, regardant fixement K-Ro de ses yeux émeraude qui ne laissait rien transparaître de ses sentiments. Jalousie ? Envie ? Mépris ? Erwan n’arrivait pas à décrypter les émotions de ce visage juvénile.
Elle détacha finalement son regard de K-Ro pour passer un instant sur Mr.Magnum. Un léger sourire inquiétant passa sur ses lèvres lorsqu’elle le survola des yeux, puis elle leur souhaita une bonne après-midi et une bonne nuit. Elle insista un peu trop sur les derniers mots pour qu’Erwan ne le remarque pas, et il rangea cette information à coté de ses mauvaises intuitions qu’il avait depuis leur rencontre avec elle.
De nouveau, dès qu’elle eut refermée la porte, le regard vide de Mr.Magnum reprit vie et il se secoua intérieurement l’esprit. Erwan, assit sur un des lits, jeta un regard à la porte où s’était dernièrement tenu la dame blanche nommée Élodie, et se tourna vers Mr.Magnum, allongé sur le dos et contemplant le plafond nu.
« Y a un truc qui cloche, lâcha-t-il au bout de quelques minutes. La fille, la Élodie, je ne sais pas pourquoi, mais je ne la sens pas du tout.
-Une intuition, Erwan ? demanda Fury.
-On peut dire ça comme ça, oui.
-Elle me plaît bien à moi, cette ville, dit K-Ro en regardant par l’unique fenêtre de la pièce, qui donnait sur la place. C’est calme et reposant : Pas de bruits, pas de voitures, pas de racailles qui se trimballent en bande…
-…pas non plus d’hommes, ni d’animaux, ni d’accueil chaleureux, termina Haschatan. Je te rappelle que personne, mis à part Élodie, ne nous a adressé la parole.
-Élodie… soupira Mr.Magnum.
-En parlant de ça, Magnum, gronda Erwan. Est-ce que tu ne penses pas qu’elle exerce beaucoup d’emprise sur toi ? »
Mr.Magnum leva la tête vers Erwan, qui soutint son regard. Puis il poussa un immense soupir et reposa sa tête sur ses mains jointes. Elle exerçait de l’emprise sur lui, oui, bien sûr : Elle était jeune, terriblement attirante, et assez peu farouche. Néanmoins, Mr.Magnum se sentit incapable de se justifier et lui dit :
« Non, c’est juste ma personnalité de Mr.Magnum qui fait des siennes, Erwan, rien de plus. Mais je contrôle la situation, ne t’en fait pas. » Puis, devant l’air dubitatif d’Erwan, ainsi que celui peu convaincu d’Haschatan, il jugea bon d’ajouter : « Mon personnage n’est qu’un fieffé coquin qui ne pense qu’aux femmes, il est donc normal que je reluque un peu la jolie guide que nous avons eu en chemin, non ?
-Mais avec tout ça, on n’a pas encore retrouvé Séphy-Roshou, je vous le rappelle. » Les regards convergèrent sur Fury. Mr.Magnum changea de position et s’assit au bord du lit. Erwan, regarda tour à tour Haschatan, Fury et Mr.Magnum, puis préféra ne rien dire et s’approcha de la fenêtre pour se mettre aux cotés de K-Ro.
« Élodie a parlé de quelqu’un que nous allions rencontrer, non ? hasarda Haschatan.
-Exact, dit Mr.Magnum. La rencontrer, pour être précis. C’est une femme, une autre. Peut-être la chef de ce village, ou au moins une dame blanche respectée par les autres, si j’en crois le ton de déférence perçu dans la voix d’Élodie tout à l’heure.
-Pourquoi devons-nous la voir ?
-Aucune idée, répondit Mr.Magnum. Mais s’il y a bien une personne qui pourra nous informer de l’éventuelle présence de Séphy-Roshou dans les parages, c’est elle. »
C’est ainsi qu’ils décidèrent de patienter encore quelques temps dans l’hôtel afin de prendre un peu de repos et d’attendre la fameuse rencontre. Mr.Magnum se coucha dans un lit et dormit un peu. Il rêva d’Élodie. Elle venait vers lui, son sourire désarmant aux lèvres, et l’embrassait avant qu’il puisse dire quoi que ce soit. Il la déshabillait d’une main, arrachant sa tunique, et lorsque leurs deux bouches ses séparaient, Mr.Magnum se rendait compte qu’il embrassait un cadavre en putréfaction, les lèvres bleuis et boursouflées d’asticots grouillants dans la chair, ses yeux anciennement verts qui était comme deux billes blanches crevées, et son corps autrefois si désirable réduis à un ramassis d’os suintants.
K-Ro et Erwan restèrent un moment devant la fenêtre, puis décidèrent de se reposer également. Ne restant qu’un autre lit de libre, ils se couchèrent tous les deux côte à côte, le plus près du bord possible. Chacun ne voyait pas les rougeurs du visage de l’autre car ils se tournaient le dos, mais Fury le remarqua et n’en dit rien.
Il resta assit par terre, examinant sans fin ses bras et ses muscles, ne cessant de s’en découvrir des nouveaux ici et là. Il n’éprouvait pas non plus le besoin de dormir : Il était, même, en pleine forme, et sentait une force latente en lui qui n’attendait que le bon moment pour exploser. Le Berserker sommeillait, mais il pouvait le réveiller quand il le souhaitait.
Haschatan avait décidé de visiter les environs et était partit seul quelques minutes après que la discussion fut terminée. Il avait traversé ‘Dame Blanche ville’ de part en part à la recherche de personne avec qui discuter, mais les rares êtres qu’il avait vu étaient des femmes qui s’étaient sauvées en courant à son approche.
Lorsque le soleil atteignit la ligne d’horizon, il était encore dehors à flâner.
*
* *
Mr.Magnum se réveilla en sursaut de son cauchemar lorsque Haschatan ouvrit la porte et la claqua, haletant. Il s’adossa au battant et reprit son souffle : Il était écarlate et transpirait à grosses gouttes. Il tenta d’articuler quelques mots à leur attention, mais n’y parvint pas. Il retenait la porte comme si ce qui se trouvait derrière ne devait jamais en sortir.
Ou entrer.
Erwan fut le premier à réagir en allant fermer le loquet de sécurité de la porte. Haschatan, le regard toujours paniqué, finit tout de même par lâcher la poignée et glissa sur le sol. Il soufflait fort et Fury se dit qu’il avait du courir un moment pour qu’il se retrouve dans un tel état. Il ouvrit la bouche mais n’émit qu’un râle impuissant et fut prit d’une quinte de toux. Erwan s’assura que le loquet fermait bien la porte en le secouant.
« Ça… ne suffira pas… articula péniblement Haschatan.
-Ne suffira pas contre quoi ? Contre qui ? » Mr.Magnum releva la tête de son camarade et remarqua les traces de griffures sur sa joue et son cou. Son corps était pris de tremblements et ses dents claquaient nerveusement, sans même qu’il ne s’en rende compte. Ses yeux, hagards, étaient pétrifiés dans un étonnement constant.
-Merde, les gars, regardez ce qui arrive ! » cria K-Ro de la fenêtre. Mr.Magnum, Fury et Erwan se précipitèrent auprès d’elle et regardèrent la foule qui se pressait sur la place principale du village. Une foule de femme.
« Une foule de dames blanches… » pensa Erwan à vois haute. Fury entendit Haschatan qui gémit d’approbation derrière eux.
Des dizaines, des centaines de dame blanches se tenaient toutes debout devant l’hôtel, dans la lueur orangée du soleil couchant. Elles regardaient toutes la fenêtre où s’agglutinaient les quatre voyageurs curieux et maintenant apeurés. Elles portaient toutes des robes blanches, mais dans cette atmosphère crépusculaires, leurs vêtements prenaient un ton rouge sanguinolent, comme si elles s’étaient toutes trempées dans une baignoire de sang.
Leurs visages au teint blafard étaient tournés vers eux, et des centaines d’yeux les fixaient avec avidité. Fury pesta et regarde le soleil qui disparaissait peu à peu derrière la ligne d’horizon. En même temps, les visages des femmes changeaient et prenaient leur véritable apparence : Celle de femmes mortes, tuées en accident ou intentionnellement.
Mr.Magnum vit leur ancienne guide, Élodie, qui se transformait en cadavre, comme dans son cauchemar, et dont les yeux se dégonflèrent tandis qu’elle passait une langue verdâtre sur ses lèvres devenues gercées. Mr.Magnum eut une grimace de dégoût, et annonça à ses amis d’un bloc :
« Je crois qu’on est dans la mouise. »
Une femme, plus grande que les autres, et qui ressemblait trait pour trait à la statue de marbre non loin d’elle, se dressa au dessus des autres. Le soleil n’était plus qu’une ligne lumineuse, et à peine eut-il complètement disparu, que la dame blanche en chef rugit en pointant un doigt décharné vers l’hôtel.
Mr.Magnum- Enorme floodeur
- Nombre de messages : 2475
Age : 42
Localisation : Dans les limbes torturées d'un esprit dérangé.
Date d'inscription : 18/01/2005
Re: Traumenschar
(partie 1)
4. Confrontations diverses.
Sans prendre la peine de réfléchir, Mr.Magnum porta une main à son holster et en sortit prestement son arme, un Magnum de calibre 357, chargé à bloc. Erwan exhiba fièrement sa longue épée Santesia qu’il tenait à deux mains et s’échauffa brièvement les poignets afin de la manier avec plus d’aisance.
K-Ro, hébétée, regardait la marée de spectres, qui ne ressemblaient plus du tout à de charmantes jeunes femmes, déferler dans l’hôtel sans discontinuer, en se bousculant, avides de les attraper, et ce certainement pas pour les inviter à prendre le thé. Haschatan, toujours adossé à la porte, commençait à reprendre des couleurs.
« Mais qu’est-ce qu’elles foutent ? » aboya Fury en attrapant Erwan à l’épaule. Ce dernier lui lança un regard sérieux, pénétrant, et Fury relâcha son étreinte. Le flot de fantômes arriva à la porte et les secousses commencèrent. Le bois craqua sous le poids des dizaines de mains qui poussaient de l’autre coté. Haschatan poussa un cri de surprise, puis pris appui sur ses deux jambes pour maintenir la porte close.
Sur la place entièrement recouverte d’âmes damnées, la Dame Blanche qui surplombait les autres continuait à vociférer et montrant la chambre, campant sur ses positions tandis que le flux de son armée morbide poursuivait sa soif insatiable et son avancée vers le groupe de voyageurs qui n’y comprenaient plus rien. Néanmoins, faute d’analyser le pourquoi et le comment, ils étaient prêts à en découdre.
Et lorsque la première main traversa la porte, arrachant un second piaillement de peur à Haschatan, Erwan n’hésita pas un instant pour trancher le membre cadavérique qui cherchait une prise à quoi s’accrocher. Il se jeta sur Haschatan et, d’un geste souple et calculé, coupa la main qui tomba sur le sol dans un immonde bruit de chair en décomposition. Par le trou nouvellement créé s’amassaient des visages pâles et affamés.
Leurs orbites étaient vides, leur teint était maladif, leurs dents jaunes et pourries, leurs joues creusées et leur cheveux, devenus clairsemés et filasses, leur tombaient en tout sens devant les yeux. Elles ne ressemblaient plus du tout à des paisibles villageoises, et Mr.Magnum se rappela distinctement le visage émacié et effrayant qu’il avait vu dans son rétroviseur, ce qui lui semblait des années auparavant.
D’autres mains jaillirent alors par la brèche formée et tentèrent d’écarter les morceaux de bois récalcitrants. Erwan faisait virevolter Santesia avec brio et adresse, tandis que les bras jonchaient le sol à ses pieds. Haschatan maintenait les restes de la porte tant bien que mal, mais leurs assaillant étaient, par rapport à eux, en surnombre.
« On s’en sortira pas, Magnum ! rugit Erwan en continuant sa découpe.
-On risque quoi, de toute façon ? » clama Haschatan en riant nerveusement. Une main passa à sa portée et il lui brisa le radius et le cubitus sans effort. Les deux os croustillèrent en se brisant, et le membre pendant et inanimé fut happé par sa propriétaire qui beuglait de douleur. « On risque pas de mourir, on est déjà mort !
-En même temps, je n’ai pas envie de savoir où on va lorsqu’on meurt en étant déjà mort, pour ma part. » conclu Fury en se précipitant à son tour vers la porte. Haschatan le vit courir et s’écarta juste à temps pour que les deux immenses mains de Fury ne l’écrase sur la porte. Fury poussa de toutes ses forces et la porte, au lieu de s’enfoncer à l’intérieur de la chambre, commença à sortir de ses gonds et écrasa les mortes vivantes qui se trouvaient agglutinées derrière.
Les nouveaux muscles de Fury, en action, étaient impressionnants. Ses veines de la taille d’un doigt pulsaient de sang, faisant gonfler les tissus et contractaient les muscles, tendaient la peau à l’extrême. Erwan cessa tout mouvements, s’attendant presque à voir la peau s’ouvrir sous la pression, mais il n’en fut rien. Griffée, éraflées, frappée, la peau tenait le coup, et Fury également. Ses yeux avaient virés au rouge et il grognait sourdement sous l’effort.
Mais il gagnait du terrain sur les folles furieuses qui voulaient les écharper. Mr.Magnum commençait juste à reprendre espoir lorsqu’une des monstruosité passa par la fenêtre, bousculant K-Ro, et atterri sur son dos. Sans hésiter, il courba le dos et accompagna le mouvement en basculant la femme vers Erwan, qui lui ouvrit le ventre dans un giclement de sang écoeurant. La morte trépassa une nouvelle fois.
Mr.Magnum jeta un rapide coup d’œil par la fenêtre et compta rapidement le nombre d’assaillante qui grimpaient sur le mur ou sautaient vers eux, bien décidées d’attaquer par cette ouverture également. Il arma le chien de son arme et vida son chargeur sur elles, réduisant huit crânes en poussière d’os et magma de cervelles putréfiées.
Haschatan aida K-Ro à se relever. Manifestement, elle n’avait rien, mais semblait un peu sonnée. Mr.Magnum rechargea rapidement son arme, en repoussant une femme d’un coup de poing rageur qui explosa la mâchoire de la défunte, répandant un liquide poisseux et répugnant sur son gant. Un liquide noirâtre qui était bien loin du sang.
« Merde, c’est pas comme les zombies de Silent Hill ou Resident Evil !! » s’exclama Erwan en se ruant derrière Fury, qui avançait régulièrement, protégé par la porte des assauts griffus des dames blanches. Mr.Magnum hocha la tête, parfaitement conscient qu’il était le seul à savoir qu’il approuvait la remarque, et continua son feu nourri vers la foule qui s’étendait à ses pieds.
Mais la place ne désemplissait pas et les dames blanches semblaient sortir indéfiniment des maisons adjacentes, de la forêt et de partout, en fait. Son regard se posa alors sur celle qui surpassait les autres par la taille, et il se demanda si son expérience des jeux vidéo pouvait lui servir ici. C’était toujours le monstre le plus gros qu’il fallait abattre pour que les petits cessent d’attaquer. Il arma, visa et…
La porte de bois émit un craquement et Fury disparu sous une masse de cadavres en une seconde. Erwan recula jusqu’à l’embrasure de la porte, là où le passage était le plus étroit, et continua à repousser les furies déchaînées avec son épée démesurée. Les têtes tombaient, ainsi que les bras et les jambes, les troncs se perforaient, le sang coulait à flot sur le seuil de la porte. Mais malgré ses efforts, il perdait du terrain.
Mr.Magnum se détourna un instant de la fenêtre pour voir comment s’organisait Erwan et si tout allait bien, et ce moment d’inattention permit à une des cadavres de planter ses griffes acérées dans son dos. Il poussa un hurlement, et plaça son arme au dessus de sa tête en une fraction de second puis explosa l’épaule de la bête agrippée à lui. Celle-ci lâcha prise et se roula sur le sol en gémissant. Mr.Magnum lui décocha un coup de pied dans le ventre qui la renvoya par la fenêtre, entraînant avec elle une de ses congénère qui avait eu le malheur d’apparaître au même instant.
Erwan glapit de souffrance dans son dos, mais une vague de dames blanches affluait vers Mr.Magnum, et il ne pu se résoudre à voir pourquoi son ami avait ainsi geint. Erwan était aux prises avec une indomptable qui, malgré ses deux bras manquants, résistait toujours aux estafilades de Santesia. Elle avait finit par lui envoyer un coup de pied là où ça fait mal, et Erwan, plié en deux, n’arrivait donc plus à suivre. Une autre zombie leva les mains au dessus de lui, poings liés en un immense marteau, et menaça de l’assommer.
Mais son mouvement fut stoppé par un balai qui alla se planter dans le torse de la femme qui resta interdite. Debout sur le lit, K-Ro souriait méchamment, la main encore lancée en avant. Erwan la regarda, étonné, et elle lui fit un clin d’œil en exhibant un immense lance-flamme nommé ‘Crame-tout’. Erwan se releva, repoussa une ultime fois l’invasion dans le couloir, puis se jeta aux pieds du lit en croisant ses mains sur sa tête.
« J’aime quand tu te prosternes devant moi, Erwan ! » jubila K-Ro en actionnant divers boutons sur son immense canon. Elle ne prit même pas la peine de viser et hurla en déchaînant les flammes sur les spectres. Elles s’enflammèrent sans mal, leurs robes et leurs peaux déchées s’embrasant comme du papier.
Une odeur atroce emplit la pièce ainsi qu’une chaleur étouffante, mais au moins les troupes ennemies reculaient ou tombaient sous l’action déterminante de K-Ro, qui riait aux éclats. Haschatan, derrière elle, maintenait l’immense réservoir d’essence qui était bien trop lourd pour elle, et lançait des hurlements de triomphe. Erwan se leva, admirant le spectacle des mortes qui brûlaient à terre, et commença à achever les survivantes.
Mr.Magnum continuait frénétiquement à faire feu sur les hordes assiégeantes qui ne cessaient de se reproduire devant lui. De temps à autre, lorsque un répit d’une ou deux secondes s’annonçait, il tentait d’atteindre la grande dame blanche, celle qui semblait diriger les autres. Mais à chaque tentative qu’il avait effectuée, la ou les balles étaient arrêtées en plein vol par une de ses sœurs qui se sacrifiait. Mr.Magnum en avait logiquement déduis que c’était bien elle qu’il fallait abattre pour réduire à néant les assauts hostiles.
K-Ro et Haschatan atteignirent le point où Fury avait disparu sous les innombrables femmes furieuses mais ils ne le retrouvèrent pas. Ni cadavre, ni rien ne suggérait son éventuelle présence actuelle ou passée ici. Néanmoins, ils continuèrent leur progression en marchant sur les restes calcinés des mortes.
Erwan était entrain d’aider Mr.Magnum à la fenêtre lorsque l’explosion leur déchira les tympans, déjà malmenés par les cris des dames blanches et les coups de feu de Mr.Magnum. Il se retourna vers le couloir, tout en rechargeant une énième fois son arme, et vit K-Ro et Haschatan courir vers lui, poursuivis par une marée de cadavres décomposés et à moitié brûlés. Ils sautèrent de l’autre coté du lit, le soulevèrent avec peine et le plaquèrent contre le trou béant de la porte.
« Qu’est-ce qu’il s’est passé ? demanda Mr.Magnum. Il remarqua soudainement l’aspect noircis de K-Ro et Haschatan, et ajouta : Où est passé ton lance flamme ?
-Euh, hésita K-Ro. Dis-lui, toi !
-Il a fait boum ! expliqua simplement Haschatan en arborant un sourire simplet.
-Oui, exactement, il a fait boum ! répéta K-Ro en souriant à son tour. De toute façon, ces inventions, ça vaut rien. Je préfère encore les balais, plus efficaces.
-Magnum !! cria Erwan d’une voix paniquée. J’ai un problème, là ! »
Mr.Magnum se précipita vers la fenêtre aux cotés d’Erwan et, tout en continuant perpétuellement à repousser les défuntes accidentées, il vit la chef des troupes qui avait reprit ses rugissements rauques et perçants. Et les centaines de dames blanches ne se contentaient plus d’avancer vers eux, avec ce cri : Elles couraient et se piétinaient entre elles pour les atteindre. Bientôt, les cadavres de leurs alliées leur servirent d’escalier pour accéder à la fenêtre, et le surnombre écrasa rapidement Erwan et Mr.Magnum.
De l’autre coté, la pression derrière le lit allait en s’accentuant, obligeant Haschatan et K-Ro à mobiliser toutes leurs forces pour maintenir le lit debout. Mais des mains et des pieds passaient à travers le sommier, tendant le tissu qui servait de fond au lit, le déchirant, l’éventrant, et le lit sembla vomir les mortes par cet orifice improvisé. Erwan hurla de terreur lorsque des mains poussèrent du plancher, écartant les lattes, les brisant. Des cadavres s’extirpaient du sol comme dans une sinistre parodie de naissance.
Mr.Magnum délaissa la fenêtre et tenta d’écraser tout ce qui sortait du sol du mieux qu’il pouvait. Il écrasa les mains, brisant les os et étalant le sang noir et nauséabond, répandit la cervelle de deux ou trois têtes qui avaient osés émerger du sol et explosa ce qui passait à sa portée. Brusquement, une nué de macchabées envahit la salle en déferlant par la fenêtre, emportant Erwan qui ne pu produire qu’un cri étouffé.
Mr.Magnum l’appela à travers le vacarme ambiant, puis une main le saisit à la cheville et le tira violemment, enfonçant sa jambe dans le sol jusqu’à la cuisse. Ainsi immobilisé, il ne pu qu’assister, impuissant, à la disparition d’Haschatan et de K-Ro, puis il perdit à son tour connaissance alors que le cri de victoire de la grande dame blanche résonnait.
*
* *
La cellule où ils se retrouvèrent était froide et humide. Dès son réveil, Erwan vit que K-Ro manquait à l’appel : Fury se tenait accroupi dans un coin, regardant ses mains sans intérêt. Mr.Magnum se tenait accroché aux barreaux en fer et les secouait en braillant des mots que l’esprit encore embrumé d’Erwan n’arrivait pas à analyser. Haschatan, quant à lui, était allongé sur la couchette en face de celle où Erwan était étendu.
« Hou ahé wou hire eukeu ouwé zon ihi ? »
Erwan se redressa et sa tête chancela dangereusement pendant quelques secondes. Le monde autour de lui se dédoubla, puis redevint normal, bien que tanguant. Il avait un goût amer en bouche, comme une sorte de liquide métallique et froid qui aurait mariné en guise de salive pendant qu’il était inconscient.
Il tenta d’interpréter les borborygmes qu’émettait Mr.Magnum en martelant la porte de leur cage, mais n’y parvint encore pas. Il passa une main dans ses cheveux et découvrit une bosse à la base du cou de la taille d’un œuf de caille. À peine eut-il effleuré l’hématome de ses doigts qu’une douleur fulgurante lui vrilla le crâne et une larme coula de chacun de ses yeux simultanément.
Mais cette douleur lui permit de retrouver pied dans le conscient et il pu ainsi comprendre lorsque Mr.Magnum répéta sa phrase, collé aux grilles :
« Vous allez nous dire ce que nous faisons ici, oui ou non ?!
-Moins fort, Magnum, J’ai l’impression qu’une centaine d’éléphants en rut ont décidés de danser la lambada affublés d’une ceinture de casseroles avec Boutros Boutros-Ghali en scaphandre sur mon cerveau.
-Erwan ! » s’écrièrent ses trois compères en même temps.
4. Confrontations diverses.
Sans prendre la peine de réfléchir, Mr.Magnum porta une main à son holster et en sortit prestement son arme, un Magnum de calibre 357, chargé à bloc. Erwan exhiba fièrement sa longue épée Santesia qu’il tenait à deux mains et s’échauffa brièvement les poignets afin de la manier avec plus d’aisance.
K-Ro, hébétée, regardait la marée de spectres, qui ne ressemblaient plus du tout à de charmantes jeunes femmes, déferler dans l’hôtel sans discontinuer, en se bousculant, avides de les attraper, et ce certainement pas pour les inviter à prendre le thé. Haschatan, toujours adossé à la porte, commençait à reprendre des couleurs.
« Mais qu’est-ce qu’elles foutent ? » aboya Fury en attrapant Erwan à l’épaule. Ce dernier lui lança un regard sérieux, pénétrant, et Fury relâcha son étreinte. Le flot de fantômes arriva à la porte et les secousses commencèrent. Le bois craqua sous le poids des dizaines de mains qui poussaient de l’autre coté. Haschatan poussa un cri de surprise, puis pris appui sur ses deux jambes pour maintenir la porte close.
Sur la place entièrement recouverte d’âmes damnées, la Dame Blanche qui surplombait les autres continuait à vociférer et montrant la chambre, campant sur ses positions tandis que le flux de son armée morbide poursuivait sa soif insatiable et son avancée vers le groupe de voyageurs qui n’y comprenaient plus rien. Néanmoins, faute d’analyser le pourquoi et le comment, ils étaient prêts à en découdre.
Et lorsque la première main traversa la porte, arrachant un second piaillement de peur à Haschatan, Erwan n’hésita pas un instant pour trancher le membre cadavérique qui cherchait une prise à quoi s’accrocher. Il se jeta sur Haschatan et, d’un geste souple et calculé, coupa la main qui tomba sur le sol dans un immonde bruit de chair en décomposition. Par le trou nouvellement créé s’amassaient des visages pâles et affamés.
Leurs orbites étaient vides, leur teint était maladif, leurs dents jaunes et pourries, leurs joues creusées et leur cheveux, devenus clairsemés et filasses, leur tombaient en tout sens devant les yeux. Elles ne ressemblaient plus du tout à des paisibles villageoises, et Mr.Magnum se rappela distinctement le visage émacié et effrayant qu’il avait vu dans son rétroviseur, ce qui lui semblait des années auparavant.
D’autres mains jaillirent alors par la brèche formée et tentèrent d’écarter les morceaux de bois récalcitrants. Erwan faisait virevolter Santesia avec brio et adresse, tandis que les bras jonchaient le sol à ses pieds. Haschatan maintenait les restes de la porte tant bien que mal, mais leurs assaillant étaient, par rapport à eux, en surnombre.
« On s’en sortira pas, Magnum ! rugit Erwan en continuant sa découpe.
-On risque quoi, de toute façon ? » clama Haschatan en riant nerveusement. Une main passa à sa portée et il lui brisa le radius et le cubitus sans effort. Les deux os croustillèrent en se brisant, et le membre pendant et inanimé fut happé par sa propriétaire qui beuglait de douleur. « On risque pas de mourir, on est déjà mort !
-En même temps, je n’ai pas envie de savoir où on va lorsqu’on meurt en étant déjà mort, pour ma part. » conclu Fury en se précipitant à son tour vers la porte. Haschatan le vit courir et s’écarta juste à temps pour que les deux immenses mains de Fury ne l’écrase sur la porte. Fury poussa de toutes ses forces et la porte, au lieu de s’enfoncer à l’intérieur de la chambre, commença à sortir de ses gonds et écrasa les mortes vivantes qui se trouvaient agglutinées derrière.
Les nouveaux muscles de Fury, en action, étaient impressionnants. Ses veines de la taille d’un doigt pulsaient de sang, faisant gonfler les tissus et contractaient les muscles, tendaient la peau à l’extrême. Erwan cessa tout mouvements, s’attendant presque à voir la peau s’ouvrir sous la pression, mais il n’en fut rien. Griffée, éraflées, frappée, la peau tenait le coup, et Fury également. Ses yeux avaient virés au rouge et il grognait sourdement sous l’effort.
Mais il gagnait du terrain sur les folles furieuses qui voulaient les écharper. Mr.Magnum commençait juste à reprendre espoir lorsqu’une des monstruosité passa par la fenêtre, bousculant K-Ro, et atterri sur son dos. Sans hésiter, il courba le dos et accompagna le mouvement en basculant la femme vers Erwan, qui lui ouvrit le ventre dans un giclement de sang écoeurant. La morte trépassa une nouvelle fois.
Mr.Magnum jeta un rapide coup d’œil par la fenêtre et compta rapidement le nombre d’assaillante qui grimpaient sur le mur ou sautaient vers eux, bien décidées d’attaquer par cette ouverture également. Il arma le chien de son arme et vida son chargeur sur elles, réduisant huit crânes en poussière d’os et magma de cervelles putréfiées.
Haschatan aida K-Ro à se relever. Manifestement, elle n’avait rien, mais semblait un peu sonnée. Mr.Magnum rechargea rapidement son arme, en repoussant une femme d’un coup de poing rageur qui explosa la mâchoire de la défunte, répandant un liquide poisseux et répugnant sur son gant. Un liquide noirâtre qui était bien loin du sang.
« Merde, c’est pas comme les zombies de Silent Hill ou Resident Evil !! » s’exclama Erwan en se ruant derrière Fury, qui avançait régulièrement, protégé par la porte des assauts griffus des dames blanches. Mr.Magnum hocha la tête, parfaitement conscient qu’il était le seul à savoir qu’il approuvait la remarque, et continua son feu nourri vers la foule qui s’étendait à ses pieds.
Mais la place ne désemplissait pas et les dames blanches semblaient sortir indéfiniment des maisons adjacentes, de la forêt et de partout, en fait. Son regard se posa alors sur celle qui surpassait les autres par la taille, et il se demanda si son expérience des jeux vidéo pouvait lui servir ici. C’était toujours le monstre le plus gros qu’il fallait abattre pour que les petits cessent d’attaquer. Il arma, visa et…
La porte de bois émit un craquement et Fury disparu sous une masse de cadavres en une seconde. Erwan recula jusqu’à l’embrasure de la porte, là où le passage était le plus étroit, et continua à repousser les furies déchaînées avec son épée démesurée. Les têtes tombaient, ainsi que les bras et les jambes, les troncs se perforaient, le sang coulait à flot sur le seuil de la porte. Mais malgré ses efforts, il perdait du terrain.
Mr.Magnum se détourna un instant de la fenêtre pour voir comment s’organisait Erwan et si tout allait bien, et ce moment d’inattention permit à une des cadavres de planter ses griffes acérées dans son dos. Il poussa un hurlement, et plaça son arme au dessus de sa tête en une fraction de second puis explosa l’épaule de la bête agrippée à lui. Celle-ci lâcha prise et se roula sur le sol en gémissant. Mr.Magnum lui décocha un coup de pied dans le ventre qui la renvoya par la fenêtre, entraînant avec elle une de ses congénère qui avait eu le malheur d’apparaître au même instant.
Erwan glapit de souffrance dans son dos, mais une vague de dames blanches affluait vers Mr.Magnum, et il ne pu se résoudre à voir pourquoi son ami avait ainsi geint. Erwan était aux prises avec une indomptable qui, malgré ses deux bras manquants, résistait toujours aux estafilades de Santesia. Elle avait finit par lui envoyer un coup de pied là où ça fait mal, et Erwan, plié en deux, n’arrivait donc plus à suivre. Une autre zombie leva les mains au dessus de lui, poings liés en un immense marteau, et menaça de l’assommer.
Mais son mouvement fut stoppé par un balai qui alla se planter dans le torse de la femme qui resta interdite. Debout sur le lit, K-Ro souriait méchamment, la main encore lancée en avant. Erwan la regarda, étonné, et elle lui fit un clin d’œil en exhibant un immense lance-flamme nommé ‘Crame-tout’. Erwan se releva, repoussa une ultime fois l’invasion dans le couloir, puis se jeta aux pieds du lit en croisant ses mains sur sa tête.
« J’aime quand tu te prosternes devant moi, Erwan ! » jubila K-Ro en actionnant divers boutons sur son immense canon. Elle ne prit même pas la peine de viser et hurla en déchaînant les flammes sur les spectres. Elles s’enflammèrent sans mal, leurs robes et leurs peaux déchées s’embrasant comme du papier.
Une odeur atroce emplit la pièce ainsi qu’une chaleur étouffante, mais au moins les troupes ennemies reculaient ou tombaient sous l’action déterminante de K-Ro, qui riait aux éclats. Haschatan, derrière elle, maintenait l’immense réservoir d’essence qui était bien trop lourd pour elle, et lançait des hurlements de triomphe. Erwan se leva, admirant le spectacle des mortes qui brûlaient à terre, et commença à achever les survivantes.
Mr.Magnum continuait frénétiquement à faire feu sur les hordes assiégeantes qui ne cessaient de se reproduire devant lui. De temps à autre, lorsque un répit d’une ou deux secondes s’annonçait, il tentait d’atteindre la grande dame blanche, celle qui semblait diriger les autres. Mais à chaque tentative qu’il avait effectuée, la ou les balles étaient arrêtées en plein vol par une de ses sœurs qui se sacrifiait. Mr.Magnum en avait logiquement déduis que c’était bien elle qu’il fallait abattre pour réduire à néant les assauts hostiles.
K-Ro et Haschatan atteignirent le point où Fury avait disparu sous les innombrables femmes furieuses mais ils ne le retrouvèrent pas. Ni cadavre, ni rien ne suggérait son éventuelle présence actuelle ou passée ici. Néanmoins, ils continuèrent leur progression en marchant sur les restes calcinés des mortes.
Erwan était entrain d’aider Mr.Magnum à la fenêtre lorsque l’explosion leur déchira les tympans, déjà malmenés par les cris des dames blanches et les coups de feu de Mr.Magnum. Il se retourna vers le couloir, tout en rechargeant une énième fois son arme, et vit K-Ro et Haschatan courir vers lui, poursuivis par une marée de cadavres décomposés et à moitié brûlés. Ils sautèrent de l’autre coté du lit, le soulevèrent avec peine et le plaquèrent contre le trou béant de la porte.
« Qu’est-ce qu’il s’est passé ? demanda Mr.Magnum. Il remarqua soudainement l’aspect noircis de K-Ro et Haschatan, et ajouta : Où est passé ton lance flamme ?
-Euh, hésita K-Ro. Dis-lui, toi !
-Il a fait boum ! expliqua simplement Haschatan en arborant un sourire simplet.
-Oui, exactement, il a fait boum ! répéta K-Ro en souriant à son tour. De toute façon, ces inventions, ça vaut rien. Je préfère encore les balais, plus efficaces.
-Magnum !! cria Erwan d’une voix paniquée. J’ai un problème, là ! »
Mr.Magnum se précipita vers la fenêtre aux cotés d’Erwan et, tout en continuant perpétuellement à repousser les défuntes accidentées, il vit la chef des troupes qui avait reprit ses rugissements rauques et perçants. Et les centaines de dames blanches ne se contentaient plus d’avancer vers eux, avec ce cri : Elles couraient et se piétinaient entre elles pour les atteindre. Bientôt, les cadavres de leurs alliées leur servirent d’escalier pour accéder à la fenêtre, et le surnombre écrasa rapidement Erwan et Mr.Magnum.
De l’autre coté, la pression derrière le lit allait en s’accentuant, obligeant Haschatan et K-Ro à mobiliser toutes leurs forces pour maintenir le lit debout. Mais des mains et des pieds passaient à travers le sommier, tendant le tissu qui servait de fond au lit, le déchirant, l’éventrant, et le lit sembla vomir les mortes par cet orifice improvisé. Erwan hurla de terreur lorsque des mains poussèrent du plancher, écartant les lattes, les brisant. Des cadavres s’extirpaient du sol comme dans une sinistre parodie de naissance.
Mr.Magnum délaissa la fenêtre et tenta d’écraser tout ce qui sortait du sol du mieux qu’il pouvait. Il écrasa les mains, brisant les os et étalant le sang noir et nauséabond, répandit la cervelle de deux ou trois têtes qui avaient osés émerger du sol et explosa ce qui passait à sa portée. Brusquement, une nué de macchabées envahit la salle en déferlant par la fenêtre, emportant Erwan qui ne pu produire qu’un cri étouffé.
Mr.Magnum l’appela à travers le vacarme ambiant, puis une main le saisit à la cheville et le tira violemment, enfonçant sa jambe dans le sol jusqu’à la cuisse. Ainsi immobilisé, il ne pu qu’assister, impuissant, à la disparition d’Haschatan et de K-Ro, puis il perdit à son tour connaissance alors que le cri de victoire de la grande dame blanche résonnait.
*
* *
La cellule où ils se retrouvèrent était froide et humide. Dès son réveil, Erwan vit que K-Ro manquait à l’appel : Fury se tenait accroupi dans un coin, regardant ses mains sans intérêt. Mr.Magnum se tenait accroché aux barreaux en fer et les secouait en braillant des mots que l’esprit encore embrumé d’Erwan n’arrivait pas à analyser. Haschatan, quant à lui, était allongé sur la couchette en face de celle où Erwan était étendu.
« Hou ahé wou hire eukeu ouwé zon ihi ? »
Erwan se redressa et sa tête chancela dangereusement pendant quelques secondes. Le monde autour de lui se dédoubla, puis redevint normal, bien que tanguant. Il avait un goût amer en bouche, comme une sorte de liquide métallique et froid qui aurait mariné en guise de salive pendant qu’il était inconscient.
Il tenta d’interpréter les borborygmes qu’émettait Mr.Magnum en martelant la porte de leur cage, mais n’y parvint encore pas. Il passa une main dans ses cheveux et découvrit une bosse à la base du cou de la taille d’un œuf de caille. À peine eut-il effleuré l’hématome de ses doigts qu’une douleur fulgurante lui vrilla le crâne et une larme coula de chacun de ses yeux simultanément.
Mais cette douleur lui permit de retrouver pied dans le conscient et il pu ainsi comprendre lorsque Mr.Magnum répéta sa phrase, collé aux grilles :
« Vous allez nous dire ce que nous faisons ici, oui ou non ?!
-Moins fort, Magnum, J’ai l’impression qu’une centaine d’éléphants en rut ont décidés de danser la lambada affublés d’une ceinture de casseroles avec Boutros Boutros-Ghali en scaphandre sur mon cerveau.
-Erwan ! » s’écrièrent ses trois compères en même temps.
Mr.Magnum- Enorme floodeur
- Nombre de messages : 2475
Age : 42
Localisation : Dans les limbes torturées d'un esprit dérangé.
Date d'inscription : 18/01/2005
Re: Traumenschar
(partie 2)
Ils s’approchèrent de sa couche et s’enquirent de son état de santé. Erwan les rassura brièvement en leur demandant d’éviter les claques amicales sur la nuque pendant quelques temps, puis il leur réclama des nouvelles de K-Ro. Les trois visages soulagés de ses amis s’assombrirent.
« Aucune idée de là où elle est ni de son état de santé, lui annonça Fury d’un air désolé. À notre réveil, elle n’était pas avec nous.
-Elle a disparue en même temps que moi, poursuivit Haschatan, mais je n’ai rien vu venir. Je ne sais même pas ce qu’il s’est passé.
-Je ne pensais même pas qu’on s’en sortirait vivant, ajouta Mr.Magnum.
-Lorsqu’on s’est réveillé ensuite, raconta Haschatan, nous étions ici, dans cette prison. Nous n’avons vu personne depuis notre réveil. Et c’est pour ça que Magnum commençait à perdre patience et à gueuler ! »
Mr.Magnum eut un sourire gêné et Erwan gloussa doucement. Haschatan se mit également à rire puis Fury fut à son tour gagné par le fou rire, et ils se retrouvèrent tout les quatre à s’esclaffer sur le sol d’une prison tenue par des femmes mortes dans un monde mort. Un monde qu’ils ne connaissaient pas.
K-Ro s’éveilla doucement lorsque les rayons d’un soleil inconnu frappèrent ses paupières closes. Elle s’étira sous sa couverture de soie avec de petits cris de plaisir, puis enfonça de nouveau son visage contenté dans l’oreiller moelleux. Quelques secondes s’écoulèrent, puis K-Ro releva sa tête et examina l’endroit où elle se trouvait.
« Mais ! Mais c’est pas ma chambre !! »
K-Ro s’assit sur le bord du lit et examina les meubles, les murs et les ornements qui décoraient la pièce. Rien à voir avec sa chambre habituelle. À contre cœur, elle admit alors que ce cauchemar emplit de femmes mortes qui les attaquaient ne devait pas en être un, et que ce voyage au pays des dames blanches
Dame Blanche ville
n’était donc pas un songe non plus. Elle poussa un long soupir désapprobateur et frissonna. C’est à ce moment précis qu’elle s’aperçut qu’elle était entièrement nue. Son visage se congestionna et elle se jeta sous sa couette en étouffant un cri de honte.
Je ne peux pas sortir comme ça !! pensa-t-elle en s’enroulant dans le tissu. Où est mon kimono ? Où sont mes vêtements ? Où je suis, carrément ? Et qui est-ce qui m’a foutu à poil ? Cette dernière question lui empourpra de nouveau les joues tandis qu’elle s’imaginait un inconnu lui enlever un à un ses habits et la reluquer dans le plus simple appareil.
La colère se succéda à la honte, et elle s’emmitoufla avec la couverture et se dirigea vers la porte, avec la ferme intention de pousser une gueulante sur la première âme qui traînait, vivante ou non. Elle tourna la poignée et n’ouvrit pas la porte : Elle était verrouillée. Elle pesta à voix haute et fila un coup de pied dans un meuble.
Un cri déchira le silence ambiant.
« Aïe-euh ! J’avais oublié que j’étais pieds nus ! »
Elle retourna sur le lit en clopinant et se massa le pied en maugréant des insultes à l’encontre des femmes zombies qui l’avait amenés ici.
Erwan ouvrit la bouche pour dire à ses compagnons qu’il avait cru entendre un cri lorsqu’il fut interrompu par un coup sourd sur les barreaux de leur cellule. Les quatre têtes bifurquèrent vers la dame blanche qui se tenait face à eux, un trousseau de clef à la main.
Élodie souriait.
« Espèce de sale petite garce… » rugit Fury en se jetant sur elle. Les barreaux ployèrent légèrement sous l’impact, mais résistèrent néanmoins. Les immenses bras de Fury passèrent entre les grilles et griffèrent le vide quelques centimètres devant Élodie, profondément amusée devant un tel spectacle. Fury poussa un hurlement de frustration et rétracta ses mains. Haschatan s’avança alors vers la grille, calmement, et parla d’une voix posée, inhabituelle.
« Qu’est-ce que voulez de nous, à la fin ? »
Méfiante, Élodie fronça les sourcils et fit tinter les clefs.
« Vous le verrez en temps voulu. Écartez-vous de la porte que je vous ouvre, et ne faites pas les malins. Vous n’y gagneriez que des coups supplémentaires.
-De toute façon, continua doucement Haschatan, vous comptez nous trucider en place publique ? Vous voulez nous pendre, nous battre, nous humilier ?
-Votre destin, à vous autres hommes morts, nous importe peu ! cracha-t-elle en s’avançant. Vous allez rencontrer Myat’Ala, notre Souveraine. Et Elle décidera de votre destinée, sales hommes.
-Encore de la misandrie, railla Erwan.
-On ne respecte plus rien, de nos jours… » ajouta Mr.Magnum en étouffant un rire. Haschatan, toujours impassible, fixait intensément Élodie. Cette dernière fit un nouveau pas et reprit ses menaces envers eux :
« Si vous devez mourir de Sa main, croyez-moi, ça sera le plus grand honneur qu’Elle puisse vous accorder. Maintenant, veuillez vous reculer !! »
Elle avait tellement poussé sur le dernier mot que son visage s’était empourpré et lui avait donné des couleurs, représentant certainement la magnifique jeune femme qu’elle avait du être avant son accident et sa transformation. Ses poings s’étaient crispés sur les clefs, qui tintinnabulaient fortement sous les secousses et Haschatan, d’un geste souple et précis, attrapa sa toge et l’attira contre les barreaux.
Élodie ouvrit la bouche pour crier, d’étonnement mais aussi de peur, mais Haschatan, rapide comme l’éclair, posa une main ferme sur son visage pâle et étouffa le hurlement. C’était la première fois que des individus morts, des humains, des vulgaires hommes, posaient la main sur elle. Elle se débattit pour échapper à l’emprise d’Haschatan, mais ce dernier raffermit sa prise et finit par l’immobiliser complètement.
Elle respirait bruyamment par les narines, et ses yeux verts lançaient des éclairs. Haschatan approcha sa bouche de son oreille et lui murmura :
« Et maintenant, nouvelle donne : Qu’est-ce qu’on fait lorsque des prisonniers récalcitrant refusent de mourir. Je te laisse trois choix. Petit un : Tu nous libères gentiment et tu nous laisse rentrer chez nous. Petit deux : Tu continues à te débattre et je t’assomme pour récupérer les clefs. Petit trois : On te tue, on te mange, on prends les clefs et on sort quand même. Tu as encore deux jokers : le 50/50 et l’avis du public. »
Mr.Magnum et Erwan pouffèrent dans son dos, tandis que la dame blanche captive foudroyait Haschatan du regard. Elle lui lança un regard plein de défi, et resta muette. Haschatan, sans départir de son envie de rire, lui somma de répondre.
« Il te reste trente secondes, ma jolie. Dépêche-toi de choisir…
-L’avis du public est à 66% pour le petit un, déclama Mr.Magnum. Quant à Fury, il préfère ne pas se prononcer. »
Erwan éclata franchement de rire, et Fury lui fit signe de baisser d’un ton, au cas où d’autres femmes seraient alertées par le rire. Haschatan souleva légèrement sa main.
« Si tu cries, je sévis. Alors, tu as choisi ?
-J’ai choisi. » dit-elle d’une voix plate. Puis un éclair traversa son regard et sa main se jeta en avant, lançant le trousseau de clef loin de la cellule, hors de portée de Haschatan et ses compères. Un sourire moqueur retroussa ses lèvres, alors qu’Haschatan comprenait qu’elle venait de le blouser. Il perdit patience et serra encore son étreinte, l’obligeant à pousser un gémissement de douleur étouffé.
« La garce, souffla-t-il. Elle a balancé les clefs.
-Laisse-la nous mener à cette Myat’Ala si elle le souhaite vraiment… » dit Mr.Magnum, qui avait reprit son sérieux. Après tout, on ne sait même pas si Séphy-Roshou a atterrit ici ou non, et cette dame blanche pourra certainement nous indiquer si oui ou non son âme erre ici avec elle et les autres dames blanches. »
Haschatan hésita, puis relâcha Élodie qui s’écroula à quatre pattes sur le sol et s’éloigna rapidement. Elle se retourna sur le mur de l’autre coté, ramassa les clefs et reprit lentement son souffle, dévisageant Haschatan. Erwan s’approcha de Mr.Magnum.
« Mais si elle nous étripe, quelles chances on aura de la retrouver ?
-Et c’est en étouffant cette pauvre âme en peine que nous allons sortir d’ici ? rétorqua Mr.Magnum à voix basse pour éviter qu’Élodie ne l’entende. Au moins, nous seront hors de cette cellule et nous aviserons une fois devant la chef. »
Mr.Magnum tourna la tête vers Fury pour lui demander son accord silencieusement, et celui-ci hocha la tête. Haschatan retourna s’asseoir sans un mot sur une couchette, et Mr.Magnum se recula à son tour au fond de la prison. Élodie se releva, arrogante, et sortit une clef du trousseau.
« C’est bien, vous devenez enfin raisonnables. » Elle se massa le cou. « Mais je dois vous prévenir que vous subirez des représailles pour ce que vous venez de faire. Surtout toi, dit-elle en désignant Haschatan, qui ne broncha pas. Vous resterez calmes ? »
Tous acquiescèrent.
« Pas de coup fourré ? Si vous esquissez ne serait-ce qu’un geste, je n’hésiterai pas à…
-Pas de coups fourrés. » la coupa Mr.Magnum en mettant ses mains sur sa tête. Les autres se mirent debout et firent pareil. Élodie ouvrit alors la porte.
*
* *
K-Ro abandonna l’idée de passer par la fenêtre. Les barreaux étaient trop solides et trop peu espacés pour soit les briser soir passer entre. Sous cette image féerique de chambre somptueuse se dissimulait en fait habilement une prison dorée. Elle retourna à son lit et s’assit en tailleur dessus, attendant la suite des opérations.
Toujours affublée d’un simple drap, elle finit par perdre patience et au bout de quelques minutes se mit à faire les cents pas dans sa chambre. Puis, son pied la faisant légèrement souffrir ; son petit orteil avait triplé de volume et l’élançait à chaque pas ; et ralentit la cadence et fit pour la huitième fois le tour des murs, examinant chaque centimètres carrés pendant de longues minutes, tentant de trouver un passage secret, ou une faille, ou au moins quelque chose pour passer le temps.
Trois coups à la porte la firent sursauter, alors qu’elle s’évertuait à déplacer le tapis pour vérifier si une trappe n’était pas apparue depuis la dernière fois. Elle replaça le tapis à la hâte et sauta sur le lit, s’enveloppant du mieux qu’elle le pouvait dans la couverture. Puis, prenant une voix hautaine, elle chantonna un « Entrez ! » mélodieux.
La dame blanche qui entra dans la chambre apportait un plateau roulant, comme dans les hôtels, et lui amena le petit-déjeuner sans dire un mot. Puis elle retira les couvercles et disposa rapidement les couverts, ayant manifestement l’habitude de ce genre de rite, puis leva les yeux sur K-Ro qui, fascinée, l’avait regardée faire.
« Voici une petite collation pour vous mettre en forme, dit la dame blanche d’un ton aimable. Je vous conseille de manger au plus vite, ça refroidi rapidement.
-J’ai pas faim, répondit sèchement K-Ro. Qui me dit que vous ne l’avez pas empoisonné ? » La dame blanche leva sur elle des yeux médusés, et éclata d’un rire franc. Elle se calma rapidement, gênée, et lui répondit :
« Nous n’avons aucune intention de vous nuire, mademoiselle K-Ro. Myat’Ala a d’autres projets pour vous. »
Sans donner plus d’explications, elle sortit de la pièce en laissant K-Ro interdite, sur le lit. Ce n’est qu’une fois la porte fermée qu’elle se rua sur le porte-plat et dégagea d’un large balayement de bras le repas qui s’y trouvait. Elle prit ensuite son élan et lança plusieurs fois le chariot à roulettes sur la porte pour la faire céder. Mais rien n’y faisait. En désespoir de cause, elle réunis ses dernière forces pour le balancer à travers la pièce.
Il percuta la fenêtre et brisa la vitre en une myriade d’éclats acérés qui reflétèrent le soleil en étoiles au plafond. Mais les barreaux, intacts, ne bougèrent pas d’un millimètre. Éreintée, à bout de nerf, K-Ro se laissa aller et tomba à genoux sur le sol, en sanglotant. Elle savait parfaitement le sort qui lui était réservé : Elle allait devenir elle aussi…
…une dame blanche.
Ils s’approchèrent de sa couche et s’enquirent de son état de santé. Erwan les rassura brièvement en leur demandant d’éviter les claques amicales sur la nuque pendant quelques temps, puis il leur réclama des nouvelles de K-Ro. Les trois visages soulagés de ses amis s’assombrirent.
« Aucune idée de là où elle est ni de son état de santé, lui annonça Fury d’un air désolé. À notre réveil, elle n’était pas avec nous.
-Elle a disparue en même temps que moi, poursuivit Haschatan, mais je n’ai rien vu venir. Je ne sais même pas ce qu’il s’est passé.
-Je ne pensais même pas qu’on s’en sortirait vivant, ajouta Mr.Magnum.
-Lorsqu’on s’est réveillé ensuite, raconta Haschatan, nous étions ici, dans cette prison. Nous n’avons vu personne depuis notre réveil. Et c’est pour ça que Magnum commençait à perdre patience et à gueuler ! »
Mr.Magnum eut un sourire gêné et Erwan gloussa doucement. Haschatan se mit également à rire puis Fury fut à son tour gagné par le fou rire, et ils se retrouvèrent tout les quatre à s’esclaffer sur le sol d’une prison tenue par des femmes mortes dans un monde mort. Un monde qu’ils ne connaissaient pas.
K-Ro s’éveilla doucement lorsque les rayons d’un soleil inconnu frappèrent ses paupières closes. Elle s’étira sous sa couverture de soie avec de petits cris de plaisir, puis enfonça de nouveau son visage contenté dans l’oreiller moelleux. Quelques secondes s’écoulèrent, puis K-Ro releva sa tête et examina l’endroit où elle se trouvait.
« Mais ! Mais c’est pas ma chambre !! »
K-Ro s’assit sur le bord du lit et examina les meubles, les murs et les ornements qui décoraient la pièce. Rien à voir avec sa chambre habituelle. À contre cœur, elle admit alors que ce cauchemar emplit de femmes mortes qui les attaquaient ne devait pas en être un, et que ce voyage au pays des dames blanches
Dame Blanche ville
n’était donc pas un songe non plus. Elle poussa un long soupir désapprobateur et frissonna. C’est à ce moment précis qu’elle s’aperçut qu’elle était entièrement nue. Son visage se congestionna et elle se jeta sous sa couette en étouffant un cri de honte.
Je ne peux pas sortir comme ça !! pensa-t-elle en s’enroulant dans le tissu. Où est mon kimono ? Où sont mes vêtements ? Où je suis, carrément ? Et qui est-ce qui m’a foutu à poil ? Cette dernière question lui empourpra de nouveau les joues tandis qu’elle s’imaginait un inconnu lui enlever un à un ses habits et la reluquer dans le plus simple appareil.
La colère se succéda à la honte, et elle s’emmitoufla avec la couverture et se dirigea vers la porte, avec la ferme intention de pousser une gueulante sur la première âme qui traînait, vivante ou non. Elle tourna la poignée et n’ouvrit pas la porte : Elle était verrouillée. Elle pesta à voix haute et fila un coup de pied dans un meuble.
Un cri déchira le silence ambiant.
« Aïe-euh ! J’avais oublié que j’étais pieds nus ! »
Elle retourna sur le lit en clopinant et se massa le pied en maugréant des insultes à l’encontre des femmes zombies qui l’avait amenés ici.
Erwan ouvrit la bouche pour dire à ses compagnons qu’il avait cru entendre un cri lorsqu’il fut interrompu par un coup sourd sur les barreaux de leur cellule. Les quatre têtes bifurquèrent vers la dame blanche qui se tenait face à eux, un trousseau de clef à la main.
Élodie souriait.
« Espèce de sale petite garce… » rugit Fury en se jetant sur elle. Les barreaux ployèrent légèrement sous l’impact, mais résistèrent néanmoins. Les immenses bras de Fury passèrent entre les grilles et griffèrent le vide quelques centimètres devant Élodie, profondément amusée devant un tel spectacle. Fury poussa un hurlement de frustration et rétracta ses mains. Haschatan s’avança alors vers la grille, calmement, et parla d’une voix posée, inhabituelle.
« Qu’est-ce que voulez de nous, à la fin ? »
Méfiante, Élodie fronça les sourcils et fit tinter les clefs.
« Vous le verrez en temps voulu. Écartez-vous de la porte que je vous ouvre, et ne faites pas les malins. Vous n’y gagneriez que des coups supplémentaires.
-De toute façon, continua doucement Haschatan, vous comptez nous trucider en place publique ? Vous voulez nous pendre, nous battre, nous humilier ?
-Votre destin, à vous autres hommes morts, nous importe peu ! cracha-t-elle en s’avançant. Vous allez rencontrer Myat’Ala, notre Souveraine. Et Elle décidera de votre destinée, sales hommes.
-Encore de la misandrie, railla Erwan.
-On ne respecte plus rien, de nos jours… » ajouta Mr.Magnum en étouffant un rire. Haschatan, toujours impassible, fixait intensément Élodie. Cette dernière fit un nouveau pas et reprit ses menaces envers eux :
« Si vous devez mourir de Sa main, croyez-moi, ça sera le plus grand honneur qu’Elle puisse vous accorder. Maintenant, veuillez vous reculer !! »
Elle avait tellement poussé sur le dernier mot que son visage s’était empourpré et lui avait donné des couleurs, représentant certainement la magnifique jeune femme qu’elle avait du être avant son accident et sa transformation. Ses poings s’étaient crispés sur les clefs, qui tintinnabulaient fortement sous les secousses et Haschatan, d’un geste souple et précis, attrapa sa toge et l’attira contre les barreaux.
Élodie ouvrit la bouche pour crier, d’étonnement mais aussi de peur, mais Haschatan, rapide comme l’éclair, posa une main ferme sur son visage pâle et étouffa le hurlement. C’était la première fois que des individus morts, des humains, des vulgaires hommes, posaient la main sur elle. Elle se débattit pour échapper à l’emprise d’Haschatan, mais ce dernier raffermit sa prise et finit par l’immobiliser complètement.
Elle respirait bruyamment par les narines, et ses yeux verts lançaient des éclairs. Haschatan approcha sa bouche de son oreille et lui murmura :
« Et maintenant, nouvelle donne : Qu’est-ce qu’on fait lorsque des prisonniers récalcitrant refusent de mourir. Je te laisse trois choix. Petit un : Tu nous libères gentiment et tu nous laisse rentrer chez nous. Petit deux : Tu continues à te débattre et je t’assomme pour récupérer les clefs. Petit trois : On te tue, on te mange, on prends les clefs et on sort quand même. Tu as encore deux jokers : le 50/50 et l’avis du public. »
Mr.Magnum et Erwan pouffèrent dans son dos, tandis que la dame blanche captive foudroyait Haschatan du regard. Elle lui lança un regard plein de défi, et resta muette. Haschatan, sans départir de son envie de rire, lui somma de répondre.
« Il te reste trente secondes, ma jolie. Dépêche-toi de choisir…
-L’avis du public est à 66% pour le petit un, déclama Mr.Magnum. Quant à Fury, il préfère ne pas se prononcer. »
Erwan éclata franchement de rire, et Fury lui fit signe de baisser d’un ton, au cas où d’autres femmes seraient alertées par le rire. Haschatan souleva légèrement sa main.
« Si tu cries, je sévis. Alors, tu as choisi ?
-J’ai choisi. » dit-elle d’une voix plate. Puis un éclair traversa son regard et sa main se jeta en avant, lançant le trousseau de clef loin de la cellule, hors de portée de Haschatan et ses compères. Un sourire moqueur retroussa ses lèvres, alors qu’Haschatan comprenait qu’elle venait de le blouser. Il perdit patience et serra encore son étreinte, l’obligeant à pousser un gémissement de douleur étouffé.
« La garce, souffla-t-il. Elle a balancé les clefs.
-Laisse-la nous mener à cette Myat’Ala si elle le souhaite vraiment… » dit Mr.Magnum, qui avait reprit son sérieux. Après tout, on ne sait même pas si Séphy-Roshou a atterrit ici ou non, et cette dame blanche pourra certainement nous indiquer si oui ou non son âme erre ici avec elle et les autres dames blanches. »
Haschatan hésita, puis relâcha Élodie qui s’écroula à quatre pattes sur le sol et s’éloigna rapidement. Elle se retourna sur le mur de l’autre coté, ramassa les clefs et reprit lentement son souffle, dévisageant Haschatan. Erwan s’approcha de Mr.Magnum.
« Mais si elle nous étripe, quelles chances on aura de la retrouver ?
-Et c’est en étouffant cette pauvre âme en peine que nous allons sortir d’ici ? rétorqua Mr.Magnum à voix basse pour éviter qu’Élodie ne l’entende. Au moins, nous seront hors de cette cellule et nous aviserons une fois devant la chef. »
Mr.Magnum tourna la tête vers Fury pour lui demander son accord silencieusement, et celui-ci hocha la tête. Haschatan retourna s’asseoir sans un mot sur une couchette, et Mr.Magnum se recula à son tour au fond de la prison. Élodie se releva, arrogante, et sortit une clef du trousseau.
« C’est bien, vous devenez enfin raisonnables. » Elle se massa le cou. « Mais je dois vous prévenir que vous subirez des représailles pour ce que vous venez de faire. Surtout toi, dit-elle en désignant Haschatan, qui ne broncha pas. Vous resterez calmes ? »
Tous acquiescèrent.
« Pas de coup fourré ? Si vous esquissez ne serait-ce qu’un geste, je n’hésiterai pas à…
-Pas de coups fourrés. » la coupa Mr.Magnum en mettant ses mains sur sa tête. Les autres se mirent debout et firent pareil. Élodie ouvrit alors la porte.
*
* *
K-Ro abandonna l’idée de passer par la fenêtre. Les barreaux étaient trop solides et trop peu espacés pour soit les briser soir passer entre. Sous cette image féerique de chambre somptueuse se dissimulait en fait habilement une prison dorée. Elle retourna à son lit et s’assit en tailleur dessus, attendant la suite des opérations.
Toujours affublée d’un simple drap, elle finit par perdre patience et au bout de quelques minutes se mit à faire les cents pas dans sa chambre. Puis, son pied la faisant légèrement souffrir ; son petit orteil avait triplé de volume et l’élançait à chaque pas ; et ralentit la cadence et fit pour la huitième fois le tour des murs, examinant chaque centimètres carrés pendant de longues minutes, tentant de trouver un passage secret, ou une faille, ou au moins quelque chose pour passer le temps.
Trois coups à la porte la firent sursauter, alors qu’elle s’évertuait à déplacer le tapis pour vérifier si une trappe n’était pas apparue depuis la dernière fois. Elle replaça le tapis à la hâte et sauta sur le lit, s’enveloppant du mieux qu’elle le pouvait dans la couverture. Puis, prenant une voix hautaine, elle chantonna un « Entrez ! » mélodieux.
La dame blanche qui entra dans la chambre apportait un plateau roulant, comme dans les hôtels, et lui amena le petit-déjeuner sans dire un mot. Puis elle retira les couvercles et disposa rapidement les couverts, ayant manifestement l’habitude de ce genre de rite, puis leva les yeux sur K-Ro qui, fascinée, l’avait regardée faire.
« Voici une petite collation pour vous mettre en forme, dit la dame blanche d’un ton aimable. Je vous conseille de manger au plus vite, ça refroidi rapidement.
-J’ai pas faim, répondit sèchement K-Ro. Qui me dit que vous ne l’avez pas empoisonné ? » La dame blanche leva sur elle des yeux médusés, et éclata d’un rire franc. Elle se calma rapidement, gênée, et lui répondit :
« Nous n’avons aucune intention de vous nuire, mademoiselle K-Ro. Myat’Ala a d’autres projets pour vous. »
Sans donner plus d’explications, elle sortit de la pièce en laissant K-Ro interdite, sur le lit. Ce n’est qu’une fois la porte fermée qu’elle se rua sur le porte-plat et dégagea d’un large balayement de bras le repas qui s’y trouvait. Elle prit ensuite son élan et lança plusieurs fois le chariot à roulettes sur la porte pour la faire céder. Mais rien n’y faisait. En désespoir de cause, elle réunis ses dernière forces pour le balancer à travers la pièce.
Il percuta la fenêtre et brisa la vitre en une myriade d’éclats acérés qui reflétèrent le soleil en étoiles au plafond. Mais les barreaux, intacts, ne bougèrent pas d’un millimètre. Éreintée, à bout de nerf, K-Ro se laissa aller et tomba à genoux sur le sol, en sanglotant. Elle savait parfaitement le sort qui lui était réservé : Elle allait devenir elle aussi…
…une dame blanche.
Mr.Magnum- Enorme floodeur
- Nombre de messages : 2475
Age : 42
Localisation : Dans les limbes torturées d'un esprit dérangé.
Date d'inscription : 18/01/2005
Re: Traumenschar
(partie 1)
5. Jugement et Damnation.
Dans l’immense sale régnait un brouhaha monumental.
Pour la majorité des personnes présentes ici, toutes des femmes, toutes des mortes, toutes des dames blanches, chaque session de tribunal était une occasion de voir des hommes. Ces hommes, elles ne faisaient que les charmer au bord de la route, telles de vulgaires prostituées mortelles, puis elles ne les revoyaient qu’au moment de leur condamnation.
Une fois seulement, une d’entre elles avait succombée au charme d’un conducteur de carrosse. Elle avait refusé de l’amener au tribunal et elle s’était vue châtiée au même titre que sa victime. La punition, exemplaire, avait largement dissuadée les autres de tenter les mêmes actions, sentiments ou non.
Élodie siégeait au premier rang.
Son regard était dans le vague. Son esprit, ailleurs. Elle songeait aux quatre jeunes hommes qui allaient se placer dans le box juste en face d’elle, d’ici quelques minutes, et qui allaient certainement être condamnée à une éternité de tourments par Myat’Ala, comme tous les autres mâles qui arrivaient ici.
Et elle voulait assister à ça. Surtout pour voir le dénommé Haschatan ployer sous le coup du jugement. Peut-être pleurera-t-il ? Peut-être demandera-t-il le pardon ? Peut-être même s’agenouillera-t-il devant moi pour solliciter ma clémence ? Dans ce dernier cas, je demanderai à Myat’Ala la permission de m’en faire un esclave, comme celui qui est arrivé avant-hier et qu’elle a gardée pour elle.
Élodie avait déposé les quatre Trauméniens sans qu’ils tentent quoi que ce soit. Mais elle savait parfaitement qu’ils pouvaient être dangereux, même sous menottes. Elle frémit en repensant à la vitesse du geste d’Haschatan, et rougit légèrement de honte de s’être fait avoir si facilement par un humain. Même si, et elle en avait l’intime conviction depuis le début, ces cinq là étaient différents des autres.
Une porte s’ouvrit sur un des côtés de la pièce et la grande dame blanche qu’avait aperçu Mr.Magnum sur la place publique hier au soir apparue. Elle avait une tête de plus que la plupart des femmes de l’assistance, et promena un regard dédaigneux sur l’assemblée, tout en se dirigeant d’un pas lent mais calculé vers le pupitre central. Un véritable trône, plus qu’un simple pupitre.
Une fois placée derrière, elle semblait encore plus imposante. Elle leva une main, en guise de salut, et toutes les dames blanches présentes firent de même, en prononçant son nom d’une voix forte et à l’unisson. Une fois ce petit rituel achevé, Myat’Ala s’assit et une jeune femme lui apporta un paquet des feuillets en vrac.
Myat’Ala, la bouche close, un air sérieux au visage, regarda succinctement les différentes feuilles, documents et autres dossiers qu’elle avait entre les mains, puis elle les reposa une fois triés. Elle jeta à nouveau un regard sur l’assemblée, comme pour s’assurer que toutes étaient prêtes, puis elle fit signe à un de ses condisciples qui ouvrit une porte.
Mr.Magnum, Fury, Erwan et Haschatan entrèrent par la porte, entravés par de lourde menottes ainsi que des chaînes qui tintaient à chacun de leurs pas. Leurs chevilles étaient également maintenues les unes aux autres. Les quatre voyageurs défilaient ainsi au pas devant leurs geôliers, un semblant d’air affligé au visage.
Élodie jubilait de voir ainsi son futur protégé entrain de s’apitoyer sur son sort. Elle le suivit ardemment du regard jusqu’à ce que le petit groupe s’immobilise derrière un pupitre, où deux dames blanches les encadrèrent, impassibles. Myat’Ala les regarda dédaigneusement, puis retourna à ses feuillet avant de parler d’une voix forte.
« Mesdemoiselles, nous voici toutes réunies afin de condamner ces sinistres hommes à la même peine que tous les autres. Mais de tout ceux qui sont arrivés parmi nous, de tous ceux que nous avons enlevés au monde des vivants, ceux-ci ce sont montrés hors normes. »
Approbation générale dans la salle.
« Au lieu de tenter de s’enfuir comme des lâches qu’ils sont, continua-t-elle, ces hommes se sont bagarrés sauvagement, nous attaquant avec leurs armes, leurs pieds et leurs poings afin de nous soumettre, de nous avilir comme dans leur monde. »
Grognements et huées de la foule, les reproches dirigés vers les accusés.
« Mais nous avons vaincus, mes sœurs. Nous avons réduit à néant leurs espérances de domination. Et nous allons faire d’eux un exemple. Leur peine, leur souffrance, sera exemplaire. Dès demain, ils seront envoyés non pas dans les camps de mâles, mais leurs âmes seront enchaînées pour une éternité de souffrance dans les limbes de l’oubli… »
Myat’Ala prit une grande inspiration, et relâcha dans un souffle :
« En bas. »
Lorsque la troupe de mâles entrèrent dans la grande salle, Erwan ne pu retenir un léger sifflement d’admiration. Il se pencha en avant et murmura à Fury, son prédécesseur :
« Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’elles font les choses en grand. »
Fury hocha la tête silencieusement, et continua à avancer avec le rythme imposé par les chaînes. Une fois réfugiés derrière un pupitre qui convenait manifestement aux accusés, Mr.Magnum et ses compagnons examinèrent la salle. Celle qui se trouve au centre l’estrade, se dit Mr.Magnum, doit être la fameuse Myat’Ala.
Celle-ci leur jeta un regard méprisant, puis commença à lire les feuilles qu’elle tenait dans sa main. Haschatan avait quant à lui les yeux fixés sur Élodie, qui était la seule dame blanche de l’assistance à l’observer intensément. Il se demandait ce qu’elle avait en tête lorsque Myat’Ala commença son discours.
« Écoute-moi ce ramassis de conneries… dit Fury.
-Oui, je sais, soupira Erwan. Nous sommes condamnés avant même d’être jugés.
-Au moins, nous sommes traités d’êtres hors normes !! » jubila Haschatan. Les autres le regardèrent d’un air consterné, et Haschatan leur sourit. La foule lançait des acclamations derrière eux, puis Myat’Ala reprit la parole.
« Non mais vous entendez ce qu’elle dit, celle-là ? s’offusqua Erwan. Selon elle, nous serions presque les fautifs, dans l’histoire !
-Nous sommes coupables d’avoir tenté de survivre, ironisa Fury.
-En tout cas, ils nous prennent vraiment pour les pires misogynes qui existent sur cette terre, affirma Erwan.
-On se croirait à un discours d’Arlette Laguiller, s’esclaffa Haschatan, puis il imita la voix de la femme politique : Dames Blancheurs, Dames Blancheuses, on vous exploite, on vous spolie ! »
Mr.Magnum eut du mal à retenir un rire, tandis que les autres pouffèrent le plus discrètement possible, alors que la foule les conspuait copieusement. Les sifflets fusaient, et Erwan songea que s’ils avaient été sur une scène de théâtre, ils auraient certainement reçu moult fruits pourris sur la figure. Puis la juge fit cesser le vacarme en parlant à nouveau.
« Écoutez ce qu’elle dit, là, ça devient sérieux… dit Fury en tendant l’oreille.
-Elle parle de… …‘peine exemplaire’ ? répéta Erwan, interloqué. Qu’est-ce que ça veut dire exactement ?
-J’ai dans l’idée que nous allons bientôt le découvrir... » marmonna Mr.Magnum, tandis que la grande dame blanche terminait son discours. Elle ménageait le suspens et, après quelques secondes de silence, lança ses derniers mots :
« En bas. »
Les acclamations qui accueillirent ces deux mots remplirent la salle, et la foule de dames blanches levèrent les mains et applaudirent à tout rompre. Erwan, Fury et les autres se regardèrent à tour de rôle, interrogateurs.
« Qu’est-ce que c’est que ce ‘en bas’ ? demanda Haschatan.
-Curieusement, répondit Erwan, je n’ai pas trop envie de la savoir !
-Bon, il est temps, dit Mr.Magnum sérieusement. Il faut lui demander si elle a vu Séphy-Roshou ou non, qu’on en finisse. »
Il s’apprêtait à hausser la voix pour surpasser les cris de victoires ambiants, mais une des dames blanches de l’assistance le devança. Elle demeurait immobile alors que ses compagnes dansaient autour d’elle et elle ne lâchait pas Haschatan des yeux. Mr.Magnum la reconnu tout de suite : « Élodie… » expira-t-il.
K-Ro, habillée d’une robe blanche, suivait le discours de la salle d’à coté. Elle était seule dans une petite pièce, et devait normalement attendre résolument qu’on vienne la chercher après que ses compagnons aient été condamnés. Mais K-Ro n’était pas d’un naturel patient, et elle faisait les cents pas en écoutant de temps à autre, l’oreille collé à la porte, ce qu’il se disait dans la salle d’à coté.
Aux applaudissements se succédèrent des manifestassions hostiles envers les accusés et, bien que K-Ro ignorait totalement l’identité des jugés, elle ne les plaignait pas moins. Il ne lui vint même pas à l’idée que ses compagnons dont elle s’inquiétait depuis son réveil étaient en réalité non loin d’elle et étaient les victimes des huées agressives qui fusaient de la salle d’à coté, sans discontinuer.
On était venu la chercher peu de temps après l’arrivée de son repas dans sa chambre, et la dame blanche lui avait fourni une robe pour simple vêtement et, évitant de répondre aux questions de K-Ro, elle était repartie sans un mot ni explications. Au bout d’un certain temps, K-Ro avait fini par enfiler l’étoffe, faute de mieux, et s’était résignée à attendre la suite.
On avait dépêché une troisième servante pour l’emmener ici, dans la salle annexe du tribunal où elle attendait maintenant depuis une bonne vingtaine de minutes, bien que, dans ces lieux, le temps n’avait plus d’importance.
5. Jugement et Damnation.
Dans l’immense sale régnait un brouhaha monumental.
Pour la majorité des personnes présentes ici, toutes des femmes, toutes des mortes, toutes des dames blanches, chaque session de tribunal était une occasion de voir des hommes. Ces hommes, elles ne faisaient que les charmer au bord de la route, telles de vulgaires prostituées mortelles, puis elles ne les revoyaient qu’au moment de leur condamnation.
Une fois seulement, une d’entre elles avait succombée au charme d’un conducteur de carrosse. Elle avait refusé de l’amener au tribunal et elle s’était vue châtiée au même titre que sa victime. La punition, exemplaire, avait largement dissuadée les autres de tenter les mêmes actions, sentiments ou non.
Élodie siégeait au premier rang.
Son regard était dans le vague. Son esprit, ailleurs. Elle songeait aux quatre jeunes hommes qui allaient se placer dans le box juste en face d’elle, d’ici quelques minutes, et qui allaient certainement être condamnée à une éternité de tourments par Myat’Ala, comme tous les autres mâles qui arrivaient ici.
Et elle voulait assister à ça. Surtout pour voir le dénommé Haschatan ployer sous le coup du jugement. Peut-être pleurera-t-il ? Peut-être demandera-t-il le pardon ? Peut-être même s’agenouillera-t-il devant moi pour solliciter ma clémence ? Dans ce dernier cas, je demanderai à Myat’Ala la permission de m’en faire un esclave, comme celui qui est arrivé avant-hier et qu’elle a gardée pour elle.
Élodie avait déposé les quatre Trauméniens sans qu’ils tentent quoi que ce soit. Mais elle savait parfaitement qu’ils pouvaient être dangereux, même sous menottes. Elle frémit en repensant à la vitesse du geste d’Haschatan, et rougit légèrement de honte de s’être fait avoir si facilement par un humain. Même si, et elle en avait l’intime conviction depuis le début, ces cinq là étaient différents des autres.
Une porte s’ouvrit sur un des côtés de la pièce et la grande dame blanche qu’avait aperçu Mr.Magnum sur la place publique hier au soir apparue. Elle avait une tête de plus que la plupart des femmes de l’assistance, et promena un regard dédaigneux sur l’assemblée, tout en se dirigeant d’un pas lent mais calculé vers le pupitre central. Un véritable trône, plus qu’un simple pupitre.
Une fois placée derrière, elle semblait encore plus imposante. Elle leva une main, en guise de salut, et toutes les dames blanches présentes firent de même, en prononçant son nom d’une voix forte et à l’unisson. Une fois ce petit rituel achevé, Myat’Ala s’assit et une jeune femme lui apporta un paquet des feuillets en vrac.
Myat’Ala, la bouche close, un air sérieux au visage, regarda succinctement les différentes feuilles, documents et autres dossiers qu’elle avait entre les mains, puis elle les reposa une fois triés. Elle jeta à nouveau un regard sur l’assemblée, comme pour s’assurer que toutes étaient prêtes, puis elle fit signe à un de ses condisciples qui ouvrit une porte.
Mr.Magnum, Fury, Erwan et Haschatan entrèrent par la porte, entravés par de lourde menottes ainsi que des chaînes qui tintaient à chacun de leurs pas. Leurs chevilles étaient également maintenues les unes aux autres. Les quatre voyageurs défilaient ainsi au pas devant leurs geôliers, un semblant d’air affligé au visage.
Élodie jubilait de voir ainsi son futur protégé entrain de s’apitoyer sur son sort. Elle le suivit ardemment du regard jusqu’à ce que le petit groupe s’immobilise derrière un pupitre, où deux dames blanches les encadrèrent, impassibles. Myat’Ala les regarda dédaigneusement, puis retourna à ses feuillet avant de parler d’une voix forte.
« Mesdemoiselles, nous voici toutes réunies afin de condamner ces sinistres hommes à la même peine que tous les autres. Mais de tout ceux qui sont arrivés parmi nous, de tous ceux que nous avons enlevés au monde des vivants, ceux-ci ce sont montrés hors normes. »
Approbation générale dans la salle.
« Au lieu de tenter de s’enfuir comme des lâches qu’ils sont, continua-t-elle, ces hommes se sont bagarrés sauvagement, nous attaquant avec leurs armes, leurs pieds et leurs poings afin de nous soumettre, de nous avilir comme dans leur monde. »
Grognements et huées de la foule, les reproches dirigés vers les accusés.
« Mais nous avons vaincus, mes sœurs. Nous avons réduit à néant leurs espérances de domination. Et nous allons faire d’eux un exemple. Leur peine, leur souffrance, sera exemplaire. Dès demain, ils seront envoyés non pas dans les camps de mâles, mais leurs âmes seront enchaînées pour une éternité de souffrance dans les limbes de l’oubli… »
Myat’Ala prit une grande inspiration, et relâcha dans un souffle :
« En bas. »
Lorsque la troupe de mâles entrèrent dans la grande salle, Erwan ne pu retenir un léger sifflement d’admiration. Il se pencha en avant et murmura à Fury, son prédécesseur :
« Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’elles font les choses en grand. »
Fury hocha la tête silencieusement, et continua à avancer avec le rythme imposé par les chaînes. Une fois réfugiés derrière un pupitre qui convenait manifestement aux accusés, Mr.Magnum et ses compagnons examinèrent la salle. Celle qui se trouve au centre l’estrade, se dit Mr.Magnum, doit être la fameuse Myat’Ala.
Celle-ci leur jeta un regard méprisant, puis commença à lire les feuilles qu’elle tenait dans sa main. Haschatan avait quant à lui les yeux fixés sur Élodie, qui était la seule dame blanche de l’assistance à l’observer intensément. Il se demandait ce qu’elle avait en tête lorsque Myat’Ala commença son discours.
« Écoute-moi ce ramassis de conneries… dit Fury.
-Oui, je sais, soupira Erwan. Nous sommes condamnés avant même d’être jugés.
-Au moins, nous sommes traités d’êtres hors normes !! » jubila Haschatan. Les autres le regardèrent d’un air consterné, et Haschatan leur sourit. La foule lançait des acclamations derrière eux, puis Myat’Ala reprit la parole.
« Non mais vous entendez ce qu’elle dit, celle-là ? s’offusqua Erwan. Selon elle, nous serions presque les fautifs, dans l’histoire !
-Nous sommes coupables d’avoir tenté de survivre, ironisa Fury.
-En tout cas, ils nous prennent vraiment pour les pires misogynes qui existent sur cette terre, affirma Erwan.
-On se croirait à un discours d’Arlette Laguiller, s’esclaffa Haschatan, puis il imita la voix de la femme politique : Dames Blancheurs, Dames Blancheuses, on vous exploite, on vous spolie ! »
Mr.Magnum eut du mal à retenir un rire, tandis que les autres pouffèrent le plus discrètement possible, alors que la foule les conspuait copieusement. Les sifflets fusaient, et Erwan songea que s’ils avaient été sur une scène de théâtre, ils auraient certainement reçu moult fruits pourris sur la figure. Puis la juge fit cesser le vacarme en parlant à nouveau.
« Écoutez ce qu’elle dit, là, ça devient sérieux… dit Fury en tendant l’oreille.
-Elle parle de… …‘peine exemplaire’ ? répéta Erwan, interloqué. Qu’est-ce que ça veut dire exactement ?
-J’ai dans l’idée que nous allons bientôt le découvrir... » marmonna Mr.Magnum, tandis que la grande dame blanche terminait son discours. Elle ménageait le suspens et, après quelques secondes de silence, lança ses derniers mots :
« En bas. »
Les acclamations qui accueillirent ces deux mots remplirent la salle, et la foule de dames blanches levèrent les mains et applaudirent à tout rompre. Erwan, Fury et les autres se regardèrent à tour de rôle, interrogateurs.
« Qu’est-ce que c’est que ce ‘en bas’ ? demanda Haschatan.
-Curieusement, répondit Erwan, je n’ai pas trop envie de la savoir !
-Bon, il est temps, dit Mr.Magnum sérieusement. Il faut lui demander si elle a vu Séphy-Roshou ou non, qu’on en finisse. »
Il s’apprêtait à hausser la voix pour surpasser les cris de victoires ambiants, mais une des dames blanches de l’assistance le devança. Elle demeurait immobile alors que ses compagnes dansaient autour d’elle et elle ne lâchait pas Haschatan des yeux. Mr.Magnum la reconnu tout de suite : « Élodie… » expira-t-il.
K-Ro, habillée d’une robe blanche, suivait le discours de la salle d’à coté. Elle était seule dans une petite pièce, et devait normalement attendre résolument qu’on vienne la chercher après que ses compagnons aient été condamnés. Mais K-Ro n’était pas d’un naturel patient, et elle faisait les cents pas en écoutant de temps à autre, l’oreille collé à la porte, ce qu’il se disait dans la salle d’à coté.
Aux applaudissements se succédèrent des manifestassions hostiles envers les accusés et, bien que K-Ro ignorait totalement l’identité des jugés, elle ne les plaignait pas moins. Il ne lui vint même pas à l’idée que ses compagnons dont elle s’inquiétait depuis son réveil étaient en réalité non loin d’elle et étaient les victimes des huées agressives qui fusaient de la salle d’à coté, sans discontinuer.
On était venu la chercher peu de temps après l’arrivée de son repas dans sa chambre, et la dame blanche lui avait fourni une robe pour simple vêtement et, évitant de répondre aux questions de K-Ro, elle était repartie sans un mot ni explications. Au bout d’un certain temps, K-Ro avait fini par enfiler l’étoffe, faute de mieux, et s’était résignée à attendre la suite.
On avait dépêché une troisième servante pour l’emmener ici, dans la salle annexe du tribunal où elle attendait maintenant depuis une bonne vingtaine de minutes, bien que, dans ces lieux, le temps n’avait plus d’importance.
Mr.Magnum- Enorme floodeur
- Nombre de messages : 2475
Age : 42
Localisation : Dans les limbes torturées d'un esprit dérangé.
Date d'inscription : 18/01/2005
Re: Traumenschar
(partie 2)
L’oreille collée à la porte, elle était toujours entrain d’écouter lorsque la porte qu’elle avait franchis peu de temps auparavant s’ouvrir brusquement. K-Ro prise la main dans le sac se redressa brutalement et tourna le dos à la porte. La femme qui était entrée ne sembla pas s’apercevoir de la curiosité assouvie de sa prisonnière, ou bien peut-être ne s’en formalisa-t-elle pas, et se contenta de lui indiquer la porte.
« Je n’étais pas entrain d’écouter, se défendit K-Ro ! J’ai juste vu un…
-C’est l’heure de ton jugement, dit calmement la dame blanche en l’interrompant. Ouvre la porte et dirige-toi au centre du tribunal, devant Myat’Ala et attends qu’elle te parle.
-Mi à ta qui ? » demanda K-Ro, qui se vit littéralement poussé dans la salle principale par l’autre dame blanche, manifestement pressée. Elle remarqua tout d’abord la multitude de spectre toutes à peu de choses prêt identiques qui beuglaient en même temps en pointant des index accusateurs vers un groupe de quatre personnes.
Puis elle reconnut ces quatre personnes.
Elle n’eut pas le temps de leur faire signe que son attention fut attirée par une dame blanche non loin d’elle qui parla plus fort que les autres pour se faire entendre. Sa voix surpassa non sans mal la cacophonie ambiante :
« J’aimerai Vous demander une faveur, Ô grande Myat’Ala. »
K-Ro la reconnu tout de suite : C’était leur guide à leur arrivée ici, Élodie. Mais elle n’avait plus rien à voir avec la charmante jeune fille qui les avait accueilli : C’était là une furie bien décidée à avoir ce qu’elle voulait, et qui roulait de grands yeux fous en tout sens, lui donnant un aspect cauchemardesque.
« J’aimerai que Vous me donniez le dénommé Haschatan comme esclave personnel, si Vous n’y voyez pas d’inconvénients. »
Le silence se fit rapidement dans la salle, et Myat’Ala étudia la question. Haschatan, de son pupitre, réfréna une envie de sauter à la gorge de leur ancienne guide ; ce qui aurait surtout eu pour effet d’entraîner ses amis à la chute avec lui, toujours entravés avec leur chaîne ; et se contenta de crier haut et fort :
« Hors de question que vous me laissiez dans les mains de cette folle ! Je préfère plutôt mourir que ça !!
-Tu es déjà mort, Haschatan, lui susurra Erwan.
-Je me permets d’insister, Ô Myat’Ala. J’aime les fortes têtes. »
Elle avait ajouté cette dernière phrase en fixant de nouveau Haschatan, qui ne répondit rien. Mr.Magnum saisit l’occasion du silence environnant pour pouvoir clairement énoncer sa question à la supérieure de toutes les dames blanches présentes.
« Est-ce que vous avez récemment vu l’âme d’une jeune fille nommée Séphy-Roshou arriver chez vous, en ces lieux ? »
Myat’Ala se retourna vers Mr.Magnum et sembla pour la première fois le regarder vraiment, et considérer sérieusement sa présence parmi elles. Elle tendit un long bras dans sa direction et rugit :
« Qui pensez-vous être pour oser poser vos questions en ces lieux, hommes ?
-Nous ne sommes rien d’autre que des intrus ici, je le sais, répondit calmement Mr.Magnum en levant ses bras enchaînés. Mais nous sommes venus chercher quelqu’un et rien d’autre. Vous nous avez attaqués sans raison apparente, et nous ne vous en tenons pas rigueur…
-Parle pour toi, marmonna K-Ro. C’est pas toi qui t’es retrouvé à poil, hein !
-...car nous savons parfaitement que vous devez protéger votre citée des autres hommes qui veulent imposer leurs lois. Mais ce n’est pas notre cas. Nous ne sommes là que vous trouver un âme, celle de Séphy-Roshou, une jeune fille décédée sans raison il y a peu. »
Le silence se fit dans la salle. Même Élodie qui était intérieurement au comble de l’excitation peu de temps auparavant, se tenait coite. Myat’Ala scruta les yeux du jeune homme, son regard déterminé, puis ceux de ses compagnons.
« Mais, est-elle morte en voiture, à cause de l’une d’entre nous ? » demanda gentiment, comme on explique à un enfant, la représentante de toutes les dames blanches. Mr.Magnum sentit son estomac se coincer. Comment avait-il pu être aussi bête, ne pas avoir songé à un tel détail. Il se mordit la lèvre inférieur pour réprimer un rire nerveux, et tourna la tête en signe de dénégation. Les autres comprirent à leur tour.
« On avait pas pensé à ça, pouffa Haschatan.
-Non, pressés comme on l’était, on a complètement omis de penser qu’elle n’avait pas pu atterrir ici, car elle est morte dans son lit, réfléchit Erwan. Et nous nous sommes précipités chez les dames blanches alors que c’était évident qu’elle ne s’y trouverait pas. »
Myat’Ala poussa un soupir amusé, et un instant Mr.Magnum cru qu’elle allait arrêter là ce simulacre de procès et les relâcher sans autre cérémonie. Mais le rire bref qu’elle lança, un rire méchant, un rire moqueur, réduisit ses espoirs en un battement de cil. Elle inscrivit quelques mots sur une feuille et sourit.
« Vous êtes bien tous pareils, les hommes : Incapables de réfléchir. Impulsifs à un point où même la bêtise de vos cerveaux ne peut vous arrêter. Vous méritez amplement ce qui va vous arriver, vous tous. »
K-Ro s’avança alors au milieu de la salle et fit un signe à ses compagnons, qui restèrent abasourdis de la voir ici et dans cette tenue. Elle se tourna ensuite gravement vers Myat’Ala, qui la regarda gravement. Les autres dames blanches regardèrent la petite nouvelle sortir une feuille de papier de sa toge et un stylo.
« Vous voulez bien signer un contrat ? » Puis, en se retournant vers la salle : « Toutes ici présente, voulez-vous entrer dans mon armée ?
-K-Ro !! hurla Fury. Est-ce bien le moment de songer à ce genre de choses ?!
-Je pense que oui, répondit K-Ro au comble de la joie. Regarde : Elles sont toutes réunies, comme une armée ! Il leur suffit de signer là et…
-K-Ro !! crièrent les trois seuls hommes de l’assemblée.
-Bien sûr, je vous garderais une place de choix, Miatata !! » conclu K-Ro sur le ton de la confidence en se penchant vers le pupitre trois fois plus grand qu’elle. Myat’Ala fulminait. Elle ouvrit la bouche pour parler, mais K-Ro était déjà entrain d’organiser un rang pour que toutes viennent signer la précieuse feuille.
Erwan, Haschatan, Fury et Mr.Magnum restaient profondément ahuris devant le spectacle qui se déroulait devant eux. Myat’Ala aboya un ‘ASSEZ !!’ retentissant, et toutes les dames blanches présentes se stoppèrent. L’injonction de leur supérieur les avait réveillés du semblant d’hypnose inconscient de K-Ro, qui paraissait déçue.
« Pourquoi vous avez fait ça, je n’ai pas eu le temps de… »
Myat’Ala attrapa la jeune fille et la brandit en hauteur. K-Ro se retrouva pendue par la robe, et elle du maintenir les cotés de son vêtement pour éviter qu’elle se retrouve de nouveau dénudée. Elle gigotait pour se libérer, lorsque Myat’Ala lui demanda son nom.
« K-Ro, répondit-elle en souriant. Mais vous pouvez m’appeler Maître Vénérée. »
Le pan du mur s’écroula au moment où K-Ro terminait sa phrase. L’ensemble des dames blanches resta pétrifier et une silhouette svelte et gracieuse avança dans les décombres. Une longue épée prolongeait son bras, et la personne marchait dans la fumée sans trébucher. Elle sortit du brouillard opaque dû à la poussière et sourit.
Mr.Magnum, K-Ro, Erwan, Fury et Haschatan s’exclamèrent de concert :
« Squall !! »
Squall fit un clin d’œil et sauta sur Myat’Ala, qui lâcha K-Ro pour parer l’attaque. Une profonde entaille apparue sur son bras, tandis que Squall atterrissait. Il se remit immédiatement en garde.
« Bisho ? vociféra Myat’Ala en se tenant le bras. Mais que fais-tu là ? Tu connais ces individus ?
-Parfaitement, répondit Squall en armant discrètement sa Gunblade.
-Mais… Mais je… » bafouilla-t-elle. K-Ro en profita pour sauter à terre, et rejoignit Erwan, Haschatan et les autres. Myat’Ala bouillait de rage. Elle se leva, ce qui lui donna une allure encore plus imposante, et toisa Squall.
« J’avais confiance en toi. Tu recherchais toi aussi cette femme ? Cette âme ?
-Oui, mais je savais pertinemment que je n’aurais jamais pu en réchapper seul, lorsque j’ai compris que Séphy-Roshou n’était pas là. J’ai donc préféré me faire adopter. » Il leva son arme vers elle et la visa.
Myat’Ala s’y attendait et se jeta sur le coté, mais Squall, au lieu de faire feu, demanda à Mr.Magnum de lever les mains en l’air.
« Tout les quatre, levez vos mains ! » Les quatre compagnons enchaînés brandir leurs poings, et Squall vida son arme sur les liens et les sectionna. De nouveau libre, les cinq aventuriers de base se ruèrent sur les gardes les plus proches et les réduisirent à l’impuissance en quelques secondes avant de rejoindre Squall.
Ils formèrent rapidement un cercle dos à dos, alors que Myat’Ala jetait ses femmes sur eux : « Attrapez-les ! Ils vont payer cher cet affront ! »
Le groupe disparu alors sous l’amoncellement des spectres.
L’oreille collée à la porte, elle était toujours entrain d’écouter lorsque la porte qu’elle avait franchis peu de temps auparavant s’ouvrir brusquement. K-Ro prise la main dans le sac se redressa brutalement et tourna le dos à la porte. La femme qui était entrée ne sembla pas s’apercevoir de la curiosité assouvie de sa prisonnière, ou bien peut-être ne s’en formalisa-t-elle pas, et se contenta de lui indiquer la porte.
« Je n’étais pas entrain d’écouter, se défendit K-Ro ! J’ai juste vu un…
-C’est l’heure de ton jugement, dit calmement la dame blanche en l’interrompant. Ouvre la porte et dirige-toi au centre du tribunal, devant Myat’Ala et attends qu’elle te parle.
-Mi à ta qui ? » demanda K-Ro, qui se vit littéralement poussé dans la salle principale par l’autre dame blanche, manifestement pressée. Elle remarqua tout d’abord la multitude de spectre toutes à peu de choses prêt identiques qui beuglaient en même temps en pointant des index accusateurs vers un groupe de quatre personnes.
Puis elle reconnut ces quatre personnes.
Elle n’eut pas le temps de leur faire signe que son attention fut attirée par une dame blanche non loin d’elle qui parla plus fort que les autres pour se faire entendre. Sa voix surpassa non sans mal la cacophonie ambiante :
« J’aimerai Vous demander une faveur, Ô grande Myat’Ala. »
K-Ro la reconnu tout de suite : C’était leur guide à leur arrivée ici, Élodie. Mais elle n’avait plus rien à voir avec la charmante jeune fille qui les avait accueilli : C’était là une furie bien décidée à avoir ce qu’elle voulait, et qui roulait de grands yeux fous en tout sens, lui donnant un aspect cauchemardesque.
« J’aimerai que Vous me donniez le dénommé Haschatan comme esclave personnel, si Vous n’y voyez pas d’inconvénients. »
Le silence se fit rapidement dans la salle, et Myat’Ala étudia la question. Haschatan, de son pupitre, réfréna une envie de sauter à la gorge de leur ancienne guide ; ce qui aurait surtout eu pour effet d’entraîner ses amis à la chute avec lui, toujours entravés avec leur chaîne ; et se contenta de crier haut et fort :
« Hors de question que vous me laissiez dans les mains de cette folle ! Je préfère plutôt mourir que ça !!
-Tu es déjà mort, Haschatan, lui susurra Erwan.
-Je me permets d’insister, Ô Myat’Ala. J’aime les fortes têtes. »
Elle avait ajouté cette dernière phrase en fixant de nouveau Haschatan, qui ne répondit rien. Mr.Magnum saisit l’occasion du silence environnant pour pouvoir clairement énoncer sa question à la supérieure de toutes les dames blanches présentes.
« Est-ce que vous avez récemment vu l’âme d’une jeune fille nommée Séphy-Roshou arriver chez vous, en ces lieux ? »
Myat’Ala se retourna vers Mr.Magnum et sembla pour la première fois le regarder vraiment, et considérer sérieusement sa présence parmi elles. Elle tendit un long bras dans sa direction et rugit :
« Qui pensez-vous être pour oser poser vos questions en ces lieux, hommes ?
-Nous ne sommes rien d’autre que des intrus ici, je le sais, répondit calmement Mr.Magnum en levant ses bras enchaînés. Mais nous sommes venus chercher quelqu’un et rien d’autre. Vous nous avez attaqués sans raison apparente, et nous ne vous en tenons pas rigueur…
-Parle pour toi, marmonna K-Ro. C’est pas toi qui t’es retrouvé à poil, hein !
-...car nous savons parfaitement que vous devez protéger votre citée des autres hommes qui veulent imposer leurs lois. Mais ce n’est pas notre cas. Nous ne sommes là que vous trouver un âme, celle de Séphy-Roshou, une jeune fille décédée sans raison il y a peu. »
Le silence se fit dans la salle. Même Élodie qui était intérieurement au comble de l’excitation peu de temps auparavant, se tenait coite. Myat’Ala scruta les yeux du jeune homme, son regard déterminé, puis ceux de ses compagnons.
« Mais, est-elle morte en voiture, à cause de l’une d’entre nous ? » demanda gentiment, comme on explique à un enfant, la représentante de toutes les dames blanches. Mr.Magnum sentit son estomac se coincer. Comment avait-il pu être aussi bête, ne pas avoir songé à un tel détail. Il se mordit la lèvre inférieur pour réprimer un rire nerveux, et tourna la tête en signe de dénégation. Les autres comprirent à leur tour.
« On avait pas pensé à ça, pouffa Haschatan.
-Non, pressés comme on l’était, on a complètement omis de penser qu’elle n’avait pas pu atterrir ici, car elle est morte dans son lit, réfléchit Erwan. Et nous nous sommes précipités chez les dames blanches alors que c’était évident qu’elle ne s’y trouverait pas. »
Myat’Ala poussa un soupir amusé, et un instant Mr.Magnum cru qu’elle allait arrêter là ce simulacre de procès et les relâcher sans autre cérémonie. Mais le rire bref qu’elle lança, un rire méchant, un rire moqueur, réduisit ses espoirs en un battement de cil. Elle inscrivit quelques mots sur une feuille et sourit.
« Vous êtes bien tous pareils, les hommes : Incapables de réfléchir. Impulsifs à un point où même la bêtise de vos cerveaux ne peut vous arrêter. Vous méritez amplement ce qui va vous arriver, vous tous. »
K-Ro s’avança alors au milieu de la salle et fit un signe à ses compagnons, qui restèrent abasourdis de la voir ici et dans cette tenue. Elle se tourna ensuite gravement vers Myat’Ala, qui la regarda gravement. Les autres dames blanches regardèrent la petite nouvelle sortir une feuille de papier de sa toge et un stylo.
« Vous voulez bien signer un contrat ? » Puis, en se retournant vers la salle : « Toutes ici présente, voulez-vous entrer dans mon armée ?
-K-Ro !! hurla Fury. Est-ce bien le moment de songer à ce genre de choses ?!
-Je pense que oui, répondit K-Ro au comble de la joie. Regarde : Elles sont toutes réunies, comme une armée ! Il leur suffit de signer là et…
-K-Ro !! crièrent les trois seuls hommes de l’assemblée.
-Bien sûr, je vous garderais une place de choix, Miatata !! » conclu K-Ro sur le ton de la confidence en se penchant vers le pupitre trois fois plus grand qu’elle. Myat’Ala fulminait. Elle ouvrit la bouche pour parler, mais K-Ro était déjà entrain d’organiser un rang pour que toutes viennent signer la précieuse feuille.
Erwan, Haschatan, Fury et Mr.Magnum restaient profondément ahuris devant le spectacle qui se déroulait devant eux. Myat’Ala aboya un ‘ASSEZ !!’ retentissant, et toutes les dames blanches présentes se stoppèrent. L’injonction de leur supérieur les avait réveillés du semblant d’hypnose inconscient de K-Ro, qui paraissait déçue.
« Pourquoi vous avez fait ça, je n’ai pas eu le temps de… »
Myat’Ala attrapa la jeune fille et la brandit en hauteur. K-Ro se retrouva pendue par la robe, et elle du maintenir les cotés de son vêtement pour éviter qu’elle se retrouve de nouveau dénudée. Elle gigotait pour se libérer, lorsque Myat’Ala lui demanda son nom.
« K-Ro, répondit-elle en souriant. Mais vous pouvez m’appeler Maître Vénérée. »
Le pan du mur s’écroula au moment où K-Ro terminait sa phrase. L’ensemble des dames blanches resta pétrifier et une silhouette svelte et gracieuse avança dans les décombres. Une longue épée prolongeait son bras, et la personne marchait dans la fumée sans trébucher. Elle sortit du brouillard opaque dû à la poussière et sourit.
Mr.Magnum, K-Ro, Erwan, Fury et Haschatan s’exclamèrent de concert :
« Squall !! »
Squall fit un clin d’œil et sauta sur Myat’Ala, qui lâcha K-Ro pour parer l’attaque. Une profonde entaille apparue sur son bras, tandis que Squall atterrissait. Il se remit immédiatement en garde.
« Bisho ? vociféra Myat’Ala en se tenant le bras. Mais que fais-tu là ? Tu connais ces individus ?
-Parfaitement, répondit Squall en armant discrètement sa Gunblade.
-Mais… Mais je… » bafouilla-t-elle. K-Ro en profita pour sauter à terre, et rejoignit Erwan, Haschatan et les autres. Myat’Ala bouillait de rage. Elle se leva, ce qui lui donna une allure encore plus imposante, et toisa Squall.
« J’avais confiance en toi. Tu recherchais toi aussi cette femme ? Cette âme ?
-Oui, mais je savais pertinemment que je n’aurais jamais pu en réchapper seul, lorsque j’ai compris que Séphy-Roshou n’était pas là. J’ai donc préféré me faire adopter. » Il leva son arme vers elle et la visa.
Myat’Ala s’y attendait et se jeta sur le coté, mais Squall, au lieu de faire feu, demanda à Mr.Magnum de lever les mains en l’air.
« Tout les quatre, levez vos mains ! » Les quatre compagnons enchaînés brandir leurs poings, et Squall vida son arme sur les liens et les sectionna. De nouveau libre, les cinq aventuriers de base se ruèrent sur les gardes les plus proches et les réduisirent à l’impuissance en quelques secondes avant de rejoindre Squall.
Ils formèrent rapidement un cercle dos à dos, alors que Myat’Ala jetait ses femmes sur eux : « Attrapez-les ! Ils vont payer cher cet affront ! »
Le groupe disparu alors sous l’amoncellement des spectres.
Mr.Magnum- Enorme floodeur
- Nombre de messages : 2475
Age : 42
Localisation : Dans les limbes torturées d'un esprit dérangé.
Date d'inscription : 18/01/2005
Re: Traumenschar
Bon, voilà, j'ai donc posté les chapitres déjà parus de ma fic. La publication sera hebdomadaire, le samedi soir de chaque semaine, et un chapitre par semaine. CHaque chapitre est ici découpé en deux tronçons, car le nombre de lignes maximum est dépassé sur ce forum. Je suis donc obligé de poster deux fois par chapitre.
L'ensemble de l'histoire se découpe en épisodes, aux même scindés en chapitres. Pas de fin prévue rapidement, croyez-moi, malgré la fin du forum d'où est issu ce texte. Pour toute question, réaction, remarques diverses et variées, c'est ici que ça se passe.
rendez-vous donc samedi soir prochain pour la suite de Traumenschar!
L'ensemble de l'histoire se découpe en épisodes, aux même scindés en chapitres. Pas de fin prévue rapidement, croyez-moi, malgré la fin du forum d'où est issu ce texte. Pour toute question, réaction, remarques diverses et variées, c'est ici que ça se passe.
rendez-vous donc samedi soir prochain pour la suite de Traumenschar!
Mr.Magnum- Enorme floodeur
- Nombre de messages : 2475
Age : 42
Localisation : Dans les limbes torturées d'un esprit dérangé.
Date d'inscription : 18/01/2005
Re: Traumenschar
Très interressant.
(Actuellement, il me reste & chapitre et demi à parcourire)
L'ambiance, telle que décrite au début, est assurément bien plantée.
(A vous fiche le cafard, en fait...)
C'est d'ailleurs, à mon sens, le point fort de ce récit.
Il est ainsi quelque peu regréttable que cette mélancolie du début soit diluée par la suite (nottament une fois les personnages mort, ou j'ai eu l'impression de retomber sur un texte de forum plus classique, là ou tout avait plutôt bien démarré.)
L'évolution est à voir, mais elle présage du bon.
(Actuellement, il me reste & chapitre et demi à parcourire)
L'ambiance, telle que décrite au début, est assurément bien plantée.
(A vous fiche le cafard, en fait...)
C'est d'ailleurs, à mon sens, le point fort de ce récit.
Il est ainsi quelque peu regréttable que cette mélancolie du début soit diluée par la suite (nottament une fois les personnages mort, ou j'ai eu l'impression de retomber sur un texte de forum plus classique, là ou tout avait plutôt bien démarré.)
L'évolution est à voir, mais elle présage du bon.
Re: Traumenschar
(partie 1)
6. Le Dieu déchu.
Myat’Ala ferma la porte de ses appartements personnels.
Depuis quelques temps, elle n’avait de cesse que de songer à sa vie d’avant. Avant qu’elle ne meure dans un accident bête au bord d’une route de campagne, alors qu’elle rentrait chez elle à la tombée du jour.
Elle était partie dans la forêt du comté de Saxtown en nouvelle Angleterre, malgré les interdictions de ses parents. Ceux-ci ne voulaient pas qu’elle sorte, surtout en fin d’après-midi alors que les nuits n’étaient pas sûres et les voleurs nombreux. Mais elle avait bravé l’interdit parental pour s’octroyer une balade dans les bois, et elle s’était un peu perdue.
Lorsqu’elle avait retrouvé son chemin, et qu’elle avait vu la lueur du feu dans leur petite maison au delà du champ, elle avait réussit à se calmer et avait ralenti l’allure. Et, au détour d’un bosquet, son meurtrier l’avait cueilli et s’était emparé de sa virginité…
…et de sa vie.
Myat’Ala lança son poing rageur contre un mur.
Il ne fallait pas qu’elle se remette à songer au temps passé, à sa vie, sa véritable vie, sous peine de redevenir faible. Maintenant, elle avait un but. Un sens à son existence. Autrefois, elle fut une femme facile à plier, facile à modeler par ces hommes qu’elle haïssait. Son père, ses petits amis, son agresseur. Tous lui avaient imposé leur volonté.
Son père l’avait éduqué, l’avait nourris. L’avait battu. Il lui donnait des ordres, il lui donnait des gifles, il lui donnait des conseils, il lui donnait des coups de poings dans le ventre lorsqu’elle laissait tomber le bois pour le feu, il lui donnait des baisers avant de dormir, il lui donnait des vêtements à recoudre, et enfin il lui donnait un peu d’amour.
Ses amis exigeaient d’elle du respect, de la considération, de l’obéissance, de l’amour, du don de soi, de la confiance, de la liberté, l’exécution sans rechigner de petits plaisirs lorsqu’ils le désiraient, mais ne parlaient que très rarement des mêmes chose dans l’autre sens.
Et, en dernier, son agresseur ne lui a rien donné, n’a rien exigé d’elle, mais il a tout prit. Ses sentiments de jeune femme, ses souvenirs, ses envies, ses peines, ses inquiétudes, son futur, sa vie. Sans même lui demander. C’est à ce moment là, alors qu’elle dérivait dans la mort, se dirigeant vers son destin, qu’elle décida de ne plus se laisser faire. Que dorénavant, elle choisirait, elle ordonnerait, elle dirigerait, et elle soumettrait les hommes à sa volonté.
« Et ceux-ci n’échapperont pas la règle. » dit-elle au mur constellé de marques de poing. Elle soupira longuement, reprenant peu à peu le contrôle de soi, et décida de prendre un peu de repos. Ce n’est pas parce que ces quatre individus arrivés dernièrement lui avait donné du fil à retordre que tout les autres allaient être façonnés dans le même moule.
Même si, elle le reconnaissait, elle s’était largement laisser berner par celui qu’elle avait prit sous son aile. Elle s’était mise en tête de qu’elle avait pu réussir à dominer pleinement un homme, et voici que celui-ci rompait ses attaches et se tournait de nouveau contre elle. Elle avait été une nouvelle fois dupe, et trop confiante. Elle ne referait pas l’erreur.
Mais maintenant que sa trahison lui avait révélé son véritable visage, Myat’Ala ne s’en sentait que mieux. C’était lui qui l’avait fait douté de la bonne foi de certains hommes. Alors, pour essayer, elle s’était dite que prendre un de ces mâles avec elle serait un bon moyen de voir si en cinq cents ans de temps les mentalités avaient changés.
Mais elle s’était trompée. Les hommes n’avaient pas changés. Ils étaient toujours aussi perfides, sournois, calculateurs, et manifestement patient au point d’attendre des mois et des mois l’occasion pour retourner leur veste. Mais cette mini révolution était matée maintenant, et c’était elle, Myat’Ala, qui tenait de nouveau les rênes.
Se rassurant elle-même, elle s’assit sur son lit, puis s’allongea et ferma les yeux. Et, une nouvelle fois, elle fit défiler le spectacle de sa mort dans son esprit.
*
* *
Lorsque la dame blanche qui les gardait fut endormie, Squall donna un léger coup de coude à Fury qui somnolait. Il ouvrit un œil, regarda à droite, puis à gauche, et finalement ouvrit les deux yeux.
« Elle dort ?
-Il faut croire, oui, dit Erwan. K-Ro ! Réveille-toi !
-Hmmm… marmonna-t-elle. Chocolat…
-Tu penses qu’on peut la secouer ? hasarda Haschatan. Tu crois que la fille fantôme roupille suffisamment ? En espérant qu’elle ne crie pas en se réveillant.
-En tout cas, murmura Mr.Magnum en fixant K-Ro, ce style vestimentaire est vraiment très osé pour des féministes acharnées. On devine tout, surtout que manifestement, ce type de toge se porte sans sous-vêtements et…
-Magnum ! s’indigna Erwan en cessant d’essayer de réveiller K-Ro.
-Désolé, le coté pervers de mon personnage Trauménien ressort…
-La bonne excuse, ouais ! » se moqua Haschatan. K-Ro ouvrit les yeux et regarda l’assemblée. Elle leva une main pour se gratter la tête et gémit de douleur en touchant sa bosse. Squall s’accroupit près d’elle.
« Qu’est-ce qui c’est passé ? Où suis-je ? Qui êtes-vous ? » demanda K-Ro. Les cinq hommes se dévisagèrent gravement, puis K-Ro agita sa main devant les yeux de Squall en souriant d’un air jubilatoire.
« Je déconnais, je n’ai pas perdue la mémoire !
-Encore heureux, grommela Fury à qui la blague était passé au dessus.
-Ne touche pas trop à ta tête, l’informa Erwan. Elles ont du te filer un sacré coup pour t’arrêter tout à l’heure. Tu étais une vraie furie. »
K-Ro se souvint vaguement du combat dans le tribunal. Leur petit groupe avait été submergé par le nombre, et ils n’avaient pas tenus dix minutes contre les dames blanches déchaînées. Mais il était plus étonnant qu’ils soient tous encore en vie. Enfin, en vie, c’était vite dit…
« Surtout que si elle était restée sans rien faire, ajouta Haschatan, il y a de grandes chances pour qu’à l’heure actuelle tu sois l’une des leurs. Elles auraient fait de toi une dame blanche parmi les autres.
-Et nous serions destinés au goulags de ces dames, mis à part Haschatan qui serait l’esclave d’Élodie et moi qui serait restés le toutou de Myat’Ala. » Squall s’assit à même le sol et leur expliqua alors ce que lui avait raconté Myat’Ala sur le destin des hommes qui mouraient à cause d’elles.
« Ils sont amenés dans le même hôtel où vous avez séjourné dès votre venue dans la citée, et à la tombée de la nuit, ils sont capturés dans leur sommeil et enfermé dans une geôle. Le lendemain, ils sont jugés dans une parodie de procès telle que vous avez pu en avoir un aperçu tout à l’heure, et condamnés à errer dans les Territoires Extérieurs.
-Les Territoires Extérieurs ? demanda Mr.Magnum. C’est quoi ces Territoires ?
-D’après ce que m’a dit Myat’Ala, ces sont des contrées inexplorées emplies de créatures monstrueuses. Et ceux qui y sont emmenés n’ont que peu de chances de survivre. »
Mr.Magnum se souvint du décor aperçu à leur arrivée dans ce monde : Les plaines verdoyantes, les collines, les champs. Rien de tout ça ne concordait avec cette histoire farfelue de Territoires.
« Ce qui explique pourquoi il n’y a aucun homme ici, alors ! en déduisit Haschatan.
-Tout à fait, approuva Erwan. Et les animaux, c’est pareil : Seules les personnes tuées par les dames blanches viennent ici. Donc aucun animal, aucun oiseau, aucun insecte.
-Logique, lorsqu’on y pense, dit Squall.
-Et aucune Séphy-Roshou non plus, à en croire La grande prêtresse Machin-chouette. »
Tous se tournèrent vers Fury qui se tenait à l’écart. Il avait sa tête posée entre ses mains et semblait souffrir atrocement. Erwan s’approcha de lui, mais Fury le rejeta d’un geste de la main. Mr.Magnum se souvint des expressions étranges que Fury arborait dans la voiture. Et maintenant, dans cette cellule, il avait presque la même tête, avec en plus une horrible grimace de douleur.
« Qu’est-ce qui se passe, Fury ? demanda Squall de loin, n’osant pas s’approcher.
-Rien, souffla-t-il. Je… Ça va bien… Un petit mal de tête, rien de plus…
-Squall, dit K-Ro, tu dois bien avoir un cachet ou deux d’aspirine ?
-Laissez, ça va passer. Déjà là, ça commence à aller mieux. »
Et, effectivement, le visage de Fury était moins congestionné. De grosses gouttes de sueur coulaient de son front et sur ses joues, et une veine battait encore sur sa tempe droite, mais dans l’ensemble il semblait s’être reprit.
« Néanmoins, reprit Squall, il a raison : Séphy-Roshou n’étant pas là, on a plus rien à faire ici.
-Comment tu comptes sortir de la cellule, s’il te plaît ? nargua gentiment Haschatan. Je te rappelle que nous sommes enfermés ! » Il se dirigea vers les barreaux et secoua la porte qui ne broncha pas. « En-fer-més.
-K-Ro, tu ne peux pas passer entre les barreaux ? s’interrogea Mr.Magnum.
-Je ne crois pas, non. »
Elle alla à son tour devant les grilles, et Haschatan s’écarta pour la laisser faire. Elle tenta de passer par divers endroits, dans plusieurs positions, mais rien n’y fit. À la dernière tentative, elle failli même restée coincée dans la porte. Découragée, elle abandonna cette idée et retourna s’asseoir.
Une voix s’éleva alors de la cellule d’à coté. Ils ne pouvaient pas voir l’homme, car c’était bien une voix d’homme qui parlait, qui se trouvait non loin d’eux, mais ils purent sans peine inférer son grand âge à sa voix chevrotante.
« Vous ne pourrez pas sortir d’ici. Personne n’a jamais échappé aux dames blanches.
-Qui êtes-vous ? demanda Mr.Magnum, devançant tout les autres.
-Mon nom ? dit le vieillard comme si cette information était de la dernière importance. Mon nom s’est perdu dans les méandres du temps, il y a plus de cinq cents ans…
-Cinq cents ans ! répéta K-Ro, dubitative. Rien qu’à la voix, vous ne les faites pas. D’ordinaire, les vieux de cinq cents ans ne peuvent plus parler car ils sont dans une tomb… » La main de Squall se plaqua sur la bouche de K-Ro, la faisant taire.
6. Le Dieu déchu.
Myat’Ala ferma la porte de ses appartements personnels.
Depuis quelques temps, elle n’avait de cesse que de songer à sa vie d’avant. Avant qu’elle ne meure dans un accident bête au bord d’une route de campagne, alors qu’elle rentrait chez elle à la tombée du jour.
Elle était partie dans la forêt du comté de Saxtown en nouvelle Angleterre, malgré les interdictions de ses parents. Ceux-ci ne voulaient pas qu’elle sorte, surtout en fin d’après-midi alors que les nuits n’étaient pas sûres et les voleurs nombreux. Mais elle avait bravé l’interdit parental pour s’octroyer une balade dans les bois, et elle s’était un peu perdue.
Lorsqu’elle avait retrouvé son chemin, et qu’elle avait vu la lueur du feu dans leur petite maison au delà du champ, elle avait réussit à se calmer et avait ralenti l’allure. Et, au détour d’un bosquet, son meurtrier l’avait cueilli et s’était emparé de sa virginité…
…et de sa vie.
Myat’Ala lança son poing rageur contre un mur.
Il ne fallait pas qu’elle se remette à songer au temps passé, à sa vie, sa véritable vie, sous peine de redevenir faible. Maintenant, elle avait un but. Un sens à son existence. Autrefois, elle fut une femme facile à plier, facile à modeler par ces hommes qu’elle haïssait. Son père, ses petits amis, son agresseur. Tous lui avaient imposé leur volonté.
Son père l’avait éduqué, l’avait nourris. L’avait battu. Il lui donnait des ordres, il lui donnait des gifles, il lui donnait des conseils, il lui donnait des coups de poings dans le ventre lorsqu’elle laissait tomber le bois pour le feu, il lui donnait des baisers avant de dormir, il lui donnait des vêtements à recoudre, et enfin il lui donnait un peu d’amour.
Ses amis exigeaient d’elle du respect, de la considération, de l’obéissance, de l’amour, du don de soi, de la confiance, de la liberté, l’exécution sans rechigner de petits plaisirs lorsqu’ils le désiraient, mais ne parlaient que très rarement des mêmes chose dans l’autre sens.
Et, en dernier, son agresseur ne lui a rien donné, n’a rien exigé d’elle, mais il a tout prit. Ses sentiments de jeune femme, ses souvenirs, ses envies, ses peines, ses inquiétudes, son futur, sa vie. Sans même lui demander. C’est à ce moment là, alors qu’elle dérivait dans la mort, se dirigeant vers son destin, qu’elle décida de ne plus se laisser faire. Que dorénavant, elle choisirait, elle ordonnerait, elle dirigerait, et elle soumettrait les hommes à sa volonté.
« Et ceux-ci n’échapperont pas la règle. » dit-elle au mur constellé de marques de poing. Elle soupira longuement, reprenant peu à peu le contrôle de soi, et décida de prendre un peu de repos. Ce n’est pas parce que ces quatre individus arrivés dernièrement lui avait donné du fil à retordre que tout les autres allaient être façonnés dans le même moule.
Même si, elle le reconnaissait, elle s’était largement laisser berner par celui qu’elle avait prit sous son aile. Elle s’était mise en tête de qu’elle avait pu réussir à dominer pleinement un homme, et voici que celui-ci rompait ses attaches et se tournait de nouveau contre elle. Elle avait été une nouvelle fois dupe, et trop confiante. Elle ne referait pas l’erreur.
Mais maintenant que sa trahison lui avait révélé son véritable visage, Myat’Ala ne s’en sentait que mieux. C’était lui qui l’avait fait douté de la bonne foi de certains hommes. Alors, pour essayer, elle s’était dite que prendre un de ces mâles avec elle serait un bon moyen de voir si en cinq cents ans de temps les mentalités avaient changés.
Mais elle s’était trompée. Les hommes n’avaient pas changés. Ils étaient toujours aussi perfides, sournois, calculateurs, et manifestement patient au point d’attendre des mois et des mois l’occasion pour retourner leur veste. Mais cette mini révolution était matée maintenant, et c’était elle, Myat’Ala, qui tenait de nouveau les rênes.
Se rassurant elle-même, elle s’assit sur son lit, puis s’allongea et ferma les yeux. Et, une nouvelle fois, elle fit défiler le spectacle de sa mort dans son esprit.
*
* *
Lorsque la dame blanche qui les gardait fut endormie, Squall donna un léger coup de coude à Fury qui somnolait. Il ouvrit un œil, regarda à droite, puis à gauche, et finalement ouvrit les deux yeux.
« Elle dort ?
-Il faut croire, oui, dit Erwan. K-Ro ! Réveille-toi !
-Hmmm… marmonna-t-elle. Chocolat…
-Tu penses qu’on peut la secouer ? hasarda Haschatan. Tu crois que la fille fantôme roupille suffisamment ? En espérant qu’elle ne crie pas en se réveillant.
-En tout cas, murmura Mr.Magnum en fixant K-Ro, ce style vestimentaire est vraiment très osé pour des féministes acharnées. On devine tout, surtout que manifestement, ce type de toge se porte sans sous-vêtements et…
-Magnum ! s’indigna Erwan en cessant d’essayer de réveiller K-Ro.
-Désolé, le coté pervers de mon personnage Trauménien ressort…
-La bonne excuse, ouais ! » se moqua Haschatan. K-Ro ouvrit les yeux et regarda l’assemblée. Elle leva une main pour se gratter la tête et gémit de douleur en touchant sa bosse. Squall s’accroupit près d’elle.
« Qu’est-ce qui c’est passé ? Où suis-je ? Qui êtes-vous ? » demanda K-Ro. Les cinq hommes se dévisagèrent gravement, puis K-Ro agita sa main devant les yeux de Squall en souriant d’un air jubilatoire.
« Je déconnais, je n’ai pas perdue la mémoire !
-Encore heureux, grommela Fury à qui la blague était passé au dessus.
-Ne touche pas trop à ta tête, l’informa Erwan. Elles ont du te filer un sacré coup pour t’arrêter tout à l’heure. Tu étais une vraie furie. »
K-Ro se souvint vaguement du combat dans le tribunal. Leur petit groupe avait été submergé par le nombre, et ils n’avaient pas tenus dix minutes contre les dames blanches déchaînées. Mais il était plus étonnant qu’ils soient tous encore en vie. Enfin, en vie, c’était vite dit…
« Surtout que si elle était restée sans rien faire, ajouta Haschatan, il y a de grandes chances pour qu’à l’heure actuelle tu sois l’une des leurs. Elles auraient fait de toi une dame blanche parmi les autres.
-Et nous serions destinés au goulags de ces dames, mis à part Haschatan qui serait l’esclave d’Élodie et moi qui serait restés le toutou de Myat’Ala. » Squall s’assit à même le sol et leur expliqua alors ce que lui avait raconté Myat’Ala sur le destin des hommes qui mouraient à cause d’elles.
« Ils sont amenés dans le même hôtel où vous avez séjourné dès votre venue dans la citée, et à la tombée de la nuit, ils sont capturés dans leur sommeil et enfermé dans une geôle. Le lendemain, ils sont jugés dans une parodie de procès telle que vous avez pu en avoir un aperçu tout à l’heure, et condamnés à errer dans les Territoires Extérieurs.
-Les Territoires Extérieurs ? demanda Mr.Magnum. C’est quoi ces Territoires ?
-D’après ce que m’a dit Myat’Ala, ces sont des contrées inexplorées emplies de créatures monstrueuses. Et ceux qui y sont emmenés n’ont que peu de chances de survivre. »
Mr.Magnum se souvint du décor aperçu à leur arrivée dans ce monde : Les plaines verdoyantes, les collines, les champs. Rien de tout ça ne concordait avec cette histoire farfelue de Territoires.
« Ce qui explique pourquoi il n’y a aucun homme ici, alors ! en déduisit Haschatan.
-Tout à fait, approuva Erwan. Et les animaux, c’est pareil : Seules les personnes tuées par les dames blanches viennent ici. Donc aucun animal, aucun oiseau, aucun insecte.
-Logique, lorsqu’on y pense, dit Squall.
-Et aucune Séphy-Roshou non plus, à en croire La grande prêtresse Machin-chouette. »
Tous se tournèrent vers Fury qui se tenait à l’écart. Il avait sa tête posée entre ses mains et semblait souffrir atrocement. Erwan s’approcha de lui, mais Fury le rejeta d’un geste de la main. Mr.Magnum se souvint des expressions étranges que Fury arborait dans la voiture. Et maintenant, dans cette cellule, il avait presque la même tête, avec en plus une horrible grimace de douleur.
« Qu’est-ce qui se passe, Fury ? demanda Squall de loin, n’osant pas s’approcher.
-Rien, souffla-t-il. Je… Ça va bien… Un petit mal de tête, rien de plus…
-Squall, dit K-Ro, tu dois bien avoir un cachet ou deux d’aspirine ?
-Laissez, ça va passer. Déjà là, ça commence à aller mieux. »
Et, effectivement, le visage de Fury était moins congestionné. De grosses gouttes de sueur coulaient de son front et sur ses joues, et une veine battait encore sur sa tempe droite, mais dans l’ensemble il semblait s’être reprit.
« Néanmoins, reprit Squall, il a raison : Séphy-Roshou n’étant pas là, on a plus rien à faire ici.
-Comment tu comptes sortir de la cellule, s’il te plaît ? nargua gentiment Haschatan. Je te rappelle que nous sommes enfermés ! » Il se dirigea vers les barreaux et secoua la porte qui ne broncha pas. « En-fer-més.
-K-Ro, tu ne peux pas passer entre les barreaux ? s’interrogea Mr.Magnum.
-Je ne crois pas, non. »
Elle alla à son tour devant les grilles, et Haschatan s’écarta pour la laisser faire. Elle tenta de passer par divers endroits, dans plusieurs positions, mais rien n’y fit. À la dernière tentative, elle failli même restée coincée dans la porte. Découragée, elle abandonna cette idée et retourna s’asseoir.
Une voix s’éleva alors de la cellule d’à coté. Ils ne pouvaient pas voir l’homme, car c’était bien une voix d’homme qui parlait, qui se trouvait non loin d’eux, mais ils purent sans peine inférer son grand âge à sa voix chevrotante.
« Vous ne pourrez pas sortir d’ici. Personne n’a jamais échappé aux dames blanches.
-Qui êtes-vous ? demanda Mr.Magnum, devançant tout les autres.
-Mon nom ? dit le vieillard comme si cette information était de la dernière importance. Mon nom s’est perdu dans les méandres du temps, il y a plus de cinq cents ans…
-Cinq cents ans ! répéta K-Ro, dubitative. Rien qu’à la voix, vous ne les faites pas. D’ordinaire, les vieux de cinq cents ans ne peuvent plus parler car ils sont dans une tomb… » La main de Squall se plaqua sur la bouche de K-Ro, la faisant taire.
Mr.Magnum- Enorme floodeur
- Nombre de messages : 2475
Age : 42
Localisation : Dans les limbes torturées d'un esprit dérangé.
Date d'inscription : 18/01/2005
Re: Traumenschar
(partie 2)
« Ici, dans ce monde qu’elle a créée, on ne vieillit pas, dit-il. Mais je devrais dire que c’est moi qui l’ai créée, car sans moi, rien de tout cela ne serait arrivé.
-Vous êtes son meurtrier. » affirma Squall. Les autres le regardèrent. Il leur expliqua brièvement les bribes de l’histoire de Myat’Ala telle qu’elle daignait la raconter à Squall. Ils l’écoutèrent en silence, puis le vieil assassin reprit confirma :
« Oui, c’est bien moi. Je l’ai violé, je l’ai battue à mort, et elle a sa vengeance en me tenant captif depuis que son fantôme m’ait fait avoir un accident non loin de l’endroit où je l’avais tuée. Et depuis tout ce temps, elle me garde prisonnier ici, captif pour l’éternité. »
Pas un mot de la part des voyageurs. Ils ne se voyaient pas plaindre un tel homme, même si sa peine était l’enfermement éternel. Il avait mérité ce qui lui arrivait, et la petite troupe comprenait même mieux le ressentiment de Myat’Ala envers les hommes.
« Je regrette ce que j’avais fait, mais c’est trop tard, n’est-ce pas ? dit-il.
-Ce n’est pas nous de juger, mais à vous-même. » déclara Erwan. Squall s’approcha encore plus des barreaux :
« Venons-en à ce qui nous intéresse, vieil homme : Connaissez-vous un moyen de sortir d’ici ? De cette prison ? »
Un silence pesant s’installa de part et d’autre du mur qui séparait les deux cellules, pendant lequel le vieillard sembla réfléchir. Puis, alors que Squall allait reposer la question, il y répondit enfin :
« Je vous l’ai déjà dit tout à l’heure : Il n’y a aucun moyen de sortir d’ici. Vous serez envoyés comme tous les autres dans cette terre lugubre et morte que Mathilde appelle à juste titre les Territoires Extérieurs. Extérieurs à tout.
-Mathilde ? Qui est Mathilde ? demanda Fury.
-Celle qui se fait appeler Myat’Ala maintenant.
-Taisez-vous un peu, là dedans, on ne s’entend plus réfléchir !! »
La garde, qui s’était réveillée, lança des regards glacés vers les prisonniers, et ils retournèrent s’asseoir dos au mur du fond. Il patientèrent sans bruit pendant quelques minutes, puis recommencèrent à communiquer par chuchotements.
« En tout cas, même si le vieux nous avait indiqué la sortie, on est toujours coincé derrière ces barreaux, râla Mr.Magnum.
-Aucun moyen de s’échapper, alors ? s’étonna Squall. On abandonne tout et on reste là à attendre qu’on nous envoie dans ces Territoires, quels qu’ils soient ? Hors de question.
-Si encore on avait eu une petite information sur l’éventuel passage de Séphy-Roshou ici, dit Fury, navré. Au lieu de ça, on a fait fausse route dès le départ et nous voilà coincé dans une prison. Quelle magnifique idée tu as eu, Magnum, avec tes voyages !
-Je ne t’ai jamais obligé à venir, répliqua Mr.Magnum, courroucé. Je te rappelle qu’à l’origine, c’est pour toi qu’on fait tout ça. C’est toi qui pleurais comme une madeleine y a pas si longtemps !
-C’était pas une raison pour tous nous tuer et nous condamner à une éternité de souffrance ! rétorqua Fury, qui commençait à serrer les poings.
-Si on commence à se disputer, alors autant tout laisser tomber dès maintenant, calma Squall. Ce n’est pas en nous nous montant les uns contre les autres qu’on s’en sortira, mais en restant tous unis !
-De plus, avança Erwan, je crois que le vieux a encore des choses à nous dire. »
Ses compagnons le regardèrent, curieux de savoir pourquoi il affirmait ça d’une façon si péremptoire, et Erwan sourit : « Une intuition. » Il leva son index vers la grille de la cellule, et tous virent la main du vieux prisonnier s’agiter, provenant de la geôle d’à-côté. Ils remarquèrent également que la garde, manifestement éreintée, s’était assoupie de nouveau.
Ils se retrouvèrent bientôt tous agglutinés au mur jouxtant les deux cachots, malgré leurs liens qui les maintenaient solidement attachés.
« La garde s’est rendormie, crachota le vieux en toussant doucement.
-Nous avons vu, oui, le remercia Haschatan.
-Vous avez des informations à nous fournir ? demanda Erwan en souriant.
-Je vous ai entendu parler d’une dénommée Séphy-Roshou, tout à l’heure… » commença le vieillard. Fury s’avança le plus qu’il pouvait et colla sa joue sur le mur froid. Les autres s’écartèrent pour le laisser passer et parler.
« Vous l’avez vu ? Vous savez où elle est ? Répondez-moi, l’ancêtre, si vous savez quelque chose, dites-le moi !!
-Du calme, mon jeune enfant, répondit-il lentement comme pour tester l’impatience de Fury. J’ai effectivement vu une jeune femme qui pourrait correspondre à votre Séphy-Roshou dans ma cellule. Elle est apparue sans crier gare au milieu de la nuit en demandant où est-ce qu’elle se trouvait… »
Le vieil assassin repentit commença alors à raconter sa courte histoire.
Je dormais à poing fermé.
La nuit était comme toutes les centaines, les milliers d’autres que j’avais passé dans cet endroit : froides, calmes et ennuyeuses à souhait. Fut une époque, j’aurais donné n’importe quoi pour que quelque chose vienne troubler cette monotonie, mais j’avais finis par m’y accoutumer, préférant ce genre de nuit sans heurt à celle où des âme d’hommes hurlantes et gémissante étaient enfermées dans la cellule dans laquelle vous vous trouvez actuellement.
Mais cette nuit-là avait tout de la morne nuit ordinaire, et mon sommeil, toujours léger, n’avait pas encore été troublé par quoi que ce fut. Je ne me rappelle pas de quoi je rêvais exactement, seulement je me souviens parfaitement que dans ce rêve, je me retrouvais à m’envoler vers le soleil, ou au moins vers une source lumineuse immense qui m’attirait, qui me happait. Comme lorsque je suis mort.
Sauf que cette fois-ci, au lieu de mourir, je me suis simplement réveillé. Et cette fille étrange était là, devant moi, dans un habit curieux que je n’ai jamais vu et qui laissait entrapercevoir beaucoup de choses.
« Où est-ce que je suis tombé, là ? » avait-elle demandé d’une voix à la fois suave et autoritaire. Je n’avais jamais entendu une pareille voix, un pareil contraste entre la chaleur du ton et les paroles gelées. J’en frissonne encore, d’ailleurs. C’est fou. Mais bref.
Je lui ai répondu qu’elle se trouvait dans ma cellule. Elle a affiché un air navré et s’est passé une main sur la figure, comme si elle se concentrait pour ne pas perdre son sang froid. Peut-être que je l’avais exaspéré, mais je ne voyais pas d’autre réponse lui donner. Après tout, qu’est-ce cet endroit, à part un monde sortit de l’imagination vengeresse d’une femme violée et tuée par mes soins ?
« Je vois bien que je suis dans une prison, stupide créature ! avait-elle crachée. Je te demande simplement si je suis au Paradis ou non ?
-Si cet endroit est le Paradis, lui ais-je répondu en souriant, alors je n’ose imaginer ce que donnerait l’Enfer, ha ha ! »
Elle m’a semblée désarçonnée par la réponse, et soudainement, je l’ai vu disparaître devant moi. Je vous avouerais que je ne sais pas exactement comment elle est apparue, ni comment elle a disparue, mais le fait est que cette jeune femme est arrivée, m’a parlé et est repartie. Et en vous entendant parler de cette fille, Séphy-Roshou, j’ai pensé que ça pourrait correspondre, ou avoir un petit rapport.
Les six voyageurs gardèrent le silence. Un léger ronflement de la femme qui les gardait les fit sursauter, et le vieux, persuadé qu’ils ne le croyaient pas, commença à s’énerver :
« Je ne suis pas un vieillard qui a perdu l’esprit ! Je suis mort vieux, mais pas sénile, et je n’ai pas bougé depuis ce moment !
-Moins fort, vieux fou, aboya Fury en réfléchissant.
-Tu crois que ça pourrait être elle ? le questionna Mr.Magnum.
-Je n’ai sais fichtrement rien… »
Squall, Haschatan et Erwan haussèrent les épaules à l’unisson lorsque Mr.Magnum posa son regard sur eux. Ils soupirèrent. Ils avaient effectivement obtenus des informations qui pourraient se révéler importantes, mais ils n’avaient pas avancé sur le moyen de sortir d’ici. Le vieux repassa une main à travers les barreaux et la tendit vers eux, agrippant légèrement Erwan par la manche.
« Vous me croyez, hein ?
-Lâchez-moi ! ordonna Erwan, mais le vieux resserra son étreinte.
-Qu’est-ce qui nous oblige à vous croire ? s’informa Squall. Quel est votre intérêt dans cette histoire ? Pourquoi nous raconter ça ?
-Emmenez-moi avec vous. »
La poigne sur la manche et le bras d’Erwan se fit plus forte. Il tenta de se dégager doucement, mais n’y parvint pas. Ce vieil ermite avait plus de force qu’il ne l’aurait pensé de prime abord. Il contracta ses muscles et fit jouer son épaule pour tirer son bras d’un coup sec et écraser la main du violeur sur le mur.
Il poussa un glapissement de douleur et la main se retira telle un serpent glissant entre les grilles. Un silence. Puis le vieux commença à hurler et à geindre. Squall essaya de la faire taire, mais sans y arriver. Les cris réveillèrent la dame blanche et se leva et frappa sur la porte de la cellule d’à coté. Le vieux cessa ses hululements sans rechigner.
« Du chiqué, murmura Haschatan.
-N’empêche que notre nounou est parfaitement réveillée maintenant, nota Erwan. Impossible de tenter n’importe lequel de nos plans d’évasion.
-Si encore on avait un plan, maugréa Fury. Vieil ahuri. » Il cracha par terre.
La dame blanche se tenait assise sur la chaise où elle s’était endormie par deux fois, mais cette fois-ci, ses yeux étaient grands ouverts et elle était aux aguets. K-Ro, qui était resté disante depuis quelques minutes, s’approcha alors d’Erwan et se colla à lui. Ce dernier rougit et jeta un œil à K-Ro, qui voulait attirer silencieusement son attention.
« Psssssssiiiiit… Erwan… chuchotât-elle doucement.
-Qu’est-ce qu’il y a ? dit-il aussi faiblement qu’il le pouvait.
-Penches-toi. »
Erwan s’exécuta sans chercher à comprendre, et il sentit les lèvres de K-Ro qui effleuraient son oreille. Cette sensation nullement désagréable, le fit frissonner, et il sentit une onde de chaleur lui inonder le visage alors qu’elle lui parlait. Il se rendit également compte qu’il n’avait rien entendu de ce qu’elle lui avait dit.
« Excuses-moi, qu’est-ce que tu disais ? bredouilla-t-il, confus.
-À quoi tu pensais encore, tête de linotte ? marmonna-t-elle entre ses dents. Je te disais que je pense avoir trouvé un moyen de sortir d’ici.
-Ah oui ? s’étonna Erwan. Et quelle est cette idée ?
-Tu sais que nous sommes revêtus de notre identité Trauménienne, actuellement ? Il n’y a rien qui te choque dans mon personnage ? »
Erwan se recula pour l’examiner de haut en bas. Rien ne le choquait, si ce n’est les liens qui la ligotaient et sa tenue légère. Il secoua la tête.
« D’ordinaire, mon personnage de K-Ro n’est jamais seule. » dit simplement K-Ro.
Le visage d’Erwan, tout d’abord dubitatif, se changea subitement, se mua en une face ravie, enjoué. Un sourire radieux et confiant éclaira son visage. Il regarda les autres et fit circuler la nouvelle. Tour à tour, les quatre autres compagnons retrouvèrent le sourire et la confiance. K-Ro jubilait. Elle fit un signe de tête en direction de leur geôlière.
Et, derrière la chaise de la dame blanche, Kefka apparu.
« Ici, dans ce monde qu’elle a créée, on ne vieillit pas, dit-il. Mais je devrais dire que c’est moi qui l’ai créée, car sans moi, rien de tout cela ne serait arrivé.
-Vous êtes son meurtrier. » affirma Squall. Les autres le regardèrent. Il leur expliqua brièvement les bribes de l’histoire de Myat’Ala telle qu’elle daignait la raconter à Squall. Ils l’écoutèrent en silence, puis le vieil assassin reprit confirma :
« Oui, c’est bien moi. Je l’ai violé, je l’ai battue à mort, et elle a sa vengeance en me tenant captif depuis que son fantôme m’ait fait avoir un accident non loin de l’endroit où je l’avais tuée. Et depuis tout ce temps, elle me garde prisonnier ici, captif pour l’éternité. »
Pas un mot de la part des voyageurs. Ils ne se voyaient pas plaindre un tel homme, même si sa peine était l’enfermement éternel. Il avait mérité ce qui lui arrivait, et la petite troupe comprenait même mieux le ressentiment de Myat’Ala envers les hommes.
« Je regrette ce que j’avais fait, mais c’est trop tard, n’est-ce pas ? dit-il.
-Ce n’est pas nous de juger, mais à vous-même. » déclara Erwan. Squall s’approcha encore plus des barreaux :
« Venons-en à ce qui nous intéresse, vieil homme : Connaissez-vous un moyen de sortir d’ici ? De cette prison ? »
Un silence pesant s’installa de part et d’autre du mur qui séparait les deux cellules, pendant lequel le vieillard sembla réfléchir. Puis, alors que Squall allait reposer la question, il y répondit enfin :
« Je vous l’ai déjà dit tout à l’heure : Il n’y a aucun moyen de sortir d’ici. Vous serez envoyés comme tous les autres dans cette terre lugubre et morte que Mathilde appelle à juste titre les Territoires Extérieurs. Extérieurs à tout.
-Mathilde ? Qui est Mathilde ? demanda Fury.
-Celle qui se fait appeler Myat’Ala maintenant.
-Taisez-vous un peu, là dedans, on ne s’entend plus réfléchir !! »
La garde, qui s’était réveillée, lança des regards glacés vers les prisonniers, et ils retournèrent s’asseoir dos au mur du fond. Il patientèrent sans bruit pendant quelques minutes, puis recommencèrent à communiquer par chuchotements.
« En tout cas, même si le vieux nous avait indiqué la sortie, on est toujours coincé derrière ces barreaux, râla Mr.Magnum.
-Aucun moyen de s’échapper, alors ? s’étonna Squall. On abandonne tout et on reste là à attendre qu’on nous envoie dans ces Territoires, quels qu’ils soient ? Hors de question.
-Si encore on avait eu une petite information sur l’éventuel passage de Séphy-Roshou ici, dit Fury, navré. Au lieu de ça, on a fait fausse route dès le départ et nous voilà coincé dans une prison. Quelle magnifique idée tu as eu, Magnum, avec tes voyages !
-Je ne t’ai jamais obligé à venir, répliqua Mr.Magnum, courroucé. Je te rappelle qu’à l’origine, c’est pour toi qu’on fait tout ça. C’est toi qui pleurais comme une madeleine y a pas si longtemps !
-C’était pas une raison pour tous nous tuer et nous condamner à une éternité de souffrance ! rétorqua Fury, qui commençait à serrer les poings.
-Si on commence à se disputer, alors autant tout laisser tomber dès maintenant, calma Squall. Ce n’est pas en nous nous montant les uns contre les autres qu’on s’en sortira, mais en restant tous unis !
-De plus, avança Erwan, je crois que le vieux a encore des choses à nous dire. »
Ses compagnons le regardèrent, curieux de savoir pourquoi il affirmait ça d’une façon si péremptoire, et Erwan sourit : « Une intuition. » Il leva son index vers la grille de la cellule, et tous virent la main du vieux prisonnier s’agiter, provenant de la geôle d’à-côté. Ils remarquèrent également que la garde, manifestement éreintée, s’était assoupie de nouveau.
Ils se retrouvèrent bientôt tous agglutinés au mur jouxtant les deux cachots, malgré leurs liens qui les maintenaient solidement attachés.
« La garde s’est rendormie, crachota le vieux en toussant doucement.
-Nous avons vu, oui, le remercia Haschatan.
-Vous avez des informations à nous fournir ? demanda Erwan en souriant.
-Je vous ai entendu parler d’une dénommée Séphy-Roshou, tout à l’heure… » commença le vieillard. Fury s’avança le plus qu’il pouvait et colla sa joue sur le mur froid. Les autres s’écartèrent pour le laisser passer et parler.
« Vous l’avez vu ? Vous savez où elle est ? Répondez-moi, l’ancêtre, si vous savez quelque chose, dites-le moi !!
-Du calme, mon jeune enfant, répondit-il lentement comme pour tester l’impatience de Fury. J’ai effectivement vu une jeune femme qui pourrait correspondre à votre Séphy-Roshou dans ma cellule. Elle est apparue sans crier gare au milieu de la nuit en demandant où est-ce qu’elle se trouvait… »
Le vieil assassin repentit commença alors à raconter sa courte histoire.
Je dormais à poing fermé.
La nuit était comme toutes les centaines, les milliers d’autres que j’avais passé dans cet endroit : froides, calmes et ennuyeuses à souhait. Fut une époque, j’aurais donné n’importe quoi pour que quelque chose vienne troubler cette monotonie, mais j’avais finis par m’y accoutumer, préférant ce genre de nuit sans heurt à celle où des âme d’hommes hurlantes et gémissante étaient enfermées dans la cellule dans laquelle vous vous trouvez actuellement.
Mais cette nuit-là avait tout de la morne nuit ordinaire, et mon sommeil, toujours léger, n’avait pas encore été troublé par quoi que ce fut. Je ne me rappelle pas de quoi je rêvais exactement, seulement je me souviens parfaitement que dans ce rêve, je me retrouvais à m’envoler vers le soleil, ou au moins vers une source lumineuse immense qui m’attirait, qui me happait. Comme lorsque je suis mort.
Sauf que cette fois-ci, au lieu de mourir, je me suis simplement réveillé. Et cette fille étrange était là, devant moi, dans un habit curieux que je n’ai jamais vu et qui laissait entrapercevoir beaucoup de choses.
« Où est-ce que je suis tombé, là ? » avait-elle demandé d’une voix à la fois suave et autoritaire. Je n’avais jamais entendu une pareille voix, un pareil contraste entre la chaleur du ton et les paroles gelées. J’en frissonne encore, d’ailleurs. C’est fou. Mais bref.
Je lui ai répondu qu’elle se trouvait dans ma cellule. Elle a affiché un air navré et s’est passé une main sur la figure, comme si elle se concentrait pour ne pas perdre son sang froid. Peut-être que je l’avais exaspéré, mais je ne voyais pas d’autre réponse lui donner. Après tout, qu’est-ce cet endroit, à part un monde sortit de l’imagination vengeresse d’une femme violée et tuée par mes soins ?
« Je vois bien que je suis dans une prison, stupide créature ! avait-elle crachée. Je te demande simplement si je suis au Paradis ou non ?
-Si cet endroit est le Paradis, lui ais-je répondu en souriant, alors je n’ose imaginer ce que donnerait l’Enfer, ha ha ! »
Elle m’a semblée désarçonnée par la réponse, et soudainement, je l’ai vu disparaître devant moi. Je vous avouerais que je ne sais pas exactement comment elle est apparue, ni comment elle a disparue, mais le fait est que cette jeune femme est arrivée, m’a parlé et est repartie. Et en vous entendant parler de cette fille, Séphy-Roshou, j’ai pensé que ça pourrait correspondre, ou avoir un petit rapport.
Les six voyageurs gardèrent le silence. Un léger ronflement de la femme qui les gardait les fit sursauter, et le vieux, persuadé qu’ils ne le croyaient pas, commença à s’énerver :
« Je ne suis pas un vieillard qui a perdu l’esprit ! Je suis mort vieux, mais pas sénile, et je n’ai pas bougé depuis ce moment !
-Moins fort, vieux fou, aboya Fury en réfléchissant.
-Tu crois que ça pourrait être elle ? le questionna Mr.Magnum.
-Je n’ai sais fichtrement rien… »
Squall, Haschatan et Erwan haussèrent les épaules à l’unisson lorsque Mr.Magnum posa son regard sur eux. Ils soupirèrent. Ils avaient effectivement obtenus des informations qui pourraient se révéler importantes, mais ils n’avaient pas avancé sur le moyen de sortir d’ici. Le vieux repassa une main à travers les barreaux et la tendit vers eux, agrippant légèrement Erwan par la manche.
« Vous me croyez, hein ?
-Lâchez-moi ! ordonna Erwan, mais le vieux resserra son étreinte.
-Qu’est-ce qui nous oblige à vous croire ? s’informa Squall. Quel est votre intérêt dans cette histoire ? Pourquoi nous raconter ça ?
-Emmenez-moi avec vous. »
La poigne sur la manche et le bras d’Erwan se fit plus forte. Il tenta de se dégager doucement, mais n’y parvint pas. Ce vieil ermite avait plus de force qu’il ne l’aurait pensé de prime abord. Il contracta ses muscles et fit jouer son épaule pour tirer son bras d’un coup sec et écraser la main du violeur sur le mur.
Il poussa un glapissement de douleur et la main se retira telle un serpent glissant entre les grilles. Un silence. Puis le vieux commença à hurler et à geindre. Squall essaya de la faire taire, mais sans y arriver. Les cris réveillèrent la dame blanche et se leva et frappa sur la porte de la cellule d’à coté. Le vieux cessa ses hululements sans rechigner.
« Du chiqué, murmura Haschatan.
-N’empêche que notre nounou est parfaitement réveillée maintenant, nota Erwan. Impossible de tenter n’importe lequel de nos plans d’évasion.
-Si encore on avait un plan, maugréa Fury. Vieil ahuri. » Il cracha par terre.
La dame blanche se tenait assise sur la chaise où elle s’était endormie par deux fois, mais cette fois-ci, ses yeux étaient grands ouverts et elle était aux aguets. K-Ro, qui était resté disante depuis quelques minutes, s’approcha alors d’Erwan et se colla à lui. Ce dernier rougit et jeta un œil à K-Ro, qui voulait attirer silencieusement son attention.
« Psssssssiiiiit… Erwan… chuchotât-elle doucement.
-Qu’est-ce qu’il y a ? dit-il aussi faiblement qu’il le pouvait.
-Penches-toi. »
Erwan s’exécuta sans chercher à comprendre, et il sentit les lèvres de K-Ro qui effleuraient son oreille. Cette sensation nullement désagréable, le fit frissonner, et il sentit une onde de chaleur lui inonder le visage alors qu’elle lui parlait. Il se rendit également compte qu’il n’avait rien entendu de ce qu’elle lui avait dit.
« Excuses-moi, qu’est-ce que tu disais ? bredouilla-t-il, confus.
-À quoi tu pensais encore, tête de linotte ? marmonna-t-elle entre ses dents. Je te disais que je pense avoir trouvé un moyen de sortir d’ici.
-Ah oui ? s’étonna Erwan. Et quelle est cette idée ?
-Tu sais que nous sommes revêtus de notre identité Trauménienne, actuellement ? Il n’y a rien qui te choque dans mon personnage ? »
Erwan se recula pour l’examiner de haut en bas. Rien ne le choquait, si ce n’est les liens qui la ligotaient et sa tenue légère. Il secoua la tête.
« D’ordinaire, mon personnage de K-Ro n’est jamais seule. » dit simplement K-Ro.
Le visage d’Erwan, tout d’abord dubitatif, se changea subitement, se mua en une face ravie, enjoué. Un sourire radieux et confiant éclaira son visage. Il regarda les autres et fit circuler la nouvelle. Tour à tour, les quatre autres compagnons retrouvèrent le sourire et la confiance. K-Ro jubilait. Elle fit un signe de tête en direction de leur geôlière.
Et, derrière la chaise de la dame blanche, Kefka apparu.
Mr.Magnum- Enorme floodeur
- Nombre de messages : 2475
Age : 42
Localisation : Dans les limbes torturées d'un esprit dérangé.
Date d'inscription : 18/01/2005
Re: Traumenschar
(partie 1)
7. Libération(s).
« Plus à droite !! Non ! Non, à gauche !! Voi… Voilà, comme ça !! »
Les ordres, relativement confus, que K-Ro donnait à Kefka obligeaient ce dernier à se comporter comme un automate. Après avoir assommé la dame blanche avec une chaise, il l’avait ligoté, difficilement, et s’évertuait maintenant à la cacher dans un recoin du mur, dans l’ombre. Mais les pieds nus et blancs dépassaient de l’orifice, et Kefka, de par sa petite taille et sa maladresse, n’arrivait pas à les coincer dans une aspérité.
« On les voit encore, ses pieds ? demanda-t-il à l’assemblée.
-Non non, c’est bon, répondit K-Ro sans se soucier de ses compagnons. Maintenant, récupère les clefs sur elle. »
Un silence pesant s’abattit sur la prison, alors que Kefka ne remuait pas.
« Quoi ? s’époumona K-Ro. Les clefs !! Toi y en a comprendre ?!
-Crie pas si fort, K-Ro, dit Erwan. Tu vas finir par ameuter les autres. Et je n’ai pas vraiment envie de me retrouver à nouveau aux prises avec une armée de femmes…
-Qu’est-ce que t’as contre les femmes ? » s’insurgea K-Ro en se tournant vers Erwan, délaissant momentanément son objet de torture numéro un en la personne de Kefka. Ce dernier prit discrètement les clefs et les fourra dans sa poche en ricanant.
« Mais rien, rien du tout, répliqua Erwan, amusé. Seulement je préfère avoir une armée de femmes vivantes à mes trousses plutôt que des cadavres.
-Et moi donc ! » ajouta Mr.Magnum, qui fit rire Haschatan. K-Ro les lança un regard noir de reproches et fit de nouveau volte-face. Kefka sifflotait innocemment. Elle examina son laquais d’un œil soupçonneux.
« Je ne suis pas dupe, Kefka, cracha-t-elle. Je sais parfaitement que tu dissimules quelque chose. Dans ta poche, là !
-Qui ça, mwa ? gazouilla le sinistre ‘sauveteur’. Mais tu sais parfaitement que je suis incapable d’une telle bassesse, surtout envers toi, ô grande maîtress…
-Libère-moi, avorton !! »
Interrompu par cette voix provenant de la cellule d’à-côté, Kefka bredouilla la fin de sa phrase et s’avança vers l’autre cellule. Sa curiosité avait été piquée au vif. Qui ose proférer de telles remarques désobligeantes envers mwa, le grand, l’illustre, le seul, l’unique Kefka ? Tout à ses pensées, il scruta la pénombre afin d’y découvrir le vieil assassin, qui tendait une main blême et ridée vers lui dans un appel au secours silencieux.
« Qui es-tu, toi ? demanda Kefka en reniflant d’un air méprisant.
-Ouvre-moi, fais-moi sortir d’ici, je t’en supplie…
-Et pourquoi ferais-je ça ? exulta l’ignoble gnome arrogant, profitant de sa situation de supériorité. Je ne te connais même pas, l’ancien.
-Alors que moi, tu me connais ! » raisonna K-Ro en souriant. Elle tendit sa main vers son souffre-douleur et lui fit les yeux doux. « Nous nous connaissons depuis tellement longtemps, mon Kefka !
-Ah ça oui ! » tempêta Kefka en perdant son sang froid, oubliant le vieillard qui se remit aussitôt à gémir en guise fond sonore. K-Ro retira sa main d’entre les barreaux et se recula un peu. Les autres restèrent bouche bée devant la révolte de Kefka, lui qui d’ordinaire acquiesçait à toutes les volontés et caprices de sa maîtresse.
« Parlons-en, de notre relation, pendant qu’on peux ! Mis à part me torturer, me faire laver le sol, m’envoyer à droite et à gauche faire des corvées qui répugneraient même un rat… » Il réfléchit. « Bon, même si ce rat, pour faire le type de corvées quotidiennes auxquelles je pense, devrait avoir des bras, des jambes, et aussi pouvoir survivre à des magnétoscopes doués d’une intelligence limitée mais d’un appétit sans bornes. Mais là n’est pas la question. »
Personne n’osa parler.
« La question, c’est de savoir pourquoi je te libèrerais, toi et tes amis qui m’ont également fait du mal ?
-Je savais que je n’aurais pas du le piétiner au 22ème la dernière fois… soupira Erwan.
-Je te promets de te donner une augmentation dès que…
-Pour qu’il y ait une augmentation, il faudrait déjà qu’il y ait un salaire, K-Ro ! vociféra Kefka, écarlate.
-Il va finir par faire rappliquer les autres. » gémit Mr.Magnum. Les autres acquiescèrent, tandis que Kefka continuait.
« Mais en guise de salaires, des coups. Au lieu de primes, des insultes. Sans compter les innombrables travaux effectué au noir sans rémunération !
-Tu voudrais des coups aussi pour le black ? demanda K-Ro, parfaitement sérieuse.
-Tu te rappelles ton cadeau de Noël dernier ? la questionna Kefka sans tenir compte de sa remarque. C’était un déguisement d’homme grenouille pour que je puisse descendre dans un réservoir à ordure où viennent se déverser tes poubelles afin d’y retrouver le contrat d’une loutre apprivoisée que tu avais jeté par mégarde !
-Mais c’est qu’elle était très utile, cette loutre !
-Mais je m’en fous ! s’emporta carrément Kefka. De toi, de tes projets de conquérir le monde, de ton armée stupide dont je suis le général et de tout le reste ! Voilà pourquoi je ne vais pas vous ouvrir la porte. Pourquoi le ferais-je ? Pour que tout recommence ?
-Bon, d’accord, abandonna K-Ro. Tu as gagné. »
Elle sortit son portefeuille et l’ouvrit. Une mite s’envola.
« Tu veux combien ?
-Kefka, intervint Haschatan. Si tu ne nous libères pas, penses-tu pouvoir t’en sortir sans nous contres les prédatrices d’en haut ?
-Il a raison, ajouta Squall. Que feras-tu seul contre elles ?
-Et si je libère ce vieux plouc qui connaît manifestement bien la région, au lieu de vous ? Peut-être sait-il comment se tirer d’ici ? »
À l’évocation de son statut, le ‘vieux plouc’ se jeta contre la grille et mit ses mains en position de prière. Manifestement, il n’avait plus du tout mal à celle qui s’était écrasée contre la parois quelques minutes auparavant.
« Je sais parfaitement comment sortir d’ici, monsieur Kefka, implora-t-il. Ouvrez-moi et je vous mènerai dans un endroit sûr !
-Accordé ! » jubila Kefka en s’approchant de la cellule du vieux brigand. Ce dernier exhiba deux rangées de dents à l’allure suspectes dans une grimace de sourire que Kefka n’aperçut pas. Mr.Magnum bouscula tout le monde en s’avançant.
« Ne fais pas ça, il ne sait rien !
-Et toi, rétorqua Kefka, que sais-tu ? »
Il enclencha la clef dans la serrure et tourna. Le cliquetis de libération du loquet résonna dans le silence de la prison, alors que la porte qui menait aux étages supérieurs sortit de ses gonds et alla se fracasser au sol. Myat’Ala se trouvait derrière, debout.
Furieuse.
Kefka fit un pas en arrière, saisi par la peur, et sentit sa vessie menacer de se libérer. La porte de la cellule du vieux prisonnier s’ouvrit alors et son occupant en sortit, vif comme l’éclair, au grand étonnement de Squall et ses compagnons. Il attrapa un couteau disposé sur le bureau de leur garde, toujours au sol et ligotée, et saisit de l’autre main un Kefka tremblotant, qui poussa un hurlement.
« Plus un geste, Mathilde !! » Les autres prisonniers tournèrent la tête vers la nouvelle arrivante, impuissants. Elle fut bientôt rejointe par une dizaine de dames blanches, dont Élodie, qui restèrent en retrait, interdites. Myat’Ala foudroyait son meurtrier du regard.
« Oh pardon, fit le vieil homme. J’avais oublié que tes esclaves à la solde de ta vengeance ne t’appelaient pas Mathilde, mais Myat’Ala. Un surnom parfaitement ridicule, si tu veux mon avis.
-Je ne veux pas ton avis, espèce de moins que rien !! » répondit Myat’Ala/Mathilde. Elle semblait être aux bord des larmes, mais personne ne savait comment interpréter celles-ci : Des larmes de fureur ? De peur ? De tristesse ? Elle-même l’ignorait. Mais quelle qu’en soit la réponse, la reine des dames blanches était prête à étriper quiconque se mettrait sur son chemin, vivants ou morts.
« Que vas-tu faire ? demanda le vieillard qui ne paraissait finalement pas si âgé que ça. Comptes-tu m’envoyer tes filles ? Tes victimes ? Car toutes sont là par ta faute, si je ne m’abuse. Indirectement, c’est toi qui les as toutes tués pour assouvir ta vengeance !
-Ferme-la, assassin !! beugla Myat’Ala.
-C’est peut-être pour ça que tu as changé de nom : Pour éviter que tes victimes ne sachent que tu es Mathilde, celle que j’ai moi-même tué et que tu as tué en retour ! Celle qui ne vaux pas mieux que moi…
-Je vais en finir avec toi une bonne fois pour toutes, violeur, lança Myat’Ala. Et ce n’est pas l’otage que tu menaces qui m’arrêtera. Ce n’est qu’un homme, après tout.
-Au secours ? hasarda Kefka.
7. Libération(s).
« Plus à droite !! Non ! Non, à gauche !! Voi… Voilà, comme ça !! »
Les ordres, relativement confus, que K-Ro donnait à Kefka obligeaient ce dernier à se comporter comme un automate. Après avoir assommé la dame blanche avec une chaise, il l’avait ligoté, difficilement, et s’évertuait maintenant à la cacher dans un recoin du mur, dans l’ombre. Mais les pieds nus et blancs dépassaient de l’orifice, et Kefka, de par sa petite taille et sa maladresse, n’arrivait pas à les coincer dans une aspérité.
« On les voit encore, ses pieds ? demanda-t-il à l’assemblée.
-Non non, c’est bon, répondit K-Ro sans se soucier de ses compagnons. Maintenant, récupère les clefs sur elle. »
Un silence pesant s’abattit sur la prison, alors que Kefka ne remuait pas.
« Quoi ? s’époumona K-Ro. Les clefs !! Toi y en a comprendre ?!
-Crie pas si fort, K-Ro, dit Erwan. Tu vas finir par ameuter les autres. Et je n’ai pas vraiment envie de me retrouver à nouveau aux prises avec une armée de femmes…
-Qu’est-ce que t’as contre les femmes ? » s’insurgea K-Ro en se tournant vers Erwan, délaissant momentanément son objet de torture numéro un en la personne de Kefka. Ce dernier prit discrètement les clefs et les fourra dans sa poche en ricanant.
« Mais rien, rien du tout, répliqua Erwan, amusé. Seulement je préfère avoir une armée de femmes vivantes à mes trousses plutôt que des cadavres.
-Et moi donc ! » ajouta Mr.Magnum, qui fit rire Haschatan. K-Ro les lança un regard noir de reproches et fit de nouveau volte-face. Kefka sifflotait innocemment. Elle examina son laquais d’un œil soupçonneux.
« Je ne suis pas dupe, Kefka, cracha-t-elle. Je sais parfaitement que tu dissimules quelque chose. Dans ta poche, là !
-Qui ça, mwa ? gazouilla le sinistre ‘sauveteur’. Mais tu sais parfaitement que je suis incapable d’une telle bassesse, surtout envers toi, ô grande maîtress…
-Libère-moi, avorton !! »
Interrompu par cette voix provenant de la cellule d’à-côté, Kefka bredouilla la fin de sa phrase et s’avança vers l’autre cellule. Sa curiosité avait été piquée au vif. Qui ose proférer de telles remarques désobligeantes envers mwa, le grand, l’illustre, le seul, l’unique Kefka ? Tout à ses pensées, il scruta la pénombre afin d’y découvrir le vieil assassin, qui tendait une main blême et ridée vers lui dans un appel au secours silencieux.
« Qui es-tu, toi ? demanda Kefka en reniflant d’un air méprisant.
-Ouvre-moi, fais-moi sortir d’ici, je t’en supplie…
-Et pourquoi ferais-je ça ? exulta l’ignoble gnome arrogant, profitant de sa situation de supériorité. Je ne te connais même pas, l’ancien.
-Alors que moi, tu me connais ! » raisonna K-Ro en souriant. Elle tendit sa main vers son souffre-douleur et lui fit les yeux doux. « Nous nous connaissons depuis tellement longtemps, mon Kefka !
-Ah ça oui ! » tempêta Kefka en perdant son sang froid, oubliant le vieillard qui se remit aussitôt à gémir en guise fond sonore. K-Ro retira sa main d’entre les barreaux et se recula un peu. Les autres restèrent bouche bée devant la révolte de Kefka, lui qui d’ordinaire acquiesçait à toutes les volontés et caprices de sa maîtresse.
« Parlons-en, de notre relation, pendant qu’on peux ! Mis à part me torturer, me faire laver le sol, m’envoyer à droite et à gauche faire des corvées qui répugneraient même un rat… » Il réfléchit. « Bon, même si ce rat, pour faire le type de corvées quotidiennes auxquelles je pense, devrait avoir des bras, des jambes, et aussi pouvoir survivre à des magnétoscopes doués d’une intelligence limitée mais d’un appétit sans bornes. Mais là n’est pas la question. »
Personne n’osa parler.
« La question, c’est de savoir pourquoi je te libèrerais, toi et tes amis qui m’ont également fait du mal ?
-Je savais que je n’aurais pas du le piétiner au 22ème la dernière fois… soupira Erwan.
-Je te promets de te donner une augmentation dès que…
-Pour qu’il y ait une augmentation, il faudrait déjà qu’il y ait un salaire, K-Ro ! vociféra Kefka, écarlate.
-Il va finir par faire rappliquer les autres. » gémit Mr.Magnum. Les autres acquiescèrent, tandis que Kefka continuait.
« Mais en guise de salaires, des coups. Au lieu de primes, des insultes. Sans compter les innombrables travaux effectué au noir sans rémunération !
-Tu voudrais des coups aussi pour le black ? demanda K-Ro, parfaitement sérieuse.
-Tu te rappelles ton cadeau de Noël dernier ? la questionna Kefka sans tenir compte de sa remarque. C’était un déguisement d’homme grenouille pour que je puisse descendre dans un réservoir à ordure où viennent se déverser tes poubelles afin d’y retrouver le contrat d’une loutre apprivoisée que tu avais jeté par mégarde !
-Mais c’est qu’elle était très utile, cette loutre !
-Mais je m’en fous ! s’emporta carrément Kefka. De toi, de tes projets de conquérir le monde, de ton armée stupide dont je suis le général et de tout le reste ! Voilà pourquoi je ne vais pas vous ouvrir la porte. Pourquoi le ferais-je ? Pour que tout recommence ?
-Bon, d’accord, abandonna K-Ro. Tu as gagné. »
Elle sortit son portefeuille et l’ouvrit. Une mite s’envola.
« Tu veux combien ?
-Kefka, intervint Haschatan. Si tu ne nous libères pas, penses-tu pouvoir t’en sortir sans nous contres les prédatrices d’en haut ?
-Il a raison, ajouta Squall. Que feras-tu seul contre elles ?
-Et si je libère ce vieux plouc qui connaît manifestement bien la région, au lieu de vous ? Peut-être sait-il comment se tirer d’ici ? »
À l’évocation de son statut, le ‘vieux plouc’ se jeta contre la grille et mit ses mains en position de prière. Manifestement, il n’avait plus du tout mal à celle qui s’était écrasée contre la parois quelques minutes auparavant.
« Je sais parfaitement comment sortir d’ici, monsieur Kefka, implora-t-il. Ouvrez-moi et je vous mènerai dans un endroit sûr !
-Accordé ! » jubila Kefka en s’approchant de la cellule du vieux brigand. Ce dernier exhiba deux rangées de dents à l’allure suspectes dans une grimace de sourire que Kefka n’aperçut pas. Mr.Magnum bouscula tout le monde en s’avançant.
« Ne fais pas ça, il ne sait rien !
-Et toi, rétorqua Kefka, que sais-tu ? »
Il enclencha la clef dans la serrure et tourna. Le cliquetis de libération du loquet résonna dans le silence de la prison, alors que la porte qui menait aux étages supérieurs sortit de ses gonds et alla se fracasser au sol. Myat’Ala se trouvait derrière, debout.
Furieuse.
Kefka fit un pas en arrière, saisi par la peur, et sentit sa vessie menacer de se libérer. La porte de la cellule du vieux prisonnier s’ouvrit alors et son occupant en sortit, vif comme l’éclair, au grand étonnement de Squall et ses compagnons. Il attrapa un couteau disposé sur le bureau de leur garde, toujours au sol et ligotée, et saisit de l’autre main un Kefka tremblotant, qui poussa un hurlement.
« Plus un geste, Mathilde !! » Les autres prisonniers tournèrent la tête vers la nouvelle arrivante, impuissants. Elle fut bientôt rejointe par une dizaine de dames blanches, dont Élodie, qui restèrent en retrait, interdites. Myat’Ala foudroyait son meurtrier du regard.
« Oh pardon, fit le vieil homme. J’avais oublié que tes esclaves à la solde de ta vengeance ne t’appelaient pas Mathilde, mais Myat’Ala. Un surnom parfaitement ridicule, si tu veux mon avis.
-Je ne veux pas ton avis, espèce de moins que rien !! » répondit Myat’Ala/Mathilde. Elle semblait être aux bord des larmes, mais personne ne savait comment interpréter celles-ci : Des larmes de fureur ? De peur ? De tristesse ? Elle-même l’ignorait. Mais quelle qu’en soit la réponse, la reine des dames blanches était prête à étriper quiconque se mettrait sur son chemin, vivants ou morts.
« Que vas-tu faire ? demanda le vieillard qui ne paraissait finalement pas si âgé que ça. Comptes-tu m’envoyer tes filles ? Tes victimes ? Car toutes sont là par ta faute, si je ne m’abuse. Indirectement, c’est toi qui les as toutes tués pour assouvir ta vengeance !
-Ferme-la, assassin !! beugla Myat’Ala.
-C’est peut-être pour ça que tu as changé de nom : Pour éviter que tes victimes ne sachent que tu es Mathilde, celle que j’ai moi-même tué et que tu as tué en retour ! Celle qui ne vaux pas mieux que moi…
-Je vais en finir avec toi une bonne fois pour toutes, violeur, lança Myat’Ala. Et ce n’est pas l’otage que tu menaces qui m’arrêtera. Ce n’est qu’un homme, après tout.
-Au secours ? hasarda Kefka.
Mr.Magnum- Enorme floodeur
- Nombre de messages : 2475
Age : 42
Localisation : Dans les limbes torturées d'un esprit dérangé.
Date d'inscription : 18/01/2005
Re: Traumenschar
(partie 2)
-Heureusement que Frédérique, notre garde, m’a prévenue pat télépathie de l’arrivée impromptue de ce nouvel invité. » Et, alors que deux dames blanches s’acharnaient à défaire les liens de Frédérique, Haschatan croisa les bras sur son torse, mécontent.
« De la télépathie… Pfff… C’est du grosbillisme, oui.
-Mathilde ! Êtes-vous vraiment tombé au niveau de cet homme que vous haïssez tant ? »
La remarque fit mouche. Myat’Ala concentra son attention vers Mr.Magnum. Ses yeux lançaient des éclairs de rage concentrée, et sa colère offensée était presque palpable.
« Ne m’appelle pas comme ça, espèce de mâle répugnant.
-Et comment dois-je vous appeler, alors ? demanda Mr.Magnum. Myat’Ala, votre pseudo censé être synonyme de respect et de vertu ? D’incarnation de la femme bafouée résignée à ne pas se laisser faire ? Ou bien dois-vous rappeler que vous êtes Mathilde, une femme qui a été battu et violé à l’orée d’un bois par un homme sans scrupule ?
-Magnum, vas-y mollo, ne la mets pas en rogne… murmura Haschatan.
-Ce que veux dire mon ami, intervint Squall en se mettant en avant, c’est que vous êtes entrain de faire les mêmes erreurs que votre meurtrier : Vous tuez des innocents pour assouvir votre vengeance, et vous avilissez les femmes pour en faire une armée à vos ordres. Croyez-vous que ce soit la meilleure solution ?
-Faire une armée, c’est une bonne solution, non ? » grommela K-Ro.
Cette fois-ci, le silence se prolongea. La reine des damnées ne savait plus quoi répondre, car Squall avait tout à fait raison. Elle n’avait fait que rechercher la vengeance ave sa haine incommensurable des hommes. Et pour ça, elle avait condamnée toutes ces femmes, ces innocentes, à la suivre dans ses tourments.
Myat’Ala tourna la tête vers elles, se remettant de plus en plus en question. Les visages de ses sujettes était tous braqués vers leur maîtresse et attendaient un ordre, un mot de sa part. N’importe quoi. Si je leur donnais l’ordre de se tuer, elles le feraient sans même y réfléchir. Qu’ai-je fait ? En quoi tout ceci est mieux que le meurtre de cet homme qui a prit un nouvel otage dans sa folie ? Et, au final, ne suis-je pas folle également ?
Désemparée, assaillie par des pensées contraires, Myat’Ala ne savait plus quoi décider. Elle se prit la tête entre les mains et tomba à genoux en poussant un petit cri plaintif. Automatiquement, trois des dames blanches les plus proches la soutinrent.
En face, le vieux brigand maintenait toujours Kefka d’une main, coinçant l’autre sous sa gorge. Celui-ci tremblait de part en part et ses joues ruisselaient de larmes de peur. Il se demanda même si ses cuisses n’étaient pas détrempées par autre chose que la transpiration. L’homme derrière lui le poussa en avant.
« N’essayez pas de m’arrêter et écartez-vous, ou bien je l’exécute. Je vais passer tout près de vous toutes, et vous n’avez aucun intérêt à me toucher. Sans quoi, je ferais un cadavre de plus et un innocent de moins.
-Pourquoi c’est toujours sur moi que ça tombe, ces embrouilles… ? gémit Kefka.
-Il est hors de question que vous sortiez d’ici, vous. N’essayez pas de profiter de l’affaiblissement de notre souveraine pour vous échapper. Et je vous répète que cet otage ne vous servira à rien : C’est un homme, et je serais personnellement très heureuse s’il mourait. »
Élodie avait manifestement pris le commandement des opérations. Myat’Ala était toujours à genoux, pesant mentalement le pour et le contre de ses actions passées, présentes et futures. Elle était momentanément incapable d’assumer le rôle de leader.
Kefka sentit le couteau aiguisé se rapprocher de sa gorge, et il hurla à l’attention de K-Ro : « Mais fait quelque chose, toi !! Dis-leur que je suis important à tes yeux, et vite !
-Pourquoi j’irai leur mentir ? ricana K-Ro.
-Très bien, conclut l’homme à voix haute. Alors si c’est comme ça… » Kefka se contracta, s’attendant à prendre un coup de couteau, mais il se sentit projeter en avant vers le group de femmes qui protégeait leur maîtresse. Élodie, rapide comme l’éclair, s’interposa et envoya valser Kefka contre un mur du plat de la main. Le gnome percuta durement le mur et tomba à terre, étourdi.
Le vieil assassin se rua alors sur une des dames blanches les plus près d’elle. Au autre vit l’action et tenta d’intervenir mais elle reçut un magistral coup de pied dans le ventre. Elle se retrouva à terre, les poumons vidés et à la limite de l’évanouissement. L’homme s’empara alors de sa cible et la menaça à son tour du couteau.
« Pas très original, tout ça, commenta Erwan, blasé.
-Il ne se renouvelle pas trop, ouais, ajouta Haschatan.
-Moi, j’aimais bien le coup de pied ! » dit K-Ro en levant un panneau noté : 10.
Le vieil homme aux ressources insoupçonnées se remit en retrait. Élodie grogna. Cette fois-ci, la situation était différente. Il ne s’agissait pas d’un simple otage, mais d’une dame blanche. Heureusement que Myat’Ala n’avait pas été prise elle-même en tant que bouclier humain, sans quoi…
« Et maintenant, mademoiselle Je-Dirige-Tout ? railla le meurtrier. Ça n’a toujours aucune importance ou bien vous allez me laisser passer ?
-Un jour ou l’autre, tu paieras pour tes actions, vieillard… Tu rejoindras tous les autres hommes dans les Territoires Extérieurs. Ou bien je t’enverrais ‘en bas’ de mes propres mains. J’espère que tu m’as bien compris ?
-Tous les hommes envoyés dans les Territoires Extérieurs ne sont pas forcément morts, mademoiselle Je-Dirige-Tout. » Le vieux raffermit sa prise sur la dame blanche.
« Ils ont créés une communauté où ils survivent tant bien que mal en se nourrissant des démons qui habitent ces Territoires, et ça depuis qu’ils ont compris que ces monstrueuses créatures étaient capables de tomber sous leurs assauts répétés. Eh oui, qu’elles soient le reflets des peurs de Mathilde ou non, elles sont mortelles et mangeables. Un village a été construit sur les ruines d’un cimetière naturel d’animaux. Un chef a été désigné, et les membres de cette tribu sont nombreux. Très nombreux. Et c’est vous-même qui grossissez leurs troupes en envoyant de nouvelles âmes. »
Le vieux reprit son souffle. L’effort qu’il fournissait pour garder en joue la dame blanche, ajouter à celui de rester en permanence sur ses gardes, amenuisait petit à petit ses réserves. Mais il ne pouvait s’arrêter de parler et, la jubilation aidant, il poursuivit son récit devant les yeux d’Élodie et des Trauméniens qui en étaient réduit à de simples spectateurs.
« Ils ont organisés tout un système de circulation de l’information. Ils savent toujours où et quand vous allez relâcher de nouvelles victimes mâles et ils vont les chercher avant qu’ils ne se fassent dévorer. Ils vous vouent une haine sans limites, et attendent le bon moment pour vous occire. Et ils y arriveront, j’en suis certain. Tôt ou tard, ils vous décimeront jusqu’à la dernière, et nous pourront enfin tuer Mathilde pour que ce lieu maudit disparaisse à jamais. »
Élodie, les dents serrées, la mâchoire crispée, resta sans parler une bonne minute. Le silence était pesant après ces lourdes révélations. Mr.Magnum jeta un œil à ses compagnons, qui lui rendirent d’un regard complètement perdu. Seul Squall lui fit un clin d’œil. Mr.Magnum leva un sourcil, puis il sourit nerveusement en l’informant silencieusement, par signe discret de la main, que ce n’était vraiment pas le moment de draguer.
Squall porta une main à son front, navré, puis se pencha à l’oreille de Mr.Magnum. Celui-ci écouta et au fur et à mesure des explications, un sourire fendit son visage. Squall se redressa, et hocha la tête. Mr.Magnum fit de même, et se tourna vers Erwan pour faire passer l’information.
« Toi, toi et toi, dit Élodie en désignant trois dames blanches. Emmenez Myat’Ala notre souveraine dans ses appartements. Mettez-la en sûreté. Je prends l’entière direction des opérations dorénavant. Exécution ! »
Les trois volontaires obéirent sans un mot et emportèrent délicatement Myat’Ala à l’étage supérieur. Restée seule, Élodie continuait à faire face au vieil homme, qui transpirait maintenant énormément.
« Nous voilà donc bloqué, hein ? souffla-t-il.
-Je vois bien que je n’ai pas le choix.
-Vous êtes ridicules, coassa le vieillard en riant. Vous êtes capables d’envoyer une cinquantaine de dames blanches à la mort pour capturer quatre ou cinq hommes, mais vous ne pouvez même pas sacrifier sciemment l’une d’entre vous pour me tenir enfermé ici.
-Nous n’avons pas le droit de donner la mort à l’une des nôtres, directement ou indirectement. » Le violeur éclata de rire. « Je vais vous laisser partir. Vous relâcherez notre amie devant la porte d’entrée. Mais n’oubliez pas, ce que j’ai dit tout à l’heure tiens toujours : Un jour ou l’autre, nous vous retrouverons. »
Le meurtrier enfonça doucement la pointe du couteau dans la gorge blanche de son otage. Il triomphait.
« Et ce jour là, je serais à la tête d’une armée entière d’hommes et nous vous écraserons comme de vulgaires mouches que vous êtes, mademoiselle Je-Dirige-To…
-Non !! Pas à l’intérieur !! hurla Mr.Magnum.
-Ah oui ? Zut, j’avais oublié qu’il était si gros !! » s’excusa K-Ro.
Le vieil homme et Élodie se tournèrent vers la geôle encore verrouillée et ils virent les six prisonniers plaqués sur les barreaux, poussés par une immense chose verte qui gonflait derrière eux. Une sorte d’immense ballon verdâtre couvert d’écailles. Une queue gigantesque passa entre deux barreaux et brisa les attaches du mur, emportant la grille et les voyageurs accrochés dessus et qui hurlaient à pleins poumons.
Élodie se jeta sur le coté, évitant de peu la chute de la grille et de ses occupants. Le vieux, avec toujours l’otage, n’en croyait pas ses yeux. Les six Trauméniens se relevèrent avec peine, se massant les endroits douloureux. K-Ro leva les yeux sur sa bestiole.
« Était-ce vraiment une si bonne idée, Squall ? demanda Haschatan.
-Hum, en fait, c’était l’idée de K-Ro…
-COOOOOOOOOIIIIIIIIIIN !!!!!!!! » beugla Téquila, heureux.
-Heureusement que Frédérique, notre garde, m’a prévenue pat télépathie de l’arrivée impromptue de ce nouvel invité. » Et, alors que deux dames blanches s’acharnaient à défaire les liens de Frédérique, Haschatan croisa les bras sur son torse, mécontent.
« De la télépathie… Pfff… C’est du grosbillisme, oui.
-Mathilde ! Êtes-vous vraiment tombé au niveau de cet homme que vous haïssez tant ? »
La remarque fit mouche. Myat’Ala concentra son attention vers Mr.Magnum. Ses yeux lançaient des éclairs de rage concentrée, et sa colère offensée était presque palpable.
« Ne m’appelle pas comme ça, espèce de mâle répugnant.
-Et comment dois-je vous appeler, alors ? demanda Mr.Magnum. Myat’Ala, votre pseudo censé être synonyme de respect et de vertu ? D’incarnation de la femme bafouée résignée à ne pas se laisser faire ? Ou bien dois-vous rappeler que vous êtes Mathilde, une femme qui a été battu et violé à l’orée d’un bois par un homme sans scrupule ?
-Magnum, vas-y mollo, ne la mets pas en rogne… murmura Haschatan.
-Ce que veux dire mon ami, intervint Squall en se mettant en avant, c’est que vous êtes entrain de faire les mêmes erreurs que votre meurtrier : Vous tuez des innocents pour assouvir votre vengeance, et vous avilissez les femmes pour en faire une armée à vos ordres. Croyez-vous que ce soit la meilleure solution ?
-Faire une armée, c’est une bonne solution, non ? » grommela K-Ro.
Cette fois-ci, le silence se prolongea. La reine des damnées ne savait plus quoi répondre, car Squall avait tout à fait raison. Elle n’avait fait que rechercher la vengeance ave sa haine incommensurable des hommes. Et pour ça, elle avait condamnée toutes ces femmes, ces innocentes, à la suivre dans ses tourments.
Myat’Ala tourna la tête vers elles, se remettant de plus en plus en question. Les visages de ses sujettes était tous braqués vers leur maîtresse et attendaient un ordre, un mot de sa part. N’importe quoi. Si je leur donnais l’ordre de se tuer, elles le feraient sans même y réfléchir. Qu’ai-je fait ? En quoi tout ceci est mieux que le meurtre de cet homme qui a prit un nouvel otage dans sa folie ? Et, au final, ne suis-je pas folle également ?
Désemparée, assaillie par des pensées contraires, Myat’Ala ne savait plus quoi décider. Elle se prit la tête entre les mains et tomba à genoux en poussant un petit cri plaintif. Automatiquement, trois des dames blanches les plus proches la soutinrent.
En face, le vieux brigand maintenait toujours Kefka d’une main, coinçant l’autre sous sa gorge. Celui-ci tremblait de part en part et ses joues ruisselaient de larmes de peur. Il se demanda même si ses cuisses n’étaient pas détrempées par autre chose que la transpiration. L’homme derrière lui le poussa en avant.
« N’essayez pas de m’arrêter et écartez-vous, ou bien je l’exécute. Je vais passer tout près de vous toutes, et vous n’avez aucun intérêt à me toucher. Sans quoi, je ferais un cadavre de plus et un innocent de moins.
-Pourquoi c’est toujours sur moi que ça tombe, ces embrouilles… ? gémit Kefka.
-Il est hors de question que vous sortiez d’ici, vous. N’essayez pas de profiter de l’affaiblissement de notre souveraine pour vous échapper. Et je vous répète que cet otage ne vous servira à rien : C’est un homme, et je serais personnellement très heureuse s’il mourait. »
Élodie avait manifestement pris le commandement des opérations. Myat’Ala était toujours à genoux, pesant mentalement le pour et le contre de ses actions passées, présentes et futures. Elle était momentanément incapable d’assumer le rôle de leader.
Kefka sentit le couteau aiguisé se rapprocher de sa gorge, et il hurla à l’attention de K-Ro : « Mais fait quelque chose, toi !! Dis-leur que je suis important à tes yeux, et vite !
-Pourquoi j’irai leur mentir ? ricana K-Ro.
-Très bien, conclut l’homme à voix haute. Alors si c’est comme ça… » Kefka se contracta, s’attendant à prendre un coup de couteau, mais il se sentit projeter en avant vers le group de femmes qui protégeait leur maîtresse. Élodie, rapide comme l’éclair, s’interposa et envoya valser Kefka contre un mur du plat de la main. Le gnome percuta durement le mur et tomba à terre, étourdi.
Le vieil assassin se rua alors sur une des dames blanches les plus près d’elle. Au autre vit l’action et tenta d’intervenir mais elle reçut un magistral coup de pied dans le ventre. Elle se retrouva à terre, les poumons vidés et à la limite de l’évanouissement. L’homme s’empara alors de sa cible et la menaça à son tour du couteau.
« Pas très original, tout ça, commenta Erwan, blasé.
-Il ne se renouvelle pas trop, ouais, ajouta Haschatan.
-Moi, j’aimais bien le coup de pied ! » dit K-Ro en levant un panneau noté : 10.
Le vieil homme aux ressources insoupçonnées se remit en retrait. Élodie grogna. Cette fois-ci, la situation était différente. Il ne s’agissait pas d’un simple otage, mais d’une dame blanche. Heureusement que Myat’Ala n’avait pas été prise elle-même en tant que bouclier humain, sans quoi…
« Et maintenant, mademoiselle Je-Dirige-Tout ? railla le meurtrier. Ça n’a toujours aucune importance ou bien vous allez me laisser passer ?
-Un jour ou l’autre, tu paieras pour tes actions, vieillard… Tu rejoindras tous les autres hommes dans les Territoires Extérieurs. Ou bien je t’enverrais ‘en bas’ de mes propres mains. J’espère que tu m’as bien compris ?
-Tous les hommes envoyés dans les Territoires Extérieurs ne sont pas forcément morts, mademoiselle Je-Dirige-Tout. » Le vieux raffermit sa prise sur la dame blanche.
« Ils ont créés une communauté où ils survivent tant bien que mal en se nourrissant des démons qui habitent ces Territoires, et ça depuis qu’ils ont compris que ces monstrueuses créatures étaient capables de tomber sous leurs assauts répétés. Eh oui, qu’elles soient le reflets des peurs de Mathilde ou non, elles sont mortelles et mangeables. Un village a été construit sur les ruines d’un cimetière naturel d’animaux. Un chef a été désigné, et les membres de cette tribu sont nombreux. Très nombreux. Et c’est vous-même qui grossissez leurs troupes en envoyant de nouvelles âmes. »
Le vieux reprit son souffle. L’effort qu’il fournissait pour garder en joue la dame blanche, ajouter à celui de rester en permanence sur ses gardes, amenuisait petit à petit ses réserves. Mais il ne pouvait s’arrêter de parler et, la jubilation aidant, il poursuivit son récit devant les yeux d’Élodie et des Trauméniens qui en étaient réduit à de simples spectateurs.
« Ils ont organisés tout un système de circulation de l’information. Ils savent toujours où et quand vous allez relâcher de nouvelles victimes mâles et ils vont les chercher avant qu’ils ne se fassent dévorer. Ils vous vouent une haine sans limites, et attendent le bon moment pour vous occire. Et ils y arriveront, j’en suis certain. Tôt ou tard, ils vous décimeront jusqu’à la dernière, et nous pourront enfin tuer Mathilde pour que ce lieu maudit disparaisse à jamais. »
Élodie, les dents serrées, la mâchoire crispée, resta sans parler une bonne minute. Le silence était pesant après ces lourdes révélations. Mr.Magnum jeta un œil à ses compagnons, qui lui rendirent d’un regard complètement perdu. Seul Squall lui fit un clin d’œil. Mr.Magnum leva un sourcil, puis il sourit nerveusement en l’informant silencieusement, par signe discret de la main, que ce n’était vraiment pas le moment de draguer.
Squall porta une main à son front, navré, puis se pencha à l’oreille de Mr.Magnum. Celui-ci écouta et au fur et à mesure des explications, un sourire fendit son visage. Squall se redressa, et hocha la tête. Mr.Magnum fit de même, et se tourna vers Erwan pour faire passer l’information.
« Toi, toi et toi, dit Élodie en désignant trois dames blanches. Emmenez Myat’Ala notre souveraine dans ses appartements. Mettez-la en sûreté. Je prends l’entière direction des opérations dorénavant. Exécution ! »
Les trois volontaires obéirent sans un mot et emportèrent délicatement Myat’Ala à l’étage supérieur. Restée seule, Élodie continuait à faire face au vieil homme, qui transpirait maintenant énormément.
« Nous voilà donc bloqué, hein ? souffla-t-il.
-Je vois bien que je n’ai pas le choix.
-Vous êtes ridicules, coassa le vieillard en riant. Vous êtes capables d’envoyer une cinquantaine de dames blanches à la mort pour capturer quatre ou cinq hommes, mais vous ne pouvez même pas sacrifier sciemment l’une d’entre vous pour me tenir enfermé ici.
-Nous n’avons pas le droit de donner la mort à l’une des nôtres, directement ou indirectement. » Le violeur éclata de rire. « Je vais vous laisser partir. Vous relâcherez notre amie devant la porte d’entrée. Mais n’oubliez pas, ce que j’ai dit tout à l’heure tiens toujours : Un jour ou l’autre, nous vous retrouverons. »
Le meurtrier enfonça doucement la pointe du couteau dans la gorge blanche de son otage. Il triomphait.
« Et ce jour là, je serais à la tête d’une armée entière d’hommes et nous vous écraserons comme de vulgaires mouches que vous êtes, mademoiselle Je-Dirige-To…
-Non !! Pas à l’intérieur !! hurla Mr.Magnum.
-Ah oui ? Zut, j’avais oublié qu’il était si gros !! » s’excusa K-Ro.
Le vieil homme et Élodie se tournèrent vers la geôle encore verrouillée et ils virent les six prisonniers plaqués sur les barreaux, poussés par une immense chose verte qui gonflait derrière eux. Une sorte d’immense ballon verdâtre couvert d’écailles. Une queue gigantesque passa entre deux barreaux et brisa les attaches du mur, emportant la grille et les voyageurs accrochés dessus et qui hurlaient à pleins poumons.
Élodie se jeta sur le coté, évitant de peu la chute de la grille et de ses occupants. Le vieux, avec toujours l’otage, n’en croyait pas ses yeux. Les six Trauméniens se relevèrent avec peine, se massant les endroits douloureux. K-Ro leva les yeux sur sa bestiole.
« Était-ce vraiment une si bonne idée, Squall ? demanda Haschatan.
-Hum, en fait, c’était l’idée de K-Ro…
-COOOOOOOOOIIIIIIIIIIN !!!!!!!! » beugla Téquila, heureux.
Mr.Magnum- Enorme floodeur
- Nombre de messages : 2475
Age : 42
Localisation : Dans les limbes torturées d'un esprit dérangé.
Date d'inscription : 18/01/2005
Re: Traumenschar
(partie 1)
8. Retournement de situation.
Myat’Ala, assise sur le lit, la tête entre les mains, continuait de ressasser sans cesse ses sinistres pensées. Les mots que son ancien esclave lui avait lancés avaient fait mouche. En plein dans le mille. Et elle n’arrivait pas à les oublier.
…vous êtes entrain de faire les mêmes erreurs que votre meurtrier…
« Non, non, ce n’est pas la même chose ! C’est lui qui m’a violé, qui m’a battu et qui m’a laissé crever comme une chienne sur le bord de la route, pendant des heures ! » Mais elle n’y croyait plus. L’histoire était vraie, elle venait de comprendre les erreurs de sa vengeance.
…vous tuez des innocents pour assouvir votre vengeance, et vous avilissez les femmes pour en faire une armée à vos ordres…
Elle était dans le faux. Totalement aveuglée par son désir de représailles envers lui, elle n’avait pas su mener à bien sa vendetta et elle s’était enlisée dans une guerre sans fin contre tous les hommes. Et le pire, c’est qu’elle avait entraînée des dizaines, des centaines, des milliers de femmes avec elle.
Croyez-vous que ce soit la meilleure solution ?
Non. C’était maintenant clair pour Myat’Ala comme de l’eau de roche. Ce n’était pas la meilleure solution. Elle menait tout le monde à la baguette comme une véritable tyran. Tout ce qu’elle avait réussie à faire, c’était faire souffrir tout le mode par sa faute. Pourquoi les autres devraient-elles souffrir et endurer ce qu’elle avait endurer, après tout ?
C’était égoïste de sa part. Et toutes ces femmes qui l’adulaient comme une reine, une souveraine, une déesse, presque… Elle ne valait pas mieux que l’autre, après tout.
Croyez-vous que ce soit la meilleure solution ?
Définitivement non.
Myat’Ala se leva et se dirigea vers la porte. Elle allait ordonner la libération des prisonniers, pour prouver sa bonne foi, et elle allait apprendre aux autres dames blanches l’art et la manière de pardonner. Leurs vies allaient changer. Ou plutôt leur mort.
Mathilde éclata de rire. Un rire franc, loin de ceux qu’elle employait d’ordinaire lorsqu’elle voulait intimider les hommes ou des dames blanches rebelles. C’était, pour la première fois depuis longtemps, un rire gai. Un rire qui fut soudainement interrompu par une explosion venant des sous-sols. De la prison.
Elle se rappela alors qu’Élodie était restée seule avec son meurtrier. Elle devait se hâter de les rejoindre. Si Squall et ses amis n’étaient pas trop rancuniers, ils l’aideraient peut-être même à le faire réintégrer sa prison ? Au moment même où elle posait sa main sur le loquet de la porte, une voix sombre, sans âge, s’éleva derrière elle.
« Tu t’es encore laissée bernée, Myat’Ala… »
*
* *
Le dragon Téquila tourna sur lui-même, envoyant sa longue queue dans le mur juste au-dessus de Kefka, qui choisit ce moment là pour ouvrir un œil et crier. Fury dégagea ses amis des décombres en rouspétant sur les idées foireuses de Squall, et Kefka les rejoint l’instant d’après. Il sautillait partout, les joues baignées de larmes.
« On va mourir !! On va mourir !!
-On est déjà mort, Kef’, lâcha Haschatan en évitant à nouveau la queue du dragon qui le frôla à quelques centimètres.
-K-Ro !! hurla Erwan. Tu ne pourrais pas tenter de raisonner Téquila ?!
-Oui, parce que là, le remède est pire que le mal, ajouta Squall.
-Mais j’ai simplement dit que je pouvais aussi matérialiser Téquila, je n’ai jamais dit que je pouvais le contrôler !! »
Une langue de feu laissa une longue trace carbonisée sur le mur près de Mr.Magnum. Ce dernier se tourna lentement vers K-Ro, une veine battante sur sa tempe, et il fit grincer ses dents. K-Ro joignit les mains et se pencha en avant.
« Gomenasaï !! »
Le couinement monstrueux du dragon résonna dans la prison, et dans le reste de l’établissement. Élodie s’était mise à l’abri dans un renfoncement du mur, sous une arche encore intacte, et observait les mouvements désordonnés et maladroits du dragon. Mais d’un autre coté, elle ne perdait pas non plus de vue le preneur d’otage, son otage, et les prisonniers qui venaient de se libérer.
Le vieillard était complètement éberlué devant cet animal gigantesque qu’il n’avait jamais vu en vrai. Bien sûr, il avait déjà entendu parler de légendes concernant des dragons, leur férocité, leur feu qui sortait de leurs bouches, mais il n’en avait jamais vu en face. Est-ce à ça que les monstres des Territoires Extérieurs ressemblent ?
Puis, il songea rapidement aux profits qu’il pouvait tirer de la situation, et décida de tenter sa chance. Exploiter les imprévus à son avantage, telle avait toujours été sa politique. Lorsque, en tant qu’être vivant, il avait aperçut cette douce et fraîche jeune femme au détour d’un chemin, il avait également employé cette méthode. Lorsque les rescapés des Territoires étaient venus le libérer, il leur avait dit de le laisser ici et qu’il allait leur servir d’informateur. Lorsque Ce petit être surgit de nulle part refusait de libérer ses amis, il avait de nouveau saisit la balle au bond et le gnome l’avait libéré.
Et maintenant, il était là, face à un dragon géant qui réduisait la prison en miettes, avec une dame blanche presque inconsciente dans les bras, et l’opportunité de sortir d’ici dans le désordre ambiant sans se faire remarquer. Il était vieux, certes, mais encore agile et rapide. Seulement il lui fallait se débarrasser de son otage qui allait le ralentir.
Ni une ni deux, il lui trancha la gorge, répandant son sang sur sa robe immaculée.
*
* *
Mathilde lâcha le loquet et resta face à la porte. La voix suave et sombre qui avait parlé, elle la connaissait. Elle lui était venue en rêve, peu de temps avant que le dernier groupe de voyageurs décédés ne parvienne jusqu’ici. Elle ne se rappelait plus exactement ce que cette voix lui avait dit, mais il était question de les envoyer ‘en bas’ ligotés, inconscient, et surtout incapables de la moindre rébellion.
Au moment des rêves, elle n’avait pas compris pourquoi les prochains arrivants devaient à tout prix être envoyés ‘en bas’ aussi impuissants que possible. Mais avec les récents événements, elle avait commencé à saisir. Même ‘en bas’, ils risquaient de faire du grabuge, bien qu’aucun homme n’en soit jamais revenu. Ni aucune des dames blanches qui avaient été assez folles ou assez curieuses pour y descendre.
« Tu t’es encore laissée avoir par un de ces hommes avec leurs belles paroles, leurs longues phrases enrobées de bons sentiments… » reprit la Voix. Mathilde n’arrivait pas à définir le sexe exact de celui qui utilisait cette Voix. Masculin, féminin ? Impossible à savoir. Parfois, la Voix prenait des intonations de gens qu’elle avait connu de son vivant ; son père, sa mère, des amis du village de Saxtown ; et parfois, elle ressemblait étrangement aux voix des dames blanches qu’elle connaissait.
Mais ce n’était que durant les rêves. Et là, Mathilde était belle et bien réveillée.
« Oui, tu es réveillée. Et pendant que tu es entrain de réfléchir, de penser, là, dans ta chambre, les prisonniers s’évadent, tuent et détruisent ce que tu as bâti. » La Voix était juste derrière elle, près de son oreille gauche. Mathilde eut un frisson douloureux qui lui parcouru la colonne vertébrale, et elle eut grand peine à réprimer un hurlement.
« Une de tes filles vient de mourir des mains de ton assassin… »
Mathilde se retourna brusquement, s’attendant à voir une silhouette vaguement humaine, noire de la tête aux pieds, armée d’une langue monstrueuse sortant d’une bouche aux crocs acérés, mais elle ne vit que sa chambre. Vide.
*
* *
Élodie aperçut la lame virevolter et plonger dans la gorge de la dame blanche, avant d’ouvrir la peau comme on coupe une motte de beurre, déversant un liquide sanguinolent sur la poitrine de la victime. Le dragon arriva ensuite devant elle et elle perdu de vue le meurtrier. La dernière image qu’elle ait vue était le corps inanimé de sa sœur dame blanche qui tombait à terre comme un pantin désarticulé.
Elle se jeta sur le sol et passa acrobatiquement sous la queue de Téquila qui cancanait sans vouloir s’arrêter, oscillant de droite à gauche comme un immeuble pris d’une subite envie de bouger. Ou d’une envie de pisser. Et un immeuble qui urine, c’est relativement rare. Une fois de l’autre coté, elle se remit agilement debout, et nota que l’assassin avait disparu, laissant évidemment le cadavre mais emportant le couteau avec lui.
Un cri de rage la fit se retourner, et elle découvrit qu’un des prisonniers était entrain d’essayer de soulever l’imposant mastodonte qui s’évertuait à détruire la prison. Et celui-ci y arrivait, même. Le monstre se retourna vers l’homme avec une tête passablement étonnée, et ne réagit pas plus que ça lorsque ses pattes quittèrent le sol.
« Ça va aller Fury ? demanda l’homme à la queue de cheval qui l’avait dévoré du regard tout le temps où elle les avait conduit vers la ville.
-Aucun problème, sortez tous d’ici, je le retiens, répondit le dénommé Fury. Il n’est pas si lourd que ça, Téquila. »
Élodie entraperçu l’espace d’un instant le vieil homme qui se faufilait hors de la pièce, mais elle n’eut pas le temps de réagir. Le dragon, Téquila, poussa son couinement affreux et cracha une colonne de feu en direction du plafond, très certainement dans le but de montrer à son Atlas personnel qu’il n’aimait pas être traité ainsi.
Celui qui s’appelait Fury grogna sourdement, contracta ses muscles, et hurla en envoyant la tête du dragon dans le plafond le plus fort qu’il le pouvait. Élodie profita du fait que le dragon avait cessé de vomir son feu pour passer à son tour, juste à la suite des autres prisonniers qui fuyaient à son tour.
Elle eut juste le temps de voir de nouveau l’homme enfoncer la tête du dragon dans le plafond en criant de rage avant de passer ce qui restait de la porte de sortie et gravir les marches menant au hall.
*
* *
Mathilde n’osait pourtant pas se retourner et offrir son dos à la pièce. Elle n’y voyait personne, mais elle sentait que quelqu’un s’y trouvait. Une présence, peu amicale, voire pas du tout. Elle se colla à la porte.
« Je sais que vous êtes encore là. »
Silence. La Voix ne daigna pas répondre, ni se manifester d’aucune façon. Peut-être n’y avait-il personne, après tout ? Son esprit embrumé par ses trop nombreuses réflexions ne lui avait-il pas joué un tour, une sorte d’hallucination auditive ? Elle ne le pensait pas mais se forçait à le croire, à se convaincre.
« Tu penses qu’ils t’ont ouvert les yeux sur des fautes, Myat’Ala ? Tu penses sincèrement t’être fourvoyé durant ces années, ces siècles ? Tout ce pourquoi tu t’es battu durant cinq cents ans, tout ce que tu as construit, tu n’y crois plus ? »
La Voix. La Voix était de retour, et plus forte, plus présente que jamais. Myat’Ala sentit un mal de tête germer en elle. Et dès que la Voix parlait de son ton si calme et pourtant tellement rempli de haine, une haine féroce et affamée, son cerveau était comme transpercée par d’immenses aiguillons gelés. Elle du se contenir pour ne pas hurler.
« Je sais que tu as mal, Myat’Ala. Au plus profond de ton être, de ton âme bafouée et violée comme ton corps, tu as mal. Et quelle est la cause de ce mal, de cette douleur lancinante qui te vrille l’esprit ? » La Voix marqua une pause, comme pour lui laisser le temps de répondre. « Les hommes. »
Mathilde porta ses deux mains à sa tête et ferma les yeux. Son visage, rougit par la douleur, était constellé de gouttelette de sueur et ses doigts laissaient des traînées blanches là où elle appuyait. Elle gémit.
« Ton meurtrier t’a fait souffrir il y a des années, et tu avais réussis à te venger. Et maintenant, qui vient de te remettre en question ? Cinq hommes venus sciemment de la Terre, cinq hommes venus exprès chercher la mort sur une autoroute dans une voiture, cinq mâles qui n’espéraient qu’une chose en te rencontrant : Te soumettre. »
La Voix avait insisté lourdement sur le dernier mot, et Mathilde avait eu la sensation qu’un étau se refermait sur son crâne, serrant de plus en plus fort, à le faire éclater. Elle tomba à genoux sur le sol, soufflante, haletante, dégoulinante de transpiration. La Voix se taisait, mais elle était toujours présente. Et elle serrait toujours l’étau.
Mathilde, d’une voix étranglée, s’entendit répondre : « Je ne… pense pas qu’ils aient totalement tort… » L’étau se desserra de manière imperceptible. Mathilde reprit des forces. « Je me suis concentré sur… sur ma vengeance personnelle durant toute ces années !! Et j’ai tué… Oui, j’ai tué des centaines, des milliers d’innocentes sous ce prétexte !! »
Pas de réponses, juste l’étreinte qui diminue sensiblement maintenant.
« Il est temps de cesser de remuer le passé et de changer de comportement !! »
Un souffle glacé emplit la chambre, comme une fenêtre laissée ouverte sur un paysage hivernal, sauf que la pièce ne comportait aucune ouverture mise à part la porte close. Mathilde se releva péniblement, soulagée de la fin de cette torture cérébrale. Elle souffla et aperçut un nuage de condensation blanchâtre se former devant sa bouche.
Une forme se profilait à l’autre bout de la pièce, une forme humaine, sans aucun doute possible, entourée de filaments de ténèbres qui s’étiraient en tout sens. Le mur sembla onduler tandis qu’un pied humain apparu, sortant du néant.
Sortant des ténèbres.
8. Retournement de situation.
Myat’Ala, assise sur le lit, la tête entre les mains, continuait de ressasser sans cesse ses sinistres pensées. Les mots que son ancien esclave lui avait lancés avaient fait mouche. En plein dans le mille. Et elle n’arrivait pas à les oublier.
…vous êtes entrain de faire les mêmes erreurs que votre meurtrier…
« Non, non, ce n’est pas la même chose ! C’est lui qui m’a violé, qui m’a battu et qui m’a laissé crever comme une chienne sur le bord de la route, pendant des heures ! » Mais elle n’y croyait plus. L’histoire était vraie, elle venait de comprendre les erreurs de sa vengeance.
…vous tuez des innocents pour assouvir votre vengeance, et vous avilissez les femmes pour en faire une armée à vos ordres…
Elle était dans le faux. Totalement aveuglée par son désir de représailles envers lui, elle n’avait pas su mener à bien sa vendetta et elle s’était enlisée dans une guerre sans fin contre tous les hommes. Et le pire, c’est qu’elle avait entraînée des dizaines, des centaines, des milliers de femmes avec elle.
Croyez-vous que ce soit la meilleure solution ?
Non. C’était maintenant clair pour Myat’Ala comme de l’eau de roche. Ce n’était pas la meilleure solution. Elle menait tout le monde à la baguette comme une véritable tyran. Tout ce qu’elle avait réussie à faire, c’était faire souffrir tout le mode par sa faute. Pourquoi les autres devraient-elles souffrir et endurer ce qu’elle avait endurer, après tout ?
C’était égoïste de sa part. Et toutes ces femmes qui l’adulaient comme une reine, une souveraine, une déesse, presque… Elle ne valait pas mieux que l’autre, après tout.
Croyez-vous que ce soit la meilleure solution ?
Définitivement non.
Myat’Ala se leva et se dirigea vers la porte. Elle allait ordonner la libération des prisonniers, pour prouver sa bonne foi, et elle allait apprendre aux autres dames blanches l’art et la manière de pardonner. Leurs vies allaient changer. Ou plutôt leur mort.
Mathilde éclata de rire. Un rire franc, loin de ceux qu’elle employait d’ordinaire lorsqu’elle voulait intimider les hommes ou des dames blanches rebelles. C’était, pour la première fois depuis longtemps, un rire gai. Un rire qui fut soudainement interrompu par une explosion venant des sous-sols. De la prison.
Elle se rappela alors qu’Élodie était restée seule avec son meurtrier. Elle devait se hâter de les rejoindre. Si Squall et ses amis n’étaient pas trop rancuniers, ils l’aideraient peut-être même à le faire réintégrer sa prison ? Au moment même où elle posait sa main sur le loquet de la porte, une voix sombre, sans âge, s’éleva derrière elle.
« Tu t’es encore laissée bernée, Myat’Ala… »
*
* *
Le dragon Téquila tourna sur lui-même, envoyant sa longue queue dans le mur juste au-dessus de Kefka, qui choisit ce moment là pour ouvrir un œil et crier. Fury dégagea ses amis des décombres en rouspétant sur les idées foireuses de Squall, et Kefka les rejoint l’instant d’après. Il sautillait partout, les joues baignées de larmes.
« On va mourir !! On va mourir !!
-On est déjà mort, Kef’, lâcha Haschatan en évitant à nouveau la queue du dragon qui le frôla à quelques centimètres.
-K-Ro !! hurla Erwan. Tu ne pourrais pas tenter de raisonner Téquila ?!
-Oui, parce que là, le remède est pire que le mal, ajouta Squall.
-Mais j’ai simplement dit que je pouvais aussi matérialiser Téquila, je n’ai jamais dit que je pouvais le contrôler !! »
Une langue de feu laissa une longue trace carbonisée sur le mur près de Mr.Magnum. Ce dernier se tourna lentement vers K-Ro, une veine battante sur sa tempe, et il fit grincer ses dents. K-Ro joignit les mains et se pencha en avant.
« Gomenasaï !! »
Le couinement monstrueux du dragon résonna dans la prison, et dans le reste de l’établissement. Élodie s’était mise à l’abri dans un renfoncement du mur, sous une arche encore intacte, et observait les mouvements désordonnés et maladroits du dragon. Mais d’un autre coté, elle ne perdait pas non plus de vue le preneur d’otage, son otage, et les prisonniers qui venaient de se libérer.
Le vieillard était complètement éberlué devant cet animal gigantesque qu’il n’avait jamais vu en vrai. Bien sûr, il avait déjà entendu parler de légendes concernant des dragons, leur férocité, leur feu qui sortait de leurs bouches, mais il n’en avait jamais vu en face. Est-ce à ça que les monstres des Territoires Extérieurs ressemblent ?
Puis, il songea rapidement aux profits qu’il pouvait tirer de la situation, et décida de tenter sa chance. Exploiter les imprévus à son avantage, telle avait toujours été sa politique. Lorsque, en tant qu’être vivant, il avait aperçut cette douce et fraîche jeune femme au détour d’un chemin, il avait également employé cette méthode. Lorsque les rescapés des Territoires étaient venus le libérer, il leur avait dit de le laisser ici et qu’il allait leur servir d’informateur. Lorsque Ce petit être surgit de nulle part refusait de libérer ses amis, il avait de nouveau saisit la balle au bond et le gnome l’avait libéré.
Et maintenant, il était là, face à un dragon géant qui réduisait la prison en miettes, avec une dame blanche presque inconsciente dans les bras, et l’opportunité de sortir d’ici dans le désordre ambiant sans se faire remarquer. Il était vieux, certes, mais encore agile et rapide. Seulement il lui fallait se débarrasser de son otage qui allait le ralentir.
Ni une ni deux, il lui trancha la gorge, répandant son sang sur sa robe immaculée.
*
* *
Mathilde lâcha le loquet et resta face à la porte. La voix suave et sombre qui avait parlé, elle la connaissait. Elle lui était venue en rêve, peu de temps avant que le dernier groupe de voyageurs décédés ne parvienne jusqu’ici. Elle ne se rappelait plus exactement ce que cette voix lui avait dit, mais il était question de les envoyer ‘en bas’ ligotés, inconscient, et surtout incapables de la moindre rébellion.
Au moment des rêves, elle n’avait pas compris pourquoi les prochains arrivants devaient à tout prix être envoyés ‘en bas’ aussi impuissants que possible. Mais avec les récents événements, elle avait commencé à saisir. Même ‘en bas’, ils risquaient de faire du grabuge, bien qu’aucun homme n’en soit jamais revenu. Ni aucune des dames blanches qui avaient été assez folles ou assez curieuses pour y descendre.
« Tu t’es encore laissée avoir par un de ces hommes avec leurs belles paroles, leurs longues phrases enrobées de bons sentiments… » reprit la Voix. Mathilde n’arrivait pas à définir le sexe exact de celui qui utilisait cette Voix. Masculin, féminin ? Impossible à savoir. Parfois, la Voix prenait des intonations de gens qu’elle avait connu de son vivant ; son père, sa mère, des amis du village de Saxtown ; et parfois, elle ressemblait étrangement aux voix des dames blanches qu’elle connaissait.
Mais ce n’était que durant les rêves. Et là, Mathilde était belle et bien réveillée.
« Oui, tu es réveillée. Et pendant que tu es entrain de réfléchir, de penser, là, dans ta chambre, les prisonniers s’évadent, tuent et détruisent ce que tu as bâti. » La Voix était juste derrière elle, près de son oreille gauche. Mathilde eut un frisson douloureux qui lui parcouru la colonne vertébrale, et elle eut grand peine à réprimer un hurlement.
« Une de tes filles vient de mourir des mains de ton assassin… »
Mathilde se retourna brusquement, s’attendant à voir une silhouette vaguement humaine, noire de la tête aux pieds, armée d’une langue monstrueuse sortant d’une bouche aux crocs acérés, mais elle ne vit que sa chambre. Vide.
*
* *
Élodie aperçut la lame virevolter et plonger dans la gorge de la dame blanche, avant d’ouvrir la peau comme on coupe une motte de beurre, déversant un liquide sanguinolent sur la poitrine de la victime. Le dragon arriva ensuite devant elle et elle perdu de vue le meurtrier. La dernière image qu’elle ait vue était le corps inanimé de sa sœur dame blanche qui tombait à terre comme un pantin désarticulé.
Elle se jeta sur le sol et passa acrobatiquement sous la queue de Téquila qui cancanait sans vouloir s’arrêter, oscillant de droite à gauche comme un immeuble pris d’une subite envie de bouger. Ou d’une envie de pisser. Et un immeuble qui urine, c’est relativement rare. Une fois de l’autre coté, elle se remit agilement debout, et nota que l’assassin avait disparu, laissant évidemment le cadavre mais emportant le couteau avec lui.
Un cri de rage la fit se retourner, et elle découvrit qu’un des prisonniers était entrain d’essayer de soulever l’imposant mastodonte qui s’évertuait à détruire la prison. Et celui-ci y arrivait, même. Le monstre se retourna vers l’homme avec une tête passablement étonnée, et ne réagit pas plus que ça lorsque ses pattes quittèrent le sol.
« Ça va aller Fury ? demanda l’homme à la queue de cheval qui l’avait dévoré du regard tout le temps où elle les avait conduit vers la ville.
-Aucun problème, sortez tous d’ici, je le retiens, répondit le dénommé Fury. Il n’est pas si lourd que ça, Téquila. »
Élodie entraperçu l’espace d’un instant le vieil homme qui se faufilait hors de la pièce, mais elle n’eut pas le temps de réagir. Le dragon, Téquila, poussa son couinement affreux et cracha une colonne de feu en direction du plafond, très certainement dans le but de montrer à son Atlas personnel qu’il n’aimait pas être traité ainsi.
Celui qui s’appelait Fury grogna sourdement, contracta ses muscles, et hurla en envoyant la tête du dragon dans le plafond le plus fort qu’il le pouvait. Élodie profita du fait que le dragon avait cessé de vomir son feu pour passer à son tour, juste à la suite des autres prisonniers qui fuyaient à son tour.
Elle eut juste le temps de voir de nouveau l’homme enfoncer la tête du dragon dans le plafond en criant de rage avant de passer ce qui restait de la porte de sortie et gravir les marches menant au hall.
*
* *
Mathilde n’osait pourtant pas se retourner et offrir son dos à la pièce. Elle n’y voyait personne, mais elle sentait que quelqu’un s’y trouvait. Une présence, peu amicale, voire pas du tout. Elle se colla à la porte.
« Je sais que vous êtes encore là. »
Silence. La Voix ne daigna pas répondre, ni se manifester d’aucune façon. Peut-être n’y avait-il personne, après tout ? Son esprit embrumé par ses trop nombreuses réflexions ne lui avait-il pas joué un tour, une sorte d’hallucination auditive ? Elle ne le pensait pas mais se forçait à le croire, à se convaincre.
« Tu penses qu’ils t’ont ouvert les yeux sur des fautes, Myat’Ala ? Tu penses sincèrement t’être fourvoyé durant ces années, ces siècles ? Tout ce pourquoi tu t’es battu durant cinq cents ans, tout ce que tu as construit, tu n’y crois plus ? »
La Voix. La Voix était de retour, et plus forte, plus présente que jamais. Myat’Ala sentit un mal de tête germer en elle. Et dès que la Voix parlait de son ton si calme et pourtant tellement rempli de haine, une haine féroce et affamée, son cerveau était comme transpercée par d’immenses aiguillons gelés. Elle du se contenir pour ne pas hurler.
« Je sais que tu as mal, Myat’Ala. Au plus profond de ton être, de ton âme bafouée et violée comme ton corps, tu as mal. Et quelle est la cause de ce mal, de cette douleur lancinante qui te vrille l’esprit ? » La Voix marqua une pause, comme pour lui laisser le temps de répondre. « Les hommes. »
Mathilde porta ses deux mains à sa tête et ferma les yeux. Son visage, rougit par la douleur, était constellé de gouttelette de sueur et ses doigts laissaient des traînées blanches là où elle appuyait. Elle gémit.
« Ton meurtrier t’a fait souffrir il y a des années, et tu avais réussis à te venger. Et maintenant, qui vient de te remettre en question ? Cinq hommes venus sciemment de la Terre, cinq hommes venus exprès chercher la mort sur une autoroute dans une voiture, cinq mâles qui n’espéraient qu’une chose en te rencontrant : Te soumettre. »
La Voix avait insisté lourdement sur le dernier mot, et Mathilde avait eu la sensation qu’un étau se refermait sur son crâne, serrant de plus en plus fort, à le faire éclater. Elle tomba à genoux sur le sol, soufflante, haletante, dégoulinante de transpiration. La Voix se taisait, mais elle était toujours présente. Et elle serrait toujours l’étau.
Mathilde, d’une voix étranglée, s’entendit répondre : « Je ne… pense pas qu’ils aient totalement tort… » L’étau se desserra de manière imperceptible. Mathilde reprit des forces. « Je me suis concentré sur… sur ma vengeance personnelle durant toute ces années !! Et j’ai tué… Oui, j’ai tué des centaines, des milliers d’innocentes sous ce prétexte !! »
Pas de réponses, juste l’étreinte qui diminue sensiblement maintenant.
« Il est temps de cesser de remuer le passé et de changer de comportement !! »
Un souffle glacé emplit la chambre, comme une fenêtre laissée ouverte sur un paysage hivernal, sauf que la pièce ne comportait aucune ouverture mise à part la porte close. Mathilde se releva péniblement, soulagée de la fin de cette torture cérébrale. Elle souffla et aperçut un nuage de condensation blanchâtre se former devant sa bouche.
Une forme se profilait à l’autre bout de la pièce, une forme humaine, sans aucun doute possible, entourée de filaments de ténèbres qui s’étiraient en tout sens. Le mur sembla onduler tandis qu’un pied humain apparu, sortant du néant.
Sortant des ténèbres.
Mr.Magnum- Enorme floodeur
- Nombre de messages : 2475
Age : 42
Localisation : Dans les limbes torturées d'un esprit dérangé.
Date d'inscription : 18/01/2005
Page 1 sur 7 • 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7
Page 1 sur 7
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum